Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Leçons de la débâcle américaine en Afghanistan par le parti communiste de l’Inde

Au-delà de la débâcle en Afghanistan,les communistes indiens en appellent à une politique de souveraineté de l’Inde, le refus de l’alignement actuel de Modi sur la politique des USA qui non seulement l’isole de ses voisins mais ne tient aucun compte de l’intérêt des peuples . (note et traduction de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

La sortie ignominieuse de l’Amérique d’Afghanistan, l’effondrement de l’Armée nationale afghane, la fuite du président Ashraf Ghani et la prise de contrôle rapide par les talibans, ont tous paru des développements étonnants.

Vingt ans après que les États-Unis et leurs alliés de l’OTAN aint envahi l’Afghanistan et renversé le régime taliban, les talibans sont de retour au pouvoir à Kaboul. Les États-Unis ont dépensé plus de 2 billions de dollars au cours de ces deux décennies et au plus fort de l’occupation, il y avait 130 000 soldats de l’OTAN stationnés en Afghanistan. Plus de 88 milliards de dollars ont été dépensés pour construire l’armée nationale. Cela n’inclut pas les milliards de dollars dépensés par le Royaume-Uni et d’autres alliés de l’OTAN.

Le récit actuel de la façon dont, au cours des 20 dernières années, les États-Unis et l’Occident ont créé un État « démocratique » n’inclut pas les milliers de civils qui sont morts dans les bombardements aériens des États-Unis et de leurs alliés; 40 % des victimes civiles ont été causées par les bombardements aériens. Le fait que le gouvernement d’Ashraf Ghani n’avait pas de soutien populaire valable et qu’il était pourri de corruption et que la vénalité affectait également l’armée était quelque chose qui a été délibérément caché dans tous les récits médiatiques.

La « guerre contre le terrorisme » proclamée par le président Bush après les attentats du 11 septembre 2001 avait des antécédents douteux. Il ne faut pas oublier que ses cibles en Afghanistan, le régime taliban et Oussama Ben Laden étaient eux-mêmes les produits du djihad lancé par les moudjahidines contre la présence des troupes soviétiques en Afghanistan dans les années 1980. Oussama Ben Laden et les différents éléments extrémistes islamiques, qui ont afflué vers le djihad financé par la CIA et équipé par l’ISI pakistanais se sont transformé en Al-Qaïda. Quant aux Taliban, ils sont la descendance des moudjahidines afghans appartenant principalement à la nationalité pachtoune.

La « guerre contre le terrorisme » lancée par le président Bush et ses conseillers néoconservateurs s’est rapidement transformée en un instrument d’agression pour poursuivre les desseins hégémoniques de l’impérialisme américain. La prochaine cible après l’Afghanistan a été l’Iraq en mars 2003. Dans l’acte d’agression s’est manifesté le plus duplicité, Saddam Hussein a été accusé d’avoir des liens avec Al-Qaïda alors qu’en fait, Oussama Ben Laden l’avait dénoncé comme un « athée » pour avoir dirigé un régime laïc. La piste des destructions s’est poursuivie avec l’extension de la guerre contre le terrorisme en Libye et en Syrie.

C’est un fait irréfutable que partout où l’agression et l’occupation impérialistes se sont produites, cela a engendré davantage de terrorisme et d’organisations terroristes. En Irak et en Syrie, Al-Qaïda et pire encore l’État islamique ont vu le jour. Après la dévastation de la Libye, divers groupes extrémistes islamiques ont émergé, qui ont ensuite étendu leur influence dans le nord-ouest de l’Afrique. L’agression impérialiste et le terrorisme sont allés côte à côte

La prise de contrôle par les Taliban est une évolution profondément inquiétante compte tenu de son caractère fondamentaliste réactionnaire. Avec la prise de pouvoir des talibans , la forme de l’avenir de l’Afghanistan est incertaine et peu claire. Beaucoup dépendra de la manière dont la nouvelle structure contrôlée par les Taliban traitera les questions de la diversité ethnique, des droits des femmes et du traitement des minorités. Le régime taliban précédent avait une approche brutale et rétrograde à l’égard de ces trois questions. La réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations Unies sur la situation en Afghanistan, qui s’est tenue le 16 août, a vu émerger une position commune – la necessité de tracer une ligne rouge pour ne pas fournir d’abri à des groupes terroristes comme l’État islamique et Al-Qaïda sur le sol afghan. Il s’agit, bien sûr, d’une préoccupation vitale pour l’Inde. Les Taliban sont également affiliés à la faction Sirajuddin Haqqani qui avait pris pour cible des projets indiens en Afghanistan.

La débâcle américaine en Afghanistan présente des leçons pour l’Inde. Dès le début, en 2001, le gouvernement Vajpayee de l’époque avait déclaré son plein soutien à l’invasion militaire américaine de l’Afghanistan. En fait, il a été déçu que les États-Unis n’aient pas profité des facilités logistiques offertes par l’Inde et se soient plutôt appuyés sur le Pakistan. L’alignement sur les États-Unis au fil des ans a maintenant culminé avec lefait que l’Inde est devenu un allié stratégique. La série d’accords militaires que le gouvernement Modi a signés a donné à cette alliance un caractère militaire. L’inscription à l’Alliance quadrilatérale (Quadrilatérale) a été la dernière étape. L’arrimage stratégique a effectivement bloqué l’autonomie stratégique de l’Inde et sapé une politique étrangère indépendante.

Si les États-Unis ont lancé leur « guerre contre le terrorisme » pour renforcer leur hégémonie principalement en Asie occidentale, la Quadrilatérale est l’expression de leur stratégie visant à contenir et à isoler la Chine.

La semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères S Jaishankar a déclaré que s’il existe une convergence avec les États-Unis à l’Est, il existe des divergences à l’Ouest, en particulier en Afghanistan. Cela signifie que le gouvernement veut s’accrocher à la Quadrilatérale, tout en exprimant sa consternation face à la façon dont les États-Unis ont quitté prématurément l’Afghanistan.

Donner la primauté à l’alignement sur les États-Unis, comme en témoigne la politique afghane, a fini par isoler l’Inde dans la région. Il est significatif que la Russie et l’Iran, qui étaient d’accord avec l’Inde pour soutenir l’Alliance du Nord, lorsque les talibans étaient au pouvoir entre 1996 et 2001, aient maintenant établi des relations avec les talibans. Avec la Chine, ils ont déjà eu des pourparlers avec les talibans avant la prise de contrôle. La politique actuelle du gouvernement Modi, avec son objectif étroit anti-Pakistan et anti-Chine, l’isole de tous nos voisins d’Asie du Sud. S’il ne recadre pas sa politique étrangère et ses perspectives stratégiques, le gouvernement Modi devra se préparer à opérer dans un environnement régional plus hostile dans les prochains jours.

Il y a le danger de voir le radicalisme islamiste croître en Asie du Sud à la suite des développements en Afghanistan, Les politiques Hindutva des gouvernements BJP rendent notre pays vulnérable à de telles influences. La persécution des minorités crée un terrain fertile pour cela. Seule la poursuite de politiques laïques fermes peut contrer cette tendance.

Dans l’immédiat, le gouvernement doit répondre à certaines des préoccupations urgentes du peuple afghan qui a des liens historiques et culturels étroits avec l’Inde. L’Inde doit faciliter l’arrivée des personnes qui souhaitent demander l’asile en tant que réfugiés. Quant aux centaines d’étudiants afghans, qui étudient dans des établissements d’enseignement à travers le pays, ils ont besoin que leurs visas soient renouvelés ou prolongés. Une aide financière sous la mise en place de bourses et de subventions doit être assurée aux personnes dans le besoin.

Au cœur de notre nouvelle politique à l’encontre de l’Afghanistan doivent se trouver les intérêts et le bien-être du peuple afghan, et non les jeux de pouvoir géopolitiques.

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