Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Hollande et Merkel face à Vladimir Poutine ? c’est grotesque autant que tragique…

La lecture de ce livre de confidences de Hollande chef de guerre (1) ne peut que susciter la plus intense des stupéfactions face à l’irresponsabilité, la médiocrité d’un tel personnel politique et ce d’autant plus que Sarkozy ne vaut pas mieux et Macron ne dépare pas. En lisant ce livre on repense à la remarque de Martine Aubry : quand j’ai repris le siège du PS à Solférino, après le passage de Hollande à la direction du PS, même les waters étaient bouchés.* Là après le passage de Hollande à la tête de l’Etat, celui-ci était durablement “bouché” que ce soit au plan intérieur ou surtout international, on se demande comment quelqu’un d’aussi médiocre arrive à accomplir tant de désastres. Il est vrai que son prédécesseur et son successeur ne valent pas mieux..

Si la catastrophe syrienne, dont nous avons déjà fait état culmine le 13 novembre 2015 avec les attentats de Paris, alors qu’il est encore président, l’expédition du Mali, tout aussi catastrophique au vu de ses résultats actuels est encore considérée par cet étrange occupant du pouvoir présidentiel, à mettre à son crédit (2). Mais le plus tragico-grotesque est sans contexte, par rapport à ce qui se passe en Ukraine aujourd’hui, la boucherie et les risques y compris nucléaires, la manière dont Hollande et Merkel ont prétendu rouler dans la farine Poutine. Loin d’apparaître comme le fou sanguinaire que nos médias peignent, Poutine se montre plutôt bonne pâte, il paraît au contraire désireux de faire l’impossible pour avoir de bonnes relations avec l’Allemagne et la France. Comme en Syrie, il veut la paix tout en se protégeant des déstabilisations otanesques. Il tient à la position eurasiatique de la Russie et à la reconnaissance de son rôle dans la victoire de la seconde guerre mondiale. Mais ces deux crétins, l’Allemande et le Français, le mot n’est pas trop dur, Hollande en tête – qui continue à s’amuser comme un petit fou en prenant à témoin ses deux biographes journalistes – ne mesurent en rien dans quelle catastrophe (une de plus) ils sont en train d’entraîner le continent européen, nous y sommes… et nous risquons plus encore vu que Macron est du même tonneau.

Le chapitre intitulé LE PACIFICATEUR (p.488 à 512) mérite aujourd’hui après la révélation de madame Merkel, corroborée par notre crétinissime, concernant leur volonté de gagner du temps pour laisser à l’Ukraine celui de devenir la grenade dégoupillée, russophobe, au nationalisme fascisant, qu’elle est aujourd’hui, fait de ce chapitre un pur chef d’œuvre grotesque.

Le chapitre commence par ce constat triomphant : “Vladimir Poutine est pris au piège. Et cela se voit. Se ressent. La tension est maximale dans le salon d’apparat du château de Benouville en Normandie. Il y a là, ce 6 juin 2014, François Hollande, Angela Merkel, Petro Porochenko, nouveau président d’une Ukraine en guerre, et Vladimir Poutine donc, tout de colère rentrée. “ (p.488)

Et quel piège, il faut lire le chapitre pour mesurer à quelle stupidité ce président français mesure l’aune de son triomphe. Avec Merkel, les deux faisant la paire, ils ont déployé des trésors d’ingéniosité pour obliger le président russe à se retrouver dans une partie à quatre avec Porochenko pour lequel Poutine – et on le comprend – n’a que mépris. La suite de son mandat en Ukraine prouvera qui est le personnage, jusqu’où il peut aller dans la corruption.

Hollande et Merkel croient-ils pouvoir obliger le président russe à reconnaître le président ukrainien fraîchement élu, mais même-là, comme le signale Poutine, cette manœuvre est inutile puisque il y aura un diplomate russe lors de la prise de pouvoir de Porochenko, donc il y aura reconnaissance. Simplement, les Russes et l’histoire prouvera qu’ils n’ont pas tort, ont un profond mépris pour le personnage avec lequel Poutine ne veut pas se commettre.

S’ils s’ignorent, puis se toisent, Poutine et Porochenko, formés à l’école soviétique, n’ont en réalité pas beaucoup de secrets l’un pour l’autre. “Ils se connaissent, confirme Hollande, Porochenko, il a des affaires en Russie. Il y a l’argent, et puis le passé… Ils savent tout sur tout” (p.494) Oui justement, et Porochenko, le roi du chocolat, a été capable de se constituer un patrimoine immobilier à Sébastopol à la tête d’une bande de malfrats armés, ce gangster a perdu avec l’annexion de la Crimée, quelques biens ainsi conquis. La suite de son règne dans lequel augmentent les dépenses d’armement, la traque des communistes, les prévarications en tous genre, aboutit à ce que Zelensky, un comédien est élu comme le serait un Coluche, simplement il a promis la paix, la réconciliation… face à ce qu’a été le pouvoir de Porochenko… Lui aussi on voit ce qu’il en est advenu…

Poutine s’est fait un principe d’utiliser ce genre d’individus mais sans se commettre avec eux et en leur faisant peur. Il ne veut donc pas le rencontrer et la quasi totalité du chapitre est consacrée à la manière dont ce nullissime de président français prétend obliger Poutine, invité par ailleurs à l’anniversaire du débarquement en Normandie a être contraint à ce tête à tête.

Quand il apprend que Porochenko sera là la réaction de Poutine est totalement spontanée:

“Au téléphone, le “tsar” fulmine. “Est-ce que ça veut dire que je ne dois plus venir, vous ne voulez pas de moi? lâche Poutine.

Non pas du tout, réplique Hollande ! J’ai invité Porochenko, mais on aura le dîner qui était prévu, la rencontre… Et il est même possible d’avoir un contact avec Porochenko… – Ah… Mais alors, il faut que je réfléchisse”, répond Poutine, pris de court par l’initiative du président français ; qui met Merkel dans la confidence. “Ensuite, reprend Hollande, on a eu un dialogue à trois, Poutine, Merkel et moi au téléphone. Merkel et moi, on a réinsisté et Poutine a dit : “D’accord, je verrai Porochenko”. (p. 492)

On est stupéfait à la lecture de ce chapitre devant la médiocrité des deux européens s’agitant comme un couple de petits bourgeois préparant un repas pour le chef de bureau et le patron de la boîte qui a bien voulu les honorer de sa présence mais dont ils trament la ruine… au profit d’un autre actionnaire qui est proche mais ne participe pas aux agapes (Obama: “Hors de question pour les chefs d’Etat américain et russe, en cette période d’extrême tension, de se retrouver à la même table. On se croirait revenu au bon vieux temps de la guerre froide“(p.492). En fait, le couple de petit bourgeois, l’UE, dîne une fois avec Obama et l’autre avec Poutine, on imagine pour jouer les Go Between, mais c’est à ce diner que Hollande manigance la présence de Porochenko. En prétendant ouvrir ce qui sera la perspective des accords de Minsk et dont on sait désormais le but réel: gagner du temps pour faire de l’Ukraine ce qu’elle est.

Déjà cette opération est en soi une indignité, mais les détails sordides abondent. Hollande est tellement excité devant sa petite manœuvre qu’il renouvelle son invitation en faisant porter un petit billet doux à Poutine par Elkabbach qui va avec Gilles Bouleau à Sotchi interviewer Poutine pour TF1. “Deux chefs d’Etat s’échangeant, en pleine crise internationale, des messages par journalistes interposés, il n’ y avait sans doute que Hollande pour y penser. “(p.492) Effectivement et les deux auteurs du livre de confidences dont on ne sait plus s’ils méprisent Hollande ou s’ils le vénèrent pour leur réserver tant de ragots sur l’exercice du pouvoir… limité au scoop médiatique notent encore que “l’anecdote fait beaucoup rire Hollande, qui retrouve son sérieux lorsqu’il rapporte le contenu de sa conversation avec Poutine, lors de son second dîner du jeudi 5 juin et la préparation de l’entrevue secrète avec Porochenko. “j’ai dit, bon, il faut qu’il se passe quelque chose dans cette rencontre, quels sont les points qui peuvent être évoqués … “Poutine semble dans de bonnes dispositions d’esprit. “D’accord, je suis prêt à discuter dit-il. Pas de photos, pas de caméras, mais on se parle…”(p.492)

Là on se dit que, soit Hollande est un imbécile intégral qui a prévu une rencontre sans s’interroger sur ce qui peut en sortir, simplement pour faire un “coup”… soit, il a déjà l’idée du piège que révèlera Merkel il y a peu et que cela il l’a ourdi non seulement avec Merkel mais avec Obama dont on a vu dans la crise syrienne à quel point il lui est totalement soumis dans le domaine international.

En tous les cas le personnage est complet quand on revient à la première page du chapitre qui souvenez-vous débute par “Vladimir Poutine est pris au piège. “ Quel piège, il ne s’agit pas seulement de cette rencontre que Hollande lui a imposée comme un gage de bonne volonté envers l’Europe, une acceptation à discuter qui va déboucher sur les accords de Minsk que personne ne songe à respecter, mais c’est parce que “Un photographe vient de faire irruption dans la pièce, à la demande de la chancelière Merkel. Elle veut immortaliser l’instant, ce premier contact entre Poutine et Porochenko, élu le 25 mai 2014 à la tête de l’Ukraine. Le point d’orgue d’une sorte d’embuscade diplomatique organisée par François Hollande, alors que le monde entier se presse sur les plages normandes, ce jour-là, à l’occasion du 70 e anniversaire du débarquement allié.” (P488)

Poutine a exigé qu’il n’y ait ni photo, ni caméra, il a beaucoup accepté, la présence de Merkel, celle de cette rencontre avec Porochenko parce qu’il tient à ce que le rôle de la Russie dans la deuxième guerre mondiale soit reconnu et ces deux comploteurs de bas niveau que sont Merkel et Hollande lui imposent cette photo et qu’elle restera au secret dans les archives de l’Elysée. Ce cliché malgré toutes les promesses a finalement été publié dans le Monde fin août 2016. “On y voit un Poutine manifestement furibard, l’oeil noir, et Porochenko, un peu plus loin, un bloc de muscles, l’allure sévère. Et au milieu, Hollande, tel qu’en lui même, indéchiffrable.” (p489)

Qui y a-t-il à déchiffrer?

Si les Français grâce à une presse et des médias au dernier degré du conditionnement servile peuvent ignorer jusqu’où peuvent aller leurs représentants jusqu’au plus haut niveau, il n’en est pas de même d’autres peuples, et même des Allemands qui aujourd’hui attribuent pour 40 % d’entre eux la responsabilité de la situation en Ukraine à l’OTAN et y compris à Merkel… le pourcentage étant de 59 % dans l’ex-RDA, les Russes savent aussi ce qu’ont été les accords de Minsk, ce qui se passait de crimes dans le Donbass et l’attitude trop conciliante de Poutine est sévèrement jugée.

Dernière remarque, je revois l’attitude de Xi Jinping refusant le dialogue avec Trudeau qui cherche à l’interpeler dans un couloir, la manière dont il juge de ces occidentaux prêts à tout pour faire de l’audience avec des provocations que répercuteront leurs propres médias.

Oui il n’y a rien à déchiffrer, si ce n’est un pouvoir qui tourne à vide, et la politique qui se perd en anecdotes, en faits divers comme ces confidences de Hollande sous le titre révélateur “Un président ne devrait pas dire ça..”

Je voudrais reprendre en l’élargissant la dernière remarque de Franck Marsal sur l’UE et le frexit:

Il est clair, et la description ci-dessus en témoigne, que rien n’est possible dans le cadre de l’UE. C’est précisément pour cela que ce cadre a été mis en place. Mais il ne faut jamais oublier la leçon de Karl Liebknecht : l’ennemi principal est dans notre propre pays. Si l’UE est un outil pour détruire tout ce que les communistes et les travailleurs avaient construit dans notre pays, ce n’est pas de son propre chef. C’est parce que la haute bourgeoisie française l’a conçue ainsi et a trouvé dans le personnel politique français de quoi exécuter ses diktats. Avec le frexit de quoi s’agit il ? Trouver des alliés dans le petit impérialisme français contre Bruxelles ? Les Grecs l’ont essayé et s’y sont brûlé les ailes. Exproprions les grands capitalistes français d’abord et faisons-le y compris en refusant les diktats de l’UE, en voyant le rôle que jouent ces capitalistes français, la manière dont ils sont imbriqués dans la financiarisation et le militarisme y compris outre atlantique…

Danielle Bleitrach

(1) Gérard Davet Fabrice Lhomme, Un président ne devrait pas dire ça… Les secrets d’un quinquennat. Stock. 2016

(2) Il est lui-même stupéfait d’être si bien accueilli même si “l’intervention au Mali engendrera, elle aussi son lot de drames inévitables. A la mi-2016, l’opérationServal rebaptisée entre temps “Barkhane” après son extension aux autres pays de la zone sahélo-saharienne, a déjà coûté la vie à une vingtaine de soldats français“(479) . On sait ce qu’il en est advenu… Il n’empêche, de ça comme de rouler dans la farine Poutine en Ukraine, passer outre ses conseils en Syrie, ce minable est tout content… alors même que ce dernier tient des propos de simple bon sens : “Nous on reconnait des Etats. Vous intervenez au Mali à la demande d’un Etat pour lutter contre les terroristes, e bien, vous devriez avoir la même position en Syrie et être conscients que l’opposition à Bachar el-Assad n’est pas une opposition légitime et que ce sont des terroristes” (p.461) ou “Depuis 2012 et ma première rencontre avec lui, Poutine me dit “Moi, je ne suis pas lié à Bachar el-Assad, mais tant qu’on a pas d’autre solution, on gardera Bachar el-Assad”. il n’a pas évolué.( p.470) Comment à partir de là et de la somme des fautes accumulées de leurs conséquences catastrophiques en ce qui concerne les positions des présidents français, la grande muette qu’est devenu son parlement, l’abscence totale d’opposition au chef de l’Etat dans ce domaine y compris depuis que le PCF est ce qu’il est, comment peut-on en arriver au consensus actuel sur tout serait de la encore faute d’un Poutine ivre de puissance et fou à lier…

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4 Commentaires

  • Xuan

    Oui, comme l’a dit Franck Marsal, l’ennemi principal est dans notre propre pays.”
    Le Frexit a coulé dans l’entre-deux tours de la première élection de Macron.
    De fait les grands monopoles capitalistes de notre pays n’y sont pas intéressés.
    Pour la simple raison qu’ils font partie des donneurs d’ordre de l’UE et non des capitalistes soumis à l’UE, comme cela a trop souvent été répété.
    C’est-à-dire qu’il serait vain de chercher une alliance politique avec une bourgeoisie “souverainiste”, que la seule tentative dans ce sens avec Asselineau a fait flop, et que la souveraineté nationale ne peut éluder le renversement du capitalisme comme priorité et comme condition de la souveraineté nationale.

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  • Smiley
    Smiley

    Comment la Russie a t elle pu accepter le format Normandie ? Tout vient de là. Un adversaire et deux intermédiaire neutres . Ça semble bien sur le papier. En réalité trois adversaires implacables qui s entendaient comme larrons en foire.
    Que pouvait il en sortir si ce n est des accords bidons.
    La Russie croyait elle vraiment que ce format excluait les États Unis et neutralisait l OTAN ? Que la gamine de R D A et le représentant de la gauche plurielle avaient chacun une diplomatie autonome ? Le fait que les accords soient signés en Biélorussie pouvait faire croire à leur validité. Peu importait le lieu en définitive puisque ils ne devaient pas être appliqués

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    • admin5319
      admin5319

      si on lit ces invraisemblables confidences il n’y a pas de doute à avoir, Poutine veut absolument conserver des liens avec l’Europe, il est bien celui encore qui accepte de ne pas mettre le veto (lui ou Medvev) à l’expédition libyenne (ce qui met en rage Lavrov qui lui est l’héritier de Primakov)… Il faut mesurer le rôle que jouent ses relations personnelles avec Merkel et la confiance totalement stupide des Russes en la France… Poutine est plein de bon sens mais il est faible à l’idée d’être accepté lui et son peuple, d’être reconnu dans la deuxième guerre mondiale. Ca c’est le côté positif, dans le négatif il y a l’entourage de libéraux, d’oligarques… Il y a cette “occidentialisation”, la corruption eltsinienne… mais cet espèce de capitalisme d’Etat qu’instaure Poutine revendique encore quelque chose de l’ordre de la dignité, de l’histoire, les nôtres sont au-delà, des petits cons nombrilistes, des petits bourgeois qui n’en finissent pas de se réjouir de là où ils sont arrivés… Franchement on ne mesure pas les salopards narcissiques stupides qui nous gouvernent …

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  • Michel BEYER
    Michel BEYER

    J’aurais du deviner….Quand on a des chefs d’Etat aussi lamentables, notre diplomatie, je parle des ministres, ne peut qu’être aussi minable. Depuis des décennies ( je mets Hubert Védrines entre parenthèses. Il me semble lui avoir été un soupçon mieux que les autres), nous avons des ectoplasmes comme ministre des affaires étrangères ( l’appellation change souvent). De Fabius ( le pire à mon avis) à Mme Colonna, que de médiocrité! De Villepin,Ô miracle, avait été bon à l’ONU avant le déclenchement de la guerre d’Irak.
    Poutine est un vrai chef d’Etat. Il a en Sergueï Lavrov un excellent ministre des affaires étrangères. L’équipe entourant S.Lavrov est du même tonneau. Si vous avez le bonheur d’écouter une personnalité de son équipe, vous n’êtes jamais déçu..
    En France, à un chef d’Etat minable ne peut convenir qu’un responsable de notre diplomatie minable.
    Et pourtant, c’est très important la diplomatie. J’espère que bientôt c’est elle qui prendra le pas sur la guerre.

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