Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

BRICS : Avant l’ouverture, la rencontre entre l’Afrique du sud et la Chine, les enjeux. Quelles opportunités pour le peuple français ?

C’était le coup d’envoi du 15e sommet des Brics ; le 22 août 2023 à Johannesburg, en amont de cette réunion, le président Chinois Xi Jinping a eu droit à une visite d’Etat, ce mardi matin. Il a été reçu à Pretoria par le président sud-africain Cyril Ramaphosa, son homologue sud-africain, qui avant d’accueillir les Brics a souhaité renforcer les relations bilatérales avec son principal partenaire commercial. Le contexte international fait que cette réunion attire l’attention du monde entier et il n’est pas indifférent que cela se passe en Afrique. En effet, l’Afrique est entrée dans un deuxième mouvement de libération nationale qui exige souveraineté pour son développement, l’accès à une modernité productive ce qui passe par une transformation qualitative de ses échanges y compris avec un partenaire comme la Chine. L’Afrique, ce continent jeune témoigne que désormais si l’autonomie stratégique a un prix, il est moins élevé que la soumission. Il n’y a pas d’hostilité, d’anti-occidentalisme mais le constat de l’impossibilité de vivre dans le système actuel. Il faut donc à la fois mesurer le contexte réel de cette rencontre qui part des pays du sud, la réalité de ce à quoi elle peut prétendre mais aussi les potentialités qu’elle recèle. C’est un nouveau “champ magnétique” historique qui succède à la contrerévolution de la chute de l’URSS et il inaugure aussi la possibilité pour chacun de choisir le socialisme qui lui convient, le mouvement communiste et la jeunesse voit se dessiner une nouvelle perspective : encore faut-il en avoir conscience y compris nous Français et nous souvenir que si notre pays a une histoire impérialiste, colonialiste, il a toujours eu en son sein des forces, un parti qui a lutté aux côtés de ceux qui se libéraient, il est temps de retrouver cette tradition.

Afrique du Sud et Chine : une histoire commune de lutte

Les deux chefs d’État ont affiché leur entente sur plusieurs dossiers en tant que chefs d’Etat mais aussi de “partis” d’obédience communiste. Cyril Ramaphosa n’hésitant pas à présenter son pays comme « véritable ami » de la Chine, et soulignant plusieurs fois le soutien apporté par Pékin à l’African National Congress au temps de la lutte contre l’apartheid. Xi Jinping lui a insisté sur la raison pour laquelle les relations de la Chine avec l’Afrique du Sud sont si bonnes et que l’amitié sino-sud-africaine est si profonde, cruciale, parce que les deux pays et partis ont partagé le bonheur et le malheur sur leurs voies de développement respectives, forgeant une amitié profonde comme “des camarades et des frères“, a indiqué M. Xi.

Dans cette logique historique, les présidents Cyril Ramaphosa et Xi ont dû constater que depuis l’établissement des relations diplomatiques il y a 25 ans, la Chine et l’Afrique du Sud ont réalisé un développement de premier plan, qui est allé bien au-delà du cadre des relations bilatérales et a une importance plus grande, et là il a été fait allusion incontestablement à l’orientation internationale en faveur de la justice et de la souveraineté. M. Xi a déclaré qu’il s’agissait de sa quatrième visite en Afrique du Sud en tant que président chinois. « J’ai un sentiment chaleureux quand je visite à nouveau le pays après cinq ans. Sous la direction du président Ramaphosa, l’Afrique du Sud jouit d’un développement national croissant et d’une influence internationale. La Chine s’en réjouit et souhaite à l’Afrique du Sud encore plus de progrès sur la voie de son développement », a déclaré M. Xi.

En 2010, la Chine a fermement soutenu l’inclusion de l’Afrique du Sud dans le mécanisme des BRICS, offrant à l’Afrique du Sud l’occasion de s’engager dans une coopération étroite dans divers domaines avec plusieurs des économies les plus importantes et à croissance rapide du monde, ce qui lui a donné des avantages substantiels.

Xi Jinping promet de mettre l’accent sur l’importation de biens sud-africains à valeur ajoutée

Mais ce qui a été avancé et qui est de fait un des enjeux de ce sommet va au-delà de cette relation bilatérale puisque l’on peut dire que cela concerne toute l’Afrique y compris à travers quoi il faut lire ce qui se passe actuellement au Niger, et en Afrique de l’ouest. L’Afrique doit accéder à une “modernité”, c’est-à-dire ne plus être uniquement un continent dans lequel on pille les matières premières mais un continent qui lui-même produit des biens industriels à valeur ajoutée. C’est ce qu’il faut entendre par nouveau point de départ historique vers de “nouveaux sommets”, non seulement plus de relations mais des relations qualitativement nouvelles tant sur le plan économique que politique. Ce qui se passe en Afrique de l’ouest actuellement a des échos dans toute l’Afrique, et pas seulement au Niger, mais y compris au Sénégal où il y a des morts liés à la répression alors qu’il n’y en pas au Niger, et concerne au premier chef également le Nigeria, le Bénin où les effets du blocus infligés au Niger par la Cédéao complice ont déjà aussi des conséquences désastreuses.

Les deux chefs d’Etat appartiennent à des partis qui sont conscients de la nature du processus mais qui ont choisi d’imposer la neutralité, la non intervention ce que porte aussi ce sommet des BRICS. Une position des non alignés qui refuse les coalitions de la guerre froide mais qui a ses propres objectifs. D’abord répondre concrètement aux besoins de développement et d’une manière qualitativement nouvelle.

M. Xi a indiqué mardi que la Chine et l’Afrique du Sud travailleraient à approfondir la coopération bilatérale dans les domaines de l’énergie électrique, des nouvelles énergies ainsi que de l’innovation scientifique et technologique. Il a également déclaré que la Chine était prête à importer davantage de produits de qualité d’Afrique du Sud et continuerait à encourager les entreprises chinoises à investir et à faire des affaires en Afrique du Sud, mais cela suppose néanmoins que ces entreprises soient canalisées dans une perspective de coopération qui se manifeste actuellement, comme l’a noté Xi, par un nombre croissant de produits agricoles spécialisés sud-africains de haute qualité entrant sur le marché chinois.

C’est également dans un domaine où la Chine a déjà apporté à l’Afrique une expérience qui a favorisé les échanges inter-africains, hors lien avec les seules métropoles coloniales, qu’a été envisagée une collaboration plus étroite entre l’Afrique du Sud et la Chine. Il s’agit des infrastructures, aidant l’Afrique du Sud à améliorer ses systèmes de transport, y compris les routes, les chemins de fer et l’aviation, afin de créer de meilleures conditions pour la connectivité commerciale dans le cadre des routes de la soie, mais aussi de l’unité africaine. Ce projet pour l’Afrique du Sud et est propice au développement équitable et durable du monde.

L’Afrique du Sud et la Chine entretiennent des relations économiques florissantes. La Chine est actuellement le plus grand partenaire commercial mondial de l’Afrique du Sud, et l’Afrique du Sud a la distinction d’être le premier partenaire commercial de la Chine en Afrique. Selon les données publiées par le ministère chinois du Commerce, le commerce bilatéral entre la Chine et l’Afrique du Sud a atteint 56,74 milliards de dollars en 2022, soit une augmentation de 5% en glissement annuel et un sommet en huit ans. Cette tendance à la croissance a continué de s’accélérer au premier semestre de cette année, avec une nouvelle augmentation de 11,7%. A Johannesburg, les marques chinoises comme Huawei, Gree sont omniprésentes. Les appareils électroménagers, les smartphones et les automobiles chinois sont tous privilégiés par la population locale.

Les deux dirigeants ont également assisté mardi à la signature d’une série d’accords de coopération allant de la coopération industrielle à l’énergie en passant par l’agriculture, parmi lesquels la coopération énergétique est considérée comme essentielle pour lutter contre les problèmes énergétiques nationaux en Afrique du Sud. Des raisons historiques ont conduit à un manque d’investissement à long terme dans le secteur de l’électricité en Afrique du Sud, associé au vieillissement sérieux des unités thermiques existantes, entraînant des pénuries d’électricité. Pour aider à résoudre ce problème, les entreprises chinoises signeront des accords avec l’Afrique du Sud lors du sommet des BRICS pour promouvoir la sécurité énergétique et le développement de l’électricité. En plus d’aider l’Afrique du Sud à s’attaquer à l’un de ses problèmes les plus urgents comme la pénurie d’électricité, la Chine jouera un rôle important dans le développement industriel du pays, en aidant à créer plus d’emplois et à accroître les échanges humains et culturels, a déclaré He Wenping. « La visite de M. Xi en Afrique du Sud approfondira l’amitié spéciale des ‘camarades plus frères’ des deux pays. »

Cette rencontre préalable entre l’Afrique du sud et la Chine, s’inscrit pleinement dans celle des dirigeants des pays des BRICS – Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud – qui se sont réunis mardi en ayant avec l’expansion des BRICS, la crise ukrainienne et la réduction de la dépendance au dollar américain en tête de l’ordre du jour, selon les médias. Mais le sommet a sa propre logique.

Cette logique sera celle d’un sommet dont tous les membres n’ont pas les mêmes attentes ni les mêmes orientations politiques et qui instaure un dialogue respectueux de favoriser une démarche diplomatique de gagnant-gagnant. Lors du sommet des BRICS, la rencontre bilatérale entre Xi et le Premier ministre indien Narendra Modi devrait également favoriser des échanges étroits et directs.

Les médias occidentaux sont à l’affut des divisions possibles alors que les Brics sont au contraire conçus comme un espace souple dans lequel sommet et échanges bi-latéraux sont à l’ordre du jour. Il est clair que l’occident espère que Modi et d’autres dirigeants qui n’ont pas pour l’exprimer rapidement, la même conception de l’émancipation des peuples vont soit entrer en conflit, soit tempérer les tendances supposées anti-impérialistes de nations comme la Chine, la Russie, l’Afrique du Sud, le Brésil.

Mais l’objectif qui rassemble les cinq grands pays membres des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud), c’est de réduire leur dépendance à l’égard du dollar américain. Le club des cinq grands émergents, à la porte duquel frappent l’Arabie saoudite et, entre autres, l’Algérie, a déjà accompli ses premiers pas dans la «dédollarisation». Il a en effet créé, dès 2015, sa propre banque, la Nouvelle Banque de développement (NDB en anglais). Objectif affiché: offrir une alternative aux institutions de Bretton Woods, le FMI (Fonds monétaire international) et la Banque mondiale, à la main des Occidentaux. L’établissement, basé à Shanghaï, est actuellement présidé par Dilma Rousseff, l’ancienne présidente du Brésil. « Nous espérons prêter de 8 milliards à 10 milliards de dollars, a-t-elle indiqué au Financial Times, la veille du sommet de Johannesburg. Notre but est que 30 % de nos prêts soient libellés en devises locales. »

Ce qu’il faut comprendre c’est la quasi totalité des pays est aujourd’hui confronté à une politique, celle des Etats-Unis qui les mènent à la catastrophe, les pays du sud sont ceux qui payent l’addition la plus élevée de cette politique qui combine régression économique, inflation liée à la dollarisation, et mesures prises par la FED qui asphyxient l’économie mondiale, assortie de sanctions, blocus, guerres, il n’y a donc pas de contradiction d’intérêt entre ceux qui privilégient la dédollarisation, des échanges y échappant, et ceux qui assortissent ce constat d’une perspective politique, le socialisme. Il y a même la conscience commune de la nécessité de l’intervention de l’Etat face à la “logique du marché”. L’Afrique offre les multiples expériences de la nécessité de l’émancipation politique si l’on veut accéder à la survie pure et simple.

C’est donc un mécanisme objectif, presque indépendamment des protagonistes et de leurs choix idéologiques et c’est d’autant plus fort que les pays occidentaux n’ont strictement rien à proposer sinon une aggravation de la situation et un autoritarisme belliciste dans lequel leurs propres peuples sont pris. Il y a quelque chose de fascinant et de terrible dans la manière dont les médias et les politiciens français traitent de ce sommet ; par le mépris (des pays à la recherche d’influence). Et avec ce mépris l’habituelle paranoïa qui explique que le rassemblement des dirigeants des BRICS visait à « contrer les États-Unis », à rapprocher de nombreux pays du Sud de la Chine et à tester les ambitions de Pékin pour assurer son hégémonie. Ce n’est pas l’esprit des BRICS, ni d’ailleurs de la Chine. Il n’empêche qu’au-delà de la dédollarisation qui est déjà une remise en cause se dessinent d’autres orientations fondamentales.

Peut être une image de carte et texte qui dit ’JP Países que solicitan adherirse a los BRICS Rusia China Brasil India Sudáfrica Bolivia Cuba Emiratos Árabes Venezuela Argentina Honduras 한:주비 Argelia Indonesia Irán Nigeria Turquía Arabia Saudita Bangladés Egipto Vietnam Kazajistán Kuwait Marruecos Palestina Senegal Tailandia Bielorrusia Bahréin Fuente Ministerio de Exteriores Sudáfrica’

Dans cette première rencontre entre la Chine et l’Afrique du sud existe également une exigence nouvelle de ce monde multipolaire dont le sud a l’initiative : développement, souveraineté et justice toutes choses que les USA et l’Occident, le système dominant ne remplit pas.

Il est vrai que les BRICS sont devenus un contrepoids à la gouvernance mondiale dominée jusqu’ici par les Etats-Unis et l’occident, et que leur voix représente les préoccupations des pays en développement vers plus de justice et à ce titre peser sur la situation actuelle.

La Chine et l’Afrique du sud dans ce tête à tête inaugural donnent-elles une impulsion au coeur de la logique basique des Brics, ont-elles privilégié une dimension nécessairement anti-impérialiste ? Il faudra mesurer les réponses données à l'”élargissement” : “Les motivations d’une douzaine de pays, qui voudraient rejoindre les BRICS, incluent l’intérêt pour le potentiel de développement économique de l’organisation avec leur désir de construire un ordre mondial plus équitable, a déclaré David Monyae, directeur du Centre d’études Afrique-Chine à l’Université de Johannesburg, au Global Times dans une récente interview. Il n’y a pas de contradiction au contraire entre la logique générale des BRICS vue par disons l’Inde ou l’Arabie Saoudite, et Cuba et le Venezuela, et la situation africaine en témoigne: « Ce qui est essentiel, c’est que ces puissances émergentes sont mécontentes de l’ordre mondial actuel. Pour ces puissances émergentes, quand elles regardent l’ordre mondial actuel dirigé par les États-Unis et les pays occidentaux, le système n’a pas évolué depuis 1945 », a déclaré Monyae. Il n’a pas été modifié pour refléter les réalités actuelles en termes de taille de l’économie, de population et d’autres questions, a-t-il noté.

Il y a aussi un mécontentement face à la militarisation du dollar américain et à la militarisation de certains biens publics mondiaux, tels que SWIFT, à la suite du conflit russo-ukrainien, a-t-il déclaré. Là aussi la position affirmée par l’Afrique du sud et par la Chine qui recherche la paix par la négociation et la voie diplomatique n’est pas contradictoire avec la Russie, ce sera tout le sens du discours de Poutine à l’ouverture du sommet tel que nous l’analysons par ailleurs.

Le sommet a été ouvert par Vladimir Poutine en vidéoconférence

Déjà dans leur prise de position sur l’Ukraine le président chinois XI et le président sud-africain Cyril Ramaphosa s’ils ont renouvelé leur souhait de paix et de négociation et leur “neutralité” dans le même temps, ils ont pris bien garde de ne pas condamner la Russie et de tenir compte pour ce pays comme pour tous ceux de la planète, en particulier ceux du sud de leur volonté de sécurité et de refus de subir l’agressivité du système de gouvernance tel qu’il est. Les deux hommes ont parlé d’une seule voix, partageant une position commune d’appel au dialogue sans ouvertement condamner la Russie, alors que tous deux ont lancé des tentatives de négociation.

Nous analysons par ailleurs l’intervention du président Poutine et ce qu’elle signifie par rapport aux enjeux. Il ne faut pas en effet sous-estimer le poids réel de la Russie que l’occident présente comme isolée, la popularité dont elle jouit en Afrique comme dans le reste du sud pour avoir osé défier militairement l’OTAN et les USA. Elle bénéficie de l’histoire de l’URSS et apporte à la Chine y compris en Inde, en Asie centrale comme dans tous les autres pays du sud une tradition diplomatique qu’illustre la présence de Lavrov.

Il est à noter que dans son message à la conférence du sommet, le président Poutine a insisté sur cette dimension des pays du sud, en montrant que c’étaient les pays pauvres qui payaient l’addition la plus lourde et que c’était donc d’eux que venait l’exigence de changements et il a rétabli les Faits sur les responsabilités dans la crise céréalière en insistant sur une chose qui est difficilement niable, la manière dont l’occident tend à attribuer à ses victimes ses propres turpitudes. A la manière dont aujourd’hui il attribue la crise économique à la Chine et les tensions sociales à ceux qui tentent de les surmonter pour mieux aggraver les problèmes.

Comme nous l’analysons par ailleurs, parmi les perspectives du sommet auxquelles Vladimir Poutine mardi, a apporté l’appui de la Russie, il y a celle de continuer à être un fournisseur alimentaire fiable pour l’Afrique. Il a indiqué que Moscou finalisait des négociations pour fournir gratuitement des céréales à un groupe de pays africains, comme annoncé préalablement, dans la foulée du retrait de l’accord avec l’Ukraine sur les livraisons de céréales en mer Noire.

Danielle Bleitrach

Nous voudrions prolonger cette analyse des enjeux posés dès l’ouverture du forum, celui d’un processus nouveau dans sa composition comme dans ses méthodes, en insistant sur le fait qu’une telle initiative dessine au delà de ses réalisations immédiates un processus, ce que nous avons appelé par ailleurs “un champ magnétique” de rapports de forces nouveau et innovant dans lesquels les luttes internes des classes dans les pays impérialistes et “colonialistes” comme la France doivent s’inscrire pour y trouver le point d’appui indispensable à leur propre transformation, c’est ce qui réunit les différents participants de ce blog, quels que soient leurs adhésions politiques en France. Et pour cela nous reprenons les remarques de Franck Marsal sur les perspectives qui s’ouvrent à nous si nous savons nous en emparer :

Que peut-on attendre en tant que Français, communistes, progressistes de ce monde multipolaire ? par Franck Marsal

Ce qui disparait avec l’impérialisme, c’est la prééminence de l’extérieur sur l’intérieur, de la grande bourgeoisie nord-américaine (et ses annexes) sur le monde, via sa puissance politique, financière et militaire. Il n’y a pas que la Chine qui est en train de mettre fin à l’hégémonie US, l’Iran aussi a su se développer de manière impressionnante malgré l’embargo, le Vietnam s’est libéré de l’occupation et a également trouvé la voie de son développement. Cuba tient tête, alors que sa position d’île au large de la Floride n’est pas très favorable et pose un grave problème notamment en approvisionnement énergétique.


L’Afrique actuelle est en train de faire son chemin. L’autonomie stratégique a un prix, mais il devient moins élevé que celui de la soumission, c’est ce que sont en train de dire le Mali, le Burkina, la Guinée, le Niger …

Les écarts majeurs de développement et de productivité sont derrière nous. Les grands déséquilibres démographiques aussi. La Chine ne souhaite pas exercer d’hégémonie mondiale, car elle sait que c’est inutile, nuisible et impossible.

Ce qui est fondamental, c’est qu’avec cette domination impérialiste, disparaît aussi le principal obstacle vers la transition socialiste. Chaque pays retrouve la liberté de choisir sa voie vers le socialisme qui est pour tous une nécessité. Depuis le début des années 70, ceci était plus ou moins interdit et tous les pays qui ont essayé ont payé un prix très élevé.

Alors, quid pour la France avec la fin de sa position impérialiste ? Opportunité ou calamité ?

A mon sens, tant que nous nous laisserons gouverner par la clique grand-bourgeoise liée à l’impérialisme US, ce sera une calamité, car ils feront tout ce qu’ils peuvent pour maintenir leur position, leurs privilèges, quitte à saboter l’avenir du pays. Ils ont déjà commencé.

Mais si on se débarrassait de ces parasites et qu’on l’on formulait une perspective de développement socialiste auto-centré, avec des échanges équilibrés avec le reste du monde. que se passerait-il ?

A mon sens, la première étape serait une chute brutale de la monnaie (euro ou franc retrouvé), ce qui rendrait les importations beaucoup plus coûteuses, notamment en pétrole, mais rendrait la production locale à sa véritable compétitivité. Il y aurait une forte chute du PIB en termes monétaires, moindre en termes de parité de pouvoir d’achat. L’énergie serait probablement le facteur limitant de la production, le temps (au moins une décennie probablement) de développer une production autonome (ce dont nous avons les moyens à moyen terme grâce à la maîtrise – encore – d’un certain nombre de technologies clés, dont bien sûr le nucléaire).

Serions-nous malheureux d’avoir perdu des sources de jouissance matérielle (finis les voyages dans les îles et les voitures de luxe, mais qui en profite ?) mais nous y gagnerions la dignité, la fierté, le sens du travail et de la vie, le retour d’un collectif incarné et une réduction substantielle de la pire misère qui n’est pas liée à la pauvreté de notre pays mais aux profondes inégalités. Si nous nous y prenons bien, ce pourrait être déjà des “jours heureux” …

A mon sens, il y a deux conditions pour réussir ce scénario :
1. Une véritable rupture par rapport à l’impérialisme, afin de pouvoir établir un vrai et sincère partenariat gagnant – gagnant avec les pays en développement. Il y a une vraie possibilité d’échange équilibré avec l’Afrique en terme d’échanges “ressources contre technologie”. Sur ce plan, le parti a un rôle très important à jouer et doit s’affirmer sans ambages contre le néo-impérialisme actuel, en solidarité sans limite avec le Sud global, les Brics, et les pays qui ont le courage de choisir la voie de la dignité, Cuba, et les pays comme le Mali, le Burkina …
2. Il faudra un certain niveau de “dictature du prolétariat”, pour que la politique de la nation soit centrée sur l’intérêt du plus grand nombre et non sur les privilèges (nombreux des diverses couches bourgeoises et petite-bourgeoises. En particulier, comme les ressources monétaires et énergétiques seront un facteur limitant du nouveau développement, il ne sera pas question de laisser une petite minorité les accaparer et les gaspiller… Cela suppose de renoncer à l’Union pour l’Union qui aboutit toujours à mettre les classes populaires à la remorque de la petite-bourgeoisie et de privilégier l’unité derrière les classes populaires. La classe ouvrière, les travailleurs essentiels doivent retrouver leur rôle dirigeant, être la boussole du mouvement collectif et là aussi le parti communiste a un rôle crucial à jouer.

La campagne électorale présidentielle a montré un réel potentiel pour notre parti. Il y a des atouts et néanmoins, des difficultés.

Le positionnement social, autour du slogan des “Jours heureux”, et de la manière dont nous l’avons décliné en thèmes fort, autour du travail, autour des droits nouveaux pour les salariés, dans une ambition positive et fédératrice pour le pays, pour la réindustrialisation ..

Le slogan des jours heureux permet de recentrer l’objectif sur la vie, dans sa complexité. Être heureux dans sa vie, être heureux dans sa famille, être heureux au travail, être heureux ensemble et non plus individuellement, c’est d’emblée sortir de faux objectifs (l’argent, la consommation, la mise en scène d’une vie “de rêve”, c’est très loin du bonheur). Lutter collectivement, construire ensemble avec patience, et voir le résultat de son effort est une forme plus approfondie du bonheur.

La limite principale, les difficultés, c’est : “sommes-nous prêt à franchir le pas de la rupture avec cette vieille société et ses fétiches ?”. Sommes nous prêts à affronter les questions qui fâchent ? A suivre l’exemple de nos aieux qui militaient contre l’occupation de la Ruhr par l’armée française, contre la guerre du Rif, puis contre les guerres coloniales ; qui présentaient aux élections ceux qui étaient privés du droit de vote ; qui défendaient becs et ongles l’URSS. En affrontant la bourgeoisie sur les questions sur lesquelles elle supportait le moins la contradiction, les communistes ont peut-être perdu au début des soutiens mais ils ont gagné à terme l’estime et la confiance de larges couches populaires.

Franck Marsal

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