Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Les dirigeants européens veulent « réarmer l’Europe »

L’essentiel de cet article, fort bien documenté, est dit quand il est constaté : Si les dirigeants européens s’acharnent à présenter une image d’unité, celle-ci apparaît donc plus précaire que jamais. Mais ils sont confrontés à un problème plus grave encore : comment convaincre les peuples de consentir à des sacrifices sociaux au nom de la lutte contre les déficits publics, et dans le même temps ouvrir sans retenue les vannes pour financer les efforts de guerre – les premiers alimentant en réalité les seconds ? on peut ajouter que le fait que ce soit le mégalomane chef d’Etat français qui pousse la contradiction à son plus haut niveau qui prenne la tête de cette invraisemblable croisade n’est pas un hasard. Mais quand on mesure à quelles extrémités en arrive Macron prêt à envoyer des troupes affronter l’armée russe on s’interroge sur qui est capable d’arrêter ce malade… (note de Danielle Bleitrach histoireetsociete)

le 13 mars 2025

Macron Zelensky

Souvent, les Conseils européens sont avant tout une affaire de mise en scène. Réunis le 6 mars à Bruxelles, les vingt-sept chefs d’Etat et de gouvernement avaient comme objectif – du moins la plupart d’entre eux – d’afficher une apparence d’unité. Deux points – inséparables – constituaient leur ordre du jour : le « réarmement de l’Europe » ; et l’amplification du soutien à Kiev.

Cette image d’unité avait déjà été la première préoccupation à Bruxelles en février 2022, lorsque les troupes russes avaient pénétré en Ukraine. Mais entre temps, le paysage s’est radicalement transformé, en particulier depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche. En à peine quelques semaines, les pires cauchemars des dirigeants européens sont devenus réalité.

Washington a d’abord confirmé qu’il excluait toute présence de troupes américaine en Ukraine, ainsi que toute perspective d’adhésion de ce pays à l’OTAN. Peu après, le vice-président des Etats-Unis a, de Munich, asséné à un auditoire sidéré que la menace « sur nos valeurs » ne venait ni de Moscou, ni de Pékin, mais d’Europe – notamment en matière de liberté d’expression. La diplomatie américaine votait, dix jours plus tard, avec les Russes, contre une résolution onusienne soutenue par les Européens (sauf la Hongrie) condamnant Moscou.

Entre temps, la rencontre à haut niveau, à Riyad, entre Russes et Américains fit comprendre aux Européens qu’ils n’auraient même pas un strapontin lorsque des négociations de paix s’engageraient. Le président Trump a ensuite estimé que son homologue ukrainien était un dictateur et qu’il portait la responsabilité du déclenchement du conflit.

Quelques jours plus tard, Volodymyr Zelensky était publiquement humilié, dans le bureau Ovale de la Maison Blanche, dans une scène qui fit le tour du monde et qui constitua une première dans les annales diplomatiques : MM. Trump et Vance l’ont accusé de jouer avec la perspective d’une troisième guerre mondiale, et lui ont fait comprendre que la défaite de Kiev était la seule perspective si les dirigeants ukrainiens ne se soumettaient pas aux exigences américaines.

Et pour confirmer le propos, Washington suspendait dans la foulée toute aide militaire et financière à Kiev, et même jusqu’à la fourniture des renseignements sur la situation du front – un ultime coup dur pour l’armée ukrainienne. Ensuite, l’aide fut rétablie après que les négociateurs américains eurent obtenu que l’Ukraine accepte le principe d’un cessez-le-feu temporaire sans les « garanties de sécurité » que cette dernière exigeait. Moscou attend des détails de la part Etats-Unis avant de se prononcer.

Quoiqu’il en soit, les leaders occidentaux, totalement désorientés, ont qualifié tout cela de « trahison » américaine et de « retournement d’alliance ». Quant à la perspective que l’Union européenne compense la disparition du soutien américain à Kiev, elle est vite apparue irréaliste. L’UE et ses Etats membres ont versé 135,4 milliards d’euros depuis 2022, dont 49,2 milliards d’euros de soutien militaire, et ont déjà prévu de monter les enchères de 30 milliards cette année.

Dans cette agitation proche de la panique, le président français a convoqué le 17 février un mini sommet avec quelques dirigeants « importants » des pays de l’UE. Ce qui a provoqué des crispations notamment de ceux qui n’avaient pas été conviés (République tchèque, Roumanie…). Une réunion de rattrapage a été organisée le surlendemain dans une nouvelle configuration intégrant des pays hors UE, qui n’a nullement calmé les frustrations.

Une nouvelle rencontre s’est déroulée le 2 mars à Londres, cette fois à l’initiative du Royaume-Uni – pays hors UE – avec le Canada et la Turquie, ce qui a rajouté à la confusion. Et confirmé ce que certains dirigeants et experts européens pressentaient : en matière de défense, l’Union européenne ne peut être un cadre valide.

D’autant qu’en son sein, Budapest s’affiche plus proche des analyses de Washington et de Moscou que de Bruxelles. A mi-voix, c’est aussi le cas de la Slovaquie. Et l’Italienne Giorgia Meloni ne cesse de cultiver sa relation privilégiée avec l’administration Trump. Enfin, des élections ont lieu cette année en Roumanie et en République tchèque qui pourraient faire basculer ces pays vers les positions de Budapest. Le premier ministre Viktor Orban ne cesse d’affirmer « il n’y a pas de solution sur le champ de bataille », ce qui exaspère ses homologues.

Le Conseil européen du 6 mars a entériné le plan présenté l’avant-veille par la Commission intitulé « Réarmer l’Europe »

C’est donc dans ce contexte que s’est tenu le Conseil européen du 6 mars. Ce dernier a, comme premier point, entériné le plan présenté l’avant-veille par la présidente de la Commission européenne intitulé « Réarmer l’Europe ».

Les chefs d’Etat et de gouvernement entendent d’une part réapprovisionner les stocks nationaux de matériels et de munitions vidés par les généreuses livraisons à l’Ukraine. Ils affichent surtout leur angoisse d’être privés de la couverture militaire américaine en cas de coup dur. Beaucoup d’entre eux suivent désormais le discours belliciste d’Emmanuel Macron, qui a fait de l’« autonomie stratégique de l’Europe » son objectif prioritaire. Une thèse désormais reprise – tournant inimaginable il y a encore quelques semaines – par le probable futur chancelier allemand, jusqu’à présent attaché à la vassalité vis-à-vis de l’Oncle Sam.

Plus précisément, Ursula von der Leyen a lancé le chiffre faramineux de 800 milliards d’euros (sur cinq ans) pour ce « réarmement ». Dans cette somme, 150 milliards seraient accordés par Bruxelles aux Etats membres sous forme de prêts, ce fonds étant lui-même constitué par un emprunt levé par la Commission sur les marchés financiers. La distribution de cette manne encouragerait les pays à acheter des armements en commun plutôt que d’effectuer des commandes dispersées.

Quant aux 650 milliards restants, ils seraient directement issus des finances des Etats membres. Ceux-ci seraient en particulier poussés aux dépenses d’armements par un mécanisme excluant ces dernières du calcul des déficits. Autrement dit, Bruxelles ne menacerait plus de sanctions les Etats en déficit excessif si c’est pour la bonne cause militaire…

D’autres options sont également sur la table pour inciter les capitales à « dépenser, dépenser, dépenser pour la défense et la dissuasion », selon les termes de la cheffe du gouvernement danois – un pays pourtant traditionnellement sourcilleux en matière de déficits publics.

Même l’Allemagne – encore représentée au Conseil par Olaf Scholz, mais en accord avec son probable successeur – a surpris en demandant que soient encore plus assouplies les exigences de rigueur budgétaire. Une prise de position qui donne l’ampleur des bouleversements en cours. Parmi les pays traditionnellement qualifiés de « radins », seuls les Pays-Bas et l’Autriche s’inquiètent encore de ces possibles orgies de dépenses.

Parmi les autres pistes citées par le Conseil européen figure la possibilité suggérée aux Etats membres d’utiliser les « fonds de cohésion », théoriquement alloués aux régions pauvres pour rattraper leur retard, pour les orienter vers les budgets militaires. De même, la Banque européenne d’investissement, théoriquement dédiée à l’octroi de crédits pour les projets civils, va être incitée à élargir son champ d’intervention. Enfin, l’épargne privée pourrait être mobilisée, notamment par de futures garanties si progressent les projets d’« union des marchés de capitaux ».

En réalité, si le Conseil a, sur ce premier point, affiché un consensus sur les principes, le diable se cache dans les détails. Par exemple, les perspectives de détourner de leur objet initial les fonds de cohésion n’enthousiasme pas beaucoup de pays de l’Est, y compris la Pologne, pas plus que l’Italie. De nombreux autres réticences se font jour plus ou moins discrètement.

Et d’importantes tensions subsistent entre des pays, emmenés par la France, privilégiant les commandes aux firmes européennes ; et ceux qui, comme la Pologne, donnent la priorité aux matériels immédiatement disponibles, souvent proposés… par les fabricants américains. Au point qu’un nouveau sommet, les 20 et 21 mars, retravaillera sur ces dossiers. En outre, en coulisses, les dirigeants européens continueront sans doute à évoquer l’extension du parapluie nucléaire français proposé par Emmanuel Macron.

A défaut d’être au clair sur les financements, les Vingt-sept ont validé une « liste de courses » prioritaire : défense aérienne et antimissile; systèmes d’artillerie ; missiles et munitions ; drones et systèmes antidrone ; moyens stratégiques, y compris en ce qui concerne l’espace et la protection des infrastructures critiques ; mobilité militaire ; domaine cyber ; intelligence artificielle ; guerre électronique…

L’autre point à l’ordre du jour portait sur le soutien à Kiev, qui ne fait pas l’unanimité

L’autre point à l’ordre du jour portait sur le soutien à Kiev – Volodymyr Zelensky (photo, avec Emmanuel Macron) avait naturellement été invité et congratulé. Le premier ministre hongrois s’est désolidarisé de ce soutien. Ses collègues ont martelé qu’il convenait de parvenir à la « paix par la force » et donc de placer « l’Ukraine dans la position la plus forte possible avant, pendant et après les négociations visant à mettre un terme à la guerre ». Et réaffirmé leur volonté de livrer de systèmes de défense aérienne, de munitions et de missiles ainsi que de fournir des formations et équipements aux brigades ukrainiennes.

Si les dirigeants européens s’acharnent à présenter une image d’unité, celle-ci apparaît donc plus précaire que jamais. Mais ils sont confrontés à un problème plus grave encore : comment convaincre les peuples de consentir à des sacrifices sociaux au nom de la lutte contre les déficits publics, et dans le même temps ouvrir sans retenue les vannes pour financer les efforts de guerre – les premiers alimentant en réalité les seconds ?

Un problème pour lequel la France d’Emmanuel Macron, lestée de déficits considérables, est en première ligne. Au point que certains commencent à évoquer un durcissement de la réforme des retraites pour… se préparer contre la « menace russe ». Une menace qui, selon les termes du maître de l’Elysée serait « existentielle et de longue durée ».

Cette affirmation est reprise et ressassée par les médias dominants. A défaut d’être étayée, elle contribue à doper considérablement les cours de bourse de Safran (moteurs et équipements aéronautiques), Airbus (aéronefs et missiles), ou Thalès (électronique embarquée et de défense) dont l’action a grimpé de 65 %. L’Allemand Rheinmetall (armements, chars) connaît un succès analogue.

Manifestement, la période n’est pas déprimante pour tout le monde.

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1 Commentaire

  • Michel BEYER
    Michel BEYER

    Fidel CASTRO en 1992 :
    Fidel Castro l’avait prédit en 1992 : La prochaine guerre sera en Europe entre la Russie et le fascisme sauf que le fascisme sera appelé démocratie (LGS)

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