Libérez Gaza mais libérez le Donbass aussi…

22 MARS 2024

Décidemment je suis en train de me réconcilier avec le féminisme (la rupture était plutôt de l’ordre de la bouderie à l’idée d’un cirque impopulaire et mondain, alors que les forces conservatrices n’attendent que ça et mes objections demeurent plus vives que jamais) … Mais ce que je sais par expérience c’est que quand les femmes se mêlent d’un combat, en assurent de fait “l’intendance” celui-ci comme elles ont tout à y gagner… j’aime bien la lucidité de cette femme sur qui est réellement Poutine, un opportuniste néolibéral que l’Otan et les Etats-Unis ont poussé jusqu’à ce rôle historique y compris dans le monde multipolaire en train de naître… (note et traduction de Danielle Bleitrach histoireetsociete)

PAR NICKY REIDFacebook (en anglais seulementGazouillerSur RedditMessagerie électronique

Image par Ömer Yıldız.

Libérez Gaza et libérez le Donbass aussi !

J’utilise assez souvent cet espace pour déplorer la disparition prématurée du mouvement anti-guerre dans ce pays et pour me vautrer sans vergogne dans les misères de ce qui aurait pu être. Ceux de mes lecteurs qui ont rejoint les rangs des fidèles que je décris affectueusement comme mes enfoirés les plus chers connaissent probablement le sermon par cœur à ce stade. L’Évangile d’Abbie Hoffman…

L’histoire épique d’une coalition hétéroclite de militants noirs, de pédés en colère, de cinglés fumeurs de drogue et de GI mécontents qui se sont réunis dans la rage, l’amour et l’empathie pour mettre fin à la croisade sauvage de Babylone en Indochine avec une campagne sauvage de sabotage déchirant les singes, d’incendies criminels sur les campus et de baise dans les rues. L’espace d’un instant, les gens bizarres l’emportèrent, le lâche de l’empire dans son coin, et tout semblait possible. Mais ensuite, ils ont congédié Nixon, mis la conscription sur la glace et ramené les troupes à la maison, et le mouvement s’est effondré. Ou pas ?

Aussi déprimé et énervé que je puisse l’être, de temps en temps, cette nation, longtemps sédatée par une casserole toxique de télé-réalité et de stupéfiants sur ordonnance puissants, me montre des signes de mécontentement face à la soif de sang de son leader à l’étranger. La vérité est que ce mécontentement est en fait devenu plus acariâtre qu’il ne l’a été depuis des décennies au cours des derniers mois. Mais comme à peu près tout ce qui est bon dans ce pays, il a aussi été tragiquement coupé en deux par des conneries partisanes mesquines.

À gauche, nous avons assisté à une recrudescence sonore d’indignation sans précédent face au soutien de longue date du Parti démocrate à la politique de plus en plus génocidaire d’Israël envers la Palestine occupée. Alors que j’ai longtemps été sage et méchante à propos des gosses hipsters complaisants de la nouvelle gauche, avec leur fétichisme effrayant de Bernie Sanders et leurs distractions politiquement correctes, ces gamins m’ont rendu carrément fière ces derniers temps avec la pure fureur de leur empathie pour le peuple longtemps réduit au silence de la bande de Gaza. Ils ont littéralement mis fin aux défilés, engagé les porcs dans des émeutes à coups de poing et chahuté sans relâche ce vieux bâtard blanc à la Maison Blanche avec des chants de « Genocide Joe ! » Abbie serait fière aussi.

Pendant ce temps, à droite, une marée montante de populistes conservateurs a également tiré un trait sur la frénésie de dépenses bipartisanes des États-Unis en Ukraine. Alors que Volodymyr Zelensky utilise l’invasion illégale de Poutine comme excuse pour trahir ses promesses de paix dans le Donbass et envoie les rangs des conscrits forcés qui ont voté pour lui le faire mourir dans les tranchées, trois républicains sur quatre qui soutiennent cette racaille de Donald Trump soutiennent également la paix en Ukraine. Et le GOP joue le jeu en retardant l’aide au Congrès en échange d’un État policier plus inhumain à la frontière.

Et pourtant, les mêmes jeunes démocrates qui menacent de ruiner la réélection de Genocide Joe à cause du bain de sang à Gaza soutiennent massivement le bain de sang en Ukraine et la foule MAGA furieuse d’avoir été agressée pour raviver la guerre froide semble n’avoir aucun problème à vider leurs portefeuilles pour que Benjamin Netanyahu puisse larguer des bunkers dans les maternités de Rafah. C’est une putain de folie totale et ça m’arrache les cheveux roses par les racines, en criant des deux côtés que c’est exactement la même chose putain de chose.

La Palestine et le Donbass sont tous deux des régions ethniquement diverses mais culturellement distinctes qui se sont retrouvées emballées et remises à des nations dont elles n’avaient jamais demandé à faire partie en premier lieu. La Palestine a longtemps été une parcelle de désert à peine gouvernée à la périphérie de l’Empire ottoman avant que les Britanniques et les Américains ne la volent et ne la proclament arbitrairement patrie pour les migrants européens. De même, le Donbass était une région de la Russie depuis les années 1700 avant que les bolcheviks ne prennent la décision unilatérale d’en faire une partie de leur nouvelle République soviétique ukrainienne en 1922, mais que l’Ukraine l’emporte avec eux lorsqu’ils ont quitté unilatéralement l’Union soviétique en 1992.

Alors que Gaza et le Donbass ont également vu leurs mouvements pour l’autonomie largement détournés par des imbéciles et des monstres, rien de tout cela ne change le fait qu’il s’agit de deux territoires illégalement occupés qui luttent pour l’autonomie populaire et que les crimes du Hamas et de Poutine ne font rien pour sanctifier la barbarie que l’Amérique et ses mandataires lourdement armés ont fait régner sur leurs têtes.

Dans le cas beaucoup moins médiatisé du Donbass, je me sens obligée de rappeler à mes collègues seigneurs de la guerre de la justice sociale que ces gens ont été soumis à une guerre civile cruelle pendant plus de sept ans avant que Poutine ne les utilise comme excuse pour piller Kiev.

Après que le Donbass a défié les ordres de Poutine et voté pour déclarer l’indépendance de l’Ukraine en 2014 pour protester contre le renversement flagrant par l’OTAN d’un président pour lequel il a voté à une écrasante majorité, le nouveau régime fantoche yankee de Kiev a placé ces gens sous un blocus paralysant et a envoyé des extrémistes ethniques ouvertement néo-fascistes pour les terroriser sous une pluie battante de tirs d’artillerie aveugles, tuant plus de 14 000 personnes, pour la plupart d’origine russe.

Volodymyr Zelensky a en fait été élu sur la promesse de mettre fin à ce cauchemar russophobe de l’apartheid et de donner au Donbass un certain degré d’autonomie, mais après avoir été intimidé et acheté par l’OTAN et sa propre armée infiltrée par les nationalistes ethniques, Zelensky est revenu sur sa parole et a réengagé son pays à reprendre par la force le Donbass pour se venger du soutien désespéré de cette région à l’invasion de Poutine.

Comme vous pouvez le voir, la plupart des gens de gauche et de droite ne semblent connaître qu’une moitié de l’histoire, mais la plupart d’entre eux ont également été attirés dans cette ignorance bipolaire par un cirque partisan corrompu qui a transformé même la putain de guerre en un autre théâtre de la guerre culturelle.

Alors que les maniaques de Jésus à droite ont été embobinés par leurs méga-églises évangéliques en leur faisant croire que tout ce qui n’est pas une capitulation totale devant le massacre sioniste est de l’antisémitisme, l’intelligentsia du câble du DNC a transformé Vladimir Poutine d’un opportuniste néolibéral corrompu en chef de file d’une sorte de conspiration crypto-fasciste internationale qui s’est développée pour inclure tout le monde, de Donald Trump à Black Lives Matter.

Les deux parties doivent sortir de cet état de fugue zombie et écouter leur conscience parce que ces veilleuses cassées leur disent clairement la même chose ; c’est mal de priver des régions entières de leur autonomie populaire, qu’elle soit accordée par Dieu ou par Allah, et c’est pire de les massacrer en masse juste pour que les putains de créatures malades du Capitole puissent vendre plus de bombes pour leurs maîtres à Wall Street.

Les deux partis soutiennent massivement ces deux spectacles horribles, et ils retournent ce qui pourrait facilement devenir un mouvement anti-guerre viable contre lui-même tout en jouant ses pacifistes pour des dupes. La seule solution viable à ce jeu d’escroquerie est de jeter ces escrocs dans leur marécage toxique une fois pour toutes et de se joindre les uns aux autres dans les rues pour exiger la fin de cette folie.

Pour l’amour d’Abbie Hoffman, réveillez-vous, chers enfoirés, et mettez fin aux massacres en Europe et au Moyen-Orient. Libérez Gaza et libérez le Donbass aussi !

Nicky Reid est une blogueuse gonzo agoraphobe, anarcho-genderqueer du centre de la Pennsylvanie et rédactrice en chef adjointe d’Attack the System. Vous pouvez la trouver en ligne sur Exile in Happy Valley.