Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Les liaisons aériennes avec l’Europe sont pires aujourd’hui que dans les années 1950

https://vz.ru/opinions/2023/4/21/1207676.html

L’organisme officiel de surveillance de la sécurité aérienne de l’UE (Eurocontrol) a annoncé : “Nous partons du principe que les espaces aériens ukrainien et russe resteront fermés jusqu’à la fin de l’horizon de planification (2029).

En d’autres termes, pendant encore au moins cinq ans (peut-être plus, mais cela dépasse l’horizon de planification), les vols autrefois habituels vers Vienne, Paris, Francfort, Rome, etc., d’une durée de deux heures et demie à quatre heures, ne seront pas rétablis.

Les seules liaisons avec les villes européennes resteront probablement les liaisons détournées via Istanbul et d’autres aéroports d’Asie et d’Afrique, qui durent environ 10 à 12 heures. En termes de temps de vol, Paris sera plus éloigné que Pékin.

Quant à l’ancienne voie, ce sera comme dans la byline sur Ilya Muromets et le Rossignol brigand (la route Tchernigov-Kiev) – “La route directe est embroussaillée, le chemin est plein de boue et d’ornières”.

Cependant, personne ne peut dire avec certitude ce qu’il adviendra des dirigeants européens et de l’UE elle-même d’ici 2029. Si nous parlons des personnalités, Macron, Scholz, Annalena, Ursula, Borrell appartiendront alors à l’histoire. Il est possible que l’UE elle-même connaisse le même sort.

Mais l’UE (et sa filiale Eurocontrol) est prête à tout pour éviter que les avions d’Aeroflot ne refassent jamais surface. Elle confirme ainsi l’adage “les sanctions sont quelque chose d’éternel”. Les exceptions à cette règle ne sont possibles qu’en cas de changements géopolitiques de nature tectonique. Lorsque les plaques continentales se superposent et que les systèmes politiques s’effondrent avec fracas, l’époque n’est plus aux sanctions.

Mais laissons là la géologie, et voyons plutôt à quoi ressemblaient les liaisons aériennes entre l’Est et l’Ouest pendant la guerre froide. (Nous ne parlerons pas des liaisons ferroviaires internationales, qui étaient importantes à l’époque, car elles ont commencé à péricliter dans les années 1980 et 1990, bien avant les bouleversements politiques actuels).

En ce qui concerne le transport aérien, les limitations étaient principalement dues à l’état de la flotte. L’aviation à pistons avait ses limites. Au début des années 1950, les vols de Moscou vers l’Europe occidentale passaient par Prague, qui était alors une plaque tournante importante. En 1954, par exemple, Aeroflot et Air France concluent un accord sur les vols entre Moscou et Paris. Ils se rendaient à Prague en Li-2 [Lissounov-2 ou Li-2 est le nom donné en URSS au bimoteur américain Douglas DC-3, produit sous licence, NdT], et de Prague à Paris en DC-3, autrement dit le même Li-2. Bien sûr, on ne peut pas voler beaucoup avec des Douglas à moteur à pistons et en 1958, avec l’arrivée du Toupolev Tu-104, le vol direct Moscou-Paris a été inauguré. Le vol durait alors 3 heures et 20 minutes.

A la même époque sont apparus les vols directs vers Londres, Amsterdam et Rome. Et au tout début des années 1970, des vols directs vers Francfort-sur-le-Main et Munich. Le nombre de vols n’a cessé d’augmenter, leur géographie s’est élargie, et les frictions interétatiques de la guerre froide étaient comme évaporées. Bien sûr, on pourrait objecter qu’il y a eu des progrès dans le transport aérien, mais qu’il y avait aussi des restrictions au niveau des départs. On a l’impression d’être à trois heures de vol et on s’imagine déjà dans un pays capitaliste (ou du monde libre), mais il y a loin de la coupe aux lèvres.

Mais il y a une autre façon de voir les choses. Si tout le monde ne pouvait pas profiter des avantages d’une communication aérienne rapide et directe avec l’Europe, mais seulement les citoyens de confiance, dits “sortables”, ce n’aurait pas été un grand péché d’offenser les citoyens sortables en leur fermant (ou en leur rendant très difficile) le chemin vers l’Europe, comme aujourd’hui où on doit utiliser des chemins détournés. Que les communistes et leurs acolytes souffrent. Néanmoins, à l’époque sombre de la guerre froide, de telles mesures discriminatoires n’étaient pas appliquées. Contrairement à ce qui se passe aujourd’hui, où elles sont annoncées pour durer. Même si l’on ne sait pas qui dirigera la Russie demain.

Une telle différence par rapport aux années 1950 peut laisser penser que la planification actuelle à long terme dans l’Europe unie est basée sur le principe “brûlons la maison, maintenant que la grange a brûlé”, ou bien “buvons tout, mais ne déshonorons pas la marine”. Eh bien, buvez jusqu’à plus soif.

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