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Les agriculteurs de l’Inde résistent aux tentatives de les expulser du site de protestation

Profitant des incidents mineurs qui ont accompagné la marche des tracteurs à Delhi, le gouvernement de Narendra Modi a choisi la répression. Il utilise l’autorité locale du plus grand état de l’inde voisin l’Uttar Pradesh, lui aussi à droite pour provoquer et réprimer. Les Communistes partout tiennent le choc et appellent à renforcer le mouvement. Extraordinaire la partialité de notre propre presse qui ne dénonce pas cette répression massive de fermiers pacifiques alors qu’ils font campagne autour de leurs créatures comme Navalny ou l’extrême-droite de Hong Kong. (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

La police et les autorités locales ont tenté jeudi d’expulser des milliers d’agriculteurs d’un site de protestation à Ghazipur. Toutefois, cette tentative a renforcé la détermination des agriculteurs à poursuivre le sit-in et a conduit à de nouvelles mobilisations 29 janvier 2021 par Pavan Kulkarni

Photo: National Herald

Quelques jours après un rassemblement massif dans la capitale New Delhi, les agriculteurs de l’Inde défient les tentatives de les expulser de leurs sites de protestation. Les agriculteurs campent en divers endroits à la périphérie de la capitale depuis plus de deux mois pour exiger l’abrogation de trois lois agricoles controversées adoptées par le gouvernement de droite de Narendra Modi en septembre 2020.

Le jeudi 28 janvier, la police et l’administration locale ont tenté de concert d’expulser les agriculteurs protestataires de Ghazipur, près de la frontière séparant la capitale indienne de l’État voisin de l’Uttar Pradesh (UP). Toutefois, les rapports indiquent que cette tentative n’a fait que renforcer la détermination des agriculteurs et a abouti à ce qu’un nombre grandissant de gens de l’Uttar Pradesh se mobilisent et se dirigent vers Ghazipur en soutien à leurs collègues manifestants.

« Les forces nous ont encerclés des quatre côtés à la fois », a déclaré Jagbir Singh Bhatti, All India Kisan Sabha (AIKS) secrétaire de district de Bulandshahr dans UP, au Peoples Dispatch vers 22 heures le 28 Janvier. Le déploiement de la Force d’action rapide (RAF) a été prolongé jusqu’au 4 février. Toutefois, en quelques heures, la position sur le terrain s’était déplacée avec l’arrivée et l’occupation de l’espace autour de la scène sur le site de la manifestation.

Au début de la journée, sur ordre du gouvernement de l’État de l’UP, qui est gouverné par le BJP qui est également au pouvoir au centre, l’administration du district de Ghaziabad a donné ordre à ces agriculteurs de quitter ce site. L’article 144 du Code de procédure pénale (CrPC), qui permet aux autorités d’interdire le rassemblement de quatre personnes ou plus, a été imposé dans cette zone où plus de 3 000 agriculteurs campaient depuis la soirée. Un ordre a également été émis en vertu de l’article 133, qui permet le recours à la force pour éliminer les « nuisances ».

Les manifestants ont également affirmé qu’un peu plus tôt dans la journée, un dirigeant local du BJP avait amené un certain nombre d’hommes de main pour créer des problèmes. La veille, l’électricité et l’approvisionnement en eau de la zone ont été coupés, prétendument par l’organisme administratif local. En fonction de ce que l’on connait des méthodes violentes de la police contre les manifestations, la réduction de l’approvisionnement en électricité est considérée comme le présage d’une action policière en préparation.

Rakesh Tikait, chef de l’Union Bharatiya Kisan (BKU), qui est parmi les principaux dirigeants agricoles du lieu, a également été invité à se rendre. « Il y a une conspiration pour créer des ennuis ici. Notre protestation va continuer, je ne me rends pas. Je vais faire face aux balles… », a-t-il déclaré, en présence de policiers, menaçant également de se suicider en signe de protestation. On pense que son élan émotionnel a joué un rôle clé dans la mobilisation des agriculteurs de la région, car il jouit d’un grand soutien dans l’ouest de l’Uttar Pradesh.

La répression imminente ?

Les développements de jeudi marquent un moment clé dans la tentative du gouvernement indien de sévir contre les manifestants à la suite du rassemblement de tracteurs le 26 janvier. Ce jour-là, des dizaines de milliers d’agriculteurs ont participé à un rassemblement de tracteurs en grande partie pacifique à Delhi. Toutefois, un groupe a refusé de suivre la voie prédéterminée tracée par les autorités ce qui a amené à des affrontements avec la police de Delhi. Certains fermiers ont également envahi le Fort Rouge et ont hissé un drapeau religieux sikh sur ses remparts. La manifestation a eu lieu le jour de la République qui célèbre l’entrée en vigueur de la constitution de l’Inde et le Fort Rouge est d’une grande importance symbolique, c’est de là que le Premier ministre hisse le drapeau national et s’adresse au pays à partir de là tous les jours de l’Indépendance (Août 15)

La Samyukta Kisan Morcha (SKM), l’organisation qui avait négocié un accord avec la police sur les routes et les horaires, s’est dissociée de la violence et a appelé à la paix. Néanmoins, cela a donné au gouvernement l’occasion de réprimer les manifestants qui ont obtenu un grand soutien à travers le pays au cours des deux derniers mois. La police a déclaré que les incidents feront l’objet d’une enquête en vertu de la Loi draconienne sur la prévention des activités illégales (UAPA) et de la loi sur la sédition, qui ont toutes deux été utilisées très souvent contre ceux qui s’opposent au gouvernement. Des avis ont également été émis par la police contre les dirigeants des agriculteurs, y compris Tikait.

Dans le même temps, les médias d’affaires ont lancé un assaut à part entière contre les manifestants en diffusant une propagande autour de la violation de la décision et l’idée que la manifestation était dirigée par une organisation terroriste séparatiste qui avait pour origine l’État du Pendjab. Ils ont utilisé l’incident pour diffamer le mouvement des agriculteurs pan-indien dirigé par SKM.

Le SKM, quant à lui, a accusé le gouvernement d’infiltrer les manifestations avec ses agents provocateurs, qui ont incité aux incidents de violence.

Ashok Dhawale, le président de All India Kisan Sabha (AIKS), un syndicat d’agriculteurs de gauche qui fait partie du SKM, a souligné lors d’une conférence organisée par le Comité d’État de Delhi du Parti communiste indien -marxiste (CPI-M), « bien qu’il y ait des centaines de milliers d’agriculteurs aux frontières de Delhi, y a-il eu une seule fenêtre de voiture qui ait été brisée? Y a-t-il eu des incidents de violence au cours de ces deux mois? (Il n’y en a pas eu) parce qu’il a été déterminé par le SKM que notre force réside dans le caractère pacifique de notre protestation, ce qui nous a gagné un large soutien de la part du public.

Lui et beaucoup d’autres ont noté le rôle joué par Deep Sidhu, un chanteur du Pendjab, qui faisait partie du groupe qui regroupé au Fort Rouge. Incidemment, Sidhu avait fait campagne pour le BJP aux élections législatives de 2019 et il y a des photos de lui avec le Premier ministre Narendra Modi et le ministre de l’Intérieur Amit Shah.

Tout au long de la nuit du 25 janvier, Sidhu avait provoqué les agriculteurs, se disputant avec eux et insistant pour se diriger vers le fort rouge, a affirmé Ashok Dhawale. « Ce n’était pas la décision de SKM », a répété Dhawle, qui a ajouté que la police, tout en faisant peu d’efforts pour empêcher ceux qui s’écartaient de la route convenue, a utilisé la force contre ceux qui s’en sont tenus aux itinéraires convenus.

C’est dans ce contexte que le gouvernement de l’UP a tenté d’expulser les manifestants jeudi soir. Toutefois, la loi a peut-être suscité de nouvelles mobilisations. K K Ragesh de l’IPC(M), membre de la chambre haute du Parlement de l’État du Kerala, gouverné par la gauche, s’est rendu sur le site de la manifestation avant 1 heure du matin le 29 janvier pour manifester la solidarité de Rakesh Tikait. L’Indian Express a rapporté que des appels avaient été lancés dans les États voisins du Pendjab et de l’Haryana pour qu’un plus grand nombre de personnes se joignent à la manifestation.

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