Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Junge Welt interviewe Jean-Marc Rouillan…

Grâce aux traductions de Marianne, nous voici en contact avec Andrei Doultsev, correspondant de la Pravda à Paris et également de junge Welt, le journal des communistes allemands. le texte a été publié en allemand dans « junge Welt ». je trouve ses répliques intéressantes et non-conventionnelles.” Effectivement et quand il dit la nécessité de la mémoire cela parle enfin cela me parle dans un temps où l’on attaque le combattant communiste, cela parle quand l’on voit le travail de destruction accompli sur Assange, cela parle quand il décrit la jacquerie des gilets jaunes… Cela parle de quoi, de tous ces individus sans organisation face à la dictature de la bourgeoisie, du capital, de l’impérialisme, comme lors de la Commune de Paris et ce que Marx puis Lénine en tirent la nécessité de la dictature du prolétariat, un parti capable de l’affronter… Le QUE FAIRE ? Ce parti partout systématiquement détruit par des liquidateurs alliés conscients ou inconscient de la dictature du capital. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

– En 1918, avant d’être assassinée par les soldats du groupe paramilitaire (les Freikorps), qui pour la première fois dans l’histoire portaient la croix gammée sur leurs casques, avec la connivence du ministre de l’intérieur allemand, le social-démocrate Noske, Rosa Luxembourg écrivit dans sa tribune “L’ordre règne à Berlin !”: « Sbires stupides! Votre ordre est bâti sur le sable. Dès demain la révolution ‘se dressera avec fracas’ proclamant à son de trompe pour votre plus grand effroi : j’étais, je suis, je serai ! Ceci est mon testament. » Elle y parle du passé, du présent et de futur. Ton livre porte le titre « Infinitif présent ». Pourquoi te concentres-tu sur l’infinitif ?

JMR : Rosa décline la conjugaison du verbe Etre. Etre face au mortifère produit et reproduit par le système. Résister au non-Etre de l’exploité en dehors de sa fonction (la négation). Et exister c’est agir, lutter, gagner son autonomie dans chaque lieu, situation et temps conjugué.

Mon livre a été écrit au fil de l’agonie de ma camarade Joëlle Aubron (morte d’un cancer après 19 ans de prison) et je tente à travers cette disparition de me poser la question du temps dans le labyrinthe carcéral. Derrière les murs, le futur est une abstraction (un simple fantasme), le passé une présence palpable (là où se joue la bataille de la mémoire), le présent une invariance (ultraréactionnaire) et simultanément une résistance individuelle et collective.

Dans le cas des prisonniers politiques, l’évidence de ce combat est permanente. Etre c’est aussi se responsabiliser de notre mémoire, la mémoire des luttes et de nos actes. D’ailleurs la prison politique est ordonnée à ce but, il faut que le prisonnier dissident retrouve le carcan de la norme et en premier lieu qu’il trahisse donc sa mémoire. Qu’il ne revendique plus le fossé avec le système qu’il avait lui-même creusé par ses actes réels. Et par là qu’il ne soit plus un être entier… Qu’il revienne à son état quotidien de zombi.

AD : Ta lutte avait-elle un sens ? Qu’aurais-tu fait différemment aujourd’hui ?

JMR : Le combat d’Action Directe a été important parce qu’il s’est situé à une époque où on a assisté à l’écroulement définitif du modèle du fordisme (mode de produire dominant) et nous avons résisté à l’apparition du néolibéralisme. C’était une époque charnière d’enthousiasme révolutionnaire, les combattants débarquaient de partout pour se battre à Paris, les italiens, les allemands, les palestiniens, les turcs, les arméniens…

Bien sûr que notre combat avait un sens, il a été une des dernières tentatives de non seulement sauver les acquis sociaux et de liberté de la phase de l’après-guerre de l’antifascisme combattant et de l’anticolonialisme mais de participer à créer une nouvelle alternative.

Aujourd’hui tout est bien différent, nous assistons à la crise de domination du néolibéralisme. Avant la pandémie, les révoltes se généralisaient et de nos jours se pose avec plus d’acuité encore le choix socialisme ou barbarie (retour des nouveaux fascismes, exploitations intensives, contrôle anti-insurrectionnel exceptionnel…). Le combat va être cruel. Et ceux qui ne luttent pas l’ont déjà perdu (comme l’écrivaient les anciens), ils participent à la montée générale du fascisme des transnationales. Du fascisme des états d’urgence.

Mais heureusement partout se créent des résistances certes différentes mais avec le même esprit de lutte que celui qui nous animait.

AD : Tu écris qu’après « un long séjour la prison rend haineux ». La lutte des classes et la haine ont parfois des points en commun mais il s’agit de phénomènes différents. Existe-t-il aujourd’hui une conscience des classes ? Aurait-elle été remplacée par la haine et le populisme ?

JMR : Dernièrement en France, l’insurrection des gilets jaunes a fait réapparaitre sur le devant de la scène le sujet de classe, le prolétaire précaire. Ç’a été un véritable coup de canon social. Non seulement ils ont été à deux doigts de réussir une insurrection à Paris en décembre 2018 mais ils ont été sur ce territoire le révélateur de la crise économique, politique, culturelle… du modèle néolibéral.

Le mouvement global des gilets jaunes est une révolte des dépossédés contre l’élite, des relégués contre la gouvernance… Et ce mouvement (dans la contradiction bien évidemment) n’a parlé que de lutte des classes. En y participant (avec mes moyens actuels) j’y ai appris énormément (dans le sens apprendre des masses comme disaient les maos de notre époque). Leurs contradictions ouvertement exprimées étaient aussi l’héritage de nos défaites et de 30 ans de néolibéralisme dépolitisateur. Mais on y comprend également la phrase de Marx, ce n’est pas ce que le prolétariat pense à un moment précis qui est essentiel, c’est ce qu’il est obligé de faire du fait de sa place dans le mode de production capitaliste.

AD : Ta politisation est née à Toulouse, la capitale des espagnols républicains exilés, et tes premières actions furent contre le régime franquiste à Barcelone. Dans la logique des choses, tu aurais dû être honoré par la France, comme une force de la coalition anti-hitlérienne pendant la seconde guerre mondiale, pour ton engagement antifasciste. Mais ce ne fut pas le cas… Etais-tu si dangereux pour la France en tant qu’anarchiste ou la France était-elle plus intéressée à préserver ses relations avec le régime franquiste ?

JMR : Maintenant les masques historiques sont tombés, on sait que les véritables maîtres de l’Espagne franquiste de 70 à 80 ne sont pas les franquistes eux-mêmes mais les gouvernants de Bonn et de Paris. La phase de fin du franquisme et de transition a été une mascarade sanglante (des milliers d’ouvriers et de résistants ont été assassinés). Mascarade jusqu’aux fausses tentatives de coup d’Etat de militaires fascistes…

De toute façon, on ne se bat pas pour être apprécié des impérialistes, mais pour répondre à des tâches précises et aux exigences de la guerre de classe. Et j’ajouterai que l’attention particulière et les condamnations dont ils m’accablent encore aujourd’hui, sont tout simplement pour moi trop d’honneur ! 

AD : Décris ta vie aujourd’hui – desquelles libertés es-tu privé après 18 ans passés en prison ?

Je suis tout simplement privé de liberté puisque ils m’ont placé en prison à domicile. Je suis écroué sous le numéro 17652 et je n’ai même pas le droit de m’exprimer sur les raisons de ma condamnation.

Depuis ma libération pour la condamnation AD, c’est-à-dire bientôt 10 ans, je n’ai passé qu’une année sans contrôle judiciaire. Le cœur de la bataille demeure encore et toujours la mémoire des luttes. Ils veulent éliminer 20 années de lutte révolutionnaire en Europe de l’ouest. Et sur ce territoire, je figure cette résistance mémorielle, j’écris, je participe à des films, à des reportages et c’est pour eux insupportable. Ils veulent le silence, la soumission…

AD : Quel rôle joue la violence dans l’histoire de la société ? Est-elle indispensable ? A quel moment ?

JMR : Les personnes dépolitisées ont toujours condamné la violence des pauvres et ignoré la violence des puissants. On le sait… et on a dû faire avec. Notre violence était très artisanale face à la violence industrielle du système. Nous la voulions ciblée alors qu’à l’époque ils massacraient des peuples entiers comme au Viêtnam et ailleurs. Des militants ont joué un rôle dans la condamnation de nos actes souvent pour seulement préserver les petites réserves de protestation que l’Etat leur garantit. Le débat politique était faussé, le diktat était simple, avec l’Etat ou avec les « terroristes » et ils ont choisi sans l’ombre d’une mauvaise conscience.

AD : Quel fut pour toi le moment charnière, l’élément déclencheur qui t’a poussé à abandonner la vie « normale » et à commencer la lutte armée ?

JMR : L’insurrection de Mai 68 a été déterminante bien évidemment. Et comme concrètement, elle s’est poursuivie dans les mois suivants, j’ai progressé dans ma politisation comme dans mes actes, des émeutes aux petits sabotages puis des attentats. Pour la lutte armée, elle était dans tous les discours. Pour moi, elle a été très concrète du fait que je vivais dans la capitale de l’antifranquisme et que nous avions à moins de 100km l’un des derniers régimes héritier de la vague fasciste des années 30.   

AD : En lisant ton livre on ressent ta douleur, ton combat, parfois ton épuisement… Il n’existe que peu de livres sincères comme le tien. Qu’est-ce que la vérité pour toi ?

JMR : La période de la mort de Joëlle a été dur pour nous tous, mais contradictoire aussi car les premiers prisonniers condamnés à perpétuité ont commencé à sortir très vite après. Je ne crois pas ce livre triste, au contraire car humainement nous étions « malgré tout » fiers d’avoir été jusqu’au bout et d’avoir été à la hauteur de nos responsabilités.

Ce livre est politique mais ce n’est pas un texte politique. Il embrasse de nombreux domaines et aussi l’intime.

La vérité oui… La vérité même si elle est parfois cruelle. Contrairement à d’autres groupes, nous avons su perdre et nous avons eu le message de vérité et de résistance qui allait avec. En assumant la responsabilité politique et en ne laissant pas mourir la mémoire, nous avons laissé la porte ouverte pour de nouveaux combats.

Aujourd’hui il ne se passe pas un mois sans que les journaux bourgeois n’agitent notre fantôme.

AD : Crois-tu que les idéaux de la gauche réussiront de nouveau à dominer d’ici quelques années le discours publique ?

JMR : Dominer le débat public n’est pas le problème. Justement au temps de Rosa, la révolution était à l’ordre du jour et finalement c’est le fascisme qui a triomphé grâce aux bourgeois et à leurs collabos de gauche comme de droite. Nous allons devoir nous battre ça c’est sûr sinon nous aurons une nouvelle période de fascisme et une nouvelle guerre. Donc pour moi ce qui m’inquiète ce n’est pas tant les discours mais plus la disparition de l’expérimentation concrète. L’anti-terrorisme néolibéral et ses collabos ont détruit presque jusqu’à la racine notre expérience pratique accumulée lors des deux phases précédentes (nous étions les héritiers concrets de la phase de décolonisation). Le peuple et le prolétariat sont aujourd’hui totalement désarmés (à tous les niveaux). Une course contre la montre est engagée…

AD : Où as-tu puisé la force de ne pas renoncer à tes idéaux en prison ? Etais-tu tenté d’abandonner ?

JMR : Nous étions une orga qui n’était pas « idéologiquement » correcte, nous étions contradictoire dans nos effectifs mêmes, nous avions des camarades anars, des autonomes et aussi des ML à l’ancienne, du coup notre action reposait plus sur le doute que sur l’affirmation idéologique et je pense que c’est la raison du faible nombre de dissociés et de repentis dans nos rangs.

J’ai eu la chance de ne jamais me poser la question de baisser les bras et de ne plus assumer la responsabilité politique de mes/nos actes, je crois que je le dois aussi aux vieux révolutionnaires espagnols qui m’ont formé et éduqué, ils ont su m’inculquer le fait que de participer à des actes révolutionnaires n’est jamais sans conséquences. J’étais prêt. Merci à eux…

AD : Pour un certain moment, as-tu eu peur pour ta vie étant en prison ? Notamment en RFA les suicides de tes camarades (Ulrike Meinhof 1976, Ingrid Schubert 1977, Andreas Baader, Gudrun Ensslin, Jan-Carl Raspe le 18 octobre 1977) restent un mystère… Ingrid Möller, la seule personne, qui a survécu la nuit de Stammheim, quand, selon la version d’état ouest-allemand, quatre prisonniers de la RAF ont commis un suicide collectif, conteste jusqu’aujourd’hui cette version et parle d’une tentative de meurtre…

JMR : Quand tu t’engages dans la lutte révolutionnaire, il faut s’attendre à mourir mais aussi à vivre (intensément) de la vraie vie… D’autre part, quand des prisonniers politiques meurent entre les mains de l’ennemi, c’est un crime d’Etat et quelle que soit la forme de ces crimes.

L’Allemagne a réagi à la vague anti-impérialiste par la bestialité aggravée par l’impréparation structurelle et simultanément l’implication d’anciens nazis dans la police et le judiciaire. Bestialité dans les arrestation-exécutions, l’usage de la torture blanche en prison et enfin la mort des prisonniers. La grande différence ici c’est que la France sortait des multiples guerres de décolonisation dont la révolution algérienne, les gouvernants étaient non seulement prêts à affronter la subversion mais plus encore ils étaient devenus les formateurs en répression pour de nombreux pays comme l’Argentine et l’Uruguay par exemple.

L’école française est basée sur la disparition. La « guerre psychologique » étouffe l’acte subversif, ici on fait comme s’il ne se passait rien ou pas grand-chose. Ils mobilisent l’université, les médias, les « ex-révolutionnaires » pour raconter ces mensonges. Alors que de 68 à 77, nous avons connu une intense activité révolutionnaire sans doute beaucoup plus sanglante qu’en Allemagne, rien ne devait durer dans le temps, tout s’effaçait au fur et à mesure. Et quand ce n’était pas possible, les barbouzes assassinaient en douce comme le prouvent les documents autour du réseau Foccart qui viennent de sortir dans le Monde. Ils ont assassiné des opposants politiques étrangers mais aussi français…

AD : Ton livre est également poétique et tu cites de grands écrivains et poètes de la pensée sociale et révolutionnaire du 20ème siècle : Jack London, Berthold Brecht, Louis Aragon, Bob Dylan, John Lennon… La littérature pour toi est-elle une méthode efficace pour surmonter le quotidien et voir les idées simples et éternelles (la révolution, la justice sociale, l’amitié) en dehors du cadre médiatique, spéculatif et opportuniste ? La littérature est-elle dangereuse pour le discours néolibéral ? Peut-elle préserver la pensée libre ?

JMR : Je n’ai jamais écrit pour écrire. Inspiré par la littérature prolétarienne des années 20, j’écris toujours pour témoigner d’une situation d’exploitation et d’oppression… et transmettre… transmettre l’idée de nos résistances, de nos luttes. Contrairement aux textes politiques proprement dit, la littérature permet d’embrasser l’ensemble de la situation et des relations. Elle situe notre engagement et décrit la joie extrême que nous avons vécue en luttant contre eux.

Ma littérature porte encore les traces des libertés que nous avions conquises et sauvegardées avant le néolibéralisme.

AD : Quel rôle a joué la chute des états socialistes de l’Europe de l’Est dans cette constellation ? Le socialisme réel fut-il une première cible pour le néolibéralisme ?

JMR : Quand les taux de profit ont considérablement chuté dans l’ouest capitaliste à la fin des années 60 et tout au long des années 70, le fordisme est entré en crise définitive. Marx expliquait bien qu’un des renversements de cette tendance passait par une extension du domaine capitaliste. Et malgré tout, l’URSS échappait à ce domaine. Le néolibéralisme en s’installant comme nouveau mode de production devait en premier lieu éliminer l’URSS et ce qu’elle impliquait (et je dirai encore malgré tout) c’est-à-dire « le monde des deux camps ». Car le néolibéralisme devait aussi recoloniser le Sud, s’accaparer à nouveau et totalement des matières premières et aggraver mondialement la précarité comme terme nouveau de l’exploitation.

Et la seconde guerre froide a commencé (crise de l’implantation des missiles, guerre des étoiles, pressions financières…) jusqu’à l’écroulement.

AD : As-tu peur que la contre-révolution néolibérale, qui domine le monde depuis les années 1980, trouvera sa fin logique dans une dictature fasciste ?

JMR : La logique du système est le seul profit… nous vivons sous un régime capitaliste… Si personne ne résiste, la bourgeoisie impérialiste n’aura nullement besoin du fascisme. Elle poursuivra son œuvre d’oppression intensive. D’autoritarisme plus ou moins masqué.

Dans certaine situation, le rapport fasciste existe déjà. Il est encore circonstancié, limité, sélectif… par exemple, il faut comprendre la mutation de la gouvernance en fascisme comme on le voit déjà avec le « maintien de l’ordre » dans les quartiers populaires.

Le fascisme ne peut être résumé au retour des fachos d’opérette, il se mesure à la multiplication des états d’urgence, des états d’exception sous divers prétextes… à l’interventionnisme guerrier dans les pays du sud… le fascisme a été et reste l’arme de la bourgeoisie. A l’époque du néolibéralisme pourrissant, la texture de la gouvernance est déjà le fascisme. C’est le reflet concret de la concentration et de la centralisation extrême du capital et de ses appareils.

AD : Ne trouves-tu pas que le néoliberalisme comme l’expression d’impérialisme débridé dont un de ses piliers est la sécurité transatlantique n’est pas qu’autoritaire, mais tout à fait totalitaire ?

JMR: Avec le néolibéralisme nous sommes passés des démocraties bourgeoises autoritaires au totalitarisme réel. La mondialisation/globalisation capitaliste, dominée donc par une hyper centralisation et concentration des capitaux, a usé des vieux instruments politiques, financiers, militaires de la phase précédente, l’OTAN, le FMI et la Banque mondiale… comme des instances de pouvoir absolu. Au niveau mondial de leurs décisions, ils n’ont plus d’opposants. Ceux-ci en restent au local ou pire au vieil état d’esprit national. Quant à l’ONU ce n’est plus qu’une baudruche et lorsque l’instance internationale refuse une intervention, les impérialistes passent outre. Définitivement l’international est sous la coupe du mondial.

Comme exemple du totalitarisme, je crois qu’il faut revenir sur le cas de la Grèce. Durant plusieurs années, ce pays a été dirigé par un collège d’experts européens. Des experts que personne n’avait élu et qui, pourtant, avaient tout pouvoir sur la « refonte » capitaliste du pays.

AD : Pendant le conflit ukrainien tu voulais aller à Lougansk pour créer un documentaire sur la révolte antifasciste. Quel est ton impression de ces événements et de l’accompagnement médiatique occidental ?

JMR: Pour réussir leurs opérations, les impérialistes s’appuient principalement sur les forces les plus réactionnaires voire fascistes. On l’a constaté en Yougoslavie, avec leur soutien aux anciens alliés des nazis, comme les oustachis croates et en Bosnie sur Izetbegovic un leader qui avait lui-même été membre du parti musulman nazi durant la seconde guerre. En Tchétchénie et en Syrie, ils soutiennent jusqu’à l’absurde les intégristes « modérés » d’al quaïda et autres… Et toute la machinerie de propagande fait accepter à l’immense majorité de la population qu’il s’agit d’une entreprise démocratique. Et ils y parviennent encore. Par exemple, le coup d’Etat de Maïdan n’a soulevé aucune protestation même chez les militants d’extrême gauche.

Pour ma part, je voulais témoigner d’un combat, d’une résistance… je voulais rencontrer en particulier les combattants des bataillons Nestor Makhno et Che Guevara et mettre devant les yeux des militants leur réalité de véritables souteneurs de l’impérialisme. Qui étaient les fascistes, ceux qui se battaient derrière les drapeaux nazis et de l’Otan, ou ceux qui se battaient sous le nom de valeureux camarades ?

Ici on m’a traité de pro-poutine, pourtant ce sont les autorités russes qui m’ont refusé le visa de transit !!!

AD : Dans le monde du 21ème siècle de plus en plus surveillé, avec un abrutissement propagé par l’état et les médias, un abrutissement de la population qui est nécessaire pour le système capitaliste, l’idée révolutionnaire survivra-t-elle ?

JMR : L’idée révolutionnaire survit… elle survit dans toutes les émeutes contre l’ordre bourgeois, dans l’utopie de renversements radicaux. Non dans les mots qu’ils ont tués ou réduits à la clandestinité ou encore à la pantomime ridicule. Dès que tu résistes vraiment, que tu vas coûte que coûte au-delà du possible et de la norme, que ta conscience du passé, présent et futur et de la complexité géostratégique progresse… l’idée révolutionnaire est vivante.

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