Naturellement je partage tout ce que dit Frank sur l’impérialisme parvenu au stade hégémonique, et ses conséquences. Je voudrais revenir sur sa question concernant la lutte des classes et les principes nous dit Xuan. Il a raison, il faut se dégager des logiques politiciennes de sommet pour prétendre intervenir. Cette mise au point de Xuan est effectivement incontournable sur la nécessité de repenser “l’erreur” et pas encore la trahison qui sera celle de Rober Hue et de la quasi totalité de ceux qui seront nés dans cette période, l’erreur de la coexistence pacifique, qui n’est pas de rechercher la paix, mais de penser l’obtenir en désarmant unilatéralement l’Etat socialiste sur le plan militaire et plus encore idéologique par le désarment de la classe ouvrière de son parti révolutionnaire, de la conscience de classe, de la nécessaire lutte des classes. J’ajouterai que “l’erreur” est devenue encore plus “erronée” à la chute de l’URSS puisque ce qui était avancé comme possibilité de la fin du komintern et la possibilité de voies parlementaires tablant sur la coexistence pacifique supposait justement l’existence de l’URSS comme garantie d’un rapport de forces contraint à la paix. La question de la possibilité de surmonter les effets de trente ans et plus de cette impasse est devant nous parce qu’il n’y a pas que le PCF pour avoir été durablement marqué par cette orientation et je continue à penser que ceux qui se rassurent en faisant le bilan des errances des dirigeants de ce parti ont eux-mêmes fait la preuve de leur incapacité à proposer une issue qui soit autre chose qu’une situation à l’italienne ou des coalitions dans lesquelles le capital joue d’abord “la gauche” non communiste et ultérieurement s’en débarrasse y compris par le fascisme. (note de Danielle Bleitrach dans histoireetsociete)
Lorsque le programme des jours heureux a été présenté, notre camarade Jean-Claude Delaunay n’avait pas dissimulé ses critiques.
Il y avait d’une part la nécessité de sauver le PCF de la liquidation pure et simple, et d’autre part le prolongement d’une tradition déjà ancrée bien avant Robert Hue, d’un parti de gouvernement, tradition issue de la théorie du passage pacifique au socialisme de Khrouchtchev.
Clouscard avait attiré l’attention des communistes sur le lien entre l’idéologie libertaire et le libéralisme, un peu moins sur le lien entre révisionnisme ou opportunisme de droite, et libéralisme. Pourtant c’est un cagoulard qui a été porté et maintenu au gouvernement, et avec l’appui de nombreux gauchistes d’ailleurs.
C’est donc un mal ancien. Mao Zedong dénonçait dans le rejet de Staline l’abandon d’une épée, épée aussitôt saisie par les impérialistes pour nous frapper. Et il ajoutait que l’épée de Lénine avait déjà suivi le même chemin … « A mon avis, elle l’a été dans une assez large mesure. La Révolution d’Octobre est-elle toujours valable? Peut-elle encore servir d’exemple aux différents pays ? Le rapport de Khrouchtchev au XXe Congrès du Parti communiste de l’Union soviétique dit qu’il est possible de parvenir au pouvoir par la voie parlementaire; cela signifie que les autres pays n’auraient plus besoin de suivre l’exemple de la Révolution d’Octobre. Une fois cette porte grande ouverte, le léninisme est pratiquement rejeté… »[1]
Restait l’épée du marxisme. On lit dans « Erreur ou trahison » le travail de sape d’A. Tsipko utilisant l’abandon de Staline pour éliminer le marxisme lui-même [p 349 – 350] :
A. Tsipko s’insurgeait contre l’idée séductrice d’une opposition simpliste par sa conception entre Staline et ses prédécesseurs et opposants politiques au sein du Parti: ” La tentation est grande de comparer la victoire de Staline sur tous ses opposants au Politburo du Comité central du PC(b)US au Thermidor de Napoléon, de la présenter comme un coup d’Etat contre-révolutionnaire, en rupture totale avec l’idéologie et les idéaux des prolétaires de Russie. Une fois que l’on est d’accord avec cette pensée séduisante, tous les problèmes sont résolus en un instant: Staline est condamné, la foi dans l’idéal est préservée, la “pureté” de la théorie est restaurée.”
L’une des idées les plus importantes de cet article était la suivante : le « stalinisme » est « une sorte d’extrémisme de gauche*», « les origines du stalinisme sont à rechercher dans les traditions du radicalisme de gauche russe », caractéristique de tout le mouvement révolutionnaire en Russie. Et bien qu’A. Tsipko ne l’ait pas écrit directement, il ressort de son article qu’il n’y avait pas de différence fondamentale entre Staline et Lénine.
En même temps, l’auteur abordait un autre problème: « Nous avons le droit et même le devoir de nous demander: qu’est-ce qui, dans la théorie de Marx, a été confirmé et que nous devons suivre ? Qu’est-ce qui, dans sa doctrine, n’était vrai que pour son époque, pour le XIXe siècle ? En quoi Marx et Engels se sont-ils trompés ? » Se demandait-il.
Sans donner une réponse exhaustive à ces questions, A. Tsipko indiquait à ses lecteurs que l’une des principales erreurs de K. Marx et F. Engels était l’idée de la possibilité de créer une société socialiste non marchande. V.I. Lénine fut convaincu du principe de l’impossibilité de combiner le marché et le socialisme jusqu’au début des années 1920. Cette idée était à la base du socialisme qui a été créé dans notre pays sous la direction de Staline.
En conséquence, l’auteur formulait la conclusion suivante : « Staline en tant que personne a été formé dans un environnement marxiste, il a assimilé comme il l’a pu en vertu de ses capacités et de sa formation l’héritage des classiques » ; en définitive, il « n’est jamais allé au-delà des vérités de l’ABC du marxisme », et par conséquent « la pensée de Staline et ses idées sur le socialisme étaient typiques des marxistes de l’époque ».
En effet, Staline était marxiste, et au fond c’est à ce titre qu’il a été déboulonné. Il ne restait plus alors à Robert Hue qu’à geindre et battre sa coulpe à « la Marche du Siècle »
Je reviens donc sur la lutte des classes dont parle Frank. Toujours dans le cadre strictement parlementaire, la lutte des classes a été balayée par la lutte entre « droite et gauche », entre un « peuple de droite » et un « peuple de gauche ». Et nous voici bien embarrassés pour retomber sur nos pieds après tant de trahisons.
Les idéologues de la bourgeoisie se sont saisi de cet autre abandon pour remplacer la lutte des classes par celle des « citoyens » opposés aux « élites et au capitalisme mondialisé ».
Pour ajouter la confusion à la confusion, on voit même certain « marxiste » remplacer la lutte de classe contre la bourgeoisie monopoliste par celle contre « oligarques et apatrides dont la recherche de leur intérêt et du profit se fait en dehors des frontières nationales » mais aussi « toutes les nouvelles couches moyennes supérieures plutôt hautes et souvent urbaines » et pour finir « tout ce qui relève de ce lumpen proletariat que je définis comme l’économie parallèle des racailles du bas et d’en haut. »
Face à cet « ennemi principal », la « lutte de libération nationale doit être conduite avec tous ceux qui ont envie de sortir du joug qui pèse sur nous à l’heure actuelle », et il s’affiche avec Dupont Aignan .
Sur ce terrain-là aussi la confusion est la plus extrême.
Il n’est pas nécessaire de s’étriper des jours durant sur la définition du prolétariat pour savoir qui sont les amis et qui sont les ennemis de la révolution. La meilleure solution consiste à partir de la réalité sociale, enquêter sur place sur la situation matérielle et les besoins matériels des masses, observer simplement lors des conflits sociaux qui se bat réellement contre le capital, qui hésite, et qui le soutient. Les cellules d’entreprise seraient sûrement un excellent outil pour ce faire, et c’est un acquis du dernier congrès, s’il est bien utilisé.
Un des principaux outils du marxisme c’est de partir des intérêts du peuple, et partir des faits.
[1] Mao Tsé-toung – « deux épées » discours à la deuxième session plénière du Comité Central issu du VIIIe Congrès du Parti Communiste Chinois – 15 novembre 1956
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Xuan
Dans le même veine, j’aurais aimé prolonger le débat sur la lutte de classe à partir du thème “Le profit est-il une logique ?” ou encore “de la lutte des classes à la lutte des logiques”
Mais on trouvera sujet à discussion plus vaste dans “Economie & Politique” du 24 juin :
“Paul Boccara et la novation révolutionnaire”
On lit notamment au paragraphe 1 – type de révolution :
“Paul développe l’idée d’une voie pacifique révolutionnaire, dépassant l’idée d’une voie révolutionnaire « violente », inefficace de nos jours…
La radicalité, ce n’est pas la violence ou l’élimination des adversaires. C’est changer la logique, rompre avec la régulation capitaliste par le taux de profit et rompre avec les régulations du libéralisme dans l’anthroponomie.”
On notera que la question de l’Etat et de son pouvoir, définie d’emblée comme “décisive”, y prend une place toute particulière “D’où l’idée de conquête de pouvoir au niveau de l’État… pour conquérir des pouvoirs décentralisés sur les entreprises et les banques, ou dans les territoires…”
Je laisse à chacune et à chacun la surprise des découvertes.
admin5319
Paul a été l’ultime tentative de théoriser l’eurocommunusme, il a repris pour une part importante les thèses de Boukharine sur le CME… ce quu conduit immanquablement les gens qui se réfèrent à lui sans avoir ses prudences d’ailleurs, à être toujours “le groupe tampon” comme Lénine en accusait Boukharine… et là ils sont le groupe tmpon avec le PGE…