Histoire et société

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La Chine n’a pas à craindre la déflation

14 AOÛT 2023

La méthode de la propagande n’est-elle pas d’inverser l’ordre des causalités pour qu’un problème qui vient doublement des Etats-Unis paraisse avoir pour origine la défaillance chinoise : le premier problème étant l’inflation due à une utilisation de ce qui est tout de même la monnaie universelle qui aboutit à une baisse de liquidité, à un fragilité du secteur bancaire, et la forme de lutte contre la dite inflation, consistant à relever les taux de la FED, ce qui organise effectivement un ralentissement économique, auquel il faut ajouter toutes les sanctions et endiguements qui reviennent en boomerang. Cela se traduit par une crise mondiale qui est la manifestation du déclin de l’hégémonie US, et la Chine qui n’a pas assez de dynamisme du marché intérieur et se trouve au niveau mondial confrontée à la baisse des échanges internationaux. Son problème n’est pas la déflation comme l’explique très bien l’article et elle conserve des taux de croissance qui font pâlir d’envie les économies occidentales mais d’empêcher que ce dynamisme soit freiné en particulier dans les secteurs d’innovation où là encore les Etats-Unis tentent de l’empêcher d’y accéder et à ce titre elle prend la mesure inverse, elle baisse les taux d’une manière spectaculaire. Ce qu’un article du Global Times que nous publions par ailleurs explique. (note et traduction par Danielle Bleitrach)

PAR DEAN BAKERFacebook (en anglais)GazouillerRedditMessagerie électronique

Source de la photographie : Caleb Roenigk – CC BY 2.0

La Chine n’a pas à craindre la déflation

Dans le sillage de la Grande Récession, il y a eu une série d’articles de presse mettant en garde contre la menace de déflation. L’histoire était que quelque chose de vraiment grave se produirait si le taux d’inflation passait d’un taux positif modeste à un taux négatif modeste. Cela signifie que quelque chose de vraiment mauvais se produirait si le taux d’inflation était de -0,5%, au lieu de 0,5%. Cela n’avait aucun sens à l’époque et cela n’a aucun sens aujourd’hui.

Pour comprendre le problème, il est important de réaliser qu’il y a un grain de vérité dans l’histoire. En principe, lorsque les entreprises envisagent un investissement, elles examineront le taux d’intérêt réel qu’elles doivent payer. C’est le taux d’intérêt qu’elles paient sur le marché, disons 6,0% sur une obligation qu’ils émettent pour emprunter de l’argent, moins le taux d’inflation attendu du produit qu’elles s’attendent à produire.

Cela signifie que, si elles produisent des voitures et s’attendent à ce que le prix des voitures augmente à un taux annuel de 2,0% au cours de la période de leur investissement, elles envisageront effectivement un taux d’intérêt réel de 4,0% (6,0% moins 2,0% équivaut à 4,0%). Dans cette histoire, si le taux d’inflation des prix des voitures baisse, disons à 1,0%, alors le taux d’intérêt réel augmentera, dans ce cas à 5,0%. À ce taux d’intérêt réel plus élevé, les entreprises seront moins susceptibles d’investir.

L’histoire générale est que toutes choses égales par ailleurs (oui, c’est un énorme qualificatif), plus le taux d’inflation est bas, plus le taux d’intérêt réel est élevé. Cela signifie qu’une inflation plus faible (et plus important encore, une inflation attendue plus faible) découragera l’investissement.

Alors, quel est le problème avec la déflation? Premièrement, il est important de reconnaître qu’un taux d’inflation plus faible signifie un taux d’intérêt réel plus élevé. De ce point de vue, toute baisse du taux d’inflation est une mauvaise nouvelle, il n’y a pas de magie particulière à franchir zéro. La baisse du taux d’inflation de 0,5 % à -0,5 % n’est pas qualitativement différente de la baisse de 1,5 % à 0,5 %. Ces deux baisses ont pour effet d’augmenter le taux d’intérêt réel et de réduire l’investissement.

L’autre point est simplement une définition. L’indice des prix à la consommation, ou quelle que soit la mesure de l’inflation que nous utilisons, est simplement une moyenne des taux d’inflation pour des milliers d’articles différents. Lorsque le taux d’inflation se rapproche de zéro, cela signifie que les prix de nombreux articles sont déjà en baisse. Cela signifie simplement que les hausses de prix dans d’autres articles l’emportent sur les baisses dans les articles avec des prix en baisse.

Lorsque l’indice global franchit zéro et devient négatif, cela signifie simplement que le poids des articles dont les prix ont baissé dépasse maintenant le poids des articles dont les prix augmentent. Ce n’est pas une crise, ça ne veut rien dire.

Il y a une histoire où la déflation peut s’auto-perpétuer, mais ce n’est pas un cas où nous descendons en dessous de zéro, c’est un cas où il y a un effondrement économique soudain qui fait chuter les prix, comme cela s’est produit au début de la Grande Dépression. Dans ce cas, nous parlions de baisses de prix à deux chiffres, et non de taux d’inflation légèrement inférieurs à zéro.

Et non, la baisse ne menace pas une spirale déflationniste. Le Japon a connu plusieurs périodes de déflation au cours des trois dernières décennies. Le taux de déflation n’a pas eu tendance à s’accélérer. Il est raisonnable de supposer que la Chine est dans la même situation.

Cela ne signifie pas que l’économie chinoise n’est pas confrontée à des problèmes. Son modèle de croissance basé sur l’explosion des exportations semble devoir prendre fin, en raison de la concurrence des pays à bas salaires et des mesures protectionnistes des États-Unis. Son gouvernement a également entravé son secteur technologique en imposant des contrôles plus stricts.

Néanmoins, son économie continue de croître beaucoup plus rapidement que celle des États-Unis et d’autres pays riches, de sorte que personne ne devrait imaginer qu’elle est maintenant morte dans l’eau. En tout cas, son problème n’est pas la déflation. Contrairement à ce que vous lisez dans le journal, si le taux d’inflation de la Chine franchit zéro et devient négatif, cela n’a vraiment pas d’importance.

Ceci est apparu pour la première fois sur le blog Beat the Press de Dean Baker.  

Dean Baker est économiste principal au Center for Economic and Policy Research à Washington, DC.

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