Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Biden a déclaré la guerre sur deux fronts, par Piotr Akopov

Un décryptage du discours de l’Union de Biden : Biden a donc trouvé une nouvelle formule : 1861 plus 1941 égale 2024. En croisant l’année où les États-Unis ont commencé la guerre de Sécession avec l’année où ils sont entrés dans la Seconde Guerre mondiale, nous obtenons le moment présent. Les deux principaux méchants sont Poutine (l’ennemi extérieur de la liberté) et Trump (l’ennemi intérieur de la liberté). Biden a mentionné ce dernier plus souvent dans son discours, mais ne l’a jamais appelé par son nom, préférant l’expression “mon prédécesseur”. En revanche, Biden s’est adressé directement à Poutine, formulant même son “simple message à Poutine” : “Nous ne partirons pas. Nous ne nous inclinerons pas. Je ne m’inclinerai pas.” Un décryptage ironique à la manière russe : quel mouche les pique tout cela pour que l’Hitler collectif qui est derrière ce vieil homme, celui qui est prêt à mettre la planète à feu et à sang puisse espérer conserver l’hégémonie d’une “mondialisation atlantique” et dont le reste du monde ne veut plus. Piotr Akopov n’est pas un communiste c’est un porte-parole de fait du parti du président Poutine et nous mesurons bien en le lisant le mélange de conservatisme, du marquage soviétique et de l’adhésion à un monde multipolaire qui est le socle de l’adhésion à Poutine, qui bénéficie en outre du fait d’être une sorte de De Gaulle ayant arraché le pays au bradage d’Eltsine, initié par Gorbatchev. D’où l’étrange querelle faite aux communistes : c’est vous qui avez détruit l’Union soviétique, voire la Russie elle-même, à la fois par Gorbatchev et par l’idéalisme de Lénine qui a inventé des “républiques” et des autonomies qui n’avaient pas lieu d’être. Bien sûr les communistes leur répondent sur la paix soviétique sans concurrence et sans pillage, la sécurité du voisin étant la sienne. (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

https://ria.ru/20240309/bayden-1931936896.html

L’Amérique est en danger – un danger sans précédent dans son histoire. C’est ainsi que le président Biden a commencé son discours devant le Congrès. Que s’est-il passé : une nouvelle épidémie terrible, une invasion extraterrestre ? Pourquoi M. Biden répète-t-il les mots de Franklin Roosevelt : “Je m’adresse à vous à un moment sans précédent dans l’histoire de notre Union” ? Roosevelt a prononcé ces paroles en janvier 1941, alors que la guerre faisait déjà rage en Europe et en Asie, mais que les États-Unis n’y étaient pas encore directement impliqués. Et aujourd’hui, selon M. Biden, il s’avère que la situation est encore pire qu’elle ne l’était à l’époque, et même qu’elle ne l’a jamais été au cours des 250 ans d’histoire des États-Unis. Pourquoi ?

Car si, en 1941, “la liberté et la démocratie étaient attaquées dans le monde entier”, le danger menace aujourd’hui l’Amérique de l’intérieur : “Depuis l’époque du président Lincoln et la guerre de Sécession, la liberté et la démocratie n’ont jamais été autant attaquées chez nous qu’aujourd’hui. Ce qui est sans précédent dans notre situation, c’est que la liberté et la démocratie sont attaquées à la fois chez nous et à l’étranger, en même temps”.

Biden a donc trouvé une nouvelle formule : 1861 plus 1941 égale 2024. En croisant l’année où les États-Unis ont commencé la guerre de Sécession avec l’année où ils sont entrés dans la Seconde Guerre mondiale, nous obtenons le moment présent. Les deux principaux méchants sont Poutine (l’ennemi extérieur de la liberté) et Trump (l’ennemi intérieur de la liberté). Biden a mentionné ce dernier plus souvent dans son discours, mais ne l’a jamais appelé par son nom, préférant l’expression “mon prédécesseur”. En revanche, Biden s’est adressé directement à Poutine, formulant même son “simple message à Poutine” :

“Nous ne partirons pas. Nous ne nous inclinerons pas. Je ne m’inclinerai pas.”

Nous ne partons pas d’où ? De l’Europe, de la Maison Blanche, du Moyen-Orient ? Non, de l’Ukraine, bien sûr. M. Biden a pressé le Congrès de débloquer enfin des fonds pour aider Kiev : “À l’étranger, les forces russes avancent, envahissent l’Ukraine et font des ravages dans toute l’Europe et au-delà. Si quelqu’un dans cette salle pense que Poutine va s’arrêter en Ukraine, je vous assure qu’il ne le fera pas. Cependant, l’Ukraine peut arrêter Poutine si nous la soutenons et lui donnons les armes dont elle a besoin pour se défendre. C’est tout ce que demande l’Ukraine. Elle ne demande pas l’envoi de soldats américains. En fait, aucun soldat américain ne combat en Ukraine. Et je suis déterminé à maintenir ce statu quo. Mais pour l’instant, l’aide à l’Ukraine est bloquée par ceux qui veulent que nous abandonnions notre rôle de leader mondial”.

En d’autres termes, seuls les ennemis de l’Amérique peuvent empêcher l’aide américaine à l’Ukraine – parce que les États-Unis non seulement peuvent, mais sont obligés de maintenir leur position de timonier de l’humanité, et qu’en abandonnant Kiev à son sort, les États-Unis perdront leur leadership mondial ? Qui sont ces ennemis ? Il est clair que c’est Poutine, mais il ne peut pas influencer le Congrès américain (du moins, ils n’y ont pas encore pensé aux États-Unis – Poutine n’influence que les élections présidentielles) ?

Mais Trump le peut – et Biden est indigné : “Il n’y a pas si longtemps, le président républicain Ronald Reagan déclarait haut et fort : “M. Gorbatchev, démolissez ce mur”. Aujourd’hui, mon prédécesseur, un ancien président républicain, dit à Poutine : ‘Faites ce que vous voulez'”. L’ancien président américain a tenu ces propos tout en s’inclinant devant le dirigeant russe. C’est scandaleux. C’est dangereux. C’est inacceptable. L’Amérique est un membre fondateur de l’OTAN, une alliance militaire de nations démocratiques créée après la Seconde Guerre mondiale pour prévenir les guerres et maintenir la paix. Aujourd’hui, nous avons rendu l’OTAN plus forte que jamais. Si les États-Unis partent maintenant, ils mettront l’Ukraine en danger. L’Europe sera menacée. Le monde libre tout entier sera menacé, et cela enhardira ceux qui nous veulent du mal”.

Que cela est bien dit. Poutine menace l’Europe et le monde, Trump se prosterne devant Poutine et menace la démocratie américaine de l’intérieur, il faut les arrêter. Pourquoi tout ce faux pathos ? Est-ce pour inciter tout le monde à aller voter pour un second mandat de Biden, le défenseur de la liberté à l’échelle américaine et mondiale ? Bien sûr, sauf que toute la formule de Joe est construite sur des mensonges.

La Russie ne menace pas l’Europe, le “monde libre” ou le monde en général – la Russie restaure son unité en résistant aux tentatives occidentales de perpétuer la division du monde russe et d’en contrôler une partie. Trump ne s’incline pas devant Poutine et ne menace ni les libertés ni les intérêts américains – si l’on entend par là les intérêts du peuple américain et non ceux de l’élite mondialiste, pour qui les États-Unis ne sont qu’un outil dans la lutte pour la domination du monde. Ce n’est pas Poutine et Trump qu’il faut comparer à Hitler, mais Biden lui-même – pas le vieil homme rusé qui parlait au Congrès, mais le “Biden collectif”, c’est-à-dire le “marais de Washington”, l’élite transatlantique qui s’accroche obstinément au projet raté de la mondialisation atlantique, c’est-à-dire à sa propre domination dans le monde.

Ni Poutine ni Trump n’ont de projets de domination mondiale, mais leurs activités gênent et nuisent considérablement à ceux qui tentent encore de réaliser de tels projets. Joe Biden peut jongler avec les mots “liberté” et “menace” autant qu’il veut, effrayer la Russie et Trump, et promettre à Poutine qu’il ne s’inclinera pas et ne partira pas. Mais en fin de compte, Joe Biden personnellement et Biden collectivement quitteront non seulement la Maison Blanche, mais aussi l’Ukraine, puis le reste du monde qui les déteste.

Parce qu’ils perdront – et, en fait, ils ont déjà perdu – non pas face à Poutine ou à Trump, mais face au cours inexorable de l’histoire, qui ne fait pas fléchir pour la première fois ceux qui s’étaient proclamés le sommet de la civilisation humaine et l’hégémon mondial.

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