Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

J.Cl. Delaunay : qui va payer le plan de Biden?

Jean-Claude Delaunay répond ici à l’article de Xuan sur qui va payer le plan de Biden? Je rappelle que tout est parti non pas de la remarque de Fabien Roussel mais surtout de la manière dont toute la presse et les forces de gauche avaient salué ce plan sans se poser au moins la question de sa faisabilité et surtout comme l’avait noté Xuan : qui paye la capacité des États-Unis grâce au dollar de payer leur manière d’actionner la planche à billet.

Par ailleurs je trouve tout à fait pertinent que Jean Claude Delaunay pose la question d’un Welfare qui préconise la guerre partout, et note que c’est le nazisme. (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Oui, bonjour Xuan et salut fraternel. J’approuve entièrement ton analyse de Biden et de ce que prétend faire aujourd’hui la grande bourgeoisie américaine. Il y aurait à dire sur le commentaire qu’en a fait Fabien Roussel. Mais d’une part j’ai cru comprendre, de loin, que Fabien avait clarifié son propos initial et dissipé les ambiguïtés qu’il pouvait contenir. Dont acte. Je crois d’autre part que la critique la plus immédiatement nécessaire est celle de Biden et des classes sociales dont il est le représentant direct.

A mon avis, il n’est pas absurde de considérer que les États-Unis puissent revenir à une économie capitaliste dont l’État social reprendrait de la vigueur. Jimmy Carter, qui fut Président des États-Unis et qui aujourd’hui est devenu pasteur, prêche chaque dimanche, paraît-il, la nécessité d’une telle politique sociale. Il se trouve que je suis allé aux États-Unis il n’y a pas si longtemps. Je souscris entièrement aux suggestions de Jimmy Carter.

Peut être va-t-on considérer que je vois les choses par le petit bout de la lorgnette. Mais je vous assure, il est aujourd’hui quasiment impossible de trouver la moindre pissotière publique dans ce pays. Mac Donald n’est plus un endroit pour se nourrir. C’est un endroit pour pisser. Quand vous demandez dans la rue : Où se trouve le Mc Donald? tout le monde comprend, cela veut dire : Où se trouve la pissotière locale? Or il existe une liaison certaine entre la disposition de ces lieux d’aisance et la lutte contre la chômage. En effet, si les autorités américaines accordent aussi peu d’attention aux toilettes publiques, c’est parce qu’elles servent de lieux de rassemblement aux chômeurs et aux déclassés américains. Il me paraît clair que la mise en œuvre d’un vaste programme de travaux publics, en fournissant de l’emploi aux chômeurs américains, libérerait les pissotières de ce pays de l’hypothèque pesant sur elles et encouragerait les édiles à les mettre au niveau que requiert la civilisation.

Mais on en est loin. Le retour de l’Etat social supposera, si tel est l’avenir de ce pays, d’une part qu’existe un puissant mouvement de masse interne aux Etats-Unis pour aller en ce sens. Sanders est une nouille social-démocrate. Ce n’est pas un chef de guerre socialiste. Cela supposera d’autre part que ce puissant mouvement interne agisse en conjonction avec un puissant mouvement externe mondial réussissant à neutraliser complètement l’impérialisme, dont ce pays est le centre.

Les Etats-Unis sont aujourd’hui dans une autre configuration. Ils sont la clé de voûte, il est vrai branlante et ébranlée, du Capitalisme monopoliste financier mondialisé. C’est dire que le dollar US ayant le statut de monnaie mondiale, si leur gouvernement met effectivement en œuvre un plan social de grande envergure, en particulier pour calmer l’état de trouille de la paupérisation dans lequel se trouvent un certain nombre de petits américains, ceux-là mêmes ayant soutenu Trump, cela veut dire que ce plan sera financé par le reste du monde. C’est exactement la question que tu poses.

En même temps, si l’on mesure bien la configuration socio-économique dans laquelle se trouvent aujourd’hui les Etats-Unis, on est conduit à soulever d’autres questions. Par exemple, la grande bourgeoisie américaine est-elle si prête que ça à accepter un tel plan autrement que du bout des lèvres sans un mouvement social puissant? Ou bien encore, en supposant qu’un tel plan aboutisse (hypothèse d’école très peu probable), que peut signifier l’existence d’un nouveau welfare intérieur si par ailleurs le risque de guerre avec les forces anti-impérialistes est maintenu à son niveau actuel? Quand on prétend apporter le welfare au peuple tout en préconisant de faire la guerre pour défendre la position impériale de la classe dirigeante, cela ne s’appelle-t-il pas le nazisme?  

Si, comme je le souhaite, le candidat Fabien Roussel est choisi par les communistes comme candidat lors des prochaines présidentielles, cela va supposer une bataille idéologique et politique énorme. Nous pouvons sortir du piège dans lequel une longue histoire nous a enfermés. Nous pouvons gagner cette place respectable qui donnera des armes au peuple français pour de nouveaux combats, pour de nouvelles victoires. On perçoit déjà, cependant, que les arguments devront être bien affûtés et que des équipes militantes nombreuses et déterminées devront aider Fabien Roussel à mener, pour la gagner, cette immense bataille.

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2 Commentaires

  • Xuan

    cher camarade, pardonne-moi de retourner la lunette à mon tour et de me focaliser sur “cela ne s’appelle-t-il pas le nazisme?”  

    Le parallèle entre Trump et l’hitlérisme était trivial, peut-être aurait-il fallu parler de mussolinisme, mais l’appliquer à Biden fait inévitablement écarquiller les mirettes de toute la gauche.

    Je partage ta question qui est une réponse. L’essence du nazisme a été définie par Dimitrov comme « une dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins et les plus impérialistes du capitalisme financier ».

    Si cette définition ne recouvre pas vraiment, mais pas encore, la situation intérieure aux USA, elle correspond à la guerre hors limites visant à briser la Chine pour maintenir l’hégémonie mondiale. Et l’hégémonie mondiale c’était le rêve d’Hitler.
    Cette guerre hors limites ne connaît pas de frontières, d’autant moins depuis l’orientation nouvelle des USA visant à reconstituer l’axe occidental. Et elle traverse aussi nos sociétés.
    L’unité des communistes et des progressistes contre l’hégémonisme est un enjeu pour la paix et pour notre révolution.

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  • Jean François DRON
    Jean François DRON

    je crois qu’il faut être particulièrment vigilant quant à l’évolution de la situation aux USA et à leurs effets négatifs sur toute la planète. Ce n’est certainement pas le moment pour nous communistes de faire du suivisme à la sociale démocratie quelle que soit sa mouture car elleconsidre le Parti Démocrate US comme un parti de gauche, ce qu’il n’est pas du tout.

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