Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

D’accord pas d’accord : l’histoire “française” avec Israël et la Palestine doit être réactualisée…

Voici une analyse d’Alain Gresh sur le conflit israélo palestinien à travers le prisme français. Voici bien longtemps que je connais et respecte Alain Gresh et Dominique Vidal. Quand je les ai rencontrés dans l’hebdomadaire Révolution où j’étais rédactrice en chef adjointe (en charge des questions de société), ils étaient infiniment plus compétents que moi sur le sujet et ils étaient partagés dans nos relations entre l’irritation que leur inspirait ce qu’ils estimaient mon “incompétence” journalistique, leur irritation face à “mon suivisme” et une sorte d’amitié face à l’honnête candeur dont j’ai toujours été capable, en particulier la manière dont je me suis corps et âme placée aux côtés de Cuba menacé.

Il y avait peut-être aussi quelque chose dans nos origines juives si complexes et le choix du soutien du peuple palestinien qui nous rapprochait, mais là nous en sommes aux impressions. Ce long détour pour dire que dans la manière dont Alain Gresh aborde ici l’analyse historique de l’évolution de la position française tout ne me convient pas. Et je crois dans ce qui était alors ma naïveté il y avait une lucidité qui faisait défaut à leurs analyses et ce dès l’élection de Mitterrand et le discours de Cancun rédigé par Regis Debray. Dominique Vidal envoyé par l’hebdomadaire pour suivre l’événement au Mexique en était revenu convaincu que Mitterrand inaugurait une grande présidence anti-impérialiste. Il n’était pas le seul ; l’idée chère à Charles Fitterman et à tant de ministres, d’intellectuels était que le cycle inauguré par la Révolution d’octobre était terminé. Se mêlait à cette vision une certaine propension des mouvements de libération nationale d’essence essentiellement social démocrate à dépasser les affrontements de la guerre froide, bref il s’agissait de ce qu’on a appelé l’Eurocommunisme.

La Chute de l’URSS, la décennie qui a suivi a paru leur donner raison, mais aujourd’hui les yeux s’ouvrent et on ne peut plus en rester là.

Moi je me suis toujours opposée à ce ralliement. Si vous lisez mes mémoires vous y constaterez que je détestais Mitterrand sans doute cela est-il dû au fait que ma première cellule s’appelait Yveton, du nom de ce militant du Parti Communiste Français en Algérie, accusé de terrorisme par les Français, assassiné par le gouvernement de l’époque avec un garde de sceaux qui refusa sa grâce et qui s’appelait François Mitterrand. Dans mes mémoires vous lirez l’influence qu’eut sur moi alors Henri Krasucki et la découverte que lui et même Mauroy se faisaient manipuler par un Mitterrand vendu au patronat et auprès de qui Gattaz avait plus d’influence que n’importe qui. J’ai tout haï de Mitterrand y compris la manière dont il flattait les intellectuels, les transformait en courtisans derrière un Jack Lang paillette et strass. Il y avait là une véritable corruption à travers laquelle on enseignait le mépris de tout ce qui était communiste.

Tout cela pour dire que ma grande différence avec ceux qui ont cru être “modernes” parce qu’ils liquidaient, a été la manière dont je me suis méfiée de tout ce qui était américain y compris dans les rêves d’autonomie du continent européen, tout ce qui a entretenu les illusions autour des accords d’Oslo et précipité la gauche dans le consensus atlantiste. Inutile de dire que mon séjour à Cuba (comme ce que je découvrais en Amérique latine et en Afrique) a confirmé mes pires préventions. A ce moment-là, Alain Gresh et Dominique Vidal étaient passés au Monde diplomatique, ils y jouaient un rôle que je considère encore comme positif mais dans le même temps ils soutenaient Jeanette Habel comme grande référence “objective” sur Cuba. L’idée maîtresse de cette “objectivité” était que, certes il y avait le blocus, mais que le blocus n’expliquait pas tout. Tous les articles (comme ceux de l’Humanité à la même époque) accordaient au blocus, quand ils daignaient en parler, le poids d’une alouette et aux “défauts” de la révolution le poids non pas d’un cheval mais d’une écurie. Je leur disais : “Peut-être que le blocus n’explique pas tout mais commençons à expliquer ce qu’il explique!.” Quand j’arrivais avec des articles très documentés sur Cuba, j’avais alors des sources auxquelles personne n’accédait, ils étaient accueillis favorablement par les temps modernes – où Claire Etcherelli contrebalançait les engouements de Lanzmann – mais ils étaient refusés par le Monde diplomatique et la presse communiste parce que “partiaux”, pas convaincants. La réputation de “stalinienne” commença à m’être faite mais paradoxalement l’estime s’est poursuivie avec Dominique Vidal et Alain Gresh… Nous nous retrouvions dans tant de combats, y compris face à l’invasion de l’Irak, il y avait tellement pire, nos désaccords étaient politiques mais humainement nous ne nous vendions pas.

Voilà quelques points qui diront d’où et comment j’entends le discours d’Alain Gresh dans cette vidéo : il a toujours été et reste ce combattant d’une vie sur les droits des palestiniens et sur les peuples du Moyen Orient. Mais il n’a cessé de se tromper sur Mitterrand, sur les socialistes, sur l’Europe, sur le sens de ce qui se passait à la suite de l’effondrement de l’union soviétique. La chute du mur de Berlin était pour lui et DV une autre ère, avec des possibles, pour moi elle était et reste une contrerévolution. Ce qui a triomphé c’est ce qu’on voit aujourd’hui : l’impérialisme américain, ses révolutions de couleur, sa pseudo lutte contre le terrorisme alors qu’il était et reste le plus terroriste des pouvoirs. Les Etats-Unis, dès la guerre froide, ont choisi le nazisme et la mort de ce salaud de Kissinger nous dit l’effet boomerang d’une dénazification qui n’avait jamais été menée au contraire.

L’oubli de la situation des Palestiniens fait partie du lot. Et la nouveauté qui est apparue depuis le 7 octobre c’est que l’on ne peut l’oublier, la paix ne pourra exister en passant par pertes et profits les dominations coloniales, que l’on approuve ou que l’on condamne l’attaque des civils, Dominique l’a affirmé très clairement, alors on doit condamner toutes les atteintes contre les civils. Il apparait des démonstrations, de la même manière qu’en Ukraine qui déclare que l’OTAN n’a pas tous les droits, parce que justement il y a la montée de la Chine, un monde multipolaire, tout ce que j’ai découvert grâce à Fidel Castro en 2003, et qui exige notre intervention consciente.

Ce qui se passe aujourd’hui partout y compris en Palestine doit être lu comme la remise en cause de cette contrerévolution avec son pouvoir terroriste des Etats-Unis : la tête qu’il faut couper parce que les autres repoussent toujours et qui est a comme bras armé et puissance de coercition les Etats-Unis, leur armada, le dollar et les institutions qui se sont mises en place dans le sillage de cette puissance. Commence à se faire jour ce que me disait un parent algérien, “que les Etats-Unis s’en aillent et crois-moi nous aurons rapidement des possibilités d’entente…

Oui mais voilà d’une part faire partir les Etats-Unis est un vrai problème et il ne risque pas d’être résolu de si tôt si on suit une radicalité gauchiste social démocrate qui n’a toujours rien compris, elle peut même se retrouver chez ces magnifiques combattants du KKE qui font une fixation sur la thèse des deux impérialistes. Mais elle prend toute son ampleur dans la LFI. Et je dois dire que ces flots de haine déversés non contre les Etats-Unis et Netanayoun mais contre les juifs, “les sionistes” est bien digne de cette social démocratisation qui s’est parée des oripeaux du radicalisme. Au lieu de rassembler y compris les communistes israéliens on balance des photos et des slogans qui excluent, interdisent à des gens comme moi de me battre pour le droit des Palestiniens. Il y a ces posts des réseaux sociaux qui définissent le verbe “isréaliser”, celui de voler un pays et de feindre d’être victime. Ces Français qui balancent ce genre de chose savent-ils ce qu’est le verbe “franciser” alors, celui de voir la paille dans l’œil du voisin et pas la poutre dans le sien ; celui depuis des siècles de pillage, torture, colonise en se parant de l’universel des droits de l’homme… Celui de feindre un accord avec les Palestiniens tout en suivant les Etats-Unis comme Mitterrand, Macron. Mais cela devient un apolitisme braillard pour d’autres, de vrais repoussoirs, Il y a même des cons intégraux qui me poursuivent en déclarant que je suis une “espionne du mossad et de la CIA” quand vous êtes juif voilà comment une certaine conception de la Palestine voire du Hamas, vous interdit toute action. Accepter la liquidation mitterrandienne c’est nourrir le gauchisme qui ne mène nulle part, tout cela parce que ces gens-là n’ont plus de perspectives politiques. Toute leur propagande ne vise en fait qu’à supprimer l’existence d’Israël sans le dire et mener ce projet jusqu’à la mort du dernier palestinien en espérant qu’il n’y aura plus de juifs. Se battre pour un seul Etat, celui mythifié de Palestine peut être un projet politique opposé à celui des deux Etats, qui reste à ce jour pourtant celui autour duquel on peut se rassembler politiquement, encore faudrait-il le dire… Voilà où nous en sommes : l’incapacité en France aujourd’hui à avoir une perspective politique, celles d’un cessez le feu immédiat avec l’ouverture de négociations régionales et avec des pays neutres (ce qui exclut les Etats-Unis, la France, l’UE, etc…) et l’ONU. Faire sortir de prison Barghouti le seul apte à négocier.

Sur tout cela je sais que nous sommes d’accord Dominique Vidal et Alain Gresh, et je respecte le combat de votre vie pour qu’il en soit ainsi mais cela passe que vous le vouliez ou non en France et dans bien d’autres pays, par l’existence d’un parti communiste apte à défendre avec humanisme les Palestiniens sans jamais céder à l’antisémitisme. Faute de cela vous aurez la montée de la haine sécuritaire s’emparant de chaque fait divers, d’actes immondes qui relèvent de la psychiatrie et qui n’ont rien à voir avec les souffrances du peuple palestinien, pour inciter les Français à se résigner au massacre des Palestiniens, voire à l’approuver.

On doit lier la cause palestinienne à un véritable anti-impérialisme et toujours dire qui est la clé de tout cela et sur qui s’appuyer.

Voilà pourquoi je me sens plus en accord avec ce texte qui vient d’Amérique latine sur le conflit israélo palestinien que sur la totalité de l’historique d’Alain Gresh dans cette vidéo. Cet historique date un peu d’une autre époque avec ses illusions.

L’histoire “française” a besoin d’être réactualisée parce qu’elle est celle de nos illusions sur ce que l’on pouvait attendre de la victoire de l’impérialisme sur l’URSS.

Je propose donc que l’on perçoive bien les problèmes réels de l’impérialisme américain : il faut continuer la poussée contre ce qui se passe à Gaza mais l’assortir d’une perspective politique qui tienne compte du basculement géopolitique dans lequel la planète se trouve avec un impérialisme américain qui est plus “terroriste” que jamais mais qui n’a plus les moyens ni politiques, ni financiers de sa politique. A court terme cessez-le-feu permanent et ouverture de négociations régionales qui écartent les Etats-Unis, le principal obstacle, le tout sur les bases définies par l’ONU. Le monde multipolaire avec le poids déterminant de la Chine est un atout essentiel vers la paix non seulement au Moyen Orient mais pour le peuple palestinien.

Il n’y a pas de force politique en France qui en soit là mais ceux qui sont les plus proches sont les communistes même si j’ai du mal à assumer la manière dont Roussel a condamné le 7 octobre sans le placer dans le contexte historique que rapporte Alain Gresh et dans toutes les occasions volontairement ratées de faire la paix par un Israël qui n’a cessé comme le reste de la planète de céder à la contre-révolution de ces dernières décades.

Danielle Bleitrach

Les États-Unis disent qu’ils ne peuvent rien faire pour arrêter la guerre de Gaza, mais ils mentent

ADAM JOHNSONTRADUIT PAR : ANA FERNANDEZ

Suite aux critiques croissantes pour son inaction, l’administration Biden affirme qu’elle est impuissante à arrêter l’attaque israélienne contre Gaza. Il s’agit d’une esquive malsaine, étant donné le grand soutien militaire et diplomatique que les États-Unis fournissent incontestablement à Israël.

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Plus de 10 000 Palestiniens, dont 4 200 enfants, ont été tués dans l’assaut d’Israël contre la bande de Gaza qui a commencé il y a plus d’un mois en réponse à l’attaque surprise du Hamas qui a tué 1 400 Israéliens. Alors que la crise humanitaire et les morts massives à Gaza s’intensifient – et que 237 Israéliens sont toujours kidnappés par le Hamas – le président Joe Biden fait face à d’énormes pressions pour appeler à un cessez-le-feu de la part de millions de manifestants à travers le monde, de 80 % des électeurs démocrates, de plus de 500 anciens participants à la campagne de BidenOxfamAmnesty InternationalMédecins Sans Frontièresvingt-cinq groupes pacifistes arabes et juifs en Israël et dix-huit agences des Nations Unies.

Biden a explicitement rejeté ces appels il y a quelques jours, déclarant qu’il n’y avait « aucune chance » d’un cessez-le-feu, tout en continuant à faire pression sur le Congrès pour obtenir 14,3 milliards de dollars supplémentaires de nouvelles armes et de financement militaire pour Israël. Cherchant à maintenir sa réputation de défenseur des droits humains et du progrès, l’administration Biden tente plutôt une série de mesures de compromis pour résoudre la quadrature du cercle de l’image éclairée qu’elle a d’elle-même en soutenant une campagne de siège et de bombardement d’une violence sans précédent.

Jusqu’à présent, la Maison-Blanche a tenté de faire adopter des mesures pour sauver la face. Le principal d’entre eux est ce que l’on appelle la pause humanitaire, un terme indéfini qui peut signifier n’importe quoi, d’une cessation indéfinie de la violence à un simple arrêt momentané des bombardements. Cela n’a pas apaisé les militants qui réclamaient un cessez-le-feu.

La semaine dernière, nous avons appris à quoi ressembleront ces « pauses humanitaires » : Israël prévoit d’arrêter les opérations militaires dans le nord de Gaza pendant quatre heures par jour, à des heures aléatoires, nominalement afin que les habitants puissent fuir vers la sécurité, mais cela pourrait également être décrit comme un plan pour expulser les Palestiniens de leurs maisons. L’administration américaine aurait également fait pression pour l’utilisation de « bombes plus petites » et de plus de « bombes de précision », mais étant donné les preuves de plus en plus nombreuses qu’Israël cible délibérément les infrastructures civiles et se livre à une punition collective, il n’est pas clair comment cela pourrait aider.

Confrontée à une crise massive de relations publiques, la Maison-Blanche tente maintenant une nouvelle approche : nourrir les journalistes complaisants d’un récit qui appelle Biden à faire pression pour un cessez-le-feu est de toute façon discutable, car la branche exécutive américaine est plus ou moins incapable d’influencer Israël. même si je le voulais.

Cela fait partie d’une tactique plus large de la Maison-Blanche de Biden : lorsqu’elle veut faire quelque chose de conservateur ou ne pas agir sur les politiques progressistes populaires, elle feint l’impuissance pour éviter les conflits idéologiques.

Dans le cas de politiques telles que l’augmentation du salaire minimum ou la réglementation des entreprises polluantes, l’administration Biden s’est déclarée impuissante avant de se donner la peine d’exercer l’influence dont elle dispose.

Le premier média à promouvoir ce récit a été le Washington Post, dont la journaliste Yasmeen Abutaleb a publié un article dans lequel elle présentait l’image d’une Maison-Blanche maladroite, impuissante et politiquement acculée. « La Maison Blanche est frustrée par l’attaque israélienne, mais voit peu d’options », déplore l’article, le cœur serré.

« Alors que l’invasion terrestre de Gaza par Israël s’intensifie », nous dit le mémo, « l’administration Biden est dans une position précaire : les responsables de l’administration disent que la contre-attaque d’Israël contre le Hamas a été trop sévère, trop coûteuse en victimes civiles et sans fin cohérente, mais ils sont incapables d’exercer une influence significative sur le plus proche allié de l’Amérique au Moyen-Orient pour changer sa position. bien sûr.

C’est une déclaration extraordinaire. L’idée que les États-Unis – qui fournissent à Israël un droit de veto automatique aux Nations Unies ; soutien en matière de renseignement ; Soutien de la marine en Méditerranée et dans le golfe Persique ; présence militaire en Syrie, en Turquie et en Irak ; et des dizaines de milliards d’armes et de fournitures militaires à la pointe de la technologie – est « incapable d’exercer une influence significative » sur Israël serait sans aucun doute une surprise pour la plupart des observateurs politiques. Quelles preuves le Post fournit-il à l’appui de cette affirmation ? Tout cela est dit par des assistants de Biden qui ont refusé d’être nommés.

L’article provient presque entièrement de responsables anonymes de Biden et d’autres personnes « familières avec les idées de l’administration ». Ils se lamentent, trouvent des excuses et font savoir au lecteur qu’ils se sentent vaguement mal à propos de l’augmentation du nombre de morts, mais insistent, avec peu d’explications, sur le fait qu’ils ne peuvent pas faire grand-chose à ce sujet.

Abutaleb a le mérite d’inclure un paragraphe dans lequel il cite Bruce Riedel, chercheur principal à la Brookings Institution, expliquant que, bien sûr, l’administration Biden a beaucoup d’influence sur les ventes d’armes et la couverture diplomatique. Mais ce truisme est rapidement réfuté, sans aucune explication, par une autre source anonyme :

« Ils voient un accident de train, et ils ne peuvent rien y faire, et les trains accélèrent », a déclaré une personne familière avec la pensée de l’administration, qui a parlé sous couvert d’anonymat pour discuter de la dynamique interne. « L’accident de train est à Gaza, mais l’explosion est dans la région. Ils savent que même s’ils faisaient quelque chose, comme conditionner l’aide à Israël, cela n’empêcherait pas les Israéliens de faire ce qu’ils font.

Mais pourquoi conditionner l’aide ne limiterait-elle pas l’assaut israélien ? Comment les responsables de Biden pourraient-ils le savoir à moins qu’ils n’essayent ? Abutaleb laisse passer la déclaration et passe à autre chose. Mais l’idée que la menace des États-Unis de retirer leur soutien diplomatique, de renseignement et militaire « n’empêchera pas vraiment les Israéliens de faire ce qu’ils font » – pas du tout – est difficile à croire.

Le prochain dans le genre de la « Maison Blanche impuissante de Biden » est le New York Times. Le journaliste chevronné David Sanger, qui fait entrer l’Ukraine dans le giron, nous dit dans son titre et son sous-titre : « Biden est confronté aux limites de l’influence américaine dans deux conflits : l’influence du président Biden sur Israël et l’Ukraine semble beaucoup plus limitée que prévu, compte tenu de son rôle central en tant que fournisseur d’armes et de renseignements. »

« Depuis 10 jours, l’administration Biden exhorte le Premier ministre Benjamin Netanyahu à autoriser des ‘pauses humanitaires’ dans le bombardement de Gaza », a déclaré Sanger au lecteur, « dans l’espoir que les 3,8 milliards de dollars annuels d’aide à la sécurité des États-Unis apporteraient suffisamment d’influence sur les tactiques du dirigeant israélien. Cela n’a pas été le cas. M. Netanyahu a rejeté la demande de M. Biden de redoubler d’efforts pour prévenir les victimes civiles lors d’un appel téléphonique lundi.

Cet article, comme celui du Washington Post, s’appuie sur des assistants anonymes pour dépeindre un Biden bien intentionné, bien que tremblant, essayant désespérément de réduire le nombre de morts civiles, mais ignoré par un Netanyahu impulsif et voyou.

L’article ne prend jamais la peine d’explorer l’option selon laquelle la Maison-Blanche de Biden pourrait menacer de retirer son soutien matériel ; On suppose simplement que cette option est hors de question en tant que levier. Les États-Unis sont dépeints comme un observateur passif des crimes de guerre avec peu de contrôle.

« Lorsqu’ils ne s’expriment pas publiquement, certains des conseillers de Biden disent que le président a été surpris par la réticence de Netanyahu à bouger sur la question des attaques contre les zones urbaines densément peuplées », rapporte Sanger. Eh bien, il en a parlé et on dirait que c’est tout ce qu’il peut faire. Sanger ne semble pas du tout intéressé par la question de savoir si Biden a d’autres options pour réduire le nombre de victimes civiles, comme ne pas financer et armer l’armée israélienne. Cette possibilité ne se présente tout simplement pas comme une option.

Enfin, nous avons un article publié dans Politico par Nahal Toosi, Alexander Ward et Lara Seligman. Venant en grande partie de – qui d’autre – de « responsables » anonymes de Biden, il insiste sur le fait qu’Israël ignorerait simplement Biden s’il essayait d’arrêter la guerre, mais il n’explique jamais pourquoi. Écrire:

Même en temps normal, le gouvernement israélien n’a pas toujours écouté Washington. Par exemple, pendant des années, les responsables américains ont exhorté en vain Israël à arrêter la construction de colonies en Cisjordanie revendiquées par les Palestiniens. Lorsque Biden était vice-président, le gouvernement israélien a même annoncé de nouvelles colonies alors que le dirigeant américain était en visite en Israël.

L’article continue ensuite à ne pas expliquer à aucun moment pourquoi menacer d’arrêter de défendre Israël à l’ONU ou de couper le partage de renseignements ou les livraisons d’armes ne fonctionnerait pas. Il dit simplement au lecteur que les États-Unis n’ont jamais essayé de proférer de telles menaces et passe au point suivant. Comment savons-nous qu’Israël ignorerait de telles menaces matérielles contre son appareil militaire si aucune Maison Blanche n’a jamais tenté de le faire ?

L’article indique clairement que la Maison-Blanche ne veut pas arrêter la guerre et qu’elle la soutient pour des raisons à la fois idéologiques et stratégiques, mais qu’elle n’a que des objections sur la tactique. Il n’est pas tenu compte du fait que ce fait pourrait motiver l’affirmation intéressée d’assistants anonymes selon laquelle ils n’ont pas le pouvoir d’obtenir un cessez-le-feu, même s’ils le voulaient.

Le mois dernier, dans les premiers jours de la guerre, le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a subi des pressions de la part de ses détracteurs sur les raisons pour lesquelles le gouvernement avait accepté d’autoriser une aide humanitaire limitée à Gaza avant le retour des otages. Il a déclaré : « Les Américains ont insisté et nous ne sommes pas en mesure de refuser. Nous dépendons d’eux pour l’aviation et l’équipement militaire. Que sommes-nous censés faire ? Dites-leur non ?

Si les États-Unis n’ont pas d’influence réelle sur Israël, quelqu’un devrait le dire au ministre israélien de la Défense.

Dans un livre récent sur Biden, The Last Politician, l’écrivain Franklin Foer détaille comment Biden a mis fin au bombardement de Gaza par Israël en 2021 par un appel téléphonique.

Après que Netanyahu « ait fait tout son possible pour justifier sa demande [de bombardements supplémentaires] parce qu’il ne pouvait pas indiquer de nouvelles cibles qui devaient être attaquées », Biden a déclaré, selon Foer : « Hé, la piste est terminée. C’est fini. Et puis, continua Foer, c’était le cas. À la fin de l’appel, Netanyahou a accepté à contrecœur un cessez-le-feu négocié par l’Égypte.

On pourrait soutenir que 2023 est différent de 2021, étant donné la nature singulièrement horrible de l’attaque du Hamas du 7 octobre, mais la même logique s’applique toujours. Netanyahou, très motivé et enragé – et l’establishment israélien de la sécurité frontalière – ne peuvent toujours pas pousser à une guerre majeure sans le soutien des États-Unis. À tout le moins, les États-Unis pourraient essayer de retirer ou de réduire ce soutien, plutôt que d’ignorer de manière préventive leur influence et d’insister sur le fait que cela n’aurait pas d’importance.

Les affirmations anonymes de l’impuissance américaine ne sont pas étayées par des preuves historiques. Ils n’ont aucun sens, et bien sûr, ils ne sont pas censés l’être. L’objectif de ces articles est de transmettre un récit plus large que ce que la Maison-Blanche essaie de populariser : qu’elle est impuissante, abasourdie et incapable de contrôler les horreurs que le public voit arriver sur ses médias sociaux toutes les quelques heures.

Lorsque l’on n’est pas en mesure d’expliquer ou de fournir une justification morale crédible aux images ininterrompues de corps sans vie d’enfants retirés des décombres jour après jour, il ne reste qu’une seule option à ceux qui la soutiennent : agir comme s’ils n’étaient pas des participants mais des observateurs passifs et espérer que le public ne se rende pas compte que cette affirmation n’a aucun sens.

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1 Commentaire

  • admin5319
    admin5319

    voici la question que m’adresse un lecteur ami et camarade et j’y réponds rapidement :

    Je comprends et respecte le fait que toute ta personnalité soit incontournablement puissamment inspirée de ton identité juive, c’est pourquoi j’aimerais que tu exposes ta conception d’une judaïcité respectueuse dans l’acceptation que tu sembles faire du sionisme ; sionisme qui, pour moi (et beaucoup d’autres), a toujours été assimilé à un « sectarisme » et à une bataille pour un état confessionnel…

    J’accepte de me tromper, mais je crois que la situation actuelle nécessite une clarification de cette question pour comprendre en quoi déverrouiller les consciences passe par une meilleure compréhension des présupposés de chacun.

    Merci de ta réponse, voire de nous rédiger un post (ou nous renvoyer à des textes, posts, livres…) traitant cette question tel que tu le conçois
    Fraternellement

    MA REPONSE

    je n’ai jamais été sioniste et s’il ne tenait qu’à moi il n’y aurait pas d’état d’Israël. C’est très puissant dans ce qui est ma conscience juive pour qui il y a l’appartenance forte à la nation française mais aussi une appartenance familiale, pas religieuse familiale avec de longues traditions d’errance et de doute auquel je tiens. En riant je dis souvent que L’URSS avec sa double “nationalité’, celle du citoyen soviétique et celle des origines familiales me convient tout à fait. Je ne suis jamais allé en Israël et je me suis toujours battu pour la jutice pour le peuple palestinien.

    ceci étant posé je hais l’antisémitisme non seulement parce que cela m’atteint mais parce que l’antisémite est pour moi d’une stupidité crasse, quand je découvre la moindre trace je sais que j’ai affaire à un individu borné et que cela va se retrouver dans d’autres traits. Une absence totale de capacité à voir la multiplicité des faits, leur dialectique, c’est à peu près le mépris que Marx éprouve pour Proudhon. Cela va se traduire par une paresse intellectuelle qui cherche la cause de tout et donc un bouc émissaire comme dans le complotisme quand au lieu de se battre pour que tout le monde ait des vaccins et contre l’appropriation par les trusts pharmaceutiques ont se met à croire à des choses qu’on ne maîtrise pas et on diffuse des rumeurs… L’antisémitisme fonctionne sur ce mode là et non seulement c’est méchant mais c’est bête.

    Un Etat juif est une hérésie non seulement dans sa forme religieuse et les laiques comme Ben Gourion qui on créé l’Etat d’Israël portent une responsabilité lourde en ayant fait coïncider cet Etat laique avec des pratiques religieuses mais c’est un peu le cas de notre héritage chrétien. le pire a été l’attitude de l’extrême droite de Begin qui a fait du nettoyage ethnique et le gouvernement actuel. je considère qu’au contraire l’existence de palestiniens chretiens et souvent communistes est une chance. Donc la question est est-ce qu’l y a au sein de ce pays cette capacité à passer de peuples (les juifs,les palestiniens, d’autres à une nation ? ) je dois dire que le travail de dominique Vidal et Alain Gresh tout ce que je lis du parti communiste isrélien est prometteur et je voudrais que cela soit mieux connu.

    Il est clair que les tendances fasistes d’Israël se développent, comme dans toute l’Europe et même ailleurs. Estè ce que nous aidons en ignorant les forces progressistses ? NON…

    Tu remarqueras que mon ennemi c’est le capital financier qui n’a pas de patrie mais un bras armé les USA, le gouvernement. Mais tu remarqueras également que j’aime la culture aux Etats-Unis et que je donne la parole frequemment à ceux qui se battent là-baa comme je me bats ici contre Macron et ce que représente le gouvernement français.

    je veux faire la même chose pour Israël où il existe un parti communiste plus puissant que le notre.

    je veux une perspective politique et pour le moment je me bats comme la quasi totalité des partis communistes et des pays socialistes pour deux Etats sur les bases de l’ONU.

    Actuellement les publications sur les réseaux sociaux ont une perspective de fait de destruction de l’Etat d’israël et leur dénonciation du “sionisme” revient à ça. Si c’est une position politique qu’ils le disent et qu’on en discute… mais c’est même pas ça c’est un hystérisation constante qui ne pose jamais de revendications politiques mais joue uniquement l’émotion…

    Cela fait du mal à des gens comme moi qui souffrent non seulement devant ce que subissent les Palestiniens mais de se trouver coupables de fait de ces horreurs. Et donc je ne veux plus m-en occuper et je ne suis pas la seule. C’est contre productif donc je tente de vous expliquer que vous êtes en train de vous isoler dans une France qui malheureusement est de plus en plus travaillée par l’extrême droite.

    Je vous propose donc de retourner à des revendications politiques en fa veur de la paix : dénoncer le gouvernement israélien, le forcer au cessez le feu, et créer les conditions d’un dialogue régional sous l’égide de l’ONU avec le rôle de la Chine par exemple.

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