Si les dossiers de The Grayzone sont en général d’un grand apport, celui-ci nous permet de nous interroger sur la manière dont le continent européen semble la proie d’une sorte “d’ukrainisation” dans laquelle se multiplient les formes fascisantes de terrorisme et d’y reconnaitre ce que l’Italie et d’autres pays d’Europe ont connu dans les années quatre vingt où l’on craignait de voir les communistes accéder au pouvoir. Dans ces années de “plomb” où se sont multipliés le attentats en Europe, on parlait beaucoup des “brigades rouges”, mais les attentats meurtriers furent perpétrés par l’extrême droite. Contrairement aux membres des Brigades rouges, qui se sont tous retrouvés en prison, les terroristes d’extrême droite ont réussi à s’échapper après chaque attentat puisqu’ils bénéficiaient tous de la protection de l’appareil de sécurité et des services secrets de l’armée italienne. En mars 2001, le général Giandelio Maletti, ancien chef du contre-espionnage italien, a laissé entendre qu’à cette époque en plus du réseau clandestin Gladio, des services secrets militaires italiens et d’un petit groupe de terroristes d’extrême droite, les massacres par lesquels on a tenté de discréditer les communistes italiens qui menaçaient d’arriver au pouvoir, ont également reçu l’approbation de la Maison Blanche et de la CIA. Comparaissant comme témoin dans le procès de terroristes d’extrême droite accusés d’être impliqués dans les attentats de la Piazza Fontana, Maletti a déclaré : « La CIA, suivant les directives de son gouvernement, voulait créer un nationalisme italien capable d’entraver ce qu’elle considérait comme un glissement vers la gauche et, à cette fin, a pu utiliser le terrorisme d’extrême droite. » (…) « On avait l’impression que les Américains étaient prêts à tout pour empêcher l’Italie de pencher à gauche », a expliqué le général, avant d’ajouter : « N’oubliez pas que c’était Nixon qui était à la tête du gouvernement et que Nixon n’était pas n’importe qui, [c’était] un politicien très habile mais un homme aux méthodes peu orthodoxes. » Rétrospectivement, le général de 79 ans a exprimé des critiques et de l’amertume : « L’Italie a été traitée comme une sorte de protectorat. J’ai honte que nous soyons toujours soumis à un contrôle spécial. »
La montée de l’extrême droite et son utilisation pour créer des foyers de guerre, tandis que l’on torture et emprisonne les communistes en Ukraine, on les assassine en Moldavie, les négociateurs d’accord sont également assassinés, le tout accompagné comme dans le cas de Berlusconi ou de Bolloré et maintenant mister K de main mise mafieuse et religieuse, avec la création de fortunes considérables type Mister K, celui qui grandit en France et dont nous analysons par ailleurs l’ascension et la main mise sur l’énergie, voire le nucléaire français, après les médias dans un autre article… Tout cela a l’allure d’un remake et on ne peut pas s’empêcher de s’interroger : si l’OTAN ne s’est pas dissous à la fin de la guerre froide, pourquoi les méthodes du gladio, seraient-elles abandonnées alors que plus que jamais la guerre alimente les réseaux de corruption où le blanchiment de la drogue se combine avec le trafic d’armes. N’oubliez pas qu’en Italie en soutien des USA, il y a eu la mafia, la banque vaticane, et elle a fourni à Berlusconi les moyens de son ascension politico-médiatique… qui a aujourd’hui patronné le retour de l’extrême-droite ?
Je voudrais insister sur le moment où a été révélée l’existence du gladio : le Premier ministre italien Giulio Andreotti a évoqué le 3 août 1990 devant le Sénat de son pays l’existence d’une armée secrète créée par l’OTAN dans toute l’Europe occidentale. Le discours révélateur d’Andreotti a eu lieu le lendemain du 2 août 1990, le jour de l’invasion du Koweït par Saddam Hussein. À Paris, Londres et Washington, les rédacteurs en chef et les conseillers militaires craignaient que le scandale ne perturbe les préparatifs de la guerre du Golfe.
Ce même 2 août, à New York, les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, « consternés par l’invasion du Koweït », avaient imposé au Conseil de sécurité de l’ONU, avec l’accord de la Chine et de la Russie, l’adoption de la résolution 660, qui ordonnait « le retrait immédiat et inconditionnel de toutes les forces irakiennes des positions occupées le 1er août 1990 ». En Occident et dans le monde entier, les médias se sont alors concentrés sur la « crise du Golfe » et ont rapporté comment les États-Unis, sous la présidence de George Bush père, avaient entrepris la plus grande opération militaire depuis la Seconde Guerre mondiale à la tête d’une coalition de pays à laquelle appartenaient l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne, l’Italie et la Hollande pour libérer le Koweït de l’occupation irakienne dans le cadre d’une opération baptisée « Tempête du désert », en janvier et février 1991.
Les grandes chaînes de télévision avaient ainsi simultanément deux histoires à mettre à la disposition du public : une guerre voulue par les Etats-Unis dans le golfe Persique et le scandale Gladio en Europe, le choix des rédactions a été exactement le même que quand en 1989, ils ont préféré provoquer l’indignation face au faux charnier de Timisoara plutôt que les 3 000 morts suite à l’intervention américaine au Panama contre “le tyran” Noriega.
Suite aux révélations du Premier ministre italien Giulio Andreotti, le scandale a néanmoins franchi les frontières italiennes lorsque, le 30 octobre, l’ancien Premier ministre socialiste grec, Andreas Papandreou, a confirmé dans le quotidien grec Ta Nea qu’il avait lui-même découvert, en 1984, une structure secrète de l’OTAN très proche du Gladio italien et dont il avait immédiatement ordonné le démantèlement. Les communistes grecs ont exigé une enquête parlementaire sur l’armée secrète et son rôle présumé dans le coup d’État des colonels en 1967. Mais le gouvernement conservateur grec de l’époque l’a ignoré. Le ministre de la Défense Varvitsiotis a expliqué qu’un ancien attaché militaire grec à Washington qui avait travaillé pour l’OTAN examinerait les allégations et la guerre du golfe avec les armes de destruction massive qui n’avaient jamais existé, pas plus que les bébés en couveuse débranchés ont submergé l’information ?
Le même étouffement de l’information a eu lieu dans toute la presse des Etats-Unis et de l’Europe qui jouissait d’un monopole de l’information. Par parenthèse, l’aviation des Etats-Unis a bombardé sans état d’âme non seulement Bagdad mais la centrale nucléaire installée par les Français.
Je conseille à ceux que cela intéresse de suivre les cafouillages en particulier ceux de Mitterrand et de son ministre de l’époque Chevénement et la manière dont après avoir nié, le Premier ministre italien Andreotti a impitoyablement démystifié le mensonge français en déclarant le 10 novembre 1990 que la France avait également participé à la dernière réunion de la direction de Gladio, l’ACC, tenue en Belgique le 23 octobre 1990. Après cette révélation, le ministre français de la Défense Jean-Pierre Chevènement, face à cette situation embarrassante, a tenté de limiter les dégâts en déclarant que l’armée secrète française était restée passive : « Selon les informations dont je disposais, elle n’a jamais eu d’autre fonction que de rester là et de remplir une fonction de liaison. » Mitterrand d’ailleurs au même moment dans une manœuvre florentine, faisait monter le Pen et organisait de faux combats spectaculaires avec Tapie. Quant à Marchais depuis 1984, (discours de Rome de Marcel Rigoud le qualifiant d’ « homme de l’échec » et ajoutant : « À sa place, je me tirerais une balle dans la tête ») il est la proie d’une crise interne qui va culminer avec la candidature de Juquin et les accusations de “stalinisme”. L’opération gorbatchévienne est entamée et aujourd’hui nous voyons en quoi elle correspond au mitterrandisme atlantiste.
En Grande-Bretagne, puisqu’il est question de ce pays dans les révélations de The Grayzone, plusieurs porte-parole du ministère de la Défense se relayaient jour après jour, donnant invariablement à la presse presque la même réponse : « Je suis désolé mais nous n’abordons jamais les questions de sécurité » ou « C’est une question de sécurité, donc nous ne l’aborderons pas » ou peut-être « Nous ne nous laisserons pas entraîner dans le domaine de la sécurité nationale ». Alors que les journaux continuaient à publier jour après jour des titres sur le scandale Gladio, le ministre britannique de la Défense, Tom King, a mis un point final aux spéculations : « Je ne sais pas contre quelle chimère vous vous présentez. La chose semble terriblement excitante, mais j’ai peur d’être un ignorant complet en la matière. Je suis beaucoup mieux informé sur le Golfe. » Dans le cadre des préparatifs de l’opération Tempête du désert et de la guerre contre l’Irak, le parlement britannique a estimé qu’il n’était pas urgent de créer une commission ou d’ouvrir un débat parlementaire [sur Gladio] et a préféré soutenir le gouvernement du Premier ministre John Major. À l’été 1992, aucun compte rendu officiel de Gladio n’avait encore été fourni, malgré l’obstination méritoire de certains journalistes tels que Hugh O’Shaughnessy : « Le silence de Whitehall et le manque presque total de curiosité manifesté par les députés à propos d’un scandale dans lequel la Grande-Bretagne est si profondément impliquée sont extraordinaires mais c’était à peu près aussi efficace qu’aujourd’hui les quelques gens qui s’obstinent à défendre Assange, ce n’était pas l’événement face à la mobilisation contre le nouvel Hitler Saddam Hussein.
Les cafouillages les plus spectaculaires ont été ceux de l’OTAN. Le lundi 5 novembre 1990, après un long silence de près d’un mois, l’OTAN nia catégoriquement les allégations d’Andreotti concernant son implication dans l’Opération Gladio et ses liens avec les armées secrètes. Le principal porte-parole de l’Organisation, Jean Marcotta, affirma depuis le quartier général du SHAPE, à Mons, en Belgique, que : « L’OTAN n’a jamais envisagé de recourir à la guérilla ou à des opérations clandestines ; elle s’est toujours occupée de questions exclusivement militaires et de la défense des frontières des pays Alliés. » Puis, le mardi 6 novembre, un autre porte-parole expliqua que le démenti de la veille était faux. Il ne fournit aux journalistes qu’un bref communiqué précisant que l’OTAN ne commentait jamais les questions couvertes par le secret militaire et que Marcotta aurait dû observer le silence. Il faut faire le tour de la presse européenne (la presse espagnole est la plus documentée) pour tenter de recomposer les déclarations et se faire une idée de l’implication réelle et de la manière dont l’omerta a fonctionné. Cela ne semble avoir qu’une seule justification à savoir que les fameux réseaux ne concernaient pas la guerre froide mais que comme l’OTAN elle-même ils ont été maintenus et fonctionnent encore aujourd’hui et effectivement il y a quelques similitudes entre “la guerre contre le terrorisme”, la guerre en Ukraine, les aspects post-soviétiques des stratégies de déstabilisation avec l’aide de réseaux fascistes alors que l’on transforme l’ennemi en nouvel Hitler.
Toute cette comédie qui a accompagné une nouvelle phase de pillages et d’interventions dans le “tiers monde” en Afrique, en Amérique latine au Moyen Orient expliquent qu’au-delà de la colonisation ces pays traitent l’Europe et les Etats-Unis de criminels hypocrites/ (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
KIT KLARENBERG·19 JUIN 2023
Des dossiers britanniques récemment déclassifiés jettent une lumière troublante sur les origines et le fonctionnement interne de l’opération Gladio, un complot secret de l’OTAN déployant des milices terroristes fascistes à travers l’Italie. Les espions de Londres ont-ils appliqué ces leçons en Ukraine ?
Les dossiers récemment déclassifiés du ministère britannique des Affaires étrangères ont ajouté des détails troublants à l’histoire de l’opération Gladio. L’opération secrète a été découverte en 1990, lorsque le public a appris que la CIA, le MI6 et l’OTAN entraînaient et dirigeaient une armée clandestine d’unités paramilitaires fascistes à travers l’Europe, déployant ses ressources pour saper les opposants politiques, y compris par des attaques terroristes sous faux drapeau.
Parmi eux se trouvait le jeune Silvio Berlusconi, l’oligarque des médias qui a été Premier ministre italien dans quatre gouvernements distincts entre 1994 et 2011. Répertorié comme membre du P2, la cabale secrète des élites politiques de l’époque de la guerre froide consacrée aux objectifs de Gladio, Berlusconi a sans aucun doute emporté de lourds secrets dans la tombe lorsqu’il est mort le 12 juin.
Il est presque impossible de croire que les vérités gênantes n’ont pas été éliminées du dossier documentaire britannique sur l’opération Gladio avant la déclassification. Néanmoins, le matériel récemment publié est très éclairant. Couvrant une période tendue de douze mois après la première divulgation publique de l’existence de Gladio, les documents illustrent comment l’appareil de renseignement étranger de Londres a gardé un œil attentif sur le continent au fur et à mesure que les événements se déroulaient.
Les documents jettent non seulement un nouvel éclairage sur la conspiration, mais ils soulignent la pertinence de Gladio alors que les services de renseignement britanniques se joignent à leurs homologues américains dans des complots contemporains impliquant des forces partisanes secrètes de la Syrie à l’Ukraine.
Divers passages parsemés dans la tranche suggèrent fortement que les Britanniques en savaient beaucoup plus qu’ils ne l’admettaient publiquement sur des actes criminels flagrants, y compris la tentative de renversement d’un gouvernement italien allié et l’enlèvement et le meurtre de son chef.
Un « réseau de résistance clandestin » se met au travail
Gladio consistait en une constellation d’armées partisanes anticommunistes dont la mission ostensible était de repousser l’Armée rouge en cas d’invasion soviétique. En réalité, ces forces ont commis d’innombrables actes violents et criminels dans le cadre d’une « Stratégie de la tension » conçue pour discréditer la gauche et justifier une répression de l’État sécuritaire.
Comme Vincenzo Vinciguerra, un agent de Gladio emprisonné à vie en 1984 pour un attentat à la voiture piégée en Italie qui a tué trois policiers et blessé deux autres, explique :
« Vous étiez censés attaquer des civils, des femmes, des enfants, des innocents en dehors de l’arène politique. La raison était simple, forcer le public à se tourner vers l’État et à demander plus de sécurité… Les gens échangeraient volontiers leur liberté contre la sécurité de pouvoir marcher dans les rues, prendre le train ou entrer dans une banque. C’était la logique politique derrière les attentats. Ils restent impunis parce que l’État ne peut pas se condamner lui-même. »
Le scandale déclenché dans les capitales occidentales par l’exposition de Gladio a dominé les gros titres pendant des mois. Le Parlement européen a répondu par l’ adoption d’une résolution condamnant l’existence d’une « organisation parallèle clandestine de renseignement et d’opérations armées [qui] échappe à tout contrôle démocratique, peut s’être immiscée illégalement dans les affaires politiques intérieures des États membres [et] dispose d’arsenaux indépendants et de ressources militaires… mettant ainsi en péril les structures démocratiques des pays dans lesquels ils opèrent.
La résolution appelait à des enquêtes judiciaires et parlementaires indépendantes sur Gladio dans chaque État européen. Mais à part des enquêtes en Belgique, en Italie et en Suisse, rien de substantiel ne s’est matérialisé. De plus, les enquêteurs ont fortement expurgé leurs conclusions tout en évitant de les faire traduire en anglais. Cela peut aider à expliquer pourquoi le scandale historique a été largement oublié.
Dans ce contexte, les documents récemment déclassifiés peuvent être l’une des sources primaires les plus précieuses à ce jour, offrant de nouvelles perspectives sur les origines et le fonctionnement interne des milices terroristes secrètes de l’OTAN en Italie.
Prenons par exemple un aide-mémoire (voir ici) préparé par Francesco Fulci, représentant permanent de l’Italie auprès de l’ONU, qui a été partagé lors d’une réunion « super-restreinte » du 6 novembre 1990 du Conseil de l’Atlantique Nord, le principal organe décisionnel politique de l’OTAN, puis transmis aux hauts responsables britanniques au pays et à l’étranger.
Basé sur une note fournie par le Premier ministre de Rome de l’époque, Giulio Andreotti, au « chef de la Commission parlementaire italienne enquêtant sur les incidents terroristes », l’aide-mémoire commence par noter qu’après la Seconde Guerre mondiale, les agences de renseignement occidentales ont conçu « des moyens de défense non conventionnels, en créant sur leurs territoires un réseau caché de résistance visant à opérer, en cas d’occupation ennemie, par la collecte d’informations, le sabotage, la propagande et la guérilla ».
Selon l’aide-mémoire, les autorités de Rome ont commencé à jeter les bases d’une telle organisation en 1951. Quatre ans plus tard, le renseignement militaire italien (SIFAR) et « un service allié correspondant » – une référence à la CIA – se sont alors formellement mis d’accord sur l’organisation et les activités d’un « réseau clandestin post-occupation » :
« [Gladio] était formé par des agents actifs sur le territoire qui, en raison de leur âge, de leur sexe et de leurs activités, pourraient raisonnablement éviter d’être expulsés et emprisonnés par les occupants étrangers ; facile à gérer, même à partir d’une structure de commandement en dehors du territoire occupé ; à un niveau top secret et donc subdivisé en « cellules » afin de minimiser les dommages éventuels causés par des défections, des accidents ou la pénétration du réseau ».
Le « réseau de résistance clandestine » a été subdivisé en branches distinctes, couvrant les opérations d’information, le sabotage, la propagande, les communications radio, le chiffrement, la réception et l’évacuation des personnes et du matériel. Chacune de ces structures devait fonctionner de manière autonome, « avec une liaison et une coordination assurées par une base extérieure ».
Le SIFAR a créé une section secrète dédiée au recrutement et à la formation des agents de Gladio. Pendant ce temps, il a maintenu cinq « unités de guérilla prêtes à être déployées dans des zones d’intérêt particulier » à travers l’Italie qui attendaient d’être activées sur une base continue.
Des « matériels opérationnels », y compris une grande variété d’explosifs, d’armes – tels que des mortiers, des grenades à main, des fusils et des couteaux – et des munitions ont été cachés dans 139 caches souterraines secrètes à travers le pays. En avril 1972, « pour améliorer la sécurité », ces arsenaux ont été exhumés et transférés dans les bureaux des carabiniers, la police militaire de Rome, près des sites d’origine.
Seuls 127 des entrepôts d’armes ont été officiellement récupérés. L’aide-mémoire indique qu’au moins deux « ont très probablement été emmenés par des inconnus » au moment de leur inhumation, en octobre 1964. Qui étaient ces agents et ce qu’ils ont fait de leurs armes volées est laissé à l’imagination.
Implication britannique dans l’effort de coup d’État
Fulci a finalement été interrogé par les participants au sommet du Conseil de l’Atlantique Nord « pour savoir si Gladio avait dévié de ses objectifs propres ». En d’autres termes, au-delà d’opérer strictement comme une force « rester derrière », à activer en cas d’invasion soviétique. Bien qu’il « ne puisse pas ajouter à ce qui était dans l’aide-mémoire », Fulci a confirmé que « les armes utilisées dans certains incidents terroristes provenaient de magasins établis par Gladio ».
Cela peut refléter le fait que la violence politique était l’un des « objectifs légitimes » de Gladio. Dans un Rapport du SIFAR de juin 1959, l’historien Daniele Ganser confirme que l’action de guérilla contre les « menaces intérieures » a été intégrée à l’opération dès sa création. Dans le contexte italien, cela impliquait de terroriser systématiquement la gauche.
Alors que le parti communiste italien montait en flèche dans les sondages avant les élections de 1948, la CIA injectait de l’argent dans les coffres des démocrates-chrétiens et une campagne de propagande anticommuniste qui l’accompagnait. L’effort de cape et de poignard a été si efficace pour empêcher l’avènement d’un gouvernement de gauche à Rome que Langley est secrètement intervenue à chacune des élections de Rome pendant au moins les 24 prochaines années.
Pourtant, les opérations secrètes de la CIA étaient insuffisantes pour empêcher les Italiens d’élire occasionnellement les mauvais gouvernements. Les élections générales de 1963 ont vu les chrétiens-démocrates l’emporter à nouveau, cette fois sous la direction du politicien de gauche Aldo Moro, qui cherchait à construire une coalition avec les socialistes et les socialistes démocrates. Au cours de l’année suivante, de longs différends ont éclaté entre ces parties sur la forme que prendrait leur administration.
Pendant ce temps, les spécialistes des opérations secrètes du SIFAR et de la CIA tels que William Harvey, connu sous le nom de « James Bond américain » a concocté un complot pour empêcher ce gouvernement de prendre ses fonctions. Connu sous le nom de » Piano Solo», il a envoyé des agents de Gladio pour une tentative d’assassinat sous faux drapeau sur Moro qui échouerait délibérément.
Selon le plan, le ravisseur devait prétendre qu’il avait reçu l’ordre par les communistes de tuer Moro, justifiant ainsi la prise violente de plusieurs sièges de partis politiques et de journaux, ainsi que l’emprisonnement de gauchistes gênants au siège secret du chapitre Gladio en Sardaigne. Le plan a finalement été avorté, bien qu’il soit resté sur la table tout au long de 1964.
Moro est devenu Premier ministre sans incident et a gouverné jusqu’en juin 1968. Piano Solo a fait l’objet d’une enquête officielle quatre ans plus tard, mais les résultats n’ont pas été publiés avant que le public n’apprenne l’existence de Gladio. Bien que les conclusions aient omis toute référence au rôle de la Grande-Bretagne dans le coup d’État prévu, les documents récemment publiés suggèrent fortement l’implication de Londres. (Lisez-les ici).
Le président italien de l’époque, Francesco Cossiga, a demandé au ministère de lui remettre « les détails des mesures de maintien du Royaume-Uni en 1964 », selon une note détaillée du Foreign Office de février 1991 sur les récents développements du scandale.
Cossiga a apparemment fait cette enquête à la suite d’un juge « dont les enquêtes sur les attaques terroristes non résolues ont d’abord mis en lumière l’opération Gladio » et qui a pris la « mesure sans précédent » d’exiger que le président témoigne sur le complot sous serment. À ce stade, Cossiga avait admis avoir appris l’existence de la force « rester derrière » alors qu’il était ministre de la Défense en 1966.
Sa requête au Foreign Office suggère fortement que les services de renseignement britanniques ont joué un rôle dans Piano Solo, et que le président italien était bien au courant du complot.
« un ou plusieurs ravisseurs de Moro étaient secrètement en contact avec l’appareil de sécurité »
Le 16 mars 1978, une unité des militants de gauche des Brigades rouges a enlevé Moro. Il se rendait à une réunion de haut niveau où il prévoyait de donner sa bénédiction à un nouveau gouvernement de coalition qui comptait sur le soutien communiste, lorsque les ravisseurs l’ont violemment extrait de son convoi. Cinq des gardes du corps de Moro ont été assassinés dans le processus.
Après presque deux mois de captivité, lorsqu’il est devenu clair que le gouvernement ne négocierait pas avec les Brigades rouges ni ne libérerait aucun de ses membres emprisonnés en échange de Moro, les ravisseurs ont exécuté l’ancien Premier ministre italien. Son cadavre criblé de balles a été laissé pourrir dans un coffre de voiture et pour que les autorités puissent le trouver.
Le meurtre de Moro a inspiré et répandue des soupçons fondés que des agents de Gladio ont infiltré les Brigades rouges pour pousser le groupe à commettre des actes excessivement violents afin de fomenter la demande populaire d’un régime de droite de la loi et de l’ordre. Plus que tout autre incident, son assassinat a rempli les objectifs de la stratégie de tension de l’État sécuritaire.
Que Moro ait été ou non une victime de Gladio, un mémo déclassifié du Foreign Office du 5 novembre 1990 rédigé par l’ambassadeur britannique de l’époque à Rome, John Ashton, indique clairement que Londres en savait beaucoup plus sur l’affaire que ce qui n’a jamais été révélé publiquement par aucune source officielle. (Lire la note complète d’Ashton ici).
« Il existe des preuves circonstancielles qu’un ou plusieurs des ravisseurs de Moro étaient secrètement en contact avec l’appareil de sécurité à ce moment-là ; et que ce dernier a délibérément négligé de suivre les pistes qui auraient pu conduire aux ravisseurs et sauver la vie de Moro », a déclaré Ashton.
De plus, selon le diplomate britannique, le comité de crise présidentiel chargé de tenter de sauver Moro faisait partie de la tristement célèbre P2 – la « loge maçonnique subversive » composée d’élites politiques fidèles à Gladio.
Selon Ashton, P2 n’était qu’une des nombreuses « mystérieuses forces de droite » qui s’efforçaient « par le terrorisme et la violence de rue de provoquer une réaction répressive contre les institutions démocratiques italiennes » dans le cadre de la « stratégie de la tension ». Et le président Cossiga ignorait complètement qu’il avait infiltré son comité de crise.
En avril 1981, des magistrats de Milan ont perquisitionné la villa de Licio Gelli, un financier italien et fasciste autoproclamé qui a fondé P2. Là, ils ont découvert une liste de 2 500 membres qui se lit comme un « Who’s Who » de politiciens, de banquiers, d’espions, de financiers, d’industriels et de hauts responsables de l’application de la loi et de l’armée. Parmi les membres les plus éminents de la cabale se trouvait Silvio Berlusconi.
Le « compromis historique » de Moro, en vertu duquel les communistes « ont rendu possible le gouvernement d’Andreotti », serait la « dernière étape du parti avant leur propre entrée au gouvernement ». Ashton a déclaré que ce développement « était un anathème pour P2 », qui était « alors sous le contrôle virtuel de l’appareil de sécurité [italien] », et aussi pour de nombreux politiciens de l’establishment non-P2, et aussi pour les États-Unis », et cherchait à « éliminer une fois pour toutes toute possibilité que le Parti communiste … pourrait atteindre le pouvoir national ».
Ashton a reconnu des « preuves circonstancielles » du « soutien américain à P2 ». En réalité, le fondateur de P2, Gelli, était si bien connecté à l’appareil de sécurité nationale et de renseignement de Washington que la station de Rome de la CIA l’avait explicitement accusé d’établir un gouvernement parallèle anticommuniste à Rome.
Des enquêtes ultérieures ont montré comment Henry Kissinger a aidé à superviser le recrutement de 400 officiers italiens et de l’OTAN de haut rang en tant qu’agents P2 en 1969. Les États-Unis étaient si reconnaissants pour la purge anticommuniste de Gelli qu’elle a fait de lui un invité d’honneur lors des cérémonies d’investiture des présidents américains Gerald Ford, Jimmy Carter et Ronald Reagan.
Ashton a conclu sa note révélatrice en notant que la vérité sur l’implication de Washington dans les « années de plomb » éclaboussées de sang de Rome ne serait « probablement jamais connue ». L’ampleur de l’implication de la Grande-Bretagne dans les attaques terroristes, les renversements gouvernementaux, les campagnes de déstabilisation et autres magouilles odieuses sous l’égide de l’opération Gladio, non seulement en Italie mais dans toute l’Europe, restera presque certainement un secret aussi, et à dessein.
Ce n’était pas jusqu’en 1993 que le public a appris comment les États-Unis et les Britanniques ont offert des munitions à des agents de Gladio pour fomenter des actes de terreur sanglants à travers l’Italie. Comme Francesco Fulci l’a dit à ses amis de l’OTAN lors de la réunion « super-restreinte », Washington et Londres ont fourni les auteurs d’attaques massives, y compris l’attentat à la bombe de 1980 contre la gare centrale de Bologne, qui a tué 85 personnes et blessé plus de 200.
Les responsables de ces crimes odieux ont échappé à la justice dans presque tous les cas. Plusieurs des principaux suspects du massacre de Bologne, y compris des fascistes et des actif MI6 confirmés comme Robert Fiore, s’enfuient à Londres. La Grande-Bretagne a refusé de l’extrader, lui et ses co-conspirateurs, malgré leurs condamnations par contumace pour crimes violents.
La vaste expérience acquise par les services de renseignement britanniques dans le cadre de l’opération Gladio soulève des questions sur les leçons que le MI6 a appliquées aux opérations secrètes actuelles sur les théâtres de conflit. Comme The Grayzone l’a révélé en novembre 2022, des vétérans de l’armée et du renseignement britanniques ont formé et parrainé une armée terroriste partisane secrète dans l’est de l’Ukraine pour mener des actes de sabotage en Crimée et dans d’autres régions à majorité russe. Le plan prévoyait la formation de cellules d’Ukrainiens idéologiquement dévoués pour « tirer, bouger, communiquer, survivre ».
https://thegrayzone.com/2023/06/19/files-british-natos-secret-terror-armies/
ALDO MOROGRANDE-BRETAGNECIAGLADIOITALIEMI6OTANOPÉRATION GLADIOSTRATÉGIE DE TENSIONROYAUME-UNIUKRAINE
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sun tzu
Un grand merci à Comaguer pour son travail preparatoire en coulisse .la clandestinité quoi !
admin5319
je ne comprends pas ta remarque , je n’ai pas utilisé aucun textes de toi autrement je t’aurais cité
thierry bruno
L’Histoire nous a toujours enseigné que les Britanniques, et particulièrement les Anglais, étaient de grands pervers, spécialistes des coups tordus.