Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Deux ou trois choses dont je suis convaincue…

Il y a peu de choses dont je suis à peu près convaincue face à ce passage d’un monde qui a connu une hégémonie “unipolaire”, celle de l’occident à un monde multipolaire, c’est d’abord qu’il ne s’agit pas de remplacer une hégémonie par une autre mais bien d’un saut dans l’inconnu dans une ère de bouleversements qui a des fondements économiques incontournables mais qui prend des formes inusitées parce qu’il s’agit d’un basculement anthropologique. Nous sommes dans un saut dans l’avenir qui ne saurait se confondre avec le passé, on ne peut s’enfermer dans des analogies. Cette dynamique est partie de la base économique mais elle remet en cause la plupart de nos certitudes, nos normes, nos institutions, elle mobilise toutes les expériences, tous les savoirs, les arts, les sciences, elle est “civilisation”… Et dans le même temps, c’est le deuxième point de conviction, ce qui nous empêche de devenir pleinement acteurs d’un tel changement est la manière dont nous continuons à entériner les valeurs et normes impérialistes ; c’est parce que nous avons été endoctrinés en profondeur par l’idée qu’il n’y a pas d’alternative, en sous-estimant voire en diabolisant le rôle des révolutions, en particulier celle de l’URSS dans ce basculement actuel. Donc il faut à la fois ne pas s’enfermer dans le passé, être attentif à ce qui nait, et dans le même temps procéder à une réévaluation de tout ce qui a permis le basculement d’aujourd’hui, reconquérir sur tous les négationnismes la véritable histoire émancipatrice. C’est ce que nous voulons Marianne et moi explorer dans ce blog.

illustration : Ce cliché célèbre fait partie d’une exposition sur les photographies d’actualité emblématiques du XXe siècle sont exposées à la Howard Greenberg Gallery jusqu’au 16 novembre 2024. Extra! Extra!: News Photographs from 1908-1975 présente des images inoubliables d’un large éventail d’événements historiques, notamment l’arrivée de la première voiture Ford, les manifestations pour le droit de vote des suffragettes, l’explosion de la bombe atomique, les moments forts du baseball, les activités en faveur des droits civiques, les événements politiques. les assassinats, Woodstock et la guerre du Vietnam. Ensemble, les photographies forment une extraordinaire histoire visuelle des États-Unis au cours du siècle dernier.

Cette double dimension de nos publications, est la chose la plus passionnante du monde à observer et pas seulement par tous les “anciens” à qui on a volé l’épopée que fut leur vie mais surtout pour tous ces jeunes qui ne veulent plus reproduire le monde tel qu’il est. C’est le seul chemin possible qui aille vers la vie tout le reste est désespérant et débouche sur l’inertie, nous n’avons pas de temps à perdre, il faut partir d’un constat :

  • un ébranlement tel que pratiquement tout notre univers conceptuel, fondé sur la suprématie occidentale et celle d’une classe sociale impérialiste dont le capitalisme s’est peu à peu confondu avec ce suprématisme et avec la militarisation financiarisé de tout ce qui gouverne les échanges humains, s’effondre. Résultat : tout ce qui nous permettait jusqu’ici de déchiffrer le monde s’avère inadéquat et il nous faut admettre une fois de plus que nous ne savons rien… ou si peu… reconquérir l’appétit de vivre et d’agir… sur l’image du déclin et du catastrophisme.

Dans cette révolution dans les perspectives, ni le passé, ni le présent, ni l’avenir ne sont soumis à notre seule capacité à générer les normes, les savoirs, C’était déjà une illusion quand l’occident paraissait le maitre mais aujourd’hui si nous voulons demeurer acteurs, il faut que nous acceptions ce décentrage. Il n’est pas dit non plus que les autres civilisations soient nécessairement amicales, bienveillantes et douées des vertus qui nous font défaut, il y a peu de chance qu’il en soit ainsi. Le seul chemin est qu’il faudra inventer les termes du dialogue, recréer les souverainetés non dans les mythes mais en mesurant bien à quel point nous sommes tous les produits de tous les forceps possibles, le mélange a déjà eu lieu et il faut réévaluer les apports, la créativité.

  • C’est là qu’intervient la seconde conviction, pour opérer cette première révolution nous ne pouvons pas ignorer ce qui l’a engendré ; il faut arrêter de sous-estimer ce qui s’est passé il y a une centaine d’années à savoir la première révolution socialiste, celle de l’URSS suivie d’un effet en chaîne au moins jusqu’à la fin des années cinquante… parce que ce mouvement a besoin de retrouver un aspect prométhéen, celui d’une libération, émancipation à ce jour prostituée…

Pourquoi parler de basculement anthropologique ? parce que c’est une manière de mieux comprendre en quoi le passage d’un mode de production à un autre, avec ses temporalités propres se traduit dans la subjectivité collective et individuelle. Comme le souligne Marx quand les forces productives n’arrivent plus à se mouvoir dans les rapports de production existants, il s’en suit un ébranlement.. Toutes vos représentations de votre être, de vos rapports sociaux sont déstabilisées comme le sont les institutions sur lesquelles elles s’appuyaient.. Le niveau anthropologique c’est celui qui nous permet de concevoir ce vertige alors que tout bascule et en particulier les catégories dans lesquelles vous percevez le monde…

Pourtant cette idée d’une mutation anthropologique, telle qu’elle a été développée par les théoriciens de l’école de Cambridge, s’est située en réponse souvent immédiate à la chute de L’URSS, qui aurait été une révolution correspondant à l’occidentalisation, donc incapable d’aller jusqu’au bout. On n’est pas loin de l’idée que c’est là les raisons de son échec. Ces chercheurs, dotés en général d’une érudition phénoménale, tout en se situant dans la filiation de Marx et Engels ont considéré comme Jack Goody – peu connu en France mais très déterminant chez les anglosaxons – ce qu’il énonce dans commentaire: “trop souvent les généralisations en sciences sociales – et cela vaut tant pour l’Asie que pour l’occident – se fondent sur la croyance que l’occident occupe la position génératrice de la norme dans la construction d’un savoir général. Toutes nos catégories, pour ainsi dire – politique et économie, Etat et société, féodalisme et capitalisme – ont été d’abord conceptualisées à partir de l’expérience de l’occident. C’est cette conceptualisation qui s’avère inapte à comprendre le bouleversement dans lequel nous sommes engagés. L’originalité néanmoins de cette école par rapport à quelqu’un comme Levi Strauss et “la pensée sauvage” c’est qu’elle continue à se situer dans une problématique marxiste de la modernité, simplement elle nous invite à ne pas croire que seul l’occident a contribué aux grands basculements historiques.

C’est de là que cette perception d’un “vertige” traduirait l’inadéquation entre le mouvement du monde et notre difficulté à penser, à conceptualiser ce qui se passe. Il nous manque la manière de penser les révolutions inaugurées par le matérialisme historique mais aussi la mise en œuvre léniniste, ce bouleversement non seulement de la dictature de la bourgeoisie mais aussi de toutes les identités territoriales, nation, internationalisme, urbain, rural, nomadisme… Ce qui continue à travailler l’espace de ce qui fut l’URSS et du socialisme après les contrerévolutions… parce que l’impérialisme est incapable de pacifier ce qu’il croit encore conquérir et qu’il ne peut que détruire…. Ce qui le fait avancer comme Biden et la classe politique occidentale tel un fantôme vers l’anéantissement et nous ils ont transformés en sujet de leurs destructions.

Nous voyons aujourd’hui le prisme intolérable du moralisme occidental qui veut que notre conception de la démocratie en revienne à un permis de tuer pour ceux qui sont adoubés comme porteurs de ce modèle, même si ce sont de franches crapules et des criminels comme Netanyahou ou Zelenski. Mais nous croyons encore qu’il suffit d’en finir avec ces individus, leur “parti” pour arrêter le “vertige”, la mort est devenue leur métier, on le subodore mais on ne mesure pas assez le fait qu’il suffirait d’un bon “maitre” impérialiste pour arrêter ces gens-là, que Harris Biden feront mieux que Trump ou vice versa…

Mais la révolution anthropologique que subit en particulier l’Europe occidentale et qui est vécue comme un déclin, une peur panique de ce monde en mouvement va beaucoup plus loin que ce que dévoilent ces destins criminels, non seulement parce que l’individu est le produit d’une machine politicienne qui va bien au-delà de la caricature de cette mégalomanie impuissante. Ils ne peuvent prospérer que parce qu’il y a fascisation des institutions, des représentations. Et cette fascisation passe par la division caricaturale entre un occident colonisateur et un sud lumpenprolétarisé qui est trop souvent traduit par un clientélisme politique qui exaspère les divisions.

L’emprise d’un tel système est telle qu’il a pu transformer les enfants de la Shoa pour certains en vrais nazis . Si l’on peut faire de certains juifs, par la peur et les apories d’une vision du monde complètement dépassée, de vrais nazis alors tout est possible dans l’effet de fascisation qu’implique une telle conception du monde. Aucun peuple, aucun individu n’est à l’abri de ce que nous a enseigné la seconde guerre mondiale, le ventre est plus que jamais fécond de la bête immonde.

Pour percevoir ce “vertige” anthropologique et ce qu’il exige réellement dans nos luttes, il faut à la fois être convaincu que le divorce entre ces “élites” et les peuples est tel que l’expression politique des mécontentements n’a plus qu’un rapport lointain avec “l’offre” démocratique, ce qui transforme les “élites” en desperados de l’anéantissement. Mais dans le même temps par suite de la crise profonde entretenue autour de l’alternative socialiste cette panique peut déboucher sur une véritable adhésion au nazisme, à la xénophobie…

C’est justement à cause de ce divorce supposé entre le peuple et un socialisme bureaucratisé, interprétation à laquelle a été le plus souvent réduite l’analyse de la fin de l’URSS que ce sont multipliées les approches anthropologiques, celles qui tentent de reconstruire un tissu social en dehors de ce qui avait été défini comme la fin de l’histoire. Le danger est que cette approche née dans la crise du marxisme dilue le fondamental de ce qu’est l’impérialisme mais elle a le mérite de nous faire percevoir l’ampleur de ce stade ultime du capitalisme en nous renvoyant chaque fois à la chute de l’empire romain qui est la référence avec la prise de Constantinople quasi contemporaine des “grandes découvertes”. Il y a la chute mais il y a aussi le fait qu’aucune société capitaliste développée n’est passé au socialisme mais a plutôt développé le fascisme ou encore qu’à partir de 1959 il n’y a plus aucune révolution socialiste.

L’École de Cambridge regroupe un certain nombre de marxistes qui, confrontés à la chute de l’URSS, vont revoir tous leurs concepts à partir de ce “séisme” et vont en particulier reprendre tout ce qui a été jusqu’ici écrit sur la Chine et d’autres civilisations. Par parenthèse on peut aussi considérer que c’est à partir de Khrouchtchev que se développerait cette vision… Mais il y a là un autre sujet à explorer. Reprendre les travaux de cette école tout en les critiquant à partir de l’évolution d’une situation de ce monde multipolaire fait partie de ce qui devrait se faire.

Ce qui me permet de revenir au choc qu’a été cette université d’été du PCF, j’ose affirmer qu’au moins 80% des participants ne croyaient pas à ce que leur répète la propagande de l’OTAN et aspiraient à un véritable débat, il s’esquissait ça et là. Mais que ce soit dans le discours d’ouverture de Roubaud Qashie ou dans l’invraisemblable intervention de clôture de Clémentine Fauconnier les “boulons ont été vissés”, il ne fallait surtout pas que les communistes et avec eux les Français aient la moindre possibilité d’action liée à ce mouvement… La manière dont a été bloqué la journée en faveur de la paix n’a fait que traduire ce “vissage de boulons” par ceux qui conservent les manettes pour aller toujours plus vers la marginalisation et la division des forces révolutionnaires.

Le choc que ne pouvait manquer d’éprouver n’importe quel communiste, n’importe quel intellectuel lors de l’intervention de la malheureuse Clémentine Fauconnier devenue “parole officielle” de l’Université d’été du PCF, résidait tout autant dans la méconnaissance du sujet qu’elle prétendait traiter (la Russie d’aujourd’hui, celle dite de Poutine) que l’absence totale de culture concernant les débats actuels en sciences sociales autre que ceux qui lui ouvraient certains financements et publication de soumission à un consensus n’ayant plus qu’un lointain rapport avec la recherche en sciences sociales. Nous étions dans une vision doublement malencontreuse du prisme occidental, une sorte de néo-colonialisme intellectuel d’autant plus insupportable qu’il ne se fonde plus sur une dynamique de conquêtes mais sur la régression totale. C’était le déclin assumé de la recherche en sciences sociales, comme celle complètement onirique d’un PCF contribuant à cet enfermement réactionnaire. Voir dans ce qui s’est passé en 1990 un simple processus de “démocratisation” plein de promesse mais qui a été avorté par le retour de l’autocrate qui avait néanmoins conservé une constitution proche de celle de la France, refuser de voir le drame social qu’a couvert cette “démocratisation était aussi fou que de ne pas percevoir à quel point ce désastre social s’était accompagné d’un démantèlement territorial sous la poussée de l’OTAN et des révolutions de couleur. C’était refuser de voir ce qui est décrit par ailleurs à travers le cas arménien, à savoir l’obligation faite à de petites républiques multinationales de mythifier leur existence à travers une identité dont la seule réalité ne pouvait être que la négation de l’URSS et la haine entretenue d’une pseudo domination russe. Il y a eu dans un tel contexte recours à une ethnicisation et une anthropologie totalement réactionnaire qui reprenait certaine recherches soviétiques mais surtout un fatras hérité de la guerre civile et des différentes croisades antibolchéviques. Ce courant réactionnaire veut nous couper de tout un travail passionnant avec des équipes multinationales dont nous nous faisons souvent l’écho dans ce blog.

Le bout d’une course entamée au moins il y a trente années ou plus et qui mériterait un travail épistémologique sur les conditions de la production en matière scientifique, la marginalisation française.

Revenons en effet sur ce que semblait ignorer cette étrange université d’été c’est la remise en cause quasi générale de cet enfermement dans un occidentalisme ossifié et le fait que l’on en soit à d’autres approches. Ce qui a été induit par l’extraordinaire développement accomplissement de l’Europe depuis “la Renaissance” a conduit selon Jack Goody à un “vol” de l’histoire, ce serait selon ce prisme qui s’avère erroné l’Europe et elle seule qui aurait tiré le reste du monde de la “barbarie”… Ce prisme a été en fait qu’après la deuxième guerre mondiale et la contrerévolution “libérale”, la chute de l’URSS est devenue celui d’une cécité telle qu’elle dépasse de loin l’invraisemblable propagande dont nous sommes nous citoyens victimes, une asphyxie telle qu’elle nous frappe d’impuissance. Nous sommes de ce fait en-deça d’un simple effet d’endoctrinement.

Ce qui caractérise en revanche cette vision anthropologique remettant en cause ce nombrilisme caricatural quand nous sommes confrontés à la puissance chinoise, à ces mondes émergents, c’est que souvent le fait que les dits anthropologues ont passé des années sur un terrain pour y constater l’accès à la modernité. Imaginez ce simple constat : il est difficile voire quasiment impossible à un européen d’acquérir les techniques de fabrication des armes et des outils dits primitifs, alors que les “sauvages” s’adaptent très rapidement à notre civilisation, le fric, l’alcool, etc… Comme l’avait proposé Engels à partir des travaux de Morgan, ces chercheurs en ont acquis un certain respect et ont examiné la famille, la propriété et l’Etat, face à la “modernité” occidentale. Alors quand on est passé de là à des civilisations comme celles des grands empires asiatiques, sous des formes à la fois permanentes et nomades on est enclin à un doute sans rivage. Mais dans un tel contexte, c’est le cas chinois qui a comme pour nous tous bouleversé toutes les catégories.

Il y a dans ces approches celles de Jack Goody mais aussi de Wallerstein, et des grands ancêtres que sont Braudel, Perry Anderson, Moses Finley, Weber, une grande interrogation sur la “bourgeoisie” : l’occident a voulu en voir le seul modèle achevé en Europe et aux Etats-Unis, toutes les autres “bourgeoisies” ayant été freinée par un État bureaucratique et despotique, et par le prestige des lettrés et de la propriété foncière. Derrière cette référence à une classe il y a comme l’a très bien vu Paul Boccara le marchand et le nom marchand et à travers ce prisme celui de la monnaie (et de la religion), des questions tout à fait actuelles avec la dédollarisation. Delaunay ici même a tenté d’initier une autre approche économique de ces catégories pour apprécier ce grand bouleversement.

Il y a même au delà du permis de tuer des guerres en cours, l’idée que toutes les autres civilisations et surtout la Chine étaient incapables d’innover et ne savaient qu’imiter. Cette vision est des plus tenaces y compris dans l’analyse qui est faite du rôle de la Chine dans ce monde multiculturel alors que même en considérant que son premier souci est d’abord le peuple chinois, il n’est pas question d’adopter le modèle des USA…

  • Ce que j’ose affirmer c’est que la plupart des prévisions et évaluations même celles qui se veulent moins réactionnaires ou revendiquent un modèle sur lequel les Russes du Kprf eux-mêmes mènent un travail exemplaire pour à la fois comme nous devrions tous le faire réévaluer le rôle immense de la révolution soviétique et ce que lui doivent toutes les expériences en cours, mais dans le même temps accepter ce que cette révolution a libéré, la multiplicité des regards et des expériences qui ont contribué à faire de l’humanité ce qu’elle est aujourd’hui. Cela suppose ce qui caractérisait déjà Marx et la plupart des anciens leaders communistes, une véritable boulimie intellectuelle, une curiosité insatiable en même temps qu’un but dans lequel désincarner toute cette activité intellectuelle : contribuer à l’émancipation de l’humanité en partant de ceux qui n’ont rien d’autre que cette espérance pour eux et leurs enfants (définition du prolétariat), en créant les conditions de les faire les sujets de cette histoire émancipatrices. Là encore ma deuxième conviction c’est que cet apport n’a cessé d’être nié et qu’il y a là un des obstacles majeurs pour répondre aux défis de notre temps.

Se dire à ce titre que la Chine comme nous en est à ce moment de l’histoire de l’humanité où nous avons plus que jamais besoin de ce savoir accumulé et dans le même temps il n’y a plus aucun modèle mais une expérimentation permanente qui exige des échanges, des coopérations…

Tout cela pour vous dire que ce blog ne saurait se contenter du récit de nos défaites et du désespoir face à l’état de tous les groupuscules communistes y compris ce que l’on fait du PCF et c’est pour cela que nous avons renoncé aux réseaux sociaux pour tenter de se dégager et explorer les deux voies ci-dessus.

Danielle Bleitrach

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