Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Le Fidel de l’ère de la SVO est mort, par Sergei Aksionov

https://svpressa.ru/war21/article/380905/

On l’avait surnommé Fidel à cause de son enthousiasme de jeune communiste et pour la Révolution cubaine. Le correspondant militaire Rostislav Zhuravlev est mort dans la zone SVO. Rostik… Des problèmes sont survenus dans la direction de Zaporozhye. Un groupe de journalistes russes a été pilonné par des armes à sous-munitions. Elles avaient été remises à l’AFU de manière tout à fait officielle par les Américains. C’était l’une des premières utilisations de ces armes interdites. Plusieurs journalistes ont été blessés. Rostislav n’a pas pu être sauvé. (note de danielle Bleitrach et traduction de Marianne Dunlop)

Le correspondant militaire Rostislav Zhuravlev est tué par une arme à sous-munitions. Comment la Russie va-t-elle réagir ?

Sur la photo : des fleurs avec la photo du correspondant tué Rostislav Zhuravlev devant l’agence de presse Rossiya Segodnya (Photo : Mikhail Tereshchenko/TASS)

Le correspondant militaire Rostislav Zhuravlev est mort dans la zone SVO. Rostik… Des problèmes sont survenus dans la direction de Zaporozhye. Un groupe de journalistes russes a été pilonné par des armes à sous-munitions. Elles avaient été remises à l’AFU de manière tout à fait officielle par les Américains. C’était l’une des premières utilisations de ces armes interdites. Plusieurs journalistes ont été blessés. Rostislav n’a pas pu être sauvé.

“Je regrette de ne pas être parti jeune, avec bravoure,
“Avec une chanson joyeuse sur les lèvres,
“Et me donner l’éternité comme récompense,
“Et partir et disperser toutes mes affaires à la hâte.

Ce sont ses lignes, écrites en 2019. Marchait-il sur la route de son destin compliqué, en comprenant et en acceptant tous les risques ? Il semblerait que oui. Un joyeux drille, capable de labourer comme un bœuf et de faire la fête comme un fou, de vivre dans des conditions extrêmes, de se passer des nécessités les plus élémentaires, d’aider de toutes ses forces des collègues, des gens simplement familiers, de penser à ses proches. C’est ainsi qu’était Rostik.

Il a rejoint la SVO dès les premiers jours et, depuis, il n’a jamais quitté la zone de combat, ne s’accordant qu’occasionnellement de courtes vacances. Donetsk, Marioupol, la région de Kharkov, la frontière russe, la région de Kherson, Zaporozhye… C’est la direction de Zaporozhye qui lui a été “assignée” dernièrement, en tant que correspondant de guerre, expliquait-il (c’est-à-dire qu’il est mort sur sa section du front).

De là, Rostislav passait souvent en direct sur les chaînes de télévision fédérales… Le talent du correspondant de guerre a été remarqué et apprécié presque immédiatement. Les correspondants de guerre de RIA Novosti, Rostislav Zhuravlev et Regina Orekhova, ont reçu le prix spécial de la Plume d’Or, qui récompense le courage dans l’exercice du métier de journaliste, ont rapporté les médias il y a exactement un an. Pour leur courage !

Peu avant la SVO, Rostislav s’est rendu en Afghanistan juste après la fuite de l’armée américaine. Le nouveau pouvoir taliban* était simple et sans détour. “Chers soldats et commandants, au nom d’Allah, le bienveillant, le miséricordieux, la personne qui tient ce papier est un journaliste, veuillez lui fournir toute l’assistance et l’aide nécessaires”, indiquait son accréditation de manière exotique en pachtou et en dari.

À Kaboul, Rostik a demandé avec insolence une interview avec Zabihullah Mujahid, un responsable de l’Émirat d’Afghanistan. “Nous sommes du côté des habitants de la Crimée et il faut écouter ce qu’ils veulent, car les gens ont le droit de voter. Si les gens veulent vivre en Russie, nous sommes d’accord avec eux”, a déclaré son interlocuteur. La nouvelle a fait le tour du monde. Même le département d’État s’en est ému.

Rostik a travaillé à la fois sur le conflit armé en Artsakh et sur les rassemblements à Erevan. Des endroits peu sûrs. À Stepanakert, lui et ses collègues ont essuyé des tirs de roquettes. Les roquettes Smerch tombaient du ciel pratiquement en direct, on pouvait les voir au ralenti. Les gars ont eu de la chance que toutes les munitions n’aient pas explosé. Ils se sont réfugiés au sous-sol. Ils ont survécu.

À cette époque, Rostislav travaillait dans notre profession depuis 7 ou 8 ans. Si je ne me trompe pas, c’était sa première expérience militaire sérieuse. Un correspondant de guerre, mais pas un militaire. En 2014, Rostik s’est rendu dans le Donbass en tant que volontaire et a combattu pendant six mois au sein de la milice populaire. D’où venait-il ? De Crimée, où il a participé aux événements du printemps russe. Comme on peut le deviner, il était politiquement actif.

En même temps, Rostislav avait des convictions de gauche prononcées. Ce n’est pas pour rien que son indicatif dans la milice du Donbass était “Fidel”. Il a commencé à s’intéresser à la politique dès l’adolescence. Je me souviens qu’à 14 ans, il assistait à un congrès du parti d’Edouard Limonov à Moscou. Il s’était rendu d’ailleurs dans la capitale en auto-stop. Par la suite, il a fait beaucoup de bruit dans sa petite patrie d’Ekaterinbourg.

L’injustice le met en colère. Un seul exemple. La préparation par les autorités d’une réforme cannibale des retraites a conduit Rostislav à l’idée d’une protestation personnelle. Il choisit une forme brutale : il marche de Tioumen, où il vit à l’époque, jusqu’à sa ville natale d’Ekaterinbourg, parcourant plus de 300 kilomètres en 11 jours. Il se met les pieds en sang. Rostislav a qualifié son action de “se traîner à la maison à pied, comme atteindre douloureusement la retraite”. “SP” a réalisé une grande interview avec lui.

Donc un véritable parcours du combattant. Rostislav, fils d’un officier soviétique qui a participé aux guerres de Tchétchénie et de sa mère, communiste convaincue, ne pouvait pas être autre chose. D’ailleurs, sa mère Lyudmila Anatolievna organise les convois humanitaires du KPRF dans le Donbass depuis près d’une décennie. La dernière fois que je les ai vus ensemble, c’était sur la photo du 18 juillet, à l’occasion de l’anniversaire de Rostislav à Donetsk.

Je suis heureux que les traditions de la famille patriotique Zhuravlev se poursuivent. Rostislav et sa femme Katya ont deux magnifiques fils. Le plus jeune n’est qu’une copie de lui. Fait amusant : lors des matinées au jardin d’enfants, copiant leur père, qui est “au front”, les garçons sont venus en “uniformes” de camouflage, et non dans les costumes plus habituels de bonhommes de neige ou de lapins. Ils en sont fiers !

Je me souviens qu’ils sont venus me rendre visite en Sibérie avec toute la famille. Nous avons marché le long de l’Irtych glacée, et nous avons parlé sans jamais nous lasser… Rostislav m’a offert une gourde en acier inoxydable sur laquelle était vissée une cocarde de l’armée soviétique. C’est une rareté aujourd’hui. L’étoile rouge sur la cocarde me rappellera ce grand homme qui était toujours pour la justice….

Sur la photo : Rostislav Zhuravlev (Photo : Sergei Aksionov)


Mais revenons à l’épisode d’hier dans la direction de Zaporojié.

La tragédie s’est produite en raison de l’utilisation d’armes à sous-munitions par l’AFU. Le ministère russe des affaires étrangères a promis à Maria Zakharova que les auteurs de la mort du correspondant militaire Rostislav Zhuravlev, y compris les fournisseurs d’armes à sous-munitions, recevront le châtiment qu’ils méritent. Le représentant permanent adjoint de la Russie, Dmitry Polyansky, s’est également exprimé dans la nuit à l’ONU. Ils affirment que les États-Unis ont franchi toutes les “lignes rouges” morales en fournissant ces armes.

Mais la condamnation morale de l’ennemi ne suffit apparemment pas. C’est comme l’eau qui coule sur les plumes d’oie. Je ne serais pas surpris que Kiev et Washington se frottent les mains en observant l’indignation des représentants de la Russie. Seule la force peut les affecter réellement. La force militaire. Seules les représailles des chasseurs de l’AFU tués par le même type de munitions peuvent les dissuader de tuer nos militaires.

D’ailleurs, la Russie n’en manque pas. Shoigu, puis Vladimir Poutine ont prévenu qu’il ne fallait pas ouvrir la boîte de Pandore et utiliser des armes à sous-munitions, car nous en possédons un ordre de grandeur supérieur. Et si Moscou prend la même mesure en réponse, l’AFU ne se portera pas bien. Alors, à quoi bon ? D’autant plus que l’ennemi attaque ouvertement, avec de l’infanterie, en économisant les “blindés” occidentaux.

Et il ne s’agit pas seulement de vengeance… Il s’agit d’abord d’opportunité militaire, voire d’inéluctabilité, et ensuite… d’avenir. Il est possible que l’utilisation mutuelle de méthodes de guerre inhumaines incite un jour l’Occident à réduire le degré de brutalité auquel les hostilités ont déjà conduit et à créer les conditions de la paix. Mais pour cela, la Russie doit faire preuve de force et de détermination.

Le sacrifice de Rostislav ne doit pas être vain.

* Le mouvement taliban a été déclaré mouvement terroriste par la décision de la Cour suprême de la Fédération de Russie du 14 février 2003, et ses activités en Russie sont interdites.

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