Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Ambroise Croizat et la trahison des classes dirigeantes françaises, par Franck Marsal

La panthéonisation de Missak et Mélinée Manouchian vient percuter une situation nationale et internationale chargée, dans laquelle les préoccupations fondamentales, la vie, la paix, la liberté redeviennent des questions quotidienne prioritaires.

La figure d’Ambroise Croizat est également connue, comme un exemple du courage, de la droiture, de l’intelligence et du sens de l’intérêt général, d’une génération de travailleurs qui sauva la France de la catastrophe et la remis sur les rails du développement et de la modernisation.

Pour comprendre les fondements de la vie politique française, telle qu’elle s’est élaborée depuis les grandes secousses de la seconde guerre mondiale et a évolué depuis, il me semble intéressant de relire un des derniers discours prononcé à l’assemblée nationale par Ambroise Croizat. Ce discours permet de retrouver le fil, fil de continuité entre les années 30 et les années actuelles, le combat toujours en cours, entre les classes dirigeantes réactionnaires et l’énergie progressiste du prolétariat français, fil à certains égards rompu parce que peut-être, le combat semblait gagné, ou en voie de l’être et que l’on baissa la garde, collectivement, malgré les avertissements que nous lance ici Croizat, en 1949. Il permet de lire la place singulière de la France en Europe et de s’interroger sur l’existence actuelle maintenue ou pas de cette place particulière. Il permet de comprendre les racines de ce que les bourgeoisies des différents pays et les sociaux-démocrates à leur suite, nomment “la construction européenne”.

Enterrement d’Ambroise Croizat

Que nous dit Ambroise Croizat ?

D’abord, il nous dit qu’entre la politique suivie par le gouvernement provisoire et les gouvernements de 46 – 47 auxquels participèrent les communistes, et celle suivie par le gouvernement français en 1949, un tournant radical a été pris. En particulier, nous dit Ambroise Croizat, la politique à l’égard de l’Allemagne. Entre 1947 et 1949, on passe ainsi d’une politique dans laquelle la Rhur doit être détachée de l’Allemagne, gérée internationalement, limiter la production d’acier allemande et donner la priorité dans la répartition du charbon aux pays victimes de l’agression nazie, à la politique exactement inverse : abandon par la France du droit aux réparations, renoncement au démantèlement des usines d’armement allemande, retour des anciens dirigeants de ces usines allemandes, des parrains de l’hitlérisme à la direction de ces usines, et au final, la priorité donnée au rétablissement industriel de l’Allemagne, au détriment de l’industrie française.

Pourquoi ce retournement ? Et bien, nous dit Croizat, c’est que derrière ce retournement ni figure pas un quelconque projet “européen”. Pas du tout. Ce qui est derrière, c’est la “création et le développement d’un puissant cartel sous la direction exclusive des capitalistes américains”. Ce projet sous-jacent n’est pas secret. Ainsi, nous dit Croizat, “le 5 janvier 1949, les industriels français, allemands et luxembourgeois se sont réunis secrètement à Dusseldörf” pour décider “le principe de la reconstitution du cartel de l’acier occidental”. “Les allemands n’ont d’ailleurs nullement caché que ce projet était appuyé par les Etats-Unis” ni que les “banquiers américains seront les grands pourvoyeurs de capitaux”. Enfin, nous dit Croizat, la haute bourgeoisie française, celle des grands industriels du comité des forges, qui avait déjà porté le projet de collaboration de la France avec l’Allemagne nazie, est partie prenante de ce projet : “S’il y eut parfois du tirage de la part des industriels de la sidérurgie française, belge, et anglaise, ce fut purement spectaculaire, car il ne s’agissaitn avant toute chose, que de marchandages.

En 1951, la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA) est crée et donne le cadre politique de ce cartel, celui de l’effacement des résultats de la seconde guerre mondiale, l’absolution de l’Allemagne, sa reconstruction comme puissance industrielle dominante en Europe mais entièrement soumise aux capitaux états-uniens. Cette CECA est l’ancêtre politique et institutionnel de notre UE actuelle. Elle est basée sur les mêmes principes institutionnels, qui sont eux-mêmes directement issus de la constitution des USA :

  • La Haute Autorité de la CECA est l’organe exécutif, formé de 9 commissaires. Elle deviendra plus tard la Commission. Elle est le centre d’action et correspond au gouvernement des USA.
  • Le Conseil Spécial des Ministres, composé d’un nombre fixe de représentant de chaque état, deviendra le Conseil de l’Union Européenne. Sa composition et ses prérogatives rappellent celles du Sénat Etats-Uniens, si ce n’est que ses membres ne sont pas élus mais choisis par les différents états (ce sont les ministres). Il faut néanmoins remarquer que jusqu’en 1913, les membres du Sénat US ne sont pas non plus élus par les citoyens, mais par les législatures de chaque état.
  • Une Assemblée Commune, qui deviendra l’actuel “parlement de l’UE”, et qui correspond dans sa forme à la chambre des représentants US
  • Une cour de justice, chargée de juger de l’application du traité, comme la cour suprême juge l’application de la constitution US.

Dans le système général de la politique européenne, l”indépendance et la “souveraineté” de chaque pays est officiellement préservée, en tous cas, dans un premier temps. Mais chaque pays a une place qui lui est assignée. Et des moyens de contrôle, de guidage, discrets mais puissants sont en place à différents niveaux, dont le principal repose, comme le souligne Ambroise Croizat sur l’inféodation volontaire de la haute bourgeoisie, d’une partie des dirigeants politiques (qui seront soigneusement sélectionnés,) des médias, de la sphère universitaire et intellectuelle. Il s’appuie également sur l’ouverture des marchés et des investissements aux capitaux états-uniens, qui vont peu à peu devenir indispensables pour nombre de grandes entreprises.

La mise en place très progressive du cadre européen va être le levier essentiel de réduction de la souveraineté. Celle-ci apparaît ainsi comme une décision volontaire des peuples européens dans la fameuse “construction” et non comme un déclassement progressif des états orchestré depuis Washington. Il facilitera la dérégulation des marchés et la levée des dernières barrières à la pénétration des capitaux étrangers (privatisations, dérégulations), tout en assurant les conditions d’exploitation du travail (réduction du poids des syndicats, suppression progressive du droit du travail, attaques des partis communistes) souhaités par les investisseurs.

Dans cette organisation de l’Europe (à l’époque occidentale) au service des cartels et des capitaux US, sur la base d’une projection de la gouvernance états-unienne, l’Allemagne a une place toute particulière : état “reconstruit” par les USA, encore divisée jusqu’en 1989, sans réelle puissance militaire,la RFA est particulièrement sous contrôle et donc un outil puissant au service des intérêts états-uniens. Et lors de la mise en place de cette Europe sous tutelle, la remise au premier rang des industriels et des magnats de l’hitlérisme et de la collaboration est un levier facile et bien rodé. Les réseaux sont là, comme pour la mafia en Italie. En France, particulièrement, le haut patronat qui s’était déjà engagé dans la collaboration avec Hitler pour éliminer le PCF et la CGT et se remettre de la frayeur que lui avait provoqué le Front Populaire, sera ravi de faire de même avec la CIA et les USA. A ce titre, Ambroise Croizat nous donne quelques détails intéressants : le haut patronat français via le président du CNPF (l’ancêtre de l’actuel MEDEF), M. Georges Villiers préside à compter de juin 1949 une “Association française pour les relations économiques avec l’Allemagne”.

Ce n’est pas parmi les classes dirigeantes, notamment chez le gros patronat, qu’on peut trouver un sens quelconque de l’intérêt national, commente Ambroise Croizat, ces derniers ne craignent pas de tendre la main à leurs collègues allemands, impunis par la volonté des dirigeants anglo-américains. Cette position du gros patronat français ne prendra pas au dépourvu les honnêtes gens de notre pays, car on sait que, dans ces milieux, on est extrêmement riche en collaborateurs des nazis. Certains, et non des moindres, ont laissé des souvenirs. Les Français se rappellent la réunion de ces trente-cinq grands magnats de la finance et de l’industrie lourde française qui, les 16 et 17 janvier 1941, ont inauguré au Royal Monceau et à l’hôtel Majestic, la collaboration économique avec Hitler. Parmi eux, il y avait M. Pierre Ricard actuel vice-président du conseil national du patronat français, M. Pierre Meunier, bras droit du comité des forges et l’un des membres les plus influents du C. N. P. F., M. Marcel Dambon, directeur général de l’Alsthom. J’en passe, et des meilleurs. Il y avait aussi M. René Norguet, à qui le C. N. P. F. a confié la présidence de la commission de la productivité formule exportée des U. S. A. — dans le but d’accélérer et de généraliser les cadences mortelles au sein de nos entreprises. Il y avait encore M. François Lehideux, rex-administrateur des usines Renault, resté impuni, et qu’on vient de voir réapparaître, à la plus grande indignation des patriotes, à la direction de la firme américaine Ford-Poissy.”

Pour Ambroise Croizat, ce qui se met en place, c’est une véritable trahison de l’intérêt national, qui “condamne la France dans un état d’infériorité absolue” et constitue une “humiliation à l’égard de ceux qui, durant l’occupation, ont combattu et fait le sacrifice de leur vie pour la libération du territoire”,une répétition des “erreurs criminelles commises depuis 1918 jusqu’en 1939. “

Cette politique a dominé l’Europe depuis 1950 environ, dans le cadre des trois institutions clés mises en place par les USA : la République Fédérale Allemande, l’UE et l’OTAN. Elles ont instituée une hiérarchie au sein d’institutions et de traités répétés ‘égaux”. De même que l’OTAN n’existe pas sans les USA qui la dirigent, l’UE a été crée avec en tête sa domination par l’Allemagne. On a souvent tenté de faire croire aux travailleurs de France que, si l’Allemagne dominait économiquement l’Europe, c’est qu’elle était mieux gérée, moins gréviste, plus efficace. Le discours de Croizat nous montre une autre réalité : la domination économique et industrielle de l’Allemagne est un principe fondateur de l’UE, dans le cadre donné par les USA, qui en furent les parrains. Derrière l’Allemagne et à travers elle, ce sont les capitaux anglo-américains qui dominent. Pour y parvenir, non seulement on a recyclé les magnats allemands qui avaient porté Hitler au pouvoir, mais on s’est appuyé également sur les magnats français qui s’était engagés dans la collaboration.

Il est important de revenir à ces sources et à cette compréhension des équilibres, pour deux raisons :

  • D’abord, pour éviter de s’engluer dans la transformation de l’UE. Non, l’UE n’est pas transformable et il faut tout reprendre à la base.
  • Ensuite parce que, avec la remise en cause de l’hégémonie états-unienne sur le monde, c’est l’ensemble de cette architecture qui va être prochainement remise en question.

Cette politique va être menée avec constance durant plusieurs décennies, en tirant parti de toutes les opportunités offertes par l’histoire avec opiniâtreté. Le bilan que l’on peut en tracé, quelques 75 ans plus tard donne entièrement raison à l’analyse d’Ambroise Croizat :

  • Fin 2022, les non-résidents détenaient 40,3% des actions des sociétés françaises du CAC 40. Ce pourcentage a augmenté particulièrement durant la décennies 1990 et 37 % de l’ensemble des actions des sociétés cotées. Ce taux s’élève à 52% pour l’Allemagne, et à 85 % pour les Pays Bas.
  • La France a touché plusieurs fois le “plafond de verre” qui lui a été fixé par le capital états-unien. Lorsque des entreprises françaises ont réussi à prendre des positions internationales trop avantageuses, elles ont subi rachats, représailles ou coup tordu. L’exemple le plus récent a été le rachat par General Electric de l’activité de turbine à gaz d’Alstom (qui fait passer sous contrôle états-unien les stratégiques turbines Arabelle nécessaires aux centrales nucléaires). Citons également les gazoducs NordStream 1 et 2, qui permettait de garantir à l’industrie européenne une énergie à pris très compétitif, et que les USA, après avoir tenté toutes les procédures “légales” possibles pour les arrêter ont, semble t-il fait exploser.
  • La mainmise états-unienne sur la sélection du personnel politique dominant et l’intervention dans les campagnes électorale, sur les médias est fréquente et garanti – en France comme dans la plupart des pays d’Europe – des gouvernements “atlantistes”.
  • Les traités européens garantissent le cadre législatif et réglementaire propice à l’exploitation la plus large et la plus approfondie : droit du travail a minima et liberté totale de circulation des capitaux.
  • etc.

Le résultat de cette politique est très clair : les USA ont obtenu, en moyenne de longue période, une croissance supérieure à la moyenne européenne et, en Europe, l’Allemagne, jusqu’à la récente crise ukrainienne, une croissance supérieure à celle de la France. L’ensemble des organisations ouvrières ont été affaiblies et le modèle politique de la plupart des pays européens évolue graduellement mais sûrement vers le modèle américain. La aussi, l’analyse d’Ambroise Croizat est parfaitement juste : la politique de soumission aux USA (et à l’UE / OTAN aujourd’hui) est contraire à l’intérêt national, c’est à dire à l’intérêt de la masse du peuple. Le développement actuel de la crise du capitalisme, la crispation de l’impérialisme US sur son hégémonie et le développement de la guerre en Ukraine rendent le coût de cette domination encore plus élevé pour les classes populaires et pour le développement et la modernisation du pays.

En s’appuyant sur leur histoire et leurs acquis, les travailleurs français et leurs organisations, le PCF, la CGT et l’ensemble du mouvement populaire, peuvent construire une nouvelle trajectoire de modernisation, de développement et d’égalité sociale. Ils ont même énormément de choses à apporter à la construction d’une société nouvelle, et ce, comme toujours, bien au-delà de nos frontières. Tout l’inverse de ce qu’ont fait depuis 75 ans les classes dirigeantes de la haute bourgeoisie françaises, qui n’ont cessé de s’appuyer sur les réactionnaires étrangers pour détruire l’embryon d’une société nouvelle élaboré dans la Résistance et à la Libération, qui non seulement n’ont jamais défendu l’originalité et la richesse des acquis français, mais les ont constamment dénoncés et méprisés. Pourtant, il y avait tant de belles choses à porter. Citons par exemple la conception française de la patrie et de la nation, non ethnique, mais à la fois ouverte et unie, basée non sur le passé mythifié mais sur un destin commun, et sur la coopération dans le travail. Quelle avancée ce serait de faire partager cette conception non seulement en “Europe”, mais aussi tout autour de la Méditerranée et au delà. Citons également la sécurité sociale à la française, telle que bâtie justement par Ambroise Croizat ou nos services publics nationalisés, à l’image de l’EdF de Marcel Paul. Ce n’est pas une question du passé. A la faveur des changements qui s’accélèrent dans le monde, ce sont les combats d’aujourd’hui et de demain. A partir de ces expériences, partagées et discutées avec l’ensemble des classes populaires, nous pouvons poser les bases d’une transition vers une société socialiste, des bases pour l’avenir. Il est même urgent, alors que partout l’extrême-droite monte en Europe, de rouvrir cette voie de la transition vers le socialisme. Ce n’est pas avec simplement des arguments moraux que les nazis ont été vaincus, mais avec un programme de transformation sociale profonde (en France le programme du CNR comme première étape) et avec l’ambition concrète de poser les jalons d’une société socialiste, d’une société débarrassée de la misère et de l’exploitation. C’est ce fil là qu’il faut renouer et réactualisé, dans une société plus développée, donc dans laquelle la perspective socialiste est encore plus à portée de main et encore plus nécessaire. (Note de Franck Marsal, pour Histoire et Société)

Discours d’Ambroise Croisat à l’Assemblée Nationale (fin 1949)

M.Ambroise Croizat. Mesdames, messieurs, avant de commencer mon exposé, je me permettrai de présenter une observation très brève au sujet de l’intervention de M. Philip. Je considère que la position du parti communiste à l’égard de la constitution et du rôle de l’Assemblée européenne demeure juste car, en réalité, cette assemblée européenne constitue un instrument, non pas destiné à consolider la paix, mais bien au contraire ayant pour objet de parfaire la préparation à la guerre. Il serait très intéressant, monsieur Philip, de savoir quelles indemnités sont allouées aux délégués à l’assemblée européenne , c’est-à-dire à des députés qui reçoivent déjà à ce titre un traitement.

M. André Philip. Je puis vous répondre tout de suite- Pendant la session l’indemnité perçue par les délégués français est de l’ordre de 2.500 francs par jour. Cette indemnité ne couvre pas les dépenses effectives et elle est inférieure de moitié ou des trois quarts à celle que reçoivent les membres des autres délégations. (

M. Jacques Duclos. Les délégués français touchent 2.500 francs par jour en plus de leur indemnité parlementaire, et vous refusez 3.000 francs par mois aux ouvriers !

M. Roland de Moustier. Que coûtent la la voiture de M. Thorez, son chauffeur et son valet de pied ?

M. Ambroise Croizat. J’adresserai à M. Philip cette autre observation : Il me paraît particulièrement grave que dans notre Assemblée, on puisse laisser dire qu‘une économie correspondante pourrait être envisagée par la suppression pure et simple du groupe communiste.

M. André Philip. J’ai dit que nous respections trop la liberté de tous pour faire une telle proposition.

M. Ambroise Croizat. Monsieur André Philip, vous êtes de ceux qui, dans la Chambre de 1936 à 1939, ont été solidaires de cette politique qui a coûté très cher à notre pays. Vous avez été solidaire; aussi de la mesure de déchéance qui a frappé l’ensemble du groupe communiste dont la plupart des membres ont été emprisonnés…

M. Lucien Coffîn. Et vous, vous avez été solidaire du traité germano-russe.

M. Eugène Thomas. Solidaire pour trahir

M. Ambroise Croizat. …et cela, au mépris de la Constitution républicaine. Mais ne vous faites pas de souci en ce qui concerne le groupe communiste. Si le groupe communiste ne vous plaît pas, nous considérons, nous, que nous sommes ici de par la volonté populaire. Et nous pourrions établir la différence entre la plupart d’entre nous avec ce que vous représentez dans la ville de Lyon qui ne compte même pas un seul conseiller ; municipal socialiste.

M. Lucien Coffin. Vous êtes moins menacé ici que vous ne le seriez en Pologne, Allez donc le demander à Gomulka !

M. Henri Teitgen. Allez donc respecter la volonté populaire dans les pays satellites]

M. Ambroise Croizat. Nous sommes en France et, si vous le voulez bien, nous allons parler de la France.

M. Jean Catrice. C’est la première fois que cela vous arrive.

M. Ambroise Croizat. J’aborde mon exposé. Lors du débat qui eut lieu le 21 juin 1948 sur la ratification dès accords de Londres, un de nos collègues qui siège à la droite de cette Assemblée, M. le marquis de Moustier, déclarait en substance : « Beaucoup d’entre vous, je le sais, sont surpris de la soudaine précipitation, avec laquelle le Gouvernement leur demande de souscrire à une politique à l’égard de l’Allemagne qui vous paraît si différente de celle qui avait été jusqu’alors soutenue avec tant de force à cette tribune même par M. le ministre des affaires étrangères ». Sachez que cette surprise a été ressentie par un très grand nombre des membres de votre commission des affaires étrangères. Ces protestations n’ont d’ailleurs jamais cessé de se manifester d’une façon ou d’une autre depuis bientôt trois ans. Le ministre des affaires étrangères soutient en effet qu’il est seul qualifié pour poursuivre une négociation internationale et que le contrôle parlementaire ne doit s’exercer que pour approuver ou rejeter les accords souscrits par le Gouvernement.

De quoi s’agissait-M, en réalité, dans l’intervention de M. le marquis de Moustier ? Il s’agissait, entre autres, de notre politique à l’égard de l’Allemagne. Il rappelait, en effet, qu’à la veille de la conférence de Moscou, et dans un mémorandum en date du 1er février 1947, le gouvernement de l’époque et son ministre des affaires étrangères, M. Georges Bidault, préconisaient une Ruhr détachée de l’Allemagne, instituée en territoire international, et administrée en commun par tous les alliés de la guerre, grands et petits. Poursuivant son intervention, M. le marquis de Moustier ajoutait : « Vous vouliez limiter la production des usines sidérurgiques, mécaniques et chimiques, développer la production du charbon et en assurer la répartition par priorité aux pays victimes de l’agression allemande , confier la gestion directe des mines et industries de ce grand bassin industriel à des organismes interalliés, .»transférer la propriété des mines aux nations alliées, exercer un pouvoir de direction sur l’ensemble des houillères, interdire aux ressortissants allemands la direction des principales sections ou groupes d’industries. « Pour l’acier, ce facteur si important ’de la puissance industrielle allemande, vous demandiez que la production en soit réduite, et que le fer de Lorraine n’allât plus en Allemagne, mais que ce fût, au contraire, le coke de la Ruhr qui vînt alimenter nos hauts fourneaux de Lorraine, que nous avions, à cette époque, tant de peine à rallumer. »

C’est ce que notre groupe n’avait cessé de préconiser. C’est en raison de l’abandon de ces principes et de ces demandes, conformes à notre sécurité et à la paix, que nous avons refusé de ratifier ces accords. La clairvoyance de notre parti communiste sur les véritables desseins de votre politique est la seule explication à donner à votre anticommunisme forcené. Nous ignorons, pour ce qui nous concerne, si M. le marquis de Moustier est revenu de sa naïveté et si, aujourd‘hui, il s’apprête à dénoncer, comme il con-
vient, ces graves abandons de nos gouvernants. En réalité, les accords de Londres ont
marqué la fin d’une politique d’indépendance française. On a pris des initiatives sur le plan international sans se soucier un seul instant d’en référer au préalable aux représentants du peuple. La pratique courante de nos ministres des affaires étrangères, c’est de placer le Parlement et le pays devant le fait accompli, ou de démentir des faits qui, quelques jours après, s’avèrent exacts» Rappelons — ceci est nécessaire pour l’histoire — que M. le président du conseil lui-même, à l’occasion de la conférence de Moscou, en mars et avril 1947, a négocié avec MM. Revin et Marshall l’alignement de la France sur la politique
américaine. C’est de cette époque que datent le renoncement et la défaillance coupable de notre politique étrangère. Vous avez tout abandonné pour accepter purement et simplement les prétentions et exigences des hommes d’affaires américains. La France, depuis cette époque, n’est plus maîtresse de ses décisions. Son attitude et sa politique sont fonction des intérêts et des exigences d’un Etat étranger. L’indépendance nationale, économique et politique de notre pays, comme sa sécurité, est définitivement sacrifiée au bénéfice des trusts internationaux. Voyons maintenant un des aspects les
plus graves de votre politique de renoncement systématique et de – capitulation : l’avenir du bassin sidérurgique de la Ruhr qui, de tout temps, a constitué le véritable arsenal de guerre de l’impérialisme allemand, celui qui a nourri les trois guerres d’agression que la France a subies en l’espace de 79 ans.

Vous avez consenti à abandonner définitivement le droit aux réparations, le démantèlement des usines de guerre.Et vous vous êtes associé depuis longtemps à cette politique qui nous amène aujourd’hui à faire participer la France au relèvement de la puissance industrielle de l’Allemagne occidentale. Je le prouverai par la suite. Les anciens dirigeants des mines et usines sidérurgiques de la Ruhr, qui ont été à l’origine de la naissance et du développement de l’hitlérisme, sont de nouveau à la tête de leurs entreprises. Ils concourent maintenant étroitement à la création et au développement d ‘ un puissant cartel sous la direction exclusive des capitalistes américains. Mais si les Krupp et les Thyssen sont en droit de se réjouir de cette sollicitude des hommes d’État yankee, par contre, pour ce qui est de l’industrie lourde française, nous risquons de payer très cher ce concours que nous apportons au rétablissement du potentiel industriel de l’Allemagne. En effet, dès l’année 1948, le patronat de la sidérurgie française constatait, en même temps que l’augmentation de la production. Une saturation du marché intérieur, d’où la recherche de débouchés extérieurs. L’année 1949 a vu les premiers symptômes du fléchissement de la production en raison aussi d’une certaine saturation du marché mondial. C’est en présence d’une crise de surproduction qui n‘en est qu’à son début et aux conséquences inévitables sur les prix des produits sidérurgiques que les maîtres de forges occidentaux envisagent de reconstituer le cartel international de l’acier. La création de cet organisme tend à ce but : limiter par des accords la production, pour maintenir les prix et les profits, au prix même de la guerre. Car la conclusion sera la guerre.

Sans être dans le secret des délibérations du comité des forges de France, la presse nous donne cependant, à cet égard, de précieuses informations qu’il n’est pas inutile de rappeler. C’est ainsi que le New York Times a informé en son temps que les industriels allemands, français et luxembourgeois se sont réunis secrètement à Dusseldorf le 5 janvier 1949. A cette mystérieuse conférence aurait été décidé le principe de la reconstitution du cartel de l’acier occidental. Naturellement, les représentants anglo-américains étaient présents, car rien ne se fait en Allemagne occidentale sans le contrôle et la participation, notamment des Américains. Les Allemands n’ont d’ailleurs nullement caché que le projet était appuyé par les Etats-Unis, et l’on ne dissimule aucunement que les banquiers américains seront les grands pourvoyeurs de capitaux. S’il y eut parfois du tirage de la part des industriels de la sidérurgie française, belge et anglaise, ce fut purement spectaculaire, car il ne s’agissait, avant toute chose, que de marchandages. Une synthèse a été trouvée des ambitions des maîtres de forges occidentaux et des magnats de la Ruhr, synthèse qui s’adapte aux buts de l’expansionnisme américain en Europe. A ce sujet, il est particulièrement intéressant de rappeler que cette synthèse a recueilli l’accord de la social-démocratie occidentale, qui voyait avec u n certain plaisir la réalisation* d‘un vaste combinat sidérurgique continental. En effet, dès le 25 avril 1948, M. Léon Blum présentait à la conférence des partis socialistes d’Europe un projet de résolution dont j’extrais ce passage : « Il est de la plus haute importance pour l’avenir des Etats-Unis d’Europe… » —bien entendu, clans l’esprit de M. Blum, sans l’U. R. S. S. et les démocraties populaires — « … que l’industrie de la Ruhr et de la Rhénanie soient intégrées dans un vaste combinat des industries charbonnières, sidérurgiques et chimiques de tout le bassin minier de la Belgique, de la Sarre, de la Lorraine et du Nord de la France. ». Les vœux de M. Léon Blum se réalisent, puisque le cartel de l’acier deviendrait, en réalité, l‘armature du combinat envisagé sous le signe évident de la puissance des trusts. Je fais observer à M. Le Bail et à M. André Philip que c’est s’illusionner que de, croire possible, dans les circonstances présentes, selon leur argumentation, une Europe socialiste. Présentement, le problème se pose de la reconstitution du cartel international de l’acier, du renforcement de la puissance des cartels eux-mêmes, c’est-à-dire le renforcement de la puissance des trusts dans cette région de l’industrie lourde. Précisons enfin que les pourparlers entre les maîtres de forges occidentaux se sont déroulés sous l’égide de « l’Arbeid luxembourgeoise », trust qui servît d’intermédiaire, entre 1914 et 1919, pour acheminer le minerai de fer lorrain pour le compte des marchands de canons de la Ruhr.

Qu’y a-t-il derrière ces parlotes ? Les capitalistes américains, qui ont déjà investi des capitaux importants dans la Ruhr, sont en train de faire main basse sur la majorité des actions des entreprises allemandes. Sous le couvert de ce cartel de l’acier, les monopoles yankees songent à contrôler l’industrie lourde du Nord de la France, du Bénélux et de l’ensemble de l’Europe marshallisée, pour mieux coordonner leurs plans de guerre antisoviétiques, d‘où l’appât qu’il font offrir par leur homme de paille Adenauer aux maîtres de forges français, leur laissant espérer l’achat jusqu‘à 40 p. 100 des actions des usines allemandes. Où prendront-ils cette énorme masse de dollars pour acheter ces 40 p. 100 d’actions ? Poser la question, c’est y répondre aussitôt. Les banquiers d’outre-Atlantique sont prêts à consentir ces avances moyennant la garantie que cela leur ouvre la perspective d’un contrôle exclusif sur les usines et la production de l’industrie lourde française. Les banquiers anglais, qui ne veulent pas être pris au dépourvu, ont annoncé au monde qu’ils sont disposés, pour ce qui les concerne, à consentir des crédits importants aux banques allemandes. C’est la course infernale des banques et de la grosse industrie pour truster, sous l’égide anglo-américaine, l’ensemble de l’industrie sidérurgique de la zone occidentale. En France même, certaines grosses entreprises sont d’ores et déjà placées sous contrôle américain, notamment l’Alsthom de Belfort, les Constructions mécaniques de Graffensiaden, de Mulhouse, les lampes Fotos de Lyon, Mathis à Strasbourg. Ce que redoutait M. le marquis de Moustier dans son intervention de juin 1948, que ne craignait pas de démentir à l’époque notre ministre des affaires étrangères, est aujourd’hui accompli. Nous avons abandonné définitivement nos droits aux réparations. Mais le gouvernement français, fidèle aux engagements qu’il a contractés dans le cadre  «des accords de Londres et des plans de guerre, renouvelle le scandale qu’on a connu après la guerre de 1914-1918, celui de l’acheminement de notre minerai de fer e{ de notre bauxite en direction de l’Allemagne, permettant à cette dernière d’accroître sa production, de dépasser la nôtre et de redevenir l’arsenal destiné à la guerre d’agression que l’on prépare. Quand M. Robert Schuman fait des discours à Montigny-les-Metz, il oublie, comme par hasard, d entretenir les Lorrains de ce fait particulièrement grave et plein de conséquences pour l’avenir de notre pays. Notre gouvernement, qui s’emploie depuis longtemps à dissimuler les dangers réels des engagements qu’il contracte, qui cache la vérité au pays, omet toujours, comme par hasard, de faire figurer dans ses statistiques le tonnage des exportations de minerai français en direction de la Ruhr. Dans le but de pallier cette défaillance, je me permets de citer quelques chiffres qui résultent de certaines constatations. C’est ainsi que, pour le seul mois d’août 1949, nous avons exporté en direction de la Sarre 304.329 tonnes de minerai, de la Belgique et du Luxembourg 512.656 tonnes, des Pays-Bas 13.755 tonnes et de la Grande-Bretagne 28.300 tonnes, soit au total 919.540 tonnes. Il n’est pas possible de connaître exactement le volume des exportations en direction de la Ruhr. Je me borne à indiquer que, d’après des recoupements, celui-ci serait nettement supérieur à 300.000 tonnes par mois. De tout temps, même pendant la guerre, on s’est employé à dissimuler la vérité sur l’aide apportée par la France à l’Allemagne. Il n’est donc pas exagéré de dire et de proclamer que cette politique, qui consiste non seulement à renoncer aux réparations, mais à participer d’une manière directe à la reconstitution du potentiel industriel de l’Allemagne, est humiliante pour notre pays et que les Français et les Françaises ont raison de manifester de légitimés inquiétudes sur les conséquences qui pourraient découler du prolongement d’une telle politique.

Sur un autre plan, il est bon de préciser comment s’organisent les relations entre les industriels français et les industriels allemands. Le Journal officiel du 3 juin 1949 contient, dans sa partie « Annonces », la déclaration d’une association française pour les relations économiques avec l’Allemagne, dont le but est, dit-on de nouer des relations économiques entre l’Union française et l’Allemagne. Ainsi, on ne se borne pas seulement à favoriser l’industrie allemande, que contrôlent les financiers américains, au détriment de l’industrie française sur notre propre marché intérieur, mais on se prépare à la favoriser sur les marchés des territoires d’outre-mer, déjà fortement encombrés par les affairistes yankee. Un certain M. Marcel Cusenier serait un des fondateurs de cette association. M. Cusenier est le président en personne de la chambre de commerce de Paris. On trouve également, à la tête de cette association, M. Pierre Jourdan, conseiller honoraire de la cour de Paris, administrateur de Péchelbronn et M. Roger Millot, qui s’intitule président du comité des classes moyennes. Le président de cette association d’hommes d’affaires qui ont pour objectif de favoriser le commerce allemand est un homme très connu : M. Georges Villiers, président du conseil national du patronat français. Son patriotisme a des limites et il est fonction des profits qu’il peut en soutirer. Il ne fait d’ailleurs, en la circonstance, qu’exécuter ce qui découle normalement de la politique gouvernementale. Et M. Georges Villiers, président du conseil national du patronat français, a exprimé son vœu ardent en juin dernier, à Montreux : « Au nom du patronat français, nous sommes prêts à tendre la main au patronat allemand parce que nous savons que les relations économiques sont à la base des relations politiques et de l’unité à venir. » Une telle déclaration ne nous étonne pas. Ce n’est pas parmi tes classes dirigeantes, notamment chez le gros patronat, qu’on peut trouver un sens quelconque de l’intérêt national. C’est à la fois le profit et l’intérêt de classe qui dominent chez eux et ces derniers ne craignent pas de tendre une main fraternelle à leurs collègues allemands, impunis par la volonté des dirigeants anglo-américains et français. Cette position du gros patronat français ne prendra pas au dépourvu les honnêtes gens de notre pays, car on sait que, dans ces milieux, on est extrêmement riche en collaborateurs des nazis. Certains, et non des moindres, ont laissé des souvenirs. Les Français se rappellent la réunion de ces trente-cinq grands magnats de la finance et de l’industrie lourde française qui, les 16 et 17 janvier 1941, ont inauguré au Royal Monceau et à l’hôtel Majestic, la collaboration économique avec Hitler. Parmi eux, il y avait M. Pierre Ricard actuel vice-président du conseil national du patronat français, M. Pierre Meunier, bras droit du comité des forges et l’un des membres les plus influents du C. N. P. F., M. Marcel Dambon, directeur général de l’Alsthom. J’en passe, et des meilleurs. Il y avait aussi M. René Norguet, à qui le C. N. P. F. a confié la présidence de la commission de la productivité formule exportée des U. S. A. — dans le but d’accélérer et de généraliser les cadences mortelles au sein de nos entreprises. Il y avait encore M. François Lehideux, rex-administrateur des usines Renault, resté impuni, et qu’on vient de voir réapparaître, à la plus grande indignation des patriotes, à la direction de la firme américaine Ford-Poissy. Le seul qui ait payé, parmi ces trente-cinq collaborateurs, c’est Pierre Pucheu,l’exécuteur du comité des forges, qui envoya au peloton d’exécution les vingt-sept otages de Châteaubriant, choisis spécialement parmi les élites de la classe ouvrière.

En un mot, par le truchement du sinistre Pucheu, c’est la vengeance du patronat et du comité des forges qui s’exerçait. Pour tous ces hommes d’affaires, la trahison est devenue la fleur de lys de leur blason. Hier contre l’Union soviétique avec Hitler, l’homme des trusts allemands, aujourd’hui contre l’Union soviétique avec Truman, l’homme des trusts américains en vérité, il n’y a rien de changé. Des événements se sont produits. La France a subi une terrible épreuve et elle a payé cher, de 1939 à 1944, les abandons et les défaillances des gouvernants. Mais on recommence comme si rien ne s’était passé, car, en haut lieu, on a su faire passer l’intérêt de classe avant l’intérêt national.

Pour montrer la servilité de nos classes dirigeantes, de ces élites qui ont trahi en 1939-1940, rappelons de quelle façon et avec quel mépris un nazi notoire, nommé Grôte, les considérait. En janvier 1941, il proclamait à qui voulait l’entendre : « Je me charge de diriger la France avec une seule dactylo, grâce à la collaboration des industriels français ».
Cette collaboration leur a rapporté des milliards de francs. Ces traîtres à la patrie au peuple, à la nation, qui portaient des toasts à l’Europe nouvelle en 1941, nous les revoyons de nouveau, et ce sont les partisans les plus ardents de ces pactes de Bruxelles et de l’Atlantique qui coûtent des centaines.de milliards aux contribuables français, en attendant de coûter de nombreuses vies humaines, comme au Viet Nam. Ils veulent, comme nos gouvernants, faire des Français les frères d’armes des SS. Hitlériens, assassins d’Oradour, contre les vainqueurs de Stalingrad.

En réalité, la politique que vous pratiquez, sans contrôle du Parlement, sans vous soucier de la vie des Français et des Françaises, nous conduit au développement de la puissance des trusts, à la reconstruction du potentiel de guerre de l’Allemagne impérialiste, tout cela dans le seul but d’entraîner de nouveau notre pays vers la guerre et vers la catastrophe. Quand on a signé le pacte de l’Atlantique et tout ce qui s’y rattache, on devrait au moins avoir le courage de dire la vérité sur les conséquences réelles de ces actes. Il ne s’agit pas de défense contre des agresseurs éventuels qui n’existent pas, mais d’une guerre d’agression véritable.

Vous sacrifiez délibérément la reconstruction de notre pays et son rééquipement. Par votre politique, vous avez porté de graves coups à l’existence de certaines de nos industries. Après celles des tracteurs, de l’aviation, de la construction électrique et de bien d’autres parmi les plus importantes de notre pays, voici que ,tout tend à placer notre industrie lourde ‘dans un état d’infériorité absolue et sous le contrôle exclusif des trusts étrangers, pour le seul bénéfice de l’accroissement de la puissance industrielle de l’Allemagne occidentale. Vous l’avez d’ores et déjà placée en état ‘d’infériorité par rapport à celle de la Ruhr. Nos usines vont être contraintes de réduire leur activité; le chômage risque de faire, avant peu, son apparition. De cela, monsieur Robert Schuman, vous vous êtes bien gardé de parler à vos auditeurs de Montigny-les-Metz. Il n‘est guère de différence entre la situation actuelle et celle de 1926, lorsque, par exemple, fut créé le cartel européen de l‘acier. A cette époque, la production sidérurgique allemande ne dépassait la nôtre que de 2,5 p. 100 pour la fonte. En vertu des accords conclus à l’époque, toute tonne supplémentaire d’acier allemand devait entraîner une amende de 4 dollars, pénalité très minime si l’on tient compte Ides capitaux énormes qui f u r e n t investis après 1918 par les banques et les gros industriels d’outre-Atlantique et d’Angleterre.

II n’est pas inutile de rappeler que divers plans f u r e n t élaborés après la première guerre mondiale pas ces deux puissances, avec l’unique souci d’aider au rétablissement rapide de la puissance économique et industrielle de l’Allemagne. Il ne fait de doute pour personne que, si la France a subi de nouveau la terrible épreuve que l’on connaît, la responsabilité en incombe à l’état de choses que je viens de signaler..Malgré les restrictions imposées dans le cadre du règlement intérieur du cartel européen de l’acier, il avait suffi à l’Allemagne hitlérienne,’ avant la guerre, de quelques années pour assurer sa suprématie dans le domaine de la production de l’acier. C’est ainsi qu’à la veille de la guerre, la France ne produisait que 6 millions 200.000 tonnes d’acier, tandis que l’arsenal de la Ruhr en produisait 23 millions 200.000 tonnes, ce qui montre toute l’importance de la capacité de production de ce centre sidérurgique et ce qui a permis, bien entendu, à l’Allemagne d’accomplir ses pillages et ses crimes à travers toute l’Europe. Précisons que la guerre n’a pas rompu davantage ces cartels puisque, pendant la « drôle de guerre », se tenait fréquemment en Suisse de mystérieuses conférences. Des wagons pleins de minerai de fer français partaient vers l’Allemagne en empruntant d’autres voies d’acheminement pour tenter de dissimuler une fois de plus aux Français la trahison de nos classes dirigeantes.

M. Yves Fagon. Les Russes faisaient de même !

M. Ambroise Croizat. N’est-il pas utile de rappeler également qu‘en 1924, le Gouvernement français mit en vente des usines métallurgiques de Lorraine restituées par l’Allemagne. Estimées à 1.750 millions de francs-or, elles ne furent vendues que 385 millions de francs, payables en vingt ans. Ce fut le plus fructueux pillage qu’on ait jamais connu, selon les termes mêmes du rapport du 19 janvier 1928 de la commission parlementaire des marchés et des spéculations sur les séquestres. Parmi les pillards, se trouvait le baron Petiet, aujourd‘hui à la tête de l’industrie automobile française, membre influent au sein de la sidérurgie de notre pays, grand animateur pour la reconstitution du cartel international de l’acier. En 1939, le baron Petiet et ses acolytes n’avaient pas fini de s’acquitter. Le 18 avril 1941, ces mêmes usines, payées quelque 300 millions de francs, étaient vendues à l’Allemagne nazie, notamment au trust Hermann Goering, pour la coquette somme de 20 milliards de francs. Depuis la Libération, ces usines sont sous séquestre. Quels seront les prochains pillards parmi les maîtres de forge internationaux ?

La presse financière et industrielle voudrait, de son côté, nous faire croire que nos maîtres de forge se défendent avec la dernière énergie contre la concurrence des maîtres de forges de Hitler, que financent les banquiers américains. C’est ainsi que l’Usine nouvelle, du 17 juin, déclarait que quatre personnalités, représentant les plus importantes industries françaises : sidérurgie, aluminium, fonderie, matériel électrique, auraient déclaré à New-York que la France commençait à ressentir la concurrence de la production allemande renaissante. Ces personnalités auraient précisé que les industries de l’acier, des produits . de fonderie et de matériel électrique sont, jusqu‘à présent, principalement affectées par
cette nouvelle concurrence allemande. Il y a là u n e vérité qui est le résultat de la politique des banquiers et des monopoleurs américains, à laquelle notre Gouvernement ne cesse de s’associer. C’est ainsi que, tout récemment, un accord commercial France-trizone a été conclu, comportant l’importation de 1.500.000 dollars de tracteurs allemands. On va en Allemagne chercher des tracteurs et on ferme les usines françaises de tracteurs ! (Applaudissements à l’extrême gauche.)

M. Jean Duclos. A Argenteuil, en particulier.

M. Ambroise Croizat. Qu’importe que l’industrie française de tracteurs soit mise en sommeil, que les ouvriers, .techniciens et ingénieurs soient réduits au chômage ;l’essentiel est de satisfaire les volontés et les exigences des capitalistes américains. Cette concurrence ira se développant. Elle nous paraît, dès l’instant, inévitable et déterminera pour notre pays des conséquences redoutables et particulièrement graves pour l’ensemble des travailleurs. Le Monde du 21 novembre souligne également que la concurrence des chantiers navals s’annonce particulièrement redoutable. Les industriels français ont pris contact avec les industriels allemands, comme aux beaux temps de l’occupation et, comme toujours, les uns et les autres s’entendent comme larrons en foire. Qu’est-ce que cela peut bien leur faire si la concurrence allemande écrase l’économie française puisque Adenauer serait prêt à leur offrir des participations financières dans les usines allemandes ! Qu’importe au gros patronat français et au Gouvernement que les entreprises de notre pays ferment leurs portes ! L’extension du chômage et la misère sont bien le moindre de leur souci ! Tout se passe comme si rien n’était changé et l’on contribue une fois de plus, sans se soucier de l’intérêt de notre pays, de son rééquipement, à tout mettre en œuvre pour que renaisse au plus tôt l’extraordinaire puissance militaire de l’Allemagne occidentale. C’est un impératif qui découle des accords que nos gouvernants ont conclu. Aucun démenti de notre ministre des affaires étrangères ne peut atténuer cette évidence. Les spécialistes des accords commerciaux du IIIe Reich comme von Malzahn dirigent, avec le concours des Américains les conditions de cette étrange collaboration. Ces messieurs sont en bonne compagnie, en compagnie de ceux qui ont travaillé au financement des crimes d’Oradour et qui sont prêts demain à faire d’autres Oradour. Les conséquences de cette politique vue sous l’angle spécifique de l’industrie sidérurgique française s’avèrent déjà particulièrement désastreuses. En effet, deux tendances se dégagent quand on compare l’évolution de l’industrie sidérurgique française à celle de l’industrie allemande. C’est, d‘une part, la tendance à la régression de l’industrie lourde française ;c’est, par contraste, l’essor de l’industrie de la Ruhr. En mars 1949, mois record de la production française d’acier, celle-ci s’est élevée à 825.000 tonnes, contre 604.000 tonnes de moyenne mensuelle en Î948, «soit une augmentation importante, certes non négligeable, de 36,5 p. 100. Quant à la production d’acier de la Ruhr, elle s’élève à plus de 750.000 tonnes contre 463.000 tonnes de moyenne mensuelle en 1948, soit une augmentation de l’ordre de 60 p. 100. Je souligne le f a i t : l’augmentation pour la France a été de 36,5 p. 100 et, pendant la m ê m e période, l’augmentation pour la Ruhr a été de l’ordre de 60 p. 100 ! Voilà des chiffres qui montrent combien furent grands les efforts accomplis par les hommes d’affaires américains pour rétablir au plus tôt la puissance de ce formidable arsenal de guerre.

Or, depuis quelques mois, on assiste en France à une stagnation, voire à une régression très nette de la production d’acier. De 825.000 tonnes en m a r s 1949,elle est tombée à 751.000 tonnes en avril, à 741.000 tonnes en juillet et à 737.000 tonnes au mois d’août, soit une diminution de l’ordre de 12 p. 100. La caractéristique de notre industrie lourde c’est, en ce moment, l’accumulation des stocks depuis un certain nombre de mois. Si, dans notre pays, il y avait des gouvernants qui se préoccupent à la fois de l’intérêt de la France et de notre peuple et qui fassent u n e politique de reconstruction et de rééquipement, nous ne constaterions pas aujourd‘hui une telle situation dans notre industrie lourde. Des usines de l’Est et du Nord qui avaient prévu un programme de modernisation et de construction de nouveaux hauts fourneaux abandonnent leurs projets les uns après les autres et paraissent accepter avec une satisfaction non dissimulée cette situation pleine de dangers pour l’avenir de notre industrie lourde. Pour s’assurer des débouchés sur les marchés mondiaux de plus en plus saturés, les magnats de la sidérurgie d’outre- Atlantique ont exigé des pays soumis au plan Marshall l’annulation de certaines commandes passées dans leur continent. C’est ainsi que l’acier que la France avait promis de livrer, que nos usines devaient fabriquer et livrer à l’Amérique latine est resté en souffrance à Briey, et cela à tel point que certaines usines de l’Est sont contraintes de réduire leur programme de fabrication et d’arrêter certaines activités. A Homécourt, le programme mensuel a été ramené de 35.000 à «26.000 tonnes, avec arrêt d’un four Martin. A Saulnes, on vient d’éteindre un haut fourneau. A Pomipey, il est question d’éteindre également un haut fourneau parce que la production reste en stock. La situation paraît identique dans les usines du Centre où l’on fabrique des aciers spéciaux. Ce phénomène n’est d’ailleurs pas spécifiquement français. Il peut être observé dans les pays marshallisés, particulièrement en Belgique et en Luxembourg. On a constaté une baisse d’environ 40 p. 100 dans le premier de ces deux pays et d’environ 25 p. 100 dans le second, de mars à juillet 1949. Mais il en va autrement en Allemagne occidentale. Pour le mois de juillet, la production d’acier de la Ruhr a dépassé celle de la France de plus de 50.000 tonnes. Pour le mois d’août, l’arsenal allemand passé sous le contrôle des anciens nazis criminels de guerre, en liberté par la grâce de leurs compères, a, depuis, maintenu sa supériorité sur notre industrie nationale. On se garde bien de publier des statistiques précises sur la production allemande, on triture les chiffres, mais les truquages masquent difficilement la réalité puisque je me réfère aux chiffres et aux appréciations des fonctionnaires du ministère des affaires étrangères. L’attaché financier français à Berne a publié tout récemment une note montrant quelle valeur et quel crédit nous pouvons accorder aux déclarations solennelles de M. le ministre des affaires étrangères. Il paraîtrait, d’après ces déclarations, que la France a exigé que la production d’acier de la Ruhr ne dépasse pas u n tonnage déterminé, celui de 11.500.000 tonnes. Voilà l’opinion exprimée par l’attaché financier français à Berne le 25 octobre dernier : « Il est possible que la structure économique et politique actuelle de l’Allemagne de l’Ouest ait une teinte américaine. Mais ce qui est certain c’est qu’on aura affaire à un Etat jeune avec lequel il faudra compter. « Les cheminées de 45.000 usines qui ont beaucoup moins souffert des bombardements qu’on ne le croyait se sont remise à fumer. Déjà la production a de nouveau atteint 91 p. 100 de celle d’avant-guerre. La réforme monétaire et l’aide américaine d‘un milliard de dollars par an ont mis fin à la pénurie de matières premières, de moyens de transport et de vivres, « L’Allemagne occidentale produit 12 millions 300.000 tonnes de charbon et 850.000 tonnes d’acier .par mois et a déjà presque dépassé la production française. »

Cet attaché financier confirme amplement ce que nous disons, ce que nous ne cessons de répéter : c’est le sacrifice des intérêts nationaux de nos principales industries au bénéfice exclusif du rétablissement de la puissance industrielle de l’impérialisme allemand. 850.000 tonnes d’acier par mois, c’est déjà un chiffre qui appelle de notre part un certain nombre de réflexions particulièrement empreintes d’inquiétude. Est-il possible d’admettre que les reconstructeurs de cet arsenal vont s’en tenir aux limites proclamées ici solennellement par notre ministre des affaires étrangères. La France représente une unité dans l’organisme de contrôle. Elle a devant elle d’autres partenaires et il est certain que, d’ores et déjà, les conditions sont réalisées pour que le tonnage qui nous a été indiqué soit non pas seulement atteint, mais très largement dépassé si l’on tient compte du fait que la capacité de production de ce centre de la Ruhr est supérieur à 20 millions de tonnes par an. D’autre part, si l’on s’en rapporte aux commentaires qui ont suivi la récente conférence des trois et aux conciliabules qui ont eu lieu, par la suite, auprès de M. Adenauer, les intentions des dirigeants américains seraient, avec Je concours tacite des dirigeants français et de toutes les autres puissances occidentales, de porter la production d’acier de la Ruhr, contrairement aux affirmations de notre ministre des affaires étrangères, de 11 millions de tonnes à 14 millions de tonnes et, probablement, dans u n avenir plus ou moins lointain, à 19 millions de tonnes. Dans tout cela, que devient notre industrie lourde française et quel est le sort réservé aux travailleurs de notre sidérurgie ? C’est bien là le moindre de vos soucis, monsieur Je ministre des affaires étrangères, mais il existe un point sur lequel vous serez d’accord, c’est celui qui consistera à accroître les exportations de notre minerai de fer en direction de la Ruhr pour que le chiffre de production prévu soit rapidement atteint. Il n’est pas inutile de rappeler, pour montrer les graves conséquences de l’abandon négocié au cours de la conférence de Moscou, qu’avec le plan Monnet, aujourd’hui mis en pièces par les tenants du dollar avec l’assentiment des gouvernants français, notre production nationale — je m ‘ en réfère au plan Monnet lui-même — devait atteindre quinze millions de tonnes d’acier en 1951. Nous sommes loin de ce compte : nous atteindrons difficilement neuf millions de tonnes pour l’exercice 1949. Ce plan de reconstruction, de rééquipement et de modernisation de notre pays était conçu de telle manière qu’il garantissait le plein emploi de la main-d’œuvre française. Il était si vaste qu’il prévoyait même pour 1950 un déficit de main-d’œuvre portant sur plus de 500.000 unités.

Ajoutons que pour la sidérurgie française ce tonnage de quinze millions de tonnes devait se maintenir en vue de conserver notre avantage sur la production de la Ruhr, qui ne devait pas atteindre à l’origine le chiffre que le ministre des affaires étrangères indiquait tout à l’heure et qui se trouvera — on peut l’affirmer, d’ores et déjà — largement dépassée à plus ou moins bref délai. Il est certain qu’au rythme actuel les usines sidérurgiques allemandes, singulièrement épargnées par les bombardements américains, sont à même d’accuser dès maintenant une nette supériorité sur la production sidérurgique française. Quant aux débouchés impossibles à trouver en raison de la diminution du pouvoir d’achat, ils seront créés par les besoins militaires qu’impose le plan d’expansionnisme américain et la préparation de la guerre d’agression contre les peuples et les pays pacifiques de l’Est.

Toute cette politique contribue à placer la France dans un état d’infériorité absolue, à répéter les erreurs criminelles commises depuis 1918 jusqu’en 1939, sous la direction de l’impulsion des trusts et des banquiers anglo-américains. On sacrifie, avec une facilité déconcertante, les intérêts de l’industrie française, en même temps qu’on contribue à aggraver la misère de notre peuple, Cette politique est condamnée. Elle est une humiliation à l’égard de ceux qui, durant l’occupation, ont combattu et fait le sacrifice de leur vie  «pour la libération du territoire, pour que s’instaure, dans notre pays, une politique nouvelle s’inspirant des besoins de la sécurité française, d’une indépendance nécessaire et absolue et pour que soit répudiée la criminelle politique pratiquée depuis 1918, qui fut à l’origine de la terrible épreuve subie pour la troisième fois en 1939-1945.

En réalité vous avez tout abandonné : le droit aux réparations, le contrôle international de la Ruhr, le démantèlement des usines. Vous avez accepté aussi que soient remis en place les hommes d’Hitler à la tête des puissantes usines de la Ruhr. Un tel bilan se traduit aujourd‘hui par les conséquences que je viens d’indiquer. M. le président du conseil a été le négociateur des accords qui mènent à cette grave situation. Il en est le principal responsable. M. Robert Schuman, son ami, n’a fait que suivre ses traces en aggravant encore cette politique de renoncement qui humilie profondément notre pays. Mais si la responsabilité de M. le président du conseil est engagée, ceux qui, dans le Gouvernement, se sont associés à celle-ci partagent avec lui le poids redoutable de ce bilan. Qu’importent les phrases et articles démagogiques préconisant l’opposition à la renaissance des cartels et monopoles quand on sait qu’en définitive — c’est l’évidence même — vous êtes solidairement responsables de tout, ce qui se réalise. C’est à ce titre que le peuple de France vous demandera des comptes. Ce n’est pas cela qu’a voulu notre peuple. (Applaudissements à l’extrême gauche.)

Vous n’avez pas daigné l’informer. Quand vous vous employez à le faire, vous vous efforcez toujours de dissimuler la vérité en ce qui concerne les conséquences exactes de vos actes et de vos décisions. Vous donnez une singulière idée de l’attitude de la France dans les conversations internationales.

Nos représentants, et, en l’occurrence, le Ministre des affaires étrangères, donnent la nette impression qu’ils n ‘ ont jamais d’opinion lorsqu’il s’agit de la sécurité de la France, de son indépendance, de son avenir et de la sauvegarde de ses industries. (Applaudissements à l’extrême gauche.)

Ils ne savent que souscrire à toutes les demandes, à toutes les exigences. Votre Gouvernement, qui dépense des sommes fabuleuses pour la guerre d’agression, se prépare de nouveau à imposer aux travailleurs et aux petites gens le soin de combler les trous énormes de votre budget. Ce vont être des charges nouvelles et une hausse inévitable des prix. Dans le domaine de la reconstruction rien n‘est fait, si ce n’est qu’il existe un ministre pour titre. Pourquoi, en effet, reconstruire puisqu’il faut préparer la guerre qui détruira tout de nouveau. (Applaudissements à l’extrême gauche.)

Vous vous dressez contre les revendications modestes des ouvriers, des fonctionnaires, des retraités, des vieux, des prisonniers. Et vous vous préparez, sous prétexte d‘un retour au régime des conventions collectives, à faire voter une loi draconienne qui supprimerait en fait le droit de grève, le peu de liberté dont dispose la classe ouvrière de notre pays. (Applaudissements à l’extrême gauche.)


M. Philippe Farine. Voyez la loi tchécoslovaque

M. Ambroise Croizat. Vous contribuez à mettre en sommeil certaines de nos plus
importantes industries, provoquant ainsi un développement continu du chômage et une aggravation de la misère chez nos travailleurs. Tout cela résulte de votre politique de
renoncement et de guerre sur le plan international. C’est là, depuis deux ans et demi, l’as-
pect de votre politique qui comporte de graves dangers, des menaces terribles pour notre nation, pour notre peuple.

Mais on ne répète pas impunément les erreurs et les fautes du passé. Soyez persuadés que nous nous emploierons à faire comprendre au peuple de France, légitimement inquiet, les véritables desseins de votre politique, que nous l’appellerons à agir comme il convient pour imposer le retour à une politique vraiment française de sécurité, d’indépendance et de paix (Applaudissements à l’extrême gauche).

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  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    En complément à ce très bon texte vous pouvez lire avec profit le livre d’Annie Lacroix-Riz où y est montré, à partir des archives, comment l’Allemagne est reconstruite, encore une fois, par le grand capital américain.

    Qu’il est encore une fois hors de question de réparations pour l’Allemagne en particulier par l’abandon du plan Morgenthtau qui proposait au moins de discuter des réparations en nature ou main d’œuvre avec les soviétiques.

    Réparations qui devaient durer 10 ans et interdire à l’Allemagne de se réarmer.

    Notez qu’aujourd’hui le réarmement de l’Allemagne se fait en partenariat très actif avec la France qui abandonne une part stratégique de son armement au profit de fusions industrielles entre Français, Allemands, Britannique et parfois Italiens.

    Nous retrouvons ici un quatuor déjà bien connu et actif dans l’entre deux guerres et avec la même idéologie légèrement mise à la mode.

    Aux commandes toujours les mêmes familles historiques politiques, industrielles et financières.

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  • Michel BEYER
    Michel BEYER

    Merci Frank pour ce document.
    Le mot “trahison” est encore trop faible. Lorsque Annie Lacroix-Riz parle de la non-épuration en France à la Libération, elle est traitée de “complotiste”. Et pourtant le cartel des forges n’a jamais cessé d’exister, avant la guerre, pendant la guerre, après la guerre….Les pères fondateurs de l’Europe, Monod et Schumann, quelle belle blague, malheureusement au détriment de la France.
    Pour rester dans la lignée de ceux qui reviennent toujours: Hollande est de retour!!!
    Fabius est le spécialiste des phrases célèbres: “Au secours, la droite revient!” Il en savait quelque chose puisqu’il était aux manettes. “Ils ont fait du bon boulot”, on le voit dans ce qu’est devenu la Lybie..
    Hollande, lui, c’était “mon ennemi, c’est la finance”. Les financiers en sont encore tout tremblants. Car, il revient le bougre. Lui qui a engagé la signature de la France au bas d’un document garantissant l’application des accords de Minsk, alors que son intention était tout autre. C’est un parjure!
    Il est en campagne en Bretagne pour la promotion de son nouveau livre. Les portes lui sont ouvertes dans les amphitéâtres de la région. La presse locale lui procure l’occasion de réaliser des interviews. Bref, tout baigne, et lui laisse entendre qu’il n’est pas exclu qu’il soit candidat en 2027. Affaire à suivre…

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  • Pedrito
    Pedrito

    C’est fou ce que le niveau de conscience politique et citoyenne s’élève de jour en jour. Grâce aux socialistes zistoriques dont ce Hollande et l’autre pintade du Poitou
    Et tous !!!

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