Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Procès Assange : révélations de Craig Murray

Grâce à Craig Murray on apprend le détail du témoignage de M. Al-Masri, et de l’effet de ce témoignage sur la juge Baraitser. Catherine Winch nous a déjà traduit une autre intervention de Craig Murray, la manière dont il note que même la juge intraitable commence à être ébranlée par la description de ce dont sont capables la CIA et les États-Unis. Il est vrai que quand nous suivons grâce aux traductions de Catherine les divers témoignages même nous qui depuis des années savons ou croyons tout savoir des mensonges, des tortures subis par des innocents sommes pénétrés d’effroi non seulement à l’idée de ce qui attend Assange en cas d’extradition mais par le fait que tout cela se poursuit. Je ne voudrais pas avoir l’air d’enfoncer le clou, mais il faut noter que la commission féminine du PCF, très liée au secteur international du PCF de Pierre Laurent, a tout fait pour empêcher que le PCF dénonce le cas Assange, relayant des accusations sans fondement sur ses violences supposées. Il a fallu le combat courageux de Fabienne Lefebvre (Vitry) pour imposer une autre attitude grâce au changement de direction du PCF (note de Danielle Bleitrach).

M. Al-Masri devait témoigner en visio-conférence. Ce lien fonctionnait parfaitement quelques heures auparavant, mais au moment où M. Al-Masri devait parler, la liaison a failli.  Ce n’est pas la première fois que ce genre de ‘panne’ se produit.

L’avocat pour la défense, Mark Summers, l’un des conseils de Assange,  a lu son témoignage d’une voix éloquente. M. Al-Masri est un petit commerçant, ressortissant allemand d’origine libanaise, habitant l’Allemagne avec sa famille depuis 1984. En 2003 il est arrêté en Macédoine après un séjour de vacances, abominablement maltraité et expédié par avion en Afghanistan où il est continuellement maltraité pendant des mois. Finalement il est libéré et emmené en Albanie où il doit retrouver son chemin pour rentrer en Allemagne. Après sa disparition inexpliquée de plus d’un an, sa famille est retournée au Liban ; personne ne croit le récit de son malheur. Finalement grâce à Wikileaks, des avocats et des journalistes ont pu reconstituer son périple et nommer les agents de la CIA responsables, qui ont été réprimandés verbalement.

M. Al-Masri et sa famille continuent de recevoir des menaces.

Voici maintenant la traduction du commentaire de Craig Murray.

COMMENTAIRE

En fait, l’impact de la lecture par Mark Summers de la déclaration d’El-Masri sur le tribunal a été énorme. Summers a un réel don pour communiquer une force morale et une colère retenue dans le ton de sa voix. Je pense que le témoignage a fait une impression certaine sur la juge Baraitser ; elle a montré des signes non pas de malaise ou d’embarras, mais de réelle détresse émotionnelle alors qu’elle écoutait attentivement. Par la suite, deux témoins différents, chacun situé dans une section du tribunal différente de la mienne, dans des conversations séparées et spontanées avec moi, m’ont dit qu’ils pensaient que le témoignage d’El-Masri avait vraiment touché la juge. Après tout, Vanessa Baraitser est aussi un être humain, et c’est la première fois qu’elle est obligée de confronter ce qui constitue vraiment le fonds de cette affaire.

Qu’est-ce qui constitue une preuve, ou un argument recevable ? Je devrais commencer par dire que le gouvernement des États-Unis s’oppose à la quasi-totalité des arguments de la défense. Ils veulent que les témoins de la défense soient considérés soit comme non experts (d’où la façon grossière dont ils sont attaqués), soit non pertinents. Le juge Baraitser a décidé qu’elle entendra tous les témoignages, et ne décidera que lorsqu’elle rendra son jugement, de ce qui est et n’est pas admissible.

Contre cela, nous avons ensuite sa décision selon laquelle les témoins ne peuvent avoir qu’une demi-heure pour faire leurs déclarations avant le contre-interrogatoire. Cela va à l’encontre de la demande du gouvernement américain de ne pas entendre du tout les déclarations des témoins avant le contre-interrogatoire. Théoriquement, Baraitser a accepté cette demande, mais en pratique elle laisse une demi-heure pour “orienter le témoin”, ce qui permet d’obtenir les faits élémentaires. Baraitser a rejeté les arguments de la défense selon lesquels les déclarations devraient être lues ou expliquées en détail par le témoin au tribunal, pour le bénéfice du public, en disant que les déclarations sont publiées. Mais elles ne sont pas publiées. La Cour ne les publie pas. Elle en donne des copies aux journalistes homologués pour couvrir le procès, mais ces journalistes n’ont aucun intérêt à les publier. Les deux premiers jours, les déclarations des témoins ont été publiées ici, mais pendant plusieurs jours, elles ont cessé. Elles semblent avoir recommencé vendredi, mais cela n’est pas satisfaisant pour le public.

Ensuite, nous avons les éléments de preuve spécifiques qui sont interdits sur objection des États-Unis, comme les détails de la torture d’El-Masri ou du contenu de la vidéo du meurtre collatéral. Je peux comprendre qu’il est vrai que ce tribunal ne juge pas si el-Masri a été torturé – en fait, c’est maintenant établi par la CEDH. Mais il est clair que son cas est pertinent pour la défense de Wikileaks de la publication nécessaire pour prévenir le crime et permettre le processus judiciaire. Le fait est que les États-Unis veulent éviter que l’embarras politique et la publicité médiatique de la torture d’El-Masri et des événements de la vidéo du Meurtre collatéral ne soient détaillés au tribunal. Je ne comprends pas pourquoi un tribunal anglais se conforme à cette censure.

Je suis profondément suspect de la “panne” de la liaison vidéo qui a rendu le témoignage en personne d’El-Masri “techniquement impossible” après les journées entières passées par le gouvernement américain à essayer de bloquer ce témoignage. Je suis également profondément suspect du fait étrange que, contrairement à d’autres témoins ayant des problèmes de vidéo, il n’y a pas eu de reprogrammation. La qualité de la vidéo et du son a été déplorable pour plusieurs témoins de la défense. Dans un monde où nous nous sommes tous habitués aux vidéoconférences ces derniers mois, l’extraordinaire incapacité du tribunal à faire fonctionner une technologie devenue courante montre un niveau d’incompétence auquel il est difficile de croire.

Note : l’accès au débat :

Par ailleurs, l’accès aux débats, par le biais de cette plate-forme, a été refusé par la juge à une quarantaine d’observateurs, pourtant initialement accrédités. Parmi eux, des ONG comme Reporters sans frontières, Amnesty International et des parlementaires européens. Dans un communiqué publié jeudi, Amnesty s’est dite « inquiète » de ce « manque d’accès » à l’audience.

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1 Commentaire

  • Jean François DRON
    Jean François DRON

    Jusqu’à quand va-t-on tolérer le dictat US mais lecomble c’est tout de même que des dirigeantscommuistes trouvent çà à leur goût. eureusement que je ne suis plus que sympathisant car vraiment trop c’est trop. !

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