Protester est le dernier service que je peux rendre au PCF… par Danielle Bleitrach

Les lecteurs attentifs de ce blog auront peut-être perçu une certaine exaspération de ma part devant la censure dont je suis – et ceux qui ont le malheur de publier un livre avec moi – victime de la part des cadres intermédiaires du PCF. Avoir à 87 ans, tant d’ennemis est un luxe, outre la bourgeoisie et quelques groupuscules, c’est la totalité de ce qui constitue de fait le secteur de « propagande » di PCF. Il s’agit de sa presse, ou ce qui en tient lieu, son secteur « culturel » (sic), la formation des militants, la commission internationale là c’est un modèle dans le genre…

On comprendra que « l’affaire » me dépasse: en fait, l’arbitraire dans la censure tient au fait qu’ il n’y a plus de responsable chargé de faire vivre la politique décidée en Congrès, en étant en prise directe avec les fédérations, les sections , les cellules IL y a diverses commissions avec des « experts » (venus de dieu sait où et désignés par le seul responsable de la commission et qui ne devraient n’avoir qu’un rôle d’aide technique) qui se sont arrogé un pouvoir organisationnel; comme la commission qui gère la politique internationale et qui périodiquement envoie des rapports aux militants qui font songer à ceux d’Attak, « il a bien parlé mais qu’est-ce qu’il a dit et qu’est-ce que j’en fait ? « … L’organisation, son mode de fonctionnement, fait songer à la Commission européenne, s’attribuant les pouvoirs d’un parlement, Conseil national, qui n’a prise sur rien… ni l’organisation, ni la formation, j’en passe et des meilleures. La dépossession citoyenne relève de l’idéologie dominante qui comme le savait jadis relève de la classe dominante… Plus quelques fédérations qui fonctionnent sur le même modèle d’opacité, comme la fédération des Bouches du Rhône. Là, l’interdit qui me frappe est tellement entré dans les mœurs pour avoir osé contredire la mutation de Robert Hue, que de « bons camarades » en arrivent à me distribuer des encouragements en cachette en évitant néanmoins de se montrer en public en train de me parler. Je caricature mais à peine et ça dure depuis près de trente ans.

On perdrait patience à moins, mais là aussi la situation a changé et la censure qui frappe notre livre va au-delà du harcèlement impuni contre un individu, harcélement digne de ce qui se passe dans une cour d’école.. L’important a fort heureusement toujours été pour moi ce que ce que j’avais à dire concernant Cuba, le rôle de l’impérialisme et les résistances venant du sud. A ce titre, j’ai bénéficié au sein du parti et de la CGT, dans différents groupes et maisons d’édition d’une aide importante. Mais j’ai pu également annoncer ce monde multipolaire, le rôle de la Chine, il y a dix ans grâce à ce qu’en avait dit Fidel Castro…

OUI, de ce côté là aussi ça bouge grace à la tenacité de certains militants, un député André Chassaigne… comme pour la Palestine, les choses avancent la réalité du monde oblige à cette conscience de la nécessité d’agir… mais que de temps perdu en interne, que de forces laissées en chemin voilà ce qu’on se dit tandis que les liquidateurs se replient en guerre de position, dans leurs tranchées, en nous forçant au sur place ce qui n’est pas difficile vu que le pli est pris…

Ce blog et ceux qui l’ont précédé a un lectorat national et international équivalent à celui de l’Humanité et ceci je le répète grâce à des communistes, des progressistes qui ont eux-mêmes déblayé le terrain. Ces militants menaient par ailleurs un combat qui a permis au 38 e congrès un renouvellement qui laisse espérer effectivement que renaisse un parti communiste et qu’il aide à reconstituer une force de résistance et de conquête dans un contexte français, européen, occidental marqué par les avancées de l’extrême droite et les tentatives d’un hégémonisme capitaliste qui ne voit plus sa survie que dans la guerre.

C’est donc à la fois l’urgence et l’espoir, qui font que l’on ne peut plus tolérer la poursuite de pratiques héritées des démissions de l’eurocommunisme. A partir du moment où il a été jugé prioritaire de reprendre pied dans le monde du travail, dans celui des victimes de cette politique d’alternance sans alternative et de fausse radicalité, il y a une porte entrouverte, lourde est la responsabilité de ceux qui ne s’unissent pas pour l’ouvrir tout grand …

Donc l’affaire de la censure de notre livre est apparemment la simple poursuite de ce qui se passe depuis trente ans : l’Humanité, la Marseillaise, les fêtes qui se produisent sous leur patronage continuent… La librairie Renaissance, qui est chargée de l’invitation des auteurs à la fête de l’Humanité, affirme hautement son droit à l’interdit. C’est d’une banalité à faire bayer d’ennui… Oui mais voilà, le terrain n’est plus le même et le plus difficile est d’en voir les opportunités.

Mes co-auteurs ignorant tout de la manière dont s’organisent dans les fêtes les débats, et le choix des auteurs se laissent piéger. Mieux ou pire, Ils nagent dans le bonheur quand une fédération ose dans la fête avoir deux exemplaires de notre livre dans une table de littérature, qui de toute manière est désertée parce qu’il n’y a plus de politique du livre, de débats pour en faciliter la lecture… Donc cela me permet déjà de vous dire que ce que j’écris là m’est propre et que les autres auteurs, en particulier Franck Marsal et Marianne Dunlop qui sont membres du part, voient ce qui bouge donc sont plus enclins à l’indulgence, ils savent les efforts qu’ils doivent déployer, l’ébranlement réel des certitudes et ce que chaque geste, y compris dérisoire, un livre sur une table comme une bouteille à la mer.

Que l’on me comprenne bien, j’ai plus d’activité de diffusion que ce que mon âge le permet, encore aujourd’hui je pars à Paris pour y rencontrer des responsables de revue et pour une émission mardi de 13 heures à 14 heures à Sud radio. J’ai d’autres débats d’autres rencontres, ce qui fait que je risque de déserter ce blog. Le livre marche très bien et il est en ré-impression. Non ma colère concerne ce que l’on fait de ce parti et la manière dont on continue à y entretenir des mœurs de censure et de chasse aux sorcières intolérables si l’on veut avoir un parti capable de se battre contre ce qui nous menace et qui est déjà là. Protester est le dernier service que je peux lui rendre.

Les membres du parti, mes amis, mes co-auteurs ont quelques perspectives enthousiasmantes concernant la mission que nous avons assigné à cet écrit: que la question de notre rapport aux BRICS, notre connaissance de ce que cela représente, devienne grâce à notre livre un sujet de débat dans le parti. Ils ont même l’espoir fou qu’il y aura à l’université d’été du PCF un débat avec Franck Marsal autour du sujet, rien n’est acquis! mais oui ! ça bouge et s’y on arrive pas ce sera pour l’année prochaine… Aujourd’hui peut-être ou alors demain comme on chante dans notre midi!

Moi, je sais en revanche par expériece, comment ces agneaux vont se faire tondre : la proposition se discute entre soi, et elle ne sera portée en fait par personne surtout pas les arapèdes qui campent sur les lieux de la décision. Quand elle interviendra, dans deux ou trois mois, elle sera confrontée au fait que le programme est terminé et que la Chine sera traitée par la spécialiste bien connue Dominique Barri, qui représente elle la ligne de Vincent Boulet et de l’Humanité de Vadim Kanmenka. ce sera pareil pour toutes les fêtes et pour celle de l’humanité tant que toutes les manettes seront tenues par les mêmes. Comme il n’y a pas assez de compétences « maison » , on se contentera le 9/10 e du temps de ne pas avoir de débat sur les BRICS, sur la Chine… et parce que j’ai protesté, il y aura l’existence de un ou deux livres dans une table de livres de plus en plus désertée parce que les fins de mois sont difficiles ^parce qu’on en voit plus très bien l’utilité pour se défendre…

D’ailleurs je serais curieuse de savoir quelle réflexion politique y a-t-il eu dans les instances concernées pour faire ce travail autour du livre de Fabien Roussel ? Outre la possibilité de l’acheter, sa place à l’entrée de la fête et un plus grand nombre.ce qui semble exister déjà.. Comment inciter à le lire, en le présentant, en insistant sur cetains thèmes ?

Dans le climat d’autocensure par rapport à tout effort intellectuel, est-il besoin de faire autre chose que de laisser aller les choses sur leur pente naturelle ?

En matière de censure et d’autocensure, je le répète, il ne s’agit pas de moi, je ne serai pas présente à la fête de l’Humanité, ni à l’Université d’été… Et j’ai dit clairement que je ne serai pas plus présente dans aucun débat de la fédération des Bouches du Rhône, il n’y a donc plus le moindre prétexte pour tous ceux qui acceptent la censure me concernant comme ‘normale »., il s’agit bel et bien de ne pas parler des rapports de forces internationaux et de leur incidence sur nos combats, il s’agit de ne pas remettre en cause le consensus atlantiste, le pseudo totalitarisme d’un socialisme « autoritaire » toute chose qui ont emporté l’eurocommunisme. Rien de plus facile, si non seulement on n’organise pas le débat mais on l’interdit, on l’étouffe… y compris lorsqu’une préface de Fabien Roussel appelle au débat. Face à l’évidence, à savoir que ce qui menace l’économie française, nos services publics et nous contraint au surarmement ce sont les USA et la commission européenne, les pays de l’OTAN ou plutôt leurs gouvernements, toute la propagande de « gauche » comme de droite que nous dénonçons, qui l’emporte. Elle consiste à accabler Trump, la cause de tous nos malheurs et à espérer le retour d’un clone d’Obama et de Biden, alors que la politique belliciste et contre nos intérêts est aussi leur œuvre. On est d’accord ou pas d’accord mais ça mérite discussion. Pas de faux fuyant…

Notre livre s’inscrit à contrecourant de ce consensus et il dit que le socialisme à la française n’a pas à avoir d’alignement et que c’est possible dans le monde multipolaire dont la Chine, un pays socialiste, avec un socialisme à la chinoise, qu’il importe de connaitre, est le leader, cela doit être entendu, d’ailleurs il est impossible de faire autrement parce que le monde multipolaire est là, parce que la Chine, l’alternative ne peut pas être niée et ignorée par ceux qui nous mentent.

Il est tellement impossible de faire autrement que bientôt le belliciste, le délirant Macron, va être en avance sur la « gauche » et sur le secteur international du PCF et de l’humanité dans sa tentative d’approche de la Chine, des BRICS … peut-être qu’alors des financements interviendront qui acheteront des silences… très loin des militants, de leur travail dans les cellules, dans les sections, non entre membres du tourisme oganisé par la commission, une dizaine pour un voyage au Vietnam ou autre terre asiatique, un coût dont on se demande qui le finance et dont les conclusions ne donnent lieu à aucune information, alors que les mêmes poursuivent leur censure vers les militants via une presse totalement contrôlée et un parti toujours plus sous informé.. Non seulement ces moeurs opaques, qui sont celles de la Commission interntionale, ne débouchent sur rien mais elles donnent le sentiment à ceux qui y participent d’être une élite et de maitriser ce que le vain peuple ne saurait savoir ce qui justifie à la fois les reponsabilités, les postes et les avantages auxquels ils donnent droit en ne fichant strictement rien d’autre que de dire au dernier qui a parlé ce qu’il a envie d’entendre en menant son train de sénateur. Qui finance qui et quoi? Vaste question sur laquelle nous sommes loin de bénéficier des contrôles de jadis… Ce qui est le propre des organisations social démocrates dont les anciens croyaient avoir débarrassé le parti communiste… cela mène à tout sauf à la démocratie et au pouvoir d’agir là où chaque adhérent compte pour un… comme le citoyen idéal d’une république disparue elle aussi…

Ce livre au contraire ouvre un espace démocratique, c’est-à-dire qu’il n’est pas une bible mais qu’il s’adresse à ceux qu’il importe de convaincre, les militants, ceux qui doivent agir auprès de notre peuple, il s’appuie sur ce qui existe déjà. Il n’est pas « facile », il réclame un travail, de l’attention, il invite d’ailleurs à prendre connaissance d’autres travaux comme ceux de Rémy Herrera. Il y a d’autres sites, d’autres forces qui représentent des apports et Jean Jullien est là pour en faire la démonstration. L’affaire on le voit dépasse largement les mesquineries et le harcèlement dont je suis victime dans ce parti depuis trente ans. Si votre conscience s’en accommode c’est votre affaire et j’éprouve certes un peu de mépris mais j’ai appris à vivre avec, non il ne s’agit pas de cela il s’agit une fois de plus d’empêcher les communistes de prendre connaissance du dossier pour mieux les faire s’aligner sur un consensus qui voue toute la gauche et le parti communiste à la marginalisation.

Donc en mon âme et conscience, et en mon nom seule, j’élève cette protestation, vous en ferez ce que vous croyez utile.En attendant je laisse ce blog à Marianne, Franck et à tous ses lecteurs.

Danielle Bleitrach