Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

PATRONAT TON UNIVERS IMPITOYABLE OU L’OPPORTUNITE DE L’ISOLEMENT

Dans la logique de deux interviews, celui de Laurent Brun à la Pravda, dont il faut reprendre chaque phrase pour bien comprendre les choix devant lesquels les communistes sont placés et le mien hier face à Aymeric Monville, mon éditeur chez Delga. Ce qui se joue face à cette logique de prédateurs qui paraît non seulement criminelle mais imbécile c’est la survie de l’espèce humaine et dans le court terme la possibilité d’une résistance. C’est pourquoi il faut faire un constat de faillite face à ceux qui ont pratiqué à gauche et même chez les communistes la collaboration avec de telles politiques et ont accepté de cautionner toutes les dérives idéologiques destinées à masquer la réalité de ces politiques.

Dans un article du 22 janvier, Le Monde décrit la manière dont « La crise liée au Covid-19 a désinhibé les patrons » : putschs et coups fourrés, le capitalisme français sent la poudre Scor-Covéa, Unibail, Suez-Veolia, Lagardère… Les groupes français sont le théâtre d’âpres batailles, où intimidations et guerres judiciaires prospèrent. L’État paraît impuissant à pacifier les belligérants. L’article signé par Isabelle Chaperon, surtout si on l’accompagne comme nous le faisons d’un autre sur l’assaut subi par le groupe Danone dit à quel point la logique du profit a pris le pas sur toute autre considération. Ce n’est pas la pandémie qui est à l’origine de ces mœurs et de l’accélération de la désinhibition, l’élection de Macron comme réponse à la crise le manifestait déjà et la description de la reprise en main de Danone se situe avant le phénomène. La crise dont il est question est une crise de surproduction classique par rapport au marché solvable doublée d’une crise financière de baisse du taux de profit. Mais tout se passe comme si la manière dont on a plus ou moins réussi à isoler la population par la pandémie rendait fou le capital. Son État, son gouvernement profite de la situation pour accroitre l’arsenal législatif répressif contre le monde du travail, tandis que les requins du capital se déchirent en exigeant des rentabilités boursières accrues. C’est en fait plus que la description de l’autophagie d’une classe dominante c’est un modèle de “sociabilité” qui s’impose à toute la société et qui n’est pas étrangère au nombreux coups de forces perpétrés au sein du monde intellectuel, politique. Un univers mafieux où tous les coups sont permis, l’isolement des victimes le permettant. Je ne peux m’empêcher de considérer que ce qui se passe au sein du PCF, les mœurs mafieuses de fait qui se développent contre la base ne sont pas étrangères à cette forme de “sociabilité” que la classe dominante impose à l’ensemble de la société. (note de Danielle Bleitrach pour histoire et société)

Le Covid-19 aurait-il un effet inattendu sur la testostérone des grands patrons ? dit l’article qui adopte le ton des tontons flingueurs pour décrire les mœurs de ces gens-là : tout porte à le croire, tant ça castagne dur dans les entreprises du CAC 40 et consorts. Putsch chez l’opérateur de centres commerciaux Unibail, puis chez le sucrier Tereos. Les frères ennemis de l’eau, Suez et Veolia, qui s’envoient à la figure invectives et huissiers, comme d’autres la vaisselle. Procès pénal qui s’ouvre en juillet pour le PDG de Covéa (MAAF, MMA, GMF), à la suite d’une plainte diligentée par le réassureur Scor. Le capitalisme français – et même son cousin de province, le mutualisme –, « c’est du brutal », pour paraphraser Raoul Volfoni dans Les Tontons flingueurs.

D’autres, toutefois, flairent une virulence, une agressivité exacerbées, avec des coups portés sous la ceinture, comme si l’entre-soi avait tourné à la haine, à l’envie de faire mal. Au même titre que les dogmes des finances publiques, les convenances et les « ça ne se fait pas » semblent avoir volé par-dessus bord pendant la tempête sanitaire et économique.
L’article décrit un État aussi impuissant à contrôler les appétits féroces qu’il l’est à mener une bataille cohérente contre la pandémie. Il n’est pourtant pas inactif non seulement il déverse des sommes gigantesques sur les belligérants mais il s’occupe à faire passer des lois liberticides car ils savent bien que quand l’épidémie s’arrêtera ils risquent d’avoir à faire à une explosion sociale de grande ampleur. Toute cette pratique politique s’accompagne d’un discours sur les faits sociaux, les scandales hors sphère de l’exploitation patronale et des grandes manœuvres autour de la lutte contre les tyrannies extérieures, la Chine, la Russie étant les ennemis désignés,la xénophobie entretenue.

Mais est-ce que cela a débuté avec la pandémie, certainement pas, il suffit de se souvenir de l’opération Danone et d’autres du même acabit pour comprendre la logique de cette crise structurelle et de la nécessité dans laquelle ils se sont trouvés de chercher des modes de gestion étatique qui renforce la dictature du capital.

« La crise a désinhibé les patrons », concède un pilier des milieux d’affaires parisiens. « “Tout est permis” est devenu le pendant dans le monde des affaires du “quoi qu’il en coûte” d’Emmanuel Macron », souligne Julien Vaulpré, directeur général du cabinet de conseil Taddeo, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy. Les tontons flingueurs cela fait songer à une affaire de famille, en fait ce n’est pas le seul entre soi et l’article renvoie en matière de mœurs à la manière dont en février 2019 le fonds activiste Bluebell Capital Partners s’était, en effet, invité au capital du groupe français d’agroalimentaire, comme l’a révélé le magazine Challenges, lundi 18 janvier.

Ce financier peu connu, mais respecté à Londres, dit l’article militait pour un changement de gouvernance à la tête de l’entreprise, un des fleurons du CAC 40, avec ses marques Evian, Activia ou Blédina. Dans une lettre adressée le 19 novembre 2020 aux administrateurs du groupe, dans laquelle il ne dévoile pas le montant de son investissement, Bluebell Capital critique d’abord la performance boursière de Danone sous la mandature de M. Faber, jugée « décevante », comparée à celles de Nestlé ou d’Unilever. Il considère que cette contre-performance ne reflète pas la qualité des actifs de l’entreprise. Il se dit d’ailleurs « fervent supporteur du double projet économique et social de Danone et de ses engagements en faveur du développement durable ». Mais il estime que, sous la direction de M. Faber, le groupe n’a pas trouvé « le bon équilibre entre la création de valeur pour l’actionnaire et les questions de durabilité ».

Ces deux cas empruntés au journal le Monde qui n’est pas particulièrement un journal révolutionnaire disent assez où en est la voracité de la classe dominante parce qu’il faut bien mesurer que ces voraces qui se la jouent “brutal” au nom essentiellement des profits de l’actionnaire n’ont qu’une logique faire payer aux salariés et à l’ensemble des citoyens leur guerre et leur recherche du profit. Les sommes fabuleuses exigées pour accroitre encore leur profit alors que les banques centrales sont obligées à pratiquer un taux nul vont être financées de la même manière.

Cette guerre féroce pour les profits est encore plus productrice de perte d’emplois que les mesures de confinement imposées par la pandémie dans des secteurs comme la restauration que l’on met en avant mais qui masquent un processus beaucoup plus destructeur. C’est ainsi que les journaux économique nous annoncent que 225 millions d’emplois à temps pleins ont été détruits en 2020 à cause du Covid-19 et que ce sont les jeunes de 18 à 24 ans qui subissent le plus ce phénomène. Mais ces statistiques masquent la réalité à savoir les secteurs qui touchent le pactole de l’aide et qui loin d’en faire bénéficier leurs salariés en profitent pour continuer la pression sur les salaires et sur l’emploi. L’avantage de l’attribution de la “crise” au covid c’est que cela entraîne une division entre catégories d’âge, d’emplois et que cela masque les responsabilités patronales.

Le désordre qui semble s’être institué dans les systèmes capitalistes autour de la gestion du COVID ne doit pas simplement être analysé comme de l’incompétence, mais bien comme un triple effet du système du profit.

1- d’abord parce que c’est pour avoir démoli les services publics et les chaînes de production, en privatisant et en délocalisant que le gouvernement français n’a plus les moyens de sa politique.

2- parce que ces politiques poursuivies sous le gouvernement de gauche comme de droite ont sanctionné leur démission face aux diktats de l’UE tout entière soumise à ces politiques au service du capital.

3- parce que le capital n’a pas arrêté ses luttes internes et continue à exiger la chair et le sang des populations et que le gouvernement tout en continuant à les servir perd encore un peu plus la capacité à faire face à l’épidémie.

On conçoit mieux comment parallèlement il leur faut empêcher toute contestation sociale non seulement réprimer avec férocité les luttes mais empêcher toute forme d’organisation qui ne relève pas du consensus. Quand on comprend cela on sait que si la barque tangue à l’intérieur des organisations les plus révolutionnaires c’est le capital financier et sa férocité qui imprime la tempête même si les timoniers du naufrage sont apparemment des gens de “gauche”.

C’est pourquoi il faut faire un constat de faillite face à ceux qui ont pratiqué à gauche et même chez les communistes la collaboration avec de telles politiques et ont accepté de cautionner toutes les dérives idéologiques destinées à masquer la réalité de ces politiques.

Danielle Bleitrach

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