Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Pourquoi et comment il vous est interdit d’envoyer un chèque au Premier Ministre du Mali, un cas concret d’ingérence politique, par Franck Marsal

Peu de gens connaissent le fonctionnement précis des “sanctions internationales”, en particulier du “gel des avoirs”, que l’UE et donc la France, met en application chaque fois que la situation internationale échappe à son contrôle. Je me suis intéressé à ce régime de sanctions, en prenant un cas particulier emblématique, celui du Mali et, précisément, la situation faite au Premier Ministre malien, Choguell Maïga. M. Choguell Maïga est inscrit par la Direction Générale du Trésor sur le Registre National du Gel des Avoirs (https://gels-avoirs.dgtresor.gouv.fr/List). Nous allons voir pourquoi, comment et quelles sont les conséquences de cette inscription. Franck Marsal nous apporte ici un éclairage important sur le rôle de la France et de L’Europe de ce que nous définissons par ailleurs par “la militarisation du dollar” activement soutenu par l’UE à ses risques et dépens. Demain nous vous présenterons d’ailleurs le complément indispensable du dossier d’aujourd’hui consacré aux transformations géopolitiques et aux choix catastrophiques de la France et de l’UE de jouer le néocolonialisme dans le sillage des USA. Franck va désormais jouer un rôle central dans la mise en lumière de cette stratégie suicidaire, sur le rôle du PCF et sur la nécessaire issue socialiste. (histoire et société)

Pour commencer, que nous dit le fameux “registre”, sur ce qui est reproché à Choguell Maïga:

Le registre national du Gel des Avoirs est une longue liste de personnes de multiples nationalités. Les personnes listées sont interdites d’une série de transactions que nous préciserons ci-après. Pour chaque personne, une rubrique “motif” précise les raisons de son inscription. Voici ce qui est écrit concernant le Premier Ministre du Mali :

En tant que Premier ministre depuis juin 2021, Choguel Maïga dirige le gouvernement de transition du Mali établi à la suite du coup d’État du 24 mai 2021. Contrairement à ce que prévoyait le calendrier des réformes et des élections arrêté précédemment en accord avec la CEDEAO conformément à la charte de la transition, il a annoncé en juin 2021 l’organisation des Assises nationales de la refondation (ANR), qu’il a présentées comme un processus préalable à la réforme et une condition à l’organisation des élections prévues pour le 27 février 2022. Comme Choguel Maïga l’a lui-même annoncé, les ANR ont ensuite été reportées à plusieurs reprises et les élections retardées. Les ANR, qui se sont finalement tenues en décembre 2021, ont été boycottées par de nombreuses parties prenantes. Sur la base des recommandations finales des ANR, le gouvernement de transition a présenté un nouveau calendrier qui prévoyait la tenue de l’élection présidentielle en décembre 2025, ce qui permettait aux autorités de transition de rester au pouvoir pendant plus de cinq ans. En juin 2022, le gouvernement de transition a présenté à la CEDEAO un calendrier révisé prévoyant la tenue de l’élection présidentielle en mars 2024, soit plus de deux ans après la date limite fixée dans la charte de la transition. La CEDEAO a adopté en novembre 2021 des sanctions individuelles à l’encontre des autorités de transition (y compris Choguel Maïga) au motif qu’elles ont retardé l’organisation des élections et l’achèvement de la transition politique du Mali. La CEDEAO a souligné que les autorités de transition avaient utilisé la nécessité de mettre en œuvre des réformes comme prétexte pour justifier la prolongation de la transition politique du Mali et pour se maintenir au pouvoir sans élections démocratiques. Le 3 juillet 2022, la CEDEAO a décidé de maintenir ces sanctions individuelles. En tant que Premier ministre, Choguel Maïga est directement responsable du report des élections prévues dans la charte de la transition et, par conséquent, il fait obstacle et porte atteinte au parachèvement de la transition politique du Mali, notamment en faisant obstacle et en portant atteinte à la tenue d’élections et au transfert du pouvoir aux autorités élues.

A titre de comparaison, voici un extrait de ce qui est écrit concernant un autre malien : Mohamed Ben Ahmed Mahri : Mohamed Ben Ahmed Mahri est un homme d’affaires issu de la communauté arabe des Lehmar présente dans la région de Gao qui a par le passé collaboré avec le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (MUJAO) (QDe.134). Inscrit en application des dispositions des points 1 à 3 de la résolution 2374 (2017) du Conseil de sécurité (interdiction de pénétrer sur le territoire de l’UE, gel des avoirs). Photo disponible pour inclusion dans la notice spéciale Interpol-Conseil de sécurité de l’Organisation des Nations unies. Lien internet vers la notice spéciale Interpol-Conseil de sécurité des Nations unies: https://www.interpol.int/fr/How-we-work/Notices/View-UN-Notices-Individuals – Informations complémentaires : Mohamed Ben Ahmed Mahri est inscrit sur la liste en application des dispositions du point 8 c) de la résolution 2374 (2017) pour le fait d’agir pour le compte d’une personne ou entité se livrant aux activités visées aux points 8 a) et b) de la résolution 2374 (2017), ou en son nom ou sur ses instructions, ou de lui fournir toute autre forme d’appui ou de financement, notamment en utilisant le produit de la criminalité organisée, dont la production et le commerce illicites de stupéfiants et de leurs précurseurs en provenance du Mali ou en transit dans le pays, la traite des êtres humains, le trafic de migrants, la contrebande et le trafic d’armes et le trafic de biens culturels. Entre décembre 2017 et avril 2018, Mohamed Ben Ahmed Mahri a dirigé une opération de trafic portant sur plus de 10 tonnes de cannabis marocain, qui ont été acheminées dans des camions réfrigérés à travers la Mauritanie, le Mali, le Burkina Faso et le Niger. Dans la nuit du 13 au 14 juin 2018, un quart du chargement a été saisi à Niamey, et le reste aurait été volé par un groupe rival dans la nuit du 12 au 13 avril 2018. (…) Dès lors, grâce au produit de la criminalité organisée, Mohamed Ben Ahmed Mahri appuie une personne identifiée, en application du point 8 b) de la résolution 2374 (2017) comme menaçant la mise en œuvre de l’accord pour la paix et la réconciliation au Mali, et un groupe terroriste visé dans la résolution 1267.

On voit manifestement que ce qui est reproché à l’un (trafic de drogue visant à financer une activité terroriste) n’est absolument pas de la même nature que ce qui est reproché à l’autre (en tant que premier ministre, avoir modifié le calendrier de la transition et donc, le calendrier électoral). Dans un cas, on parle d’activités criminelles, dans l’autre, d’activités politiques relevant de l’exercice de ses fonctions par un premier ministre.

Nous sommes face à l’utilisation d’un dispositif de sanctions individuelles (dont on conçoit qu’il puisse avoir une pertinence dans le cadre d’activités de crime organisé et de terrorisme) à des fins d’ingérence politique dans le fonctionnement institutionnel interne d’un pays tiers.

Quel est le contenu politique de ce qui est reproché au Premier Ministre malien ?

Effectuons un petit retour (rapide et factuel) sur l’histoire récente du Mali. Comme cela est bien connu, le Mali subit depuis 2012 l’action de plusieurs groupes terroristes et, la plupart, islamistes qui ont pris le contrôle de zones parfois importantes du pays (situation qui n’est pas sans rapport avec la destruction par l’OTAN de la Libye voisine en 2011). En 2012, le président (ancien général) Amadou Toumani Touré qui avait été élu en 2002 puis réélu en 2012 est déposé par une mutinerie militaire, qui reproche au président son incapacité à vaincre les groupes terroristes. En 2013, une nouvelle élection présidentielle amène au pouvoir Ibrahim Boubacar Keïta qui est élu président de la République. En 2020, un nouveau coup d’état renverse le président (à qui on reproche à nouveau son incapacité à vaincre le terrorisme) et met en place un régime de transition, avec un Comité National de Salut Public, présidé par le colonel Assimi Goïta. Ce Comité nomme rapidement un Président de la Transition, Bah N’Daaw et un Premier Ministre de la Transition Moctar Ouane. En 2021, le Comité National de Salut Public, insatisfait de l’avancée de la situation démet de leurs fonctions ces deux personnes et nomme comme Président de la Transition le colonel Assimi Goïta et comme Premier Ministre de la Transition, Choguell Maïga. Après avoir dans un premier temps promis des élections pour février 2022, le pouvoir de la Transition se ravise et exprime la nécessité d’un travail de préparation approfondi, convoque les Assises Nationales de la Refondation et (comme le souligne d’ailleurs l’exposé des motifs du Gel des Avoirs “Sur la base des recommandations finales des ANR, le gouvernement de transition a présenté un nouveau calendrier” et reporte les élections.

Je fais ce petit détour pour exposer le contexte politique et le désaccord sous-jacent à ce qui est reproché à Choguell Maïga (et, à travers lui, au pouvoir de la Transition). Nous avons deux positions politiques :

  • le pouvoir de la Transition considère (non pas seul, mais sur la base des conclusions des Assises Nationales de la Refondation, auxquelles ont participé une partie significative des forces politiques maliennes) qu’il vaut mieux reporter les élections pour les réussir, et faire en sorte qu’un consensus national stabilise la situation du pays (par ailleurs en guerre civile et ayant subi plusieurs coups d’état dans la période récente.
  • l’UE, la France et la CEDEAO considèrent que la tenue rapide des élections est un préalable et à elle seule, permettra au Mali de résoudre ultérieurement les autres questions.

On peut évidemment associer à chaque point de vue des arrières pensées : on peut accuser le colonel Goïta et le Premier Ministre Choguell de repousser les élections pour rester au pouvoir, tout comme on peut accuser les groupes internationaux sus-mentionnés de vouloir des élections accélérées (sans débat approfondi) pour permettre le retour au pouvoir d’hommes avec lequel ils ont (plus ou moins secrètement) partie liée.

Je ne vais pas traiter le fond du désaccord (pour aborder la question, on peut commencer par lire le très intéressant document final des Assises Nationales de la Refondation à l’adresse suivante : https://www.maliweb.net/wp-content/news/images/2021/12/re%CC%81sultats-des-ANR-RECOMMANDATIONS-PANEL.pdf). J’invite néanmoins le lecteur à y réfléchir, car il s’agit d’une question politique à mon sens profonde et pertinente : est-ce que la démocratie peut se résumer à la tenue d’élections, ou bien y a t-il des conditions politiques pour que des élections permettent l’exercice réel de la souveraineté populaire, notamment une condition de temps et de modalités de préparation, dans l’objectif d’aboutir à un consensus national large sur l’intérêt vital du pays ?

La question que nous devons nous poser en premier lieu est la suivante : en quoi des pays et institutions étrangères sont légitimes à traiter d’une telle question à la place du peuple malien et de ses institutions ?

Et en quoi, les institutions d’un autre continent (l’Europe) sont-elles légitimes à prendre des “sanctions” INDIVIDUELLES et FINANCIÈRES contre le Premier Ministre en exercice d’un pays africain sur la base de telles considérations politiques ?

Comment en est-on arrivé là ?

Petite remarque préalable : il est évident que si le gouvernement d’un pays africain quel qu’il soit, prend un jour des sanctions individuelles et financières (quel qu’en soit le motif) contre le premier ministre d’un pays comme la France, cela n’aura absolument aucun impact autre que symbolique. Les “sanctions” économiques et financières sont par nature, l’arme (ici politique) des riches et des dominants.

Le régime du Gel des Avoirs est établi par l’Union Européenne, plus exactement par le Conseil des Chefs d’Etats et de Gouvernement dit “Conseil Européen”. Le 4 février 2022, le Conseil Européen a décidé de sanctionner 5 personnes du gouvernement Malien de la Transition, au motif du report du calendrier électoral annoncé le 8 janvier par le gouvernement Malien de la Transition à la CEDEAO. Le communique officiel stipule “Les cinq personnes désignées font l’objet d’une interdiction de voyager, qui les empêche d’entrer sur le territoire de l’UE ou de transiter par celui-ci, et d’un gel des avoirs. En outre, il est interdit aux citoyens et aux entreprises de l’UE de mettre des fonds à leur disposition, que ce soit directement ou indirectement.” (https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2022/02/04/mali-eu-adopts-targeted-sanctions-against-five-individuals/#).

On notera au passage que ces sanctions individuelles ne s’appliquent pas seulement aux personnes concernées, mais à tous les citoyens et entreprises de l’UE, qui sont interdits de mettre des fonds à leur dispositions, et ce “directement ou indirectement”. Imaginons que vous souhaitez apporter une aide au peuple malien et qu’une partie de cet argent parvienne au Premier Ministre de ce pays, vous pouvez être mis en cause.

Cette décision du 4 février s’appuie sur une décision précédente qui a institué la mise en place d’un régime de sanction spécifique à la situation malienne, cela a eu lieu le 13 décembre 2021. Le communiqué officiel du 13 décembre 2021 expose ainsi la situation : “Le Conseil a modifié aujourd’hui son régime de sanctions en raison de la situation au Mali, en établissant de nouveaux critères qui permettront à l’UE d’imposer de manière autonome des mesures restrictives aux personnes et entités responsables de menaces pour la paix, la sécurité ou la stabilité du Mali, ou d’obstacle à la mise en œuvre de sa transition politique. À ce jour, l’UE ne pouvait que transposer dans sa législation les sanctions décidées par les Nations unies.”(https://www.consilium.europa.eu/fr/press/press-releases/2022/02/04/mali-eu-adopts-targeted-sanctions-against-five-individuals/#). C’est très clair : “A ce jour, l’UE ne pouvait que transposer dans sa législation les sanctions décidées par l’ONU”. Or, l’ONU, si elle a condamné, comme il est d’usage, le coup d’état, n’a pas pris de régime de sanctions.

J’insiste à nouveau, voici une institution d’un autre continent, qui met en place une réglementation spécifique à la transition politique interne d’un pays tiers. C’est quasiment sans précédent. Et ceci s’effectue en s’émancipant, “comme si de rien n’était”, du cadre de l’ONU.

Comment fonctionne l’Union Européenne (dans ce type de décision) ?

Le 13 décembre 2021 avait donc lieu une réunion du Conseil de l’UE. Le Conseil de l’UE est une réunion des gouvernement, non pas au niveau des chefs d’état, mais au niveau des ministres (en l’occurrence ici, les ministres des affaires étrangères. La réunion au niveau des chefs d’états et de gouvernement est appelée “Conseil de l’Europe” (c’est subtil …). Le communiqué (référencé ci-dessus) a été publié à 10h30 (pour un début de réunion convoqué à 9h30). On peut trouver ici les documents disponibles relatifs à cette réunion : https://www.consilium.europa.eu/fr/meetings/fac/2021/12/13/

La décision concernant le Mali est reprise dans une longue liste de points intitulés “Liste des points A”, rubrique “Activités non législatives”, c’est le point n°6 : Décision et règlement du Conseil concernant des mesures restrictives en raison de la situation au Mali – Adoption – approuvé par le Coreper (2e partie) le 8 décembre 2021.

Décryptons un peu (source : https://www.vie-publique.fr/fiches/20328-quest-ce-que-le-conseil-de-lunion-europeenne-ue)

Le COREPER (2ème partie) est le comité officiellement formé par les ambassadeurs des différents pays de l’UE auprès de l’institution. Il a pour mission de préparer les décisions du Conseil et de s’efforcer de résoudre les points de divergence. En l’occurrence, il s’est réuni le 8 décembre, et on présume qu’il a constaté un accord sur ce dossier.

Le Conseil de l’UE, lorsqu’il statue sur la politique étrangère est présidé par le “Haut-représentant de l’Union pour les Affaires Étrangères et la Politique de Sécurité”, M. Josep Borrell (celui qui pense que l’Europe est un jardin et le reste du monde une jungle : https://observalgerie.com/2022/10/19/politique/europe-jardin-monde-jungle/).

Que signifie maintenant l’énigmatique mention “Activités non législatives” ? Et bien, nous explique le site “Vie publique” : chaque session du Conseil se compose de deux parties : les délibérations sur les actes législatifs de l’Union. Le Conseil siège alors en public ; et les activités non législatives (pour lesquelles donc, il siège à huis clos).

Enfin, le terme “Règlement” signifie, dans le jargon UEien que la décision doit être appliquée directement dans les pays membres.

Conclusion :

En conclusion, nous constatons que la décision de prendre, hors du cadre de l’ONU, et pour des motifs politiques, des sanctions individuelles et financières contre (entre autres) le Premier Ministre d’un pays tiers d’un autre continent a été prise en moins d’une heure lors d’une réunion à huis clos d’une petite trentaine de ministres des affaires étrangères, présidée par M. Borell sur lequel je m’abstiendrai d’en dire davantage.

Que conclure ?

Bien sûr qu’il n’est pas étonnant, dans ces conditions, de voir de nombreux africains rejeter l’action de la France et de l’UE. Mais cela doit nous interroger aussi sur le fonctionnement de nos institutions. La complexité du fonctionnement institutionnel de l’UE a un effet d’opacité. C’est un peu comme le latin pour la messe. On écoute, mais on ne comprend pas, cela évite la tentation de poser des questions. A force d’opacité, nous nous retrouvons avec des institutions qui donnent à la Terre entière des leçons permanentes de démocratie, mais qui agissent dans l’arbitraire le plus total.

La déclaration universelle des droits de l’homme (https://www.un.org/fr/universal-declaration-human-rights/) stipule (art. 8) que : “Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial, qui décidera, soit de ses droits et obligations, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle”.

Il n’y a ici ni tribunal, ni même accusation pénale contre M. Choguell, premier ministre du Mali. Pourtant, les mesures administratives prises contre lui et politiquement motivées, s’apparentent bel et bien à une condamnation. M. Choguell a t-il le droit de contester ces mesures ? Comment ? Quel tribunal “compétent”, indépendant et impartial” peut décider du bien fondé de la décision prise contre lui ? Si un citoyen français envoie un chèque à M. Choguell, que risque-t-il et comment pourra-t-il se défendre ? Si un lecteur féru de droit peut m’éclairer sur ce point, je suis preneur.

La déclaration précise aussi (art. 7) que “Tous sont égaux devant la loi et ont droit sans distinction à une égale protection de la loi. Tous ont droit à une protection égale contre toute discrimination qui violerait la présente Déclaration et contre toute provocation à une telle discrimination.” et que (art. 12) “Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.” et enfin que (Art. 15) “Nul ne peut être arbitrairement privé de sa propriété.

On mesure ici combien on joue sur les mots, pour contourner l’esprit de la déclaration : un compte en banque n’est ni une correspondance privée, ni même une propriété. Légalement, vous n’êtes pas “propriétaire” de l’argent que vous avez déposé à la banque. Vous détenez une créance sur la banque. Celle-ci s’est engagée en prenant votre argent à vous le rembourser. On prend une décision qui interdit à la banque de remplir cette obligation. On arguera j’imagine que dans ces conditions, le gel des avoirs ne “prive pas arbitrairement M. Choguell de sa propriété”. Mais, bon, on contourne quand même l’esprit de la déclaration des droits de l’homme, pour exercer, via sa vie privée, une pression politique sur le Premier Ministre d’un pays tiers. C’est à ce titre clairement une ingérence politique.

Enfin, et pour conclure cet article, il est évident que ceci n’est pas un monde équilibré, composé de nations égales et se considérant comme telles. Au fond, les bourgeoisies française et européenne, au travers de ce genre d’action, sont dans le déni de la fin de leur domination sur le monde en général et sur l’Afrique en particulier. A travers l’UE, elles ont construit des instruments politiques qui leur permettent d’agir sans contrôle. Aujourd’hui, l’émancipation réelle de l’Afrique du joug néo-colonial est en marche. C’est un combat ardu et difficile, qui se paye par le terrorisme, la faim et le sous-développement. Au contraire du combat contre le colonialisme, c’est un combat contre une domination qui se cache, qui ne s’affiche guère au grand jour, mais qui agit masquée, dans l’ombre ou sous des prétextes la dissimulant, notamment celui de la démocratie. Les classes travailleuses d’Europe n’ont que faire de ces vieilleries. Leur intérêt est, dans toutes les dimensions, à une Afrique libre et développée avec laquelle entretenir des relations fraternelles et mutuellement fructueuses. Nous avons aussi, ici, notre part à construire de cet avenir.

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