Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

La Croatie : autopsie du rejet de la balkanisation de l’UE et de l’OTAN

La Croatie aussi aspire au changement. Le parti au pouvoir la HDZ est celui qui, se reconnaissant officiellement proche des néo-nazis oustachis a mené à la fois l’éclatement de la Yougoslavie, la haine des Serbes, et du communisme mais qui a installé des privatisations bases d’une “élite” totalement corrompue qui a cherché sa survie dans l’intégration européenne, un clientélisme et l’anticommunisme. “Virer ce parti” est la seule ligne qui unit les Croates de l’extrême droite à la gauche. Un cas de figure qui semble se répéter partout sauf chez le vertueux KKE qui lui poursuit sa ligne : seul le socialisme et les communistes incorruptibles offrent une perspective politique et donne au peuple la force de résister à la fois au fascisme et aux compromis sociaux démocrates qui de fait font alliance à travers l’UE et l’OTAN aux intérêts impérialistes et à ceux de l’oligarchie vendue.

En Bosnie Herzegovine comme en Croatie voici une campagne de réhabilitation des Oustachis qui dénonce l’exécution par les partisans communistes des Oustachis à la libération. C’est la camp que la France de Kouchner, mais aussi déjà de Robert Hue, Marie Georges Buffet alors que la majeure partie du PCF dénonçait l’illégalité de l’attaque de la Yougoslavie.

HISTORIQUE DE LA HDZ : les collaborateurs oustachis

La HDZ a été fondé de manière presque clandestine en 1989 par des nationalistes croates dissidents menés par Franjo Tuđman lorsque le multipartisme en Yougoslavie était encore embryonnaire. Ce parti comme celui du père LE PEN ne cache pas ou à peine les bases sur lesquelles il se constitue.

Ce parti avait un seul ennemi la Ligue des communistes de Croatie, dont le chef Ivica Račan avait pourtant opté pour la social-démocratie. Tuđman et les fondateurs du parti bénéficièrent d’un large soutien financier de la part des Croates expatriés qui avaient fui en tant que collaborateurs des Oustachis fascistes et de l’ancien État indépendant de Croatie constitué sur ces bases pronazies.

Les Oustachis
c’est-à-dire les insurgés (en croate : Ustaše), étaient un mouvement séparatiste croate, fasciste et anti-yougoslave. Après des années de clandestinité, les oustachis prirent le pouvoir en Croatie en 1941 avec le soutien de l’Allemagne et de l’Italie, après l’invasion et le démembrement de la Yougoslavie : ils instaurèrent l’État indépendant de Croatie, une dictature particulièrement féroce, qui se signala par de nombreux massacres des populations serbes, tziganes et juives de Croatie et de Bosnie-Herzégovine. Au printemps 1941, après l’invasion de la Yougoslavie par les troupes hitlériennes, les oustachis reçoivent des nazis le gouvernement d’un nouveau territoire : l’État indépendant croate qui rejoint officiellement l’Axe Rome-Berlin-Tokyo le 15 juin 1941. Ce nouvel État fasciste s’étend sur la Bosnie-Herzégovine et la Croatie actuelle (excepté la côte dalmate annexée par l’Italie). Dès lors, avec le soutien d’une partie du clergé catholique, le parti fasciste croate instaure une des plus sanglantes dictatures de la Seconde Guerre mondiale. Le mouvement, fort d’environ 60 000 militants, applique en effet une politique de conversion forcée à l’égard des deux millions de Serbes (orthodoxes), des Juifs, et des Tziganes vivant dans le nouvel État. De nouvelles dispositions légales interdisent le cyrillique, des écoles sont fermées, des églises orthodoxes détruites. Cette politique se transforme en véritable purification ethnique. Les oustachis procèdent de deux manières : ils massacrent les habitants par villages entiers, ou bien raflent des milliers de personnes qui sont ensuite dirigées vers des camps de concentration, les plus importants étant ceux de Jasenovac et Stara Gradiska. En revanche, les musulmans de Bosnie-Herzégovine collaborent et sont célébrés par le régime. Parallèlement, les oustachis combattent aux côtés de la Wehrmacht, notamment sur le front de l’Est et contre la résistance communiste retranchée dans les montagnes de Bosnie-Herzégovine.

A la défaite nazi et à la libération menée par les partisans yougoslaves, les collaborateurs aidés par le Vatican suivirent les filières habituelles vers le Canada et l’Amérique latine où ils contribuent à développer l’antisémitisme .

La fin du socialisme yougoslave est ici aussi présentée comme la victoire contre la “volonté de purification ethnique” du dictateur communiste et met en place un “nazi” reconnu…

Ce sont ces gens-là dont se réclament ceux que les Etats-Unis, l’Europe, la gauche de Kouchner, les Bernard-Henri Lévy et autres Glucksmann père vont soutenir comme ils le font partout contre le communisme. Déjà avec la liste “Bouge l’Europe” la moitié de la liste présentée par le PCF est officiellement pour ces gens-là, ce sont des socialistes et ceux qui avec Jacques Fath, Cirera vont être le parti des “mutants” avec l’appui de Francis Wurtz. Ceux qui s’opposent à cette forfaiture vont être mis sur la touche, interdits, la chasse aux sorcières bat son plein au nom de l’UE et des “droits de l’homme” partout. Là aussi on s’y croirait.

En fait, le financement de “l’immigration” émanait également de la CIA. Cette influence se retrouva à la HDZ qui appela au rétablissement de la Croatie dans ses « frontières naturelles et historiques ». Celles-ci auraient inclus la Bosnie-Herzégovine jusqu’à la rivière Drina ainsi que les territoires que la commission Djilas avait attribué en 1945 à la Serbie et au Monténégro. L’Union démocratique croate a été au pouvoir de 1990 à 2000, détenant la présidence de la République, la majorité à la Diète de la République et le gouvernement. Pendant ces mandats, la Croatie devint indépendante (1991), fut reconnue internationalement (1992) et dut faire face à la Guerre de Croatie (1991-1995). La haine de la Serbie devient l’aliment de la guerre qui bénéficie non seulement des Etats-Unis mais d’un soutien quasi officiel de l’Allemagne et du Vatican sur le modèle développé en Pologne. On décrit un “nationalisme serbe” yougoslave de Slobodan Milošević qui est en fait un Gorbatchévien assez mollasson mais qui symbolise l’unité yougoslave. L’élection présidentielle croate de 1992 porta Franjo Tuđman au poste de président de la République qu’il occupa jusqu’à sa mort en 1999 et il représenta très vite pour les Serbes le symbole de la période nazie avec la résurgence des oustachis (célèbres pour avoir offert un panier des yeux de juifs à Hitler). Comment des juifs comme Madeleine Albright, démocrate, sauvée de ces gens-là par les partisans de Tito (un Croate mais accusé d’être pro-serbe communiste) ont-ils pu soutenir des gens pareils c’est un mystère qui s’est renouvelé dans bien des endroits y compris aujourd’hui en France avec un vendu comme Glucksmann…

La mutation de ce parti face à une absence d’alternative

À la fin des années 1990 le parti perdit en popularité, notamment en raison des échecs politiques comme lors de la crise de Zagreb et d’une situation socio-économique allant en se dégradant. En décembre 1999, Franjo Tuđman, malade d’un cancer depuis 1993, décède brutalement. Une coalition se forme de centre gauche et de centre droit et force la HDZ a abandonner tous les leviers du pouvoir. Ce parti parait définitivement condamné mais il opère une mutation qui le reconduit durablement au pouvoir. Cette mutation est tout à fait comparable à celle d’un Bardella flanqué toujours de “Reconquête”.

Les leaders de la HDZ se sont tout d’abord définis comme un parti de droite non seulement aux sympathies fascistes mais avec une idéologie libérale et Tuđman se disait inspiré par Margaret Thatcher. Plus tard, dans le cadre de son intégration européenne, le parti se définit comme de centre droit et comme chrétien démocrate. Leur seule idéologie officielle était de proclamer la réconciliation nationale, qu’aurait mise à mal aussi bien les communistes et partisans de la Yougoslavie que les ultranationalistes qui continuent à se réclamer des Oustachis. En pratique, cette idéologie justifia une réhabilitation au moins informelle des oustachis et une justification de fait de leur idéologie combinée avec la traque de tout ce qui rappelait le socialisme yougoslave.

Même si la formation adopte un ton plus modéré dans les années 2000, conduisant à une scission et à la création du Bloc croate en 2002, un chemin assez comparable à celui de Bardella et Marion Maréchal. L’arrivée à la tête du parti en mai 2012 de Tomislav Karamarko, ancien vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, pousse la HDZ à renouer avec les thèmes de l’extrême droite. Mais en fait en 2013 et en 2015, elle forme même un cartel électoral avec le parti d’extrême droite HSP-AS10.

La HDZ mobilise une rhétorique nationaliste traditionnellement portée par l’extrême droite et met en avant son identité chrétienne.

La HDZ mena la Croatie du communisme au capitalisme. Les gouvernements de la HDZ menèrent toutes les privatisations. Franjo Tuđman avoua que son but était de créer une nouvelle élite croate de 200 familles qui auraient élevé le niveau de vie de la majorité des Croates. La HDZ au pouvoir, privatisant l’industrie croate, fut critiquée et accusée d’avoir accordé des passe-droits au profit des anciens profiteurs de guerre, cette accusation de corruption systématique et de clientélisme est la force et la faiblesse encore aujourd’hui du gouvernement croate qui aujourd’hui comme bien des gouvernements installés sur les mêmes bases par les Etats-Unis et l’UE ont de moins en moins à distribuer et la corruption a produit une “élite” qui parait de plus en plus en rupture avec la situation du peuple qui se dégrade. .

Au pouvoir, la HDZ fait pression contre le droit à l’avortement.

La HDZ bénéficie du fait d’avoir pour opposant un ensemble de partis, avec une gauche très faible qui au pouvoir n’a pas d’alternative au libéralisme, un spectre qui rappelle étrangement celui de bien des “démocraties” y compris en France.

Ce contexte qui est à la fois celui d’un parti profondément réactionnaire bâti sur des bases fascistes qui a procédé dans le cadre de la destruction de la Yougoslavie et de la manière dont cette désintégration a marqué “les révolutions de couleur”, le rôle déjà de l’alliance de l’OTAN et des forces les plus réactionnaires pour privatiser les pays et créer une élite “pro-européenne” entraînant comme dans toute l’Europe une balkanisation autour d’une “élite” pro-européenne de plus en plus corrompue, mais qui joue la respectabilité et la “démocratie”.

Dans ces conditions les élections croates se sont polarisées autour de la manière dont il était possible de virer le parti au pouvoir.

Les élections législatives du 17 avril 2024 : « pour ou contre le parti historique de droite au pouvoir »

L’intérêt pour les élections législatives du 17 avril 2024 a été exceptionnel : 62% des électeurs se sont déplacés, un record pour la Croatie. Pendant la campagne, toutes les formations politiques ont tenté de créer une atmosphère « pour ou contre le parti historique de droite au pouvoir », l’Union démocratique croate (HDZ) ont expliqué les commentateurs occidentaux sans trop s’étendre sur l’historique.
Aussi, cette élection a brouillé les cartes entre les traditionnels clivages gauche-droite. Aussi bien la gauche que la droite souverainiste et nationaliste disent partager le même objectif de changement, quitte à former une coalition technique pour chasser du pouvoir le HDZ du Premier ministre Andrej Plenkovic.

Au vu des résultats de l’élection, cet objectif semble atteignable. En tête, le HDZ remporterait, d’après les premiers résultats, 60 députés sur 151, en baisse de 6 sièges, ce qui n’est pas suffisant pour former le gouvernement ; 76 sièges sont nécessaires pour gouverner seul. Les divers partis de gauche obtiendraient ensemble 55 sièges. Les deux formations d’extrême droite obtiendraient respectivement 14 et 11 sièges. Celles-ci semblent en position de décider qui formera le futur gouvernement.

Danielle Bleitrach

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