Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Du consensus autour de la guerre “picrocholine” ou de la “dépolitisation” française par Danielle Bleitrach

Jamais un gouvernement aussi nul et minoritaire dans l’opinion publique n’a joui d’un consensus aussi stupéfiant sur ce qui fonde la citoyenneté, la capacité de décider de la paix et de la guerre. Pèse sur ce vol de la citoyenneté, la Constitution qui permet au président monarque de ne solliciter l’avis de personne si ce n’est ses conseillers courtisans et ses bailleurs de fond, il y a la fraude européenne qui méprise le vote référendaire comme celui des parlementaires, mais il y a aussi un consensus imbécile y compris au parlement dont nous prétendons traiter ici.

Le discours macronien, repris et amplifié par Glucksmann et d’autres, est un tel déni de raison que c’est l’ensemble du débat politique qui en parait entaché de nullité. L’expression « guerre picrocholine » et l’adjectif « picrocholin » sont un peu désuets, mais ils sont passés dans le langage courant pour qualifier un conflit absurde, déclenché pour des motifs insignifiants. Picrochole est l’exemple type du mauvais roi, que François Rabelais cherche à dénoncer, par opposition au bon roi, représenté par Grandgousier, père de Gargantua. Emporté par un caractère revanchard et belliqueux et par une folie mégalomane, ce gouvernant stupide provoque pour des raisons futiles un conflit avec le royaume de Grandgousier. Finalement, la guerre de conquête qu’il a lancée contre son voisin se termine pour lui par une déroute total. Pichrocole Macron avec en écho Glucksmann, veulent nous faire prendre leurs grotesques provocations pour du courage alors qu’ils ne risquent rien, et le pire est que personne ne parait prendre la mesure de ce que signifie reconnaitre que l’on va envoyer des troupes en Ukraine, alors que l’on y est déjà de mauvaise façon, ce qui est stupéfiant de sottise assumée.

Qu’un tel déni de bon sens ait pour seul écho les interventions médiatiques tout aussi picrocholinnes, ces pseudos spécialistes qui devisent gravement sur notre puissance nucléaire ou poussent des soldats de plomb devant eux en jurant que l’armée russe est incapable d’aller plus loin (bien que paradoxalement elle nous menace à Paris) est proprement stupéfiant. Rien ne les arrête dans la surenchère surtout pas la vraisemblance, et pourtant cette bande puérile et effrayante a réussi à créer un halo autour de ce qu’il est interdit de dire au point que l’on eut hier au parlement à discuter du déficit français sans que personne n’ose effleurer négativement l’affirmation de Lecornu de la France entrant dans une économie de guerre et le ruissellement qui va être déversé sur les marchands d’armes. Qui ne voit pas au pays de Rabelais que tout ces gens méritent un bon coup de pied au cul et que ceux qui n’osent pas le flanquer se condamnent à leur tour à ne plus être crédibles : le débat politique, les élections proches ne veulent plus rien dire quand on accepte de restreindre la connaissance des faits à de la propagande sans la moindre profondeur parce que l’on chie dans sa culotte comme le dirait Rabelais sans ménagement, tout ce qu’on peut échanger par ailleurs est “dépolitisé”.

Pire encore ce qui faisait que la France participait à l’universel est renié, quand on choisit de renoncer à Rabelais pour se confondre avec l’étroitesse colonialistes et la vassalité aux USA, comme Glucksmann et Macron, ces gens-là ne sont crédibles ni pour le peuple français ni pour la planète…

Quand on lit les textes venus de Russie, on voit au contraire des gens pour lesquels l’enjeu est vital et combien il s’est construit de désillusion en désillusion sur ce que l’on peut espérer de l’occident, on peut être d’accord ou pas c’est nettement moins dérisoire.

POSER LES TERMES D’UNE NÉGOCIATION RELÈVERAIT DE LA TRAHISON

Le degré d’irresponsabilité grotesque tient non seulement à la capacité de mener un tel affrontement par un Macron et d’autres mais de prétendre créer un état d’esprit qui considère que toute véritable négociation relève de la haute trahison. Marteler qu’il n’y aura pas de paix si on ne suit pas cette bande de délirants devrait ne susciter qu’un énorme éclat de rire. Que ces âneries soient énoncées par des gens qui ne feront pas la guerre dont ils fantasment les épisodes depuis des années comme s’il s’agissait d’un match de foot est au delà du supportable, quand on sait à quel point ils sont intervenus pour empêcher les négociations en cours. Comment cette troupe n’a cessé de multiplier les provocations et les crimes contre les populations civiles sous tous les climats et en particulier en Ukraine,. Comment aujourd’hui encore, ils nous invitent à nous réjouir de ces crimes comme des victoires destinées à faire oublier ce qu’il est interdit de dire, le fiasco militaire. Comment ne pas voir qu’une telle attitude autant que les mœurs habituelles des USA et des ses “alliés” dont la France et la Grande Bretagne rend crédible les accusations de participation à la boucherie moscovite. Et le spectacle de ces pitres comme ici Johnson et Zelensky ne peut qu’inspirer le dégout à tout individu sensé.

Il ne suffit pas d’une minute de silence hâtif de l’invraisemblable parlement français parce qu’on se sait à découvert aux yeux de la planète, tout aussi hâtif que de ne plus oser mettre son droit de veto à l’ONU à propos de Gaza, ou d’aller jouer les tiers-mondistes en Guyane ou en se faisant adouber par Lula, quand ce qu’on est devient un tel handicap planétaire .

La question est de savoir pourquoi ces gens n’ont plus de réelle opposition en matière géopolitique et de la guerre picrocholine, pourquoi il existe cet étrange consensus pourquoi même ceux qui n’atteignent pas le degré de déconsidération d’un Glucksmann semblent avoir d’abord renoncé à l’idée simple que l’on ne fait pas la paix entre amis mais avec l’ennemi. Pour faire la paix, Il faut que des gens que tout oppose acceptent un dialogue, la reconnaissance de l’existence de divergences qui peuvent être fondées, pourquoi de fait chacun accepte le deal oser refaire l”histoire réelle serait une pactisation avec le mal absolu.

Pourquoi le mal absolu ? Là c’est encore plus extraordinaire, on nous demande d’être l’ennemi de l’ennemi de l’OTAN, des USA, d’un système hégémonique mondialisé, les Russes ne sont pas à nos frontières, ils ne lèsent pas nos intérêts même si Macron leur attribue la manière dont il se fait chasser de l’Afrique, ils ne sont pas pour grand chose dans le mépris dans lequel on tient nos élites. Non, ce qu’il faut que nous gobions comme si nous étions un parlementaire français c’est la choix de l’UE. Le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, vient de déclarer à propos de la situation actuelle sur le front oriental : „Nous ne pouvons pas nous permettre que la Russie gagne cette guerre sinon les intérêts américains et européens seront très endommagés. Ce n’est pas seulement une question de générosité, ce n’est pas une question de soutenir l’Ukraine parce que nous aimons le peuple ukrainien. C’est dans notre propre intérêt et c’est aussi dans l’intérêt des États-Unis en tant qu’acteur mondial… “

Qui est convaincu que les intérêts des Etats-Unis et ceux du Français lambda sont totalement confondus? Cela peut suggérer quelques doutes mais nous sommes gouvernés par une bande de fanatiques radicalisés qui considèrent que tous ceux qui osent tenter de mettre en relief les raisons de la guerre du côté de Poutine, sont des traitres qu’il faut exclure, interdire, et pourquoi pas finir par incarcérer.

Celui qui n’accepte pas de participer à un tel délire fait le jeu de l’ennemi et ils ont réussi effectivement à museler le parlement, cela va très loin, quand il est question du déficit français personne n’ose faire la moindre remarque sur le don nécessaire à Zelensky, on prend aux capitalistes mais jamais à ceux de l’armement comme c’est bizarre pourtant un simple missile c’est de l’ordre d’un million de dollars… Non ils ont réussi à bloquer toute voix en faveur de la paix, parce qu’en parodiant De Gaulle, on pourrait dire que ceux qui bêlent Paix, Paix et qui dans le même temps se croient obligés d’inventer, parce que comme nous allons le voir il s’agit bien d’invention que nous sommes devant le mal absolu ne font que justifier notre soumission au USA. De surcroit, on ne négocie pas avec le mal absolu et tout a été fait pour faire de Poutine ce mal absolu et il n’y a pas un parlementaire français pour aller contre cette fable.

NON CE N’EST PAS LA RUSSIE QUI CHERCHE UNE GUERRE NUCLÉAIRE, NI DE “CIVILISATION”, ET CE DEPUIS 2001

Déjà reprendre l’histoire à partir de 2014 est édifiant, mais interdit, puisque la fiction fanatique veut que tout doive impérativement débuter en 2022, on n’en finirait pas d’énumérer tous les mensonges dont nous sommes d’ailleurs abreuvés depuis cette date, la manière dont on nous a gorgés de fausses victoires et de maladies de Poutine. Revoir depuis 2022 ce qui s’est affirmé sur les plateaux de télévision, les faux experts à qui on a fait appel est sans appel et déshonore un peu plus les élites politico-médiatiques qui ont accepté de se taire et continuent de fait à cautionner comme l’ensemble du parlement français…

Pourtant il est aisé de reprendre l’histoire post soviétique et l’on s’aperçoit que toutes les tentatives du dit Poutine pour s’intégrer à l’occident ont été repoussées et que les communistes russes n’ont pas tort de dénoncer le caractère tardif de la prise de conscience du danger d’une Russie aux mains de l’oligarchie.

Il y a une date en particulier qui est importante, en 2002 avec “la lutte contre le terrorisme” puisque celui-ci se rappelle à notre souvenir et donne lieu à un nouveau numéro de danseurs de claquettes sur la paranoïa russe qui voit la main de l’occident dans la culotte de daech comme elle l’était dans celle de ben laden :

En 1949, l’URSS acquiert l’arme atomique ce qui est resté à ce jour la seule garantie de ne pas voir se renouveler l’expérience d’Hiroshima même en Corée. L’OTAN prétend être une réponse à cette capacité nucléaire mais c’est une division de l’Europe et une récupération systématique des forces nationalistes, anticommunistes et le plus souvent fascistes comme “noyaux de liberté”.

En 2002, George W. Bush met fin au traité de contrôle et de limitation des armes ABM (Traité sur les missiles anti-balistiques) signé en 1972. Dans le contexte post-11 septembre, les Etats-Unis font un choix qui n’a rien d’obligatoire et qui parait même totalement absurde. Si Bush dénonce ainsi unilatéralement le traité de contrôle et de limitation des armes c’est que dans le cadre, explique-t-il, du 11 septembre il veut pouvoir frapper l’ennemi partout, l’extraterritorialité n’a plus aucun frein, l’armée des Etats-Unis a tous les droits, ses bases se multiplient et elles deviennent bizarrement le foyer à partir desquels se multiplient les trafics de drogue et d’armes, les attentats criminels. Pourquoi Bush et ses commanditaires ont-il besoin de pousser cela jusqu’au nucléaire, on pourrait s’interroger s’agit-il d’envoyer des bombes atomiques sur Ben Laden au fond de sa grotte ? Non, il y a utilisation du 11 septembre par les néo-conservateurs et les extrémistes de droite, tous ayant des intérêts matériels à ce choix qui prétendent lutter “contre le terrorisme planétaire” en terme d’affrontement d’Etat dont on invente comme pour l’Irak (en 2003) la capacité de nuisance (le plus souvent d’ailleurs en utilisant Israël et l’analogie avec le nouvel Hitler). Cela va avec l’extension de l’OTAN vers l’est et une logique de militarisation qui frappe tous les continents y compris avec l’aide du dollar. Les promesses faites à Gorbatchev de ne pas étendre l’OTAN au-delà de l’Allemagne réunifiée n’étant en rien respecté. Notez que les demandes en 2001 de Poutine à Clinton qui semblaient accueillies avec des applaudissements lors de son discours devant le Bundestag le 25 septembre 2001 seront repoussées alors même que Bush rompt l’accord sur les armes nucléaires.

Tant que l’on ne saisit pas cette logique qui est antérieure au coup d’Etat de 2014 et de l’attaque des populations russophones qui refusent de devenir des bastions de l’OTAN contre la Russie, on peut toujours diaboliser comme le font toutes les forces politiques française la Russie et son dirigeant. Le plus extraordinaire est qu’il n’y a plus eu une seule voix au parlement français, plus un seul organe de presse pour aller contre cette logique délirante. Non on a construit de toutes pièces une conviction : celui qu’on agresse est plus qu’un adversaire, il est le mal absolu.

CELUI QUI REFUSE LA GUERRE DES CIVILISATIONS ET LE RACISME C’EST POUTINE

mais on peut aller encore plus loin dans l’opposition face à cette politique de diabolisation du “terrorisme” pour en fait attaquer des Etats et les détruire en les transformant en zone de misère et de guerre. Puisque nous sommes devant un attentat et que l’Occident, la france en premier attribuent à l’Etat islamique ce massacre. nous ne reviendrons pas sur le fait que l’Etat islamique est la créature de ces mêmes néo-conservateurs(1) . Contentons nous de revenir au fameux discours devant le Bundestag de 2001. C’est du Gorbatchev pur jus : “la Russie est une nation européenne amie” il parle d “maison commune”. Pourtant il y a une différence déjà Poutine refuse l’idée d’une “guerre de civilisation”, elle est étrangère à sa conception de la Russie. La Russie a connu des révoltes par exemple au Daghestan en septembre 1999 : le Djamaat islamique du Daghestan, avait déclaré comme nulle la constitution russe et instauré la Charia dans de nombreux villages. S’en était suivi une alliance avec les forces tchétchènes. Les rebelles wahhabites seront repoussés avec un repli en Tchétchénie. Poutine parle d’un monde devenu “plus complexe” : « Je tiens à souligner d’emblée que parler d’une quelconque « guerre de civilisations » est inadmissible. Ce serait une erreur d’assimiler les musulmans dans leur ensemble aux fanatiques religieux. Peu avant mon départ pour Berlin, j’ai rencontré les chefs religieux des musulmans de Russie. Ils ont décidé d’organiser à Moscou une conférence internationale sur « l’Islam contre le terrorisme. Je pense que nous devons soutenir cette initiative. » dit Poutine qui refusera toujours de confondre les “terroristes” et des peuples, des religions…

Que nos obsessionnels de l’empire du mal le veuillent ou non, qu’il s’agisse de transformer le terrorisme en prétexte pour attaquer des Etats (aujourd’hui des puissances nucléaires désormais) ou de lutter effectivement contre le dit terrorisme, la Russie n’est pas dans cette logique et elle refuse hier comme aujourd’hui le discours qui est devenu celui de nos médias à savoir l’ennemi serait une question de “civilisation”.

RIEN QUE CES FAITS DEVRAIENT NOUS INCITER A NOUS INTERROGER SUR LES MALADES QUI PRÉTENDENT NOUS ENTRAINER DANS UNE GUERRE DANS LAQUELLE LA FRANCE EST EFFRAYANTE, PUÉRILE ET GROTESQUE

L’absence totale de réflexion et de pensée critique face à un discours, qui invente une menace et tente même de lui donner corps pour mieux pratiquer une fuite en avant, de la part de gens qui ne feront pas la guerre en se contentant de détruire les chances de paix, est sans perspective autre que la guerre. Il déshonore non seulement les boute-feu mais le crédit accordé à ce scénario grotesque rend sans le moindre intérêt le débat politique: comment accorder le moindre crédit à ceux qui acceptent de laisser courir notre pays vers une guerre avec la Russie, voire la Chine.

Danielle Bleitrach

Curiosité : La page Wikipedia de Shahab al-Muhajir, chef de “ISIS-K” depuis 2020, organisation présentée comme auteure de l’attentat à Moscou par les médias occidentaux, a été modifiée le 18 janvier 2024 et aussi le 24 mars 2024. Parmi les modifications de janvier dernier, on trouve la suppression des phrases suivantes (traduction de l’anglais) : — Il travaillait comme sous-traitant d’une société de sécurité et fréquentait l’aérodrome de Bagram [base US – NDT]. Il était le garde spécial des premiers vice-présidents de l’époque, Abdul Rashid Dostum et Amrullah Saleh [pions des Etats-Unis – NdT], et disposait d’une licence de transfert d’armes depuis 2017. — Il bossait en gros pour des barons de la drogue et des pions de la CIA. Sa mort, annoncée en 2023, n’a pas été confirmée.

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3 Commentaires

  • CROCE
    CROCE

    Le plus drôle, c’est que les Etats-Unis ont reconnu l’indépendance du Donbass…le 17 Juillet 1959, par la Loi Publique n° 86-90, dite de la Semaine des Nations Captives.
    Cette Loi a été entérinée par le Sénat et la Chambre des Représentants, et reconduite d’année en année jusqu’à aujourd’hui !
    Ce qui veut dire clairement que les Etats-Unis font une guerre impitoyable à ceux qu’ils sont censés protéger ( comme d’habitude ).
    Une preuve de ce que j’affirme ?
    https://archive.almanar.com.lb/french/article.php?id=252482
    A noter que ce qui est appelé Cossackia dans la Loi comprend outre le Donbass, la Crimée, Odessa, la Transnistrie, et prive l’Ukraine d’accès à la mer.
    En effet les cosaques occupaient toutes ces zones !

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  • Mirande
    Mirande

    Excellent rappel qu’il faut diffuser le plus possible car la propagande de guerre est féroce en France.

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