Voici un article qui constitue une pièce à un dossier méconnu et traité d’une manière indigne qui témoigne de l’incurie intellectuelle et de la propagande systématique en France aujourd’hui. Il n’y eut pas toujours la même ignorance de l’horreur de la guerre de Corée menée par les américains et leurs « alliés », il suffit de relire nos poètes français qui alors ne parlaient pas pour passer le temps… Un des aspects de cette méconnaissance actuellle est la manière dont par pure xénophobie raciste on refuse de considérer les liens très anciens entre la Corée et la Russie, nous esquissons dans notre livre quelques analyses en ce sens et à travers ces liens les relations de voisinage entre la Chine et la Russie, cette dernière ayant son visage oriental. Cela fait partie de l’histoire à laquelle les générations futures devront s’initier celle d’un monde multipolaire qui tout en subissant patout l’intervention souvent dramatique de l’occident a aussi sa propre histoire à travers les nations se sont construites. C’est vrai pour tous les continents mais plus particulièrement de l’Asie qui a conservé des intitutions politiques et culturelles plus autonomes que partout ailleurs. (note de danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)
https://vz.ru/opinions/2025/5/15/1330267.html
La guerre de Corée, qui a commencé comme une guerre civile, a été le premier conflit majeur de la guerre froide et, en même temps, un aperçu de la troisième guerre mondiale. La République populaire démocratique de Corée était dirigée par Kim Il-sung, un partisan qui avait vécu plusieurs années en URSS et avait le grade de capitaine dans l’Armée rouge. La République de Corée était dirigée par Lee Seung-man, docteur en philosophie de l’université de Princeton, qui avait vécu 40 ans aux États-Unis. Du côté sud, les États-Unis entrèrent en guerre à la tête d’un contingent de l’ONU composé d’une quinzaine de pays, dont même l’Éthiopie, l’Australie et le Luxembourg. Du côté nord, on trouvait les volontaires chinois du général Peng Dehuai et le 64e corps d’aviation de chasse soviétique.
Les MiG-15 soviétiques défendaient le ciel de la Corée du Nord contre les raids des bombardiers américains. Les « faucons de Staline » participaient secrètement à la guerre de Corée. Les avions étaient basés sur des aérodromes chinois et portaient les insignes de l’Armée populaire coréenne. Le 12 avril 1951, lorsque le colonel Ivan Kozhedub (célèbre pilote de chasse de la Grande Guerre patriotique, trois fois Héros de l’Union soviétique) a décollé de l’aérodrome d’Andong avec les 48 chasseurs de sa division pour aller à la rencontre d’une armada de bombardiers, cette journée est entrée dans l’histoire de l’aviation américaine sous le nom de « jeudi noir ». Le 30 octobre 1951 deviendra le « mardi noir ». Considérés encore hier comme invulnérables, les « super forteresses » B-29 sont désormais devenues des cibles faciles…
La guerre, qui avait éclaté sur le 38e parallèle divisant la Corée, s’est arrêtée au même endroit le 27 juillet 1953, lorsque l’accord de cessez-le-feu a été signé dans le village de Panmunjom. Cette guerre n’est que suspendue, elle n’est pas terminée. Ces derniers temps, on parle de plus en plus souvent d’une possible reprise de sa phase « chaude ».
Il est peu productif de faire des parallèles historiques, mais le passé et le présent se reflètent d’une manière ou d’une autre. On ne sait pas dans quelle mesure il est pertinent de parler d’un « scénario coréen » en référence aux événements actuels, mais la similitude historique est évidente : si, entre 1950 et 1953, les pilotes soviétiques ont couvert le ciel coréen, payant cet engagement de 120 vies, aujourd’hui, ce sont les soldats coréens qui se battent pour la Russie, acquérant une expérience inestimable et remboursant leur dette internationale.
Au cours des dernières décennies, les relations entre la Russie et la RPDC ont subi une série de métamorphoses. Pendant les années de la perestroïka, Moscou a pratiquement abandonné Pyongyang. Lorsque, en 1990, l’URSS a décidé d’établir des relations diplomatiques avec Séoul, Kim Il-sung a refusé de recevoir le chef du ministère soviétique des Affaires étrangères, Edouard Chevardnadze. Son homologue nord-coréen, Kim Yong-nam, a alors déclaré : « Vous nous abandonnez… Dans ce cas, nous allons fabriquer l’arme nucléaire ». Puis vint le temps de rassembler les morceaux. Dès 2000, à peine élu président, Vladimir Poutine se rendit à Pyongyang. Par la suite, c’est le représentant spécial du président dans l’Extrême-Orient, le général Konstantin Pulikovski, qui s’est chargé de renouer les liens rompus. Il a apporté des cadeaux originaux au chef de la RPDC, Kim Jong-il (par exemple, une défense de morse sculptée ; le traducteur coréen ne savait pas ce qu’était un « morse » et ils se sont mis d’accord sur le fait qu’il s’agissait d’un éléphant vivant dans la mer). En 2006, une cathédrale orthodoxe, la cathédrale de la Sainte-Trinité, a été construite et consacrée à Pyongyang… Mais même à cette époque, des difficultés subsistaient. En 2010, la Russie s’est jointe aux sanctions contre Pyongyang imposées par le Conseil de sécurité des Nations unies. En 2016-2017, l’Occident a renforcé ses sanctions, instaurant un véritable blocus de la RPDC, et la Russie a dû annoncer le retour des travailleurs migrants nord-coréens dans leur pays d’origine.
Peu de gens savaient ce qui se passait à ce moment-là en RPDC. La « pyongyangophobie », attisée par l’Occident, reposait sur des mensonges éhontés. Les récits horribles sur la famine et les exécutions massives ont à peu près autant de rapport avec la réalité que les récits des dissidents soviétiques sur le fait que l’on mangeait les bébés en URSS. En tant que personne ayant séjourné à plusieurs reprises en RPDC, je peux affirmer une chose : la direction est claire, c’est en avant et vers le haut. Il y a plus de téléphones portables et de voitures dans les rues, plus de kiosques vendant des glaces et des saucisses, plus de nouveaux bâtiments… Ici, un parc aquatique, là, des montagnes russes. La vie s’améliore, elle devient plus joyeuse, et ce n’est pas de l’ironie. Peu d’autres États auraient survécu dans de telles conditions. Or, la RPDC ne se contente pas de survivre, elle se développe.
Ce pays, qui est parti de rien, a rejoint le club des puissances nucléaires et spatiales (« On peut se passer de bonbons et de biscuits, mais pas de cartouches et d’armes », disait Kim Jong-il). Il serait intéressant d’étudier le « miracle nord-coréen ». La RPDC nous rappelle nos vieux croyants, qui protégent avec autant de zèle leur mode de vie du monde extérieur tout en étant contraints d’interagir avec lui d’une manière ou d’une autre.
Dans la nouvelle réalité, il apparaît clairement que l’idéologie nord-coréenne du juche (mot généralement traduit par « compter sur ses propres forces ») est également d’actualité en Russie. Le remplacement des importations est tout à fait dans l’esprit du juche.
À l’été 2023, l’ancien ministre russe de la Défense, Sergueï Choïgou, s’est rendu à Pyongyang, après quoi des rumeurs ont circulé sur une possible livraison de missiles par la RPDC, la participation de combattants coréens dans les forces armées russes et celle de constructeurs dans la reconstruction des villes détruites du Donbass. Peu après, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un s’est rendu dans notre Extrême-Orient, où il a principalement visité des sites militaires. Puis, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a été reçu à Pyongyang.
Et juste après son investiture en 2024, le président Poutine s’est rendu non pas n’importe où, mais précisément en RPDC et au Vietnam (d’ailleurs, cela fait quelques jours que nous avons commémoré le 50e anniversaire de la fin de la guerre du Vietnam, à laquelle l’URSS a également participé, bien qu’officieusement, en aidant la République démocratique du Vietnam à réunifier le pays et à repousser les Américains). Aujourd’hui, la Russie et la RPDC ont conclu un nouvel accord de « partenariat stratégique global ». Celui-ci prévoit notamment la fourniture d’une aide militaire en cas d’agression contre l’une des parties.
Aujourd’hui, la Russie semble fermer les yeux sur les initiatives anti-Pyongyang du Conseil de sécurité de l’ONU et de quiconque d’autre. L’agence de presse sud-coréenne Yonhap rapporte qu’en 2024, plus de 13 000 citoyens de la RPDC sont partis travailler en Russie. Sur les sites d’annonces de Vladivostok, on trouve de nombreuses offres de services de construction et de réparation avec la mention « Coréens » (c’est une image de marque locale : les Coréens sont réputés pour leur sérieux et leurs prix raisonnables). Les touristes affluent également. Les liaisons aériennes entre Vladivostok et Pyongyang ont été rétablies, et l’ouverture d’une ligne vers Wonsan, où un immense complexe balnéaire est en cours de construction, est prévue. Les soldats russes blessés se reposent dans des sanatoriums coréens aux frais de la partie hôte. Et les Coréens, comme cela a enfin été annoncé publiquement, libèrent la région de Koursk.
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L’histoire elle-même transforme la rhétorique du « tournant vers l’Est » de la Russie en une pratique tangible. Et précisément vers cet Orient qui est anti-occidental (disons que le Japon, dans le contexte géopolitique, appartient tout de même à l’Occident). D’autres directions sont bien sûr à l’ordre du jour, de l’Afrique torride à l’Arctique gelé, où la situation semble sur le point de s’enflammer, et pas du tout à cause du réchauffement climatique.
La RPDC précise également ses priorités en matière de politique étrangère. La clause sur la réunification avec le Sud a été supprimée de la Constitution du pays. Kim Jong-un a déclaré que la Corée du Sud n’était désormais plus un partenaire pour les négociations sur la réunification, mais un pays hostile. À l’entrée sud de Pyongyang, l’Arche de la Réunification, érigée en 2001, à l’époque du réchauffement des relations entre le Nord et le Sud, a été démantelée. Sous cette arche, je me souviens avoir participé, il y a 20 ans, à une marche internationale avec le slogan « Korea is one… ».
L’histoire continue, bien sûr, aucune frontière n’est définitive. Néanmoins, l’existence de deux États coréens est une réalité de notre époque. Les linguistes se demandent même s’il est encore possible de parler de dialectes de Pyongyang et de Séoul, ou si le Nord et le Sud parlent désormais des langues différentes. Même le mot « Corée » sonne différemment à Séoul et à Pyongyang : respectivement, Hanguk et Choson…
Le Nord, se coupant du Sud, se rapproche de plus en plus de la Russie. La construction récente d’un pont sur le fleuve Tuman (en coréen : Tuman-gang) à l’extrême sud de la région dePrimorye, près du lac Khasansk, en est une preuve supplémentaire. Un pont temporaire en bois avait été construit pendant la guerre de Corée sur ce fleuve, qui marque la frontière entre la Russie et la RPDC. Plus tard, un pont ferroviaire permanent, le pont de l’Amitié, a été construit. Aujourd’hui, un peu plus en aval, un autre pont, routier cette fois, devrait voir le jour. C’est ainsi que ce pays, considéré par les États-Unis comme un paria et membre de l’« axe du mal », surmonte son isolement. Avec l’aide de la Russie, qui s’appuie aujourd’hui elle aussi sur ses propres forces et sur ses rares véritables amis.
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