Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Serguei Narychkine : l’histoire du Comintern est riche en enseignements utiles et pratiques

Voici encore un texte fondamental que nous a préparé Marianne Dunlop, puisqu’il s’agit non pas d’un texte du KPRF revenant sur l’apport du Comintern, mais d’une table ronde de l’Université d’Etat sur ce qu’a été l’internationale communiste. Cette analyse fait aussi partie de ce que tente le pouvoir russe, à savoir comme l’a fait Poutine pour sa propre élection présidentielle recueillir en tant que chef des armées, voire héritier de la Russie monarchique autant que de l’URSS, recueillir l’élan patriotique du peuple russe. L’idéologie du pouvoir et de son parti Russie Unie a toujours été anticommuniste – elle ressemble beaucoup au gaullisme – mais face à la nécessité d’affronter l’OTAN, la guerre sur trois fronts comme le disent les Chinois ou la guerre que l’on fait avaler par morceaux aux peuples, on assiste à une captation d’héritage qui ne cesse de grandir dans le peuple russe. (note de danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

https://historyrussia.org/sobytiya/s-e-naryshkin-segodnya-iz-opyta-kominterna-mogut-byt-izvlecheny-poleznye-prikladnye-uroki.html

Le 16 mai 2024, l’Université sociale d’État de Russie a accueilli une table ronde consacrée à l’histoire de l’Internationale communiste. Serguei Naryshkine, président de la Société historique russe [et directeur du Service des renseignements extérieurs de la fédération de Russie], a participé à l’événement.

Dans son discours, Serguei Evgenievitch a souligné le rôle important de l’organisation de l’Internationale communiste dans la lutte contre le fascisme :

« Vu d'aujourd'hui, il est évident que les idées du Comintern n'ont pas passé l'épreuve du temps, mais dans leur essence, elles n'étaient pas destructrices, mais, à leur manière, progressistes et constructives. Je note que l'opposition implacable de l'Internationale communiste au nazisme a joué un rôle non négligeable dans la popularité de l'Internationale communiste. Dès 1923, la direction du Comintern a créé le Comité mondial de lutte contre le fascisme et, lors du septième congrès de l'Internationale communiste, qui s'est tenu ici à Moscou en 1935, la lutte irréconciliable contre le fascisme a été déclarée tâche de toutes les forces de gauche. Avec le temps, le contraste évident entre la politique perfide d'« apaisement de l'agresseur » menée par les puissances occidentales et la position inflexible de l'Union soviétique a conduit de nombreux membres de l'Internationale communiste à coopérer avec les services de renseignements étrangers soviétiques ». 

Au début du XXe siècle, le Comintern, qui réunissait les partis communistes de plusieurs dizaines de pays, est devenu le principal défi à l'ordre mondial colonial existant. Par l'intermédiaire de l'organisation, l'Union soviétique a apporté un soutien politique et économique aux mouvements de libération nationale dans le monde entier, a contré la menace nazie et a mené des activités de renseignement à l'étranger. Aujourd'hui, le bâtiment du comité exécutif du Comintern abrite l'un des bâtiments de l'Université sociale d'État de Russie. 

 Andrey Khazin, recteur de la RGSU et académicien de l'Académie russe des arts, a souligné que les traditions conservées par la Maison du Comintern peuvent devenir un pilier dans la construction d'un monde nouveau aujourd'hui :

    « Le bâtiment principal de notre université, héritière des traditions de l'université communiste Sverdlov, au sein de laquelle les quatre universités du Comintern ont fusionné dans les années 30, et de l'école supérieure du comité central du parti communiste de toute l'Union, est situé dans la légendaire maison du Comintern. C'est ici qu'ont travaillé, avant et pendant la guerre, les plus fidèles alliés de notre pays, dont plus d'une douzaine sont devenus les dirigeants de leur pays après la victoire de 45. Ils ont été confrontés à la tâche de créer un nouveau système mondial fondé sur des principes d'organisation sociale et politique différents de ceux qui prévalaient auparavant. Nous pouvons avoir des attitudes différentes à l'égard de l'idéologie communiste, mais une chose est sûre : ils ont atteint leur but. Aujourd'hui, notre pays est à nouveau confronté à une telle tâche. Et nous, en nous appuyant notamment sur l'expérience organisationnelle du Comintern, nous serons en mesure de la mener à bien dans des conditions nouvelles ». 

Konstantin Mogilevsky, vice-ministre de l'enseignement supérieur et des sciences et coprésident de l'OIR, a déclaré que ce sont les idées créatives de l'Internationale communiste qui ont attiré les jeunes étrangers à visiter l'URSS et à recevoir une éducation soviétique :

    « Les membres de l'Internationale communiste se sont unis sur la base de l'égalité, de leurs idées sur la nature du processus historique et sur la direction que prenait le monde. Le rôle prépondérant de notre pays était dû au fait que des événements que beaucoup considéraient comme « l'avant-garde des processus historiques mondiaux » s'y déroulaient. Les idées du Comintern ont séduit de nombreuses personnes parce qu'elles étaient constructives. Il s'agissait d'idées pour un monde juste avec des chances égales pour tous. C'est pourquoi, dans l'entre-deux-guerres, les idées du Comintern ont attiré les jeunes, et c'est à ce moment-là que notre éducation est devenue attrayante pour les étrangers. Nous nous souvenons également de l'Université communiste des travailleurs de l'Est et d'autres établissements d'enseignement supérieur qui ont été créés à l'époque précisément pour former des étudiants étrangers ». 


Poursuivant sa réflexion sur l'influence internationale du Comintern, Alexandre Tcohubarian, coprésident de l'OIR et directeur scientifique de l'Institut d'histoire générale de l'Académie des sciences de Russie, a souligné :

    « Je voudrais attirer l'attention sur le rôle du Comintern dans l'histoire mondiale. Bien qu'il ait été créé à l'initiative des dirigeants soviétiques, il s'agissait d'une nécessité de l'époque et d'un processus objectif qui s'est déroulé au début du 20e siècle. Tout d'abord, le mouvement révolutionnaire de gauche se développait partout. Par conséquent, la création du Comintern ne reflétait pas seulement la contribution des bolcheviks et la compréhension de leur objectif, mais elle était une conséquence et reflétait les tendances qui se manifestaient ». 

Alexander Vatlin, professeur à la faculté d'histoire de l'université d'État Lomonosov de Moscou, a évoqué les problèmes liés à la préservation de la mémoire des activités de l'Internationale communiste :

    « Dans les années 80 et 90, le Comintern est tombé dans l'oubli. Et il y a de sérieuses raisons externes et internes à cela. Parmi les raisons externes, nous pouvons rappeler qu'après la fin de la guerre froide, le Comintern, en tant que projet scientifique, est devenu une victime. Par ailleurs, il n'y a plus de véritables héritiers institutionnels du Comintern, nous ne faisons que réclamer la mémoire de nos prédécesseurs. Enfin, le Comintern était une organisation très documentée, mais elle ne l'était pas d'une manière qui soit importante pour l'historien. Il y avait des milliers de pages de débats idéologiques, de rapports, mais ce qui se passait réellement dans la pratique était clandestin et classifié. Il me semble que nous devons combiner la mémoire historique, grâce à la Société historique russe, et une modeste analyse scientifique froide ». 



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2 Commentaires

  • Xuan

    Russie Unie rêve peut être de prendre la place du parti père, mais cette époque est révolue dans un monde multipolaire.

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  • Etoilerouge
    Etoilerouge

    Le capitalisme se sent en danger tant qu’existera un parti communiste. Russie Unie est renforcé par la guerre, la nécessité de s’unir face à l’OTAN. Le danger de réduire le communisme est réel. A l’inverse une défaite propulsera le kprf au pouvoir. Chaque acte économique de Poutine est pro capitaliste. D’où l’importance d’unir à nouveau les partis communistes, d’où l’importance du PCF et la nécessité de battre la droite au sein du parti.

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