Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

La plaie et le couteau, matérialisme et théologie de Staline

est avec Роман Егоров .

On connait les quelques vers ci-dessous -prémonitoires- retrouvés dans les papiers de Staline après sa mort, mais il y a bien d’autres poèmes dont certains plutôt romantiques – écrits alors qu’il avait seize ans au séminaire- paraissent de qualité, comme l’un d’entre eux intitulé “le Matin”, ils étaient dans les manuels de l’école primaire géorgienne. Une constante en est cette réflexion sur le destin, et la nature, une tempête faite des couleurs, des odeurs de la patrie, s’empare de l’individu et l’oblige à être, chacun est contraint de subir cette loi… malheureusement je ne connais pas le russe et il difficile de se contenter de la traduction automatique dans ce domaine. En revanche, le poème intitulé “celui qui écoute” m’a fait songer à la plaie et au couteau d’ARAGON mais gonflé plus encore du vent de l’histoire, thème fort chez lui pour expliquer son destin. Ou encore à cet étrange dialogue avec son fils qui se prenait pour le fils de de STALINE et qui virait voyou de la jeunesse dorée, il lui a dit “Tu n’es pas STALINE, je ne suis même pas Staline, Staline ce sont les Soviets”. Ou encore cette conviction qui le fait rester à Moscou alors que les Allemands sont à une cinquantaine de kilomètres : “les Allemands ne s’empareront pas de Moscou, Napoléon a pu le faire parce qu’il représentait les forces de progrès, mais les nazis sont les forces de la réaction et nous les arrêterons”. Joukov quelles que soient les rancœurs éprouvées contre Staline a toujours reconnu que c’était lui qui insufflait cette formidable force de résistance.

illustration : L’« Ange de l’histoire » dont parle Benjamin dans sa 9e thèse « Sur le concept d’histoire » est plus qu’une simple allusion au tableau de Paul Klee intitulé Angelus Novus. Cette expression se rapporte directement à la 1re thèse, où Benjamin souligne l’importance de la théologie pour le matérialisme historique, on retrouve non seulement chez Benjamin mais également chez Ernst Bloch et Lukacs, cette relation entre marxisme et messianisme, ce sont des écrivains philosophes juifs. Mais il y a incontestablement chez les Russes et chez Staline une rencontre dans le messianisme mais plus inscrit dans le rapport à la nature, un chamanisme.

(Poèmes de Staline trouvés après sa mort dans ses archives)

Après ma mort… sur ma tombe

Des descendants ingrats vont entasser les ordures,

mais après de nombreuses années,

le vent de l’histoire va les balayer

Joseph Staline

Autre poème : Le maitre et le disciple : Parlons de l’éternité avec vous (1):

Bien sûr que je suis coupable de beaucoup ! Mais quelqu’un a aussi dirigé mon destin

.J’ai senti ce regard omniprésent

Il ne m’a pas laissé dormir ou me reposer,

Il vivait en moi et régnait sur moi.

Et moi, en tant qu’esclave de l’humeur universelle,

L’acier va diriger le pays.

Qui était mon commandant suprême secret ?

Qu’est-ce qu’il voulait en me gouvernant

Moi, comme un esclave, juge et bourreau,

Était partout dans ce pays de pauvreté.

Et tout était inconcevable à l’époque :

D’où vient la force, la volonté, le pouvoir ?

Mon âme comme une roue de voiture,

Poussée par des millions de passions .

Et seulement alors, au printemps, en 1945, Il m’a chuchoté tranquillement à l’oreille :

– Tu étais mon novice, soldat,

Et ta paix est proche !

1949* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *

(1) L’ange de l’histoire ou le concept de tikkoun dans la mystique juive se rapproche étrangement de ce messianisme russe y compris avec sa relation à la nature et u processus à la fois individuel et collectif, mystique et rationnel mais dépassant le matérialisme vulgaire. « L’Infini se produit en renonçant à l’envahissement d’une totalité dans une contraction laissant une place à l’être séparé. Ainsi, se dessinent des relations qui se frayent une voie en dehors de l’être. Un infini qui ne se ferme pas circulairement sur lui-même, mais qui se retire de l’étendue ontologique pour laisser une place à un être séparé, existe divinement» Emmanuel Lévinas, Totalité et infini, Nijhoff, 1961

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