L’œuvre de Phillis Wheatley, première poète africaine-américaine à avoir été publiée aux États-Unis, sera mise à l’honneur à Washington. La Smithsonian Institution a acquis une collection appartenant à cette esclave et autrice du XVIIIe siècle, dont le manuscrit de son poème “Ocean”, rapporte “The New York Times” a été retrouvé. Courrier international publie cet article qui m’inspire des sentiments divers, en premier lieu la volonté de faire connaitre cette femme et d’aller immédiatement chercher ses poésies, Océan en particulier (femme libre toujours tu chériras la mer). Mais pourquoi le cacher, j’éprouve aussi de la suspicion quelque chose qui a le relent du discours de Biden à l’ONU, la tentative de masquer l’atrocité de l’esclavage et ce qu’il a engendré encore aujourd’hui, derrière une vision de la promotion américaine y compris d’un président noir Obama, d’un général noir Collin Powell et d’en faire les instruments dociles de l’impérialisme, de sa politique raciste et destructrice à l’échelle de la planète. Comment dire à la fois mon intérêt pour la culture, pour la force des peuples des Etats-Unis, le refus de m’en passer et dans le même temps de l’escroquerie de sa marchandisation, de sa propagande.? … Ce n’est pas si loin de ce que j’éprouve en ce moment pour mon propre pays, la France…
Publié le 27 septembre 2023 à 15h33
Une édition rare d’un recueil de poèmes de Phillis Wheatley, publié en 1773. PHOTO MARISSA ROTH/NYT
Elle a été l’une des poètes les plus célèbres des États-Unis au XVIIIe siècle. Elle arrive aux Etats-Unis en 1761 alors qu’elle n’était qu’une enfant, Phillis Wheatley est devenue douze ans plus tard la première autrice africaine-américaine publiée. L’un de ses très rares manuscrits, Ocean, sera désormais visible dans un musée de la Smithsonian Institution, à Washington, au sein d’une collection de 30 objets, relate The New York Times. C’est sur un bateau la ramenant en septembre 1773 de Londres, où elle effectuait une tournée promotionnelle, vers les États-Unis que Phillis Wheatley a écrit Ocean, “une ode de 70 vers empreinte de rêves, d’émerveillement et d’un puissant désir de liberté”, décrit le quotidien new-yorkais. Longtemps resté inédit, le poème a été considéré comme perdu jusqu’en 1998, lorsqu’il est réapparu dans une vente aux enchères.
Un poème “éblouissant”
Désormais, il appartient aux collections du Musée national de l’histoire et de la culture africaines-américaines, qui célébrait déjà en son sein le parcours unique de Phillis Wheatley, vendue enfant aux Wheatley, une famille aisée de Boston, qui l’a baptisée d’après le nom du bateau sur lequel elle était arrivée captive depuis l’Afrique de l’Ouest. Esclave, Phillis Wheatley a été affranchie peu après la publication de son premier recueil, en décembre 1773.
Ocean est un poème “éblouissant”, estime le directeur du musée, Kevin Young, interrogé par The New York Times. Il se dit particulièrement ému en s’imaginant l’état dans lequel pouvait se trouver l’écrivaine “au moment où elle traversait l’océan [afin de rejoindre Boston, pour la deuxième fois de sa vie] : une première fois dans d’atroces circonstances, une seconde fois en sa qualité d’illustre poète”. Parmi les nouvelles acquisitions figurent aussi des journaux et des livres datant de son époque. Et d’autres, publiés après son décès en 1784, qui témoignent de son héritage dans la culture américaine, à l’image d’un pamphlet de 1930 écrit par un club faisant partie d’un réseau américain de cercles féminins portant son nom.
Ce que ne précise pas courrier international c’est un fait qui pour moi la rapproche de Baya, la peintre algérienne dont l’exposition a lieu dans la Vieille charité à Marseille. C’est une famille de blanc, celle de ses maitres, devenus ses protecteurs qui découvrent ses dons et l’exhibent. Relation complexe qui est aussi celle entre femmes et on pense bien sûr aux Bostoniennes du grand écrivain Henry James autant qu’au Talon de fer de Jack London : Susannah Wheatley de la famille qui l’a achetée devient la mentore de Phillis Wheatley, elle invite des personnalités de la haute société bostonienne pour s’entretenir avec la fantastique ) Dark child from Africa. Elle l’emmène également dans des salons de diverses figures éminentes de Boston comme le gouverneur Thomas Hutchinson, le lieutenant gouverneur Andrew Oliver, le juriste John Hancock. Lors de ces visites Phillis Wheatley se fait connaitre par ses conversations sur la Bible et la littérature anglaise et devient un sujet d’admiration au sein des personnes cultivées de Boston. Cela dit, elle a la conscience du fossé qui la sépare de la société « blanche », même quand elle est l’invitée d’honneur, elle refuse poliment de s’asseoir à la table de ses admirateurs, préférant se mettre à l’écart sur une table voisine. Que signifie cette attitude, le respect des codes des maîtres ou le refus de “l’assimilation”, là encore la figure de Goldman revient me hanter : qu’est-ce que cela signifie de devenir “comme les autres”.
Sa première biographe Margaretta Odell (une descendante de Susannah Wheatley) souligne le fait qu’elle est consciente de son statut de privilégiée vis à vis de ses frères et sœurs de couleur. Ainsi, lorsque Susannah Wheatley l’emmène chez Eunice Fitch et ses filles, par une ironie du sort, elle convie chez l’épouse de Timothy Fitch le négrier propriétaire du schooner le Phillis. Si Eunice Fitch se montre chaleureuse envers Phillis Wheatley, l’ambiance change quand ses filles viennent prendre le thé, elles montrent leur gêne à partager le thé avec une servante noire. Phillis Wheatley se lève pour se retirer, mais Eunice Fitch la retient jusqu’à la fin du thé. Même si c’est une victoire, il demeure que la jeune femme est consciente que sa place n’est pas à la même table que celle des Blancs, fussent-ils des admirateurs.
Il reste la poésie, la recherche des mots qui combleront cette identité que l’on transforme en gouffre.
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