Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Les réservistes finlandais ne veulent pas d’une guerre avec la Russie, ils ont vu en Ukraine ce que cela donne.

Il suffit de se rendre dans les pays dont les autorités semblent pourtant manifester un grand enthousiasme pour l’adhésion à l’OTAN (voire pour se mettre sur un pied de guerre), pour constater qu’à la base, le dit enthousiasme se traduit souvent chez le citoyen ordinaire par la crainte de se retrouver en première ligne dans une guerre qu’ils n’ont pas réellement voulue. Cet état d’esprit nous l’avions constaté en Pologne, en particulier à proximité d’une base de l’OTAN, mais aussi dans la plupart des anciens pays du pacte de Varsovie, c’est pourquoi cet article sur l’état d’esprit des Finlandais nous parait tout à fait crédible. Notons que les Français ne sont pas plus enthousiastes à l’idée de se retrouver en guerre même si le Front est plus lointain. Les “plaisanteries” de Trump alors que nous sommes de plus en plus dépendants des USA sur le plan militaire comme énergétique, les nouvelles qui filtrent malgré la censure, ici comme en Finlande, finiront par créer les conditions d’une prise de conscience. On peut penser que comme les ondes parties de la réalité ukrainienne, ce refus de la guerre ne peut que croître et atteindre un certain niveau de maturation en juin au moment des élections européennes, la proximité avec la réalité du champ de bataille jouant son rôle décisif dans la vision réaliste de la circonscription mais les autres facteurs ne sont pas à négliger. (note de Danielle Bleitrach histoireetsociete)

https://svpressa.ru/war21/article/404687/

Les réservistes finlandais ne veulent pas être appelés dans l’armée active. Ils ont donc commencé à “voter avec leurs pieds” en faveur du passage au service civil. La semaine dernière, environ 700 personnes ont pris cette décision. À titre de comparaison : pour l’ensemble de l’année 2023 – 1650. Minna Nenonen, directrice exécutive de l’Association des réservistes, et Miina Kaarkoski, chercheuse à l’Académie nationale de défense, l’ont déclaré lors d’une interview accordée à Yle, la chaîne d’information publique la plus populaire du pays.

Selon eux, si l’on considère la situation dans son ensemble, le flux de citoyens qui ont décidé de quitter la réserve ne semble pas très important. Mais il est révélateur à sa manière. Et plus négatif que neutre. En effet, selon la loi finlandaise, il est impossible de revenir du statut civil à la réserve militaire. On ne peut que participer volontairement à la défense du pays.

L’armée de nos voisins est considérée comme l’une des plus stables de l’UE. Cela est dû en grande partie au maintien de la conscription universelle (l’expérience de l’URSS !).

Après avoir atteint l’âge de 18 ans, environ 80 % des Finlandais partent servir. Ceux qui ne peuvent pas prendre les armes en raison de leurs convictions se voient proposer d’autres solutions : service hospitalier, service de sauvetage, etc. Le refus de l’un ou l’autre est puni de six mois d’emprisonnement. Les conscrits “font leur temps” de six mois à un an, en fonction de leur spécialité. Ensuite, ils sont transférés dans la “réserve militaire”, où ils sont enregistrés jusqu’à l’âge de 50-60 ans.

Si, en temps de paix, l’armée de Suomi compte environ 20 000 hommes, en cas d’opérations militaires, elle peut atteindre près d’un million de “baïonnettes” qualifiées. La différence est considérable. Surtout dans la période géopolitique turbulente que nous traversons actuellement. Comment les dirigeants de l’armée peuvent-ils ne pas s’enthousiasmer ?

Le ministre de la défense du pays voisin, Antti Häkkänen, a déjà qualifié les actions de ses compatriotes d'”antipatriotiques”. Et il a demandé avec insistance que le changement de statut soit interdit.

– Les autorités elles-mêmes et leurs politiques sont à blâmer pour s’être mises dans cette situation”, a répondu à SP Darina K., qui, il y a de nombreuses années, a changé sa ville natale de Saint-Pétersbourg pour Helsinki après avoir épousé un homme d’affaires originaire de cette ville. – Elles ont adhéré aux sanctions anti-russes. Elles ont adhéré à l’OTAN contre l’avis de la majorité de la population. Elles ont fermé leurs frontières avec la Russie. Elles ont commencé à s’isoler de la Russie… Mais plus elles nous font peur avec “l’agression russe”, moins nous y croyons.

SP : Les citoyens finlandais ont raison de ne pas y croire.

– Tout le monde voit ce que les États-Unis et l’OTAN ont fait à l’Ukraine. Ils comprennent ce à quoi de tels “jeux” peuvent conduire. Si seulement nous avions plus d’informations ici sur ce qui se passe en Russie et en Ukraine. Ainsi que dans l’ensemble de l’UE.

Votre correspondant s’est également entretenu avec un représentant du Parti populaire suédois de Finlande au sujet des aspirations anti-guerre des réservistes finlandais. Il a demandé à ne pas être nommé. Selon ce parlementaire d’un certain âge, ses concitoyens ont surtout peur d’une guerre avec la Russie. D’où leur désir d’être libérés de leurs obligations de réservistes. “La mémoire des générations fonctionne”, estime-t-il : la défaite face à l’URSS lors de la “guerre d’hiver” de 1939/40. Même s’il y a aussi des “têtes brûlées” qui rêvent de revanche.

Dmitry Solonnikov, directeur de l’Institut du développement de l’État moderne, poursuit le sujet.

SP : Quelle est, selon vous, la raison du “mouvement de retrait” dans la réserve de l’armée finlandaise ?

– Les gens normaux ne veulent pas aller à la guerre. Dans la plupart des pays du monde, le nombre de citoyens qui font leur service militaire diminue.

Dans un certain nombre de pays, où les armées sont constituées selon le principe du contrat, il n’y a même pas assez de militaires. Tout d’abord, les jeunes ne sont pas intéressés. Même s’il existe de sérieux ascenseurs sociaux sous la forme de préférences pour les militaires. Ils préfèrent une vie paisible et tranquille, le service civil. La Finlande n’est pas une exception.

“SP” : Est-ce la raison pour laquelle les politiciens locaux font maintenant peur à la population en évoquant une “guerre russe inévitable” ?

– Mais on ne les croit pas vraiment. D’une part. D’autre part, ce sont des citoyens européens. S’ils sont “acculés” dans leur pays, par exemple s’ils sont envoyés de force à l’armée comme dans le régime bandériste de Kiev, ils peuvent aller travailler dans n’importe quel pays de l’Ancien Monde. Ou de l’autre côté de l’océan. Là où c’est plus calme.

“SP” : En même temps, ils votent massivement aux élections pour des partis pro-américains qui n’aiment pas le monde, et l’OTAN est “chez eux”.

– Oui, mais ils ne veulent pas participer à tout ce qui concerne la préparation d’éventuelles opérations militaires. Ils préfèrent rester à l’écart, selon le principe de laisser les politiciens s’en occuper, tandis que nous trouverons notre utilité dans des domaines non militaires.

“SP” : Il s’agit peut-être de la “défense” de l’Alliance – craignent-ils que leurs troupes “s’égarent” pour participer à des guerres dans différentes régions du monde ?

– Je ne pense pas que ce soit ça. Sinon, ils ne voteraient pas pour les partis de leur pays qui prêchent l’idéologie de l’OTAN. Ce qui s’est passé lors des élections législatives de l’année dernière et des élections présidentielles actuelles. D’ailleurs, les candidats au poste de leader de Suomi, qui ont obtenu, disons, les trois premières places au premier tour, sont les partisans les plus actifs de l’OTAN dans ce pays.

“SP : Voilà pour les “Finlandais apolitiques” !

– Ils vivent dans le courant paneuropéen. Ils croient qu’une Europe unie les protégera en cas d’urgence. Le fait que la partie orientale de leur pays ait fait faillite à cause des sanctions anti-russes ne signifie rien. Le reste de la Finlande voit son avenir dans l’UE et les États-Unis. C’est là que se trouvent leurs principaux garants et partenaires, tant sur le plan économique que militaire. Pas en Russie.

Notre expert militaire Ivan Konovalov a son propre avis.

– Tout n’est pas aussi clair avec les réservistes finlandais. Les Finlandais sont pour la plupart des patriotes et sont toujours prêts à défendre activement leur patrie”, déclare Ivan Pavlovich. – Et la démarche qui se dessine avec leur passage au service civil est une façon d’exprimer leur désaccord avec la politique actuelle du gouvernement de leur pays. C’est aussi une réaction à l’adhésion à l’OTAN. Ils voient que cette organisation peut provoquer n’importe quoi, n’importe où et n’importe quand. Ils en tirent donc des conclusions. Il ne s’agit pas de la Russie, c’est certain.

En outre, de nombreuses personnes sont offensées par le fait que les autorités ne leur ont pas demandé leur avis sur l’adhésion à l’OTAN, qu’elles n’ont pas organisé de référendum. Cela les affecte également. Après tout, la société finlandaise ne voulait pas militariser le pays.

Je ne sais pas si le retrait massif des réservistes a été organisé par quelqu’un ou s’il est né spontanément, mais je suis sûr qu’il sera de grande ampleur. Le principe des dominos.

“SP” : Nos voisins ont-ils des hommes politiques raisonnables capables de tenir tête à une bande de satellites de Washington ?

– Tout le monde se souvient de leur statut de “tampon” entre la Russie et l’Occident collectif. Il a contribué à la prospérité économique du pays. Il a également apporté des dividendes politiques. La Finlande était considérée dans le monde. Elle jouait un rôle majeur. Et maintenant ? Elle fait partie d’un grand groupe appelé l’OTAN.

Print Friendly, PDF & Email

Vues : 277

Suite de l'article

4 Commentaires

  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    Le refus de la guerre s’exprime de manière particulière à Adviika.

    Aujourd’hui le chaudron est fermé avec environ 3500 soldats de l’AFU pris dans la nasse. Ils évacuent par petits groupes de 15 personnes dans les routes bouseuses le long des bandes forestières qui longent les champs ukrainiens.

    À ce rythme il leur faut encore 40 heures pour évacuer les 3500 soldats, un temps qui sera probablement trop court à la vitesse de progression des troupes russes. Ce serait une des plus grosse capture de prisonniers dans cette guerre s’ils se rendent.

    Le 3e bataillon “Asov” a été envoyé pour protéger la retraite des soldats de l’AFU et ils auraient refusé de combattre et fuit le terrain, car rien n’a été préparé, pas de tranchée, ni bunkers, ni positions de mitrailleuses, ils refusent de “mourir pour les erreurs des chefs.”
    Le 3e bataillon aurait lui même parlait d’enfer à Adviika et de combats à 360 degrés dans lesquels en 4 jours ils auraient perdu 600 des membres de cette troupe d’élite.
    Info ou intox ?
    Difficile à dire, mais si Asov refuse le combat Zelensky peut commencer à trembler.

    Selon les sources ukrainiennes 60 000 soldats russes seraient basés à proximité de Robotyne le lieu connu comme Bradley Square où la contre offensive ukrainienne à été ruinée.

    Ce village totalement en ruine n’a pas d’intérêt par contre le front à son ouest est massivement bombardé par les russes et semble être une préparation pour entamer l’avance vers Zoporijia, ensuite comme villes principales restent Dnipro et Poltava avant la capture de Kiev, à moins qu’une offensive nord ne se mette en place.

    À la différence de Zaloujny, Sirsky est un officier russe formé dans l’armée soviétique et risque d’être beaucoup plus agile que ceux de l’OTAN.

    Répondre
  • Franck Marsal
    Franck Marsal

    Peut-être qu’Azov n’est pas satisfait du remplacement de Zaluzhny par Syrsky et compte sur une défaite spectaculaire de ce dernier à Adviivka pour reprendre la main politiquement à Kiev …

    Répondre
    • admin5319
      admin5319

      tout est possible, nous ne sommes plus dans la logique politique mais dans les délires de la CIA, on verrait zelensky atterrir à Moscou avec Syrsky, pour fuir des oligarques type Poroshenko, flanqués d’Azov, que je n’en serais même pas étonnée. Relisez l”interview de Poutine, la manière dont il s’adrese à Zelensky, souvenez-vous de la manière dont le dirigeant tchétchène Kadirov en pleine “négociations reniées” proposait à Zelensky de l’extrader vers Poutine qui lui était un “homme de parole”, alors que les occidentaux font la peau à leurs alliés.

      la question est que va faire la France dans cette galère et jusqu’à que point la classe politique s’est-elle autointoxiquée avec ce que les américains appellent le Blob analysé par ailleurs et où tout cela nous mènen-t-il ? Autre question : qui est le petit réseau (j’en connais un certain nombre) qui a agi au sein du PCF et de la CGT pour mener l’intoxication atlantiste… Kamenka ne se cache même plus, Nous sommes en plein dans les moeurs de la CIA dont Poutine explique qu’elles sont normales pour lui ancien agent du KGB, mais quand les complots des services secrets prennent la place de la politique d’Etat, d’un parti et mènent à la carrastrophe il faut dit-il savoir y renoncer… c’est du bon sens et il serait temps que le PCF réfléchisse à la manière d’imposer la paix, le fait est qu’il y a un véritable réseau qui a participé de cette intoxication et d’autres… très peu diretement vendus, la plupart devenus force d’inertie…empecher le PCF d’agir et travailler alors toute la gauche en toute quiétude est plus que son pourcentage électoral .

      Répondre
  • Franck Marsal
    Franck Marsal

    Que sont les “classes politiques” actuelles ? On le voit dans tous les pays d’Europe : les groupes dominants (Macron et consorts, les gens qui ont porté l’UE, l’OTAN, le libéralisme et la mondialisation) mènent le soutien à l’Ukraine avec en perspective leur propre survie en tant que caste dominante. Pour eux, la défaite de l’OTAN est impensable, car ils sentent bien le risque d’être emportés par la vague. Non pas par la vague des chars russes qui traverseraient le continent, mais simplement la vague de l’effondrement de la réputation de l’occident dominant. Ils ne veulent pas l’entendre, mais ils le savent : le monde a changé. Ils sont désormais minoritaires et la pyramide de puissance et de domination, tenue par tous les moyens, menace de s’effondrer.
    Or, c’est seulement ce pouvoir international, cette capacité à briser économiquement toute tentative alternative par l’isolement, par l’étouffement commercial et financier, qui leur a permis de dominer. Que reste-t-il de Macron, de Bernard Arnaud, sans la crainte de l’isolement international que provoquerait une autre politique ?
    Donc, que reste-t-il de Macron et consorts, si le pouvoir mondial n’est plus à Washington ? Quel est l’avenir du serviteur soumis lorsque le maître est renversé ?
    Ce qui est frappant, c’est comment cela joue, non seulement sur les partis dominants, mais également sur les oppositions. C’est là qu’on mesure les limites de plus en plus étroites dans lesquelles se joue le théatre démocratique. Sortir du théatre, c’est prendre un risque, faire un pari sur l’avenir, brûler les vaisseaux, perdre tout aujourd’hui. Mais rester dans le théâtre, c’est accepter les limites non dites : ne pas remettre en cause les fondements du pouvoir, ne pas briser les tabous. A coup sûr, cependant, c’est se condamner demain à tomber avec les autres dans le discrédit.

    Répondre

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

La modération des commentaires est activée. Votre commentaire peut prendre un certain temps avant d’apparaître.