Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Qu’est-ce qui a été pire : l’industrialisation capitaliste ou la désindustrialisation par les mêmes ?

Si nous savons? et Marx et Engels ont beaucoup insisté là-dessus, leur rencontre et même leur collaboration s’est établie sur ce constat: la révolution industrielle sous la forme que lui a donné le capitalisme en Europe, aux Etats-unis et dans le reste du monde a été une épreuve terrible pour l’humanité mais elle a produit les fossoyeurs de ce même capitalisme : les prolétaires. Il y a eu donc un aspect indéniablement émancipateur dans cette abominable transformation sur lequel se sont opérés des crimes mais aussi des conquêtes sociales. voici donc la manière dont Marx et Engels ont décrit la classe sociale émancipatrice et la relation entre industrialisation, mondialisation (apparition de l’impérialisme) et classe sociale.

La premier fait, l’apogée du prolétariat européen et de ses luttes à savoir la commune de Paris, est aussi le moment où s’opère l’ouverture sur une nouvelle phase celle de l’impérialisme tel que le décrira Lénine, le partage du monde entre puissance concurrente et monopoles en train d’unir la puissance bancaire et industrielle dans le financier.

Le second fait dans lequel on assiste au contraire à la “désindustrialisation” que décrit le sujet video et qui frappe toute l’EUROPE et après la chute de l’URSS toute son ancienne aire d’influence a également été envisagée dans le Capital, le livre II débute en effet par la description de la manière dont toutes les phases d’accumulation du capital produisent ce que Marx appelle ses “invalides”. Avec ce village tzigane qui est décrit dans la video, mais aussi ce qu’on voit aujourd’hui en UKRAINE, comme dans toute l’EUROPE et même aux USA et qui se traduit par des phénomènes politiques de retour de l’extrême-droite, pas nécessairement dans ce prolétariat déclassé mais dans la petite bourgeoisie, qui a peur à la fois de l’insécurité qu’ils génèrent et de la contagion dans le déclassement nous avons le pourrissement d’une situation antérieure sur laquelle s’est édifié le capital et le pacte passé un temps avec sa propre classe ouvrière et qui devient caduque.

Le troisième fait est le caractère massif de ces “invalides” du capital et de sa phase d’accumulation définie comme néo-libéralisme, alors que comme l’a justement Jean Claude Delaunay il s’agit de comprendre l’impérialisme, le thème à la mode est celui des inégalités, mais il y a là plus que des “inégalités”, il y une destruction massive à la fois des êtres humains et de l’environnement, un phénomène planétaire auquel on voudrait résumer le “prolétariat”

Le quatrième fait est au contraire la montée en puissance de nouveaux rapports sud-sud avec l’intégration de nouvelles phases de production, d’échange et de tentative de maîtrise des circuits financiers, c’est ce qui nous intéresse dans ce blog.

Voici donc les étapes de constitution du prolétariat selon Marx et Engels. Etant bien entendu que chaque phase d’accumulation du capital produit une transformation de la classe ouvrière et “les invalides” de la phase précédente, la Lumprolétarisation, c’est ce qui est décrit en particulier dans le début du livre II du capital et illustré par l’effet des enclosures, la manière dont le prolétariat rural est chassé de ses terres pour aller se vendre au propriétaire des moyens de production. Il est doublement “libéré” du lien à la terre son moyen de production et “libre” d’aller se vendre. Quand il est question de migration, il faut bien voir les mécanismes à l’échelle planétaire par lesquels se développe la mise en mouvement y compris la desindustrialisation de la phase d’accumulation dite néo-libérale.

DANIELLE BLEITRACH

  1. PAR QUOI LE PROLETAIRE SE DISTINGUE-T-IL DE L’OUVRIER DE MANUFACTURE ?

L’ouvrier de manufacture du XVIe au XVIIIe siècle avait encore presque partout en sa possession un instrument de travail : son métier à tisser, son rouet pour sa famille, un petit champ qu’il cultivait pendant ses heures de loisir. Le prolétaire n’a rien de tout cela. L’ouvrier de manufacture vit presque toujours à la campagne et entretient des rapports plus ou moins patriarcaux avec son propriétaire ou son employeur. Le prolétaire vit dans les grandes villes et n’a avec son employeur qu’un simple rapport d’argent. L’ouvrier de manufacture est arraché par la grande industrie à ses rapports patriarcaux, perd la petite propriété qui lui restait encore et c’est alors qu’il devient un prolétaire.

  1. QUELLES FURENT LES CONSEQUENCES DIRECTES DE LA REVOLUTION INDUSTRIELLE ET DE LA DIVISION DE LA SOCIETE EN BOURGEOIS ET PROLETAIRES ?

Premièrement, le vieux système de la manufacture ou de l’industrie reposant sur le travail manuel fut complètement détruit, par suite de la diminution des prix des produits industriels réalisée dans tous les pays à la suite de l’introduction du machinisme. Tous les pays semi-barbares, qui étaient restés jusque-là plus ou moins en dehors du développement historique et dont l’industrie avait reposé sur le système de la manufacture, furent violemment arrachés à leur isolement. Ils achetèrent les marchandises anglaises à bon marché et laissèrent mourir de faim leurs propres ouvriers de manufacture. C’est ainsi que des pays qui n’avaient réalisé aucun progrès depuis des siècles, tels que l’Inde, furent complètement révolutionnés et que la Chine elle-même va maintenant au-devant d’une révolution. L’invention d’une nouvelle machine en Angleterre peut avoir pour résultat de condamner à la famine, en l’espace de quelques années, des millions d’ouvriers chinois. De cette manière, la grande industrie a relié les uns aux autres tous les peuples de la terre, transformé tous les marchés locaux en un vaste marché mondial, préparé partout le terrain au progrès et à la civilisation et fait en sorte que tout ce qui se passe dans les pays civilisés doit nécessairement exercer ses répercussions sur tous les autres pays ; de sorte que si, maintenant, les ouvriers se libèrent en Angleterre ou en France, cela doit entraîner comme conséquence dans tous les autres pays des révolutions qui, tôt ou tard, aboutiront, là aussi, à la libération des ouvriers.


Deuxièmement, la révolution industrielle, partout où la grande industrie a remplacé la production manufacturière, a eu pour résultat un développement extraordinaire de la bourgeoisie, de ses richesses et de sa puissance, et a fait d’elle la première classe de la société. En conséquence, partout où cela s’est produit, la bourgeoisie s’est emparée du pouvoir politique et a évincé les classes jusque-là dominantes : l’aristocratie et les maîtres de corporations, ainsi que la monarchie absolue qui les représentait toutes deux. La bourgeoisie anéantit la puissance de l’aristocratie, de la noblesse, en supprimant les majorats, c’est-à-dire l’inaliénabilité de la propriété foncière, ainsi que tous les privilèges féodaux. Elle détruisit la grande puissance des maîtres de jurande, en supprimant toutes les corporations et tous les privilèges corporatifs. Elle leur substitua la libre concurrence, c’est-à-dire un état de la société où chacun a le droit d’exercer la branche d’activité qui lui plaît et où rien ne peut l’arrêter dans cette activité que l’absence du capital nécessaire. L’introduction de la libre concurrence est, par conséquent, la proclamation publique que, désormais, les membres de la société ne sont inégaux que dans la mesure où leurs capitaux sont inégaux, que le capital est la puissance décisive et qu’ainsi les capitalistes, les bourgeois, sont devenus la première classe de la société. Mais la libre concurrence est indispensable, au début, au développement de la grande industrie, parce qu’elle est le seul régime qui permette à la grande industrie de croître. Après avoir ainsi anéanti la puissance sociale de la noblesse et de la corporation, la bourgeoisie anéantit également leur puissance politique. Devenue la première classe au point de vue économique, elle se proclame également la première classe au point de vue politique. Elle y parvient au moyen de l’introduction du système représentatif, qui repose sur l’égalité bourgeoise devant la loi et la reconnaissance légale de la libre concurrence, et qui fut établi dans les pays d’Europe sous la forme de la monarchie constitutionnelle. Dans ces monarchies constitutionnelles n’ont le droit de vote que ceux qui possèdent un certain capital, par conséquent seulement les bourgeois. Les électeurs bourgeois élisent des députés bourgeois et ces derniers, usant du droit de refuser les impôts, élisent à leur tour un gouvernement bourgeois.


Troisièmement, la révolution industrielle a partout provoqué le développement du prolétariat dans la mesure même où elle permettait le développement de la bourgeoisie elle-même. Au fur et à mesure que les bourgeois s’enrichissaient le nombre des prolétaires augmentait, car, étant donné que les prolétaires ne peuvent être occupés que par le capital et que le capital ne peut s’accroître qu’en occupant des ouvriers, il en résulte que l’augmentation du prolétariat va exactement de pair avec l’augmentation du capital. La révolution industrielle a également pour résultat de grouper les bourgeois comme les prolétaires dans de grandes agglomérations, où l’industrie est pratiquée avec le plus d’avantages, et de donner au prolétariat, par cette concentration des grandes masses dans un même espace, la conscience de sa force. D’autre part, plus la révolution industrielle se développe, plus on invente de nouvelles machines qui éliminent le travail manuel, plus la grande industrie a tendance, comme nous l’avons déjà dit, à abaisser le salaire à son minimum, rendant ainsi la situation du prolétariat de plus en plus précaire. La révolution industrielle prépare ainsi, du fait du mécontentement croissant du prolétariat, d’une part, et du fait du développement de sa puissance, d’autre part, une révolution sociale que conduira le prolétariat.

XII. QUELLES FURENT LES AUTRES CONSEQUENCES DE LA REVOLUTION INDUSTRIELLE ?

La grande industrie créa, avec la machine à vapeur et autres machines, les moyens d’augmenter rapidement, à peu de frais et jusqu’à l’infini la production industrielle. La libre concurrence imposée par cette grande industrie prit rapidement, à cause de cette facilité de la production, un caractère extrêmement violent. Un nombre considérable de capitalistes se jetèrent sur l’industrie, et bientôt on produisit plus qu’on ne pouvait consommer. La conséquence fut que les marchandises fabriquées ne trouvèrent pas preneur et que survint ce qu’on appelle une crise commerciale. Les usines durent arrêter le travail ; les fabricants firent faillite et les ouvriers furent condamnés à la famine. Il en résulta partout une grande misère. Au bout de quelque temps, les produits superflus vendus, les usines commencèrent de nouveau à travailler, les salaires augmentèrent et, peu à peu, les affaires marchèrent mieux que jamais. Mais pas pour longtemps, car, de nouveau, on produisit trop de marchandises et une nouvelle crise se produisit, qui prit exactement le même cours que la précédente. C’est ainsi que, depuis le début de ce siècle, l’état de l’industrie a constamment oscillé entre des périodes de prospérité et des périodes de crise, et presque régulièrement, tous les cinq ou sept ans, une crise semblable s’est produite, entraînant chaque fois une grande misère pour les ouvriers, une agitation révolutionnaire générale, et un extrême danger pour tout le régime existant. »

in ENGELS, Friedrich, Principes du communisme (1847), d’après la traduction aux Éditions sociales, Paris, 1968

Print Friendly, PDF & Email

Vues : 173

Suite de l'article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

La modération des commentaires est activée. Votre commentaire peut prendre un certain temps avant d’apparaître.