Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Frontière russo-mongole : “Nous rééduquerons nous-mêmes les lâches et les fugitifs de la Fédération de Russie, laissez-les venir, nous avons mille ans d’expérience”.

Un texte d’une cocasserie qui provoque le sourire puis un franc fou-rire ce qui fait du bien par les temps qui courent. Mais il est aussi plein d’enseignement sur les relations entre la Chine, la Mongolie et la Russie, dont on sent bien qu’il y a quelques siècles voire des millénaires d’expérience entre eux. Ce genre de texte en outre avec son humour décapant témoigne de la manière dont la Russie et ses “marches” prennent la situation. Dans le fond si l’on considère que le plus russe des dirigeants à savoir Staline était un caucasien, on se dit que périodiquement la Russie a dû chercher sa légende ailleurs, remarquez c’est un peu pareil pour la Chine, ce peuple de paysans pacifiques auquel il faut des dynasties mongoles ou mandchoues, pour acquérir un minimum d’esprit guerrier. A lire pour relativiser les angoisses du moment (note de Danielle Bleitrach et traduction dde Marianne Dunlop)

https://svpressa.ru/war21/article/347711/

Les descendants de Gengis Khan naturaliseront nos fugitifs à leur manière

par Igor Moiseïev

Mongolie. Sukhbaatar. À la frontière mongole (Photo : TASS/Evgeny Epanchintsev)

La Géorgie, le Kazakhstan et la Turquie ne sont pas les seuls pays à accueillir ceux qui fuient la Russie. Selon l’Agence d’immigration de Mongolie (AIM), environ sept mille personnes sont arrivées dans la république depuis le début de la mobilisation partielle. Et ils se verront délivrer et renouveler des permis de séjour.

Les autorités mongoles déroulent un tapis vert pour nos fugitifs. Qu’est-ce qui motive une telle générosité ? Nous en avons parlé avec les Mongols eux-mêmes, ceux d’entre eux qui, en raison des spécificités de leur travail, communiquent constamment avec les spécialistes d’AIM.

– Ce sont principalement des gens qui viennent des territoires frontaliers, explique l’entrepreneur Enkhamgalan Davaa. Il fait constamment la navette entre la Mongolie et la Russie, achetant des innovations technologiques pour l’industrie alimentaire. – La plupart d’entre eux sont des jeunes d’Oulan-Oude, d’Irkoutsk, de Kemerovo, de Novossibirsk et de Kiakhta. Russes, Bouriates, Kalmouks. Oui, ce sont des lâches. Oui, en termes de moralité, ils ne sont pas les meilleurs représentants de la race humaine.

Travailleurs pendant la récolte du blé, Mongolie. (Photo : Sergey Bobylev/TASS)

Mais nous, en Mongolie, n’avons qu’une très mince “couverture humaine” pour faire face à l’immensité du territoire. Il y a trois millions trois cent mille Mongols dans le pays. C’est comme deux quartiers de Moscou. Parmi eux, un million et demi vivent à Oulan-Bator. Et pour le reste de la vaste steppe, il y en a un million et demi. Elle est vide. Seul le vent y souffle. Des dizaines de milliers de kilomètres carrés inhabités. Et à côté se trouve une Chine surpeuplée d’un milliard et demi d’habitants.

Maintenant les Chinois construisent beaucoup à Ulaanbaatar. Ils sont, bien sûr, d’excellents constructeurs. Les entreprises chinoises construisent ici des quartiers entiers – dix à quinze immeubles à plusieurs étages avec tous les équipements – parking, écoles, jardins d’enfants. C’est du sérieux. En règle générale, les Chinois envoient sur nos chantiers des jeunes hommes non mariés sur nos chantiers. Ils organisent des discothèques sur leur propre site de construction pendant les week-ends. Nos jeunes femmes mongoles célibataires affluent vers eux comme des papillons vers la lumière. Épouser un Chinois, c’est résoudre d’un seul coup tous vos problèmes quotidiens. De tels mariages sont très encouragés dans l’Empire céleste…

Et les “fuyards” de Russie qui viennent chez nous sans le vouloir renforcent notre “couverture humaine”.

La pratique montre que des enfants très intelligents naissent des mariages mixtes de Russes et de Mongols. Et nous, les Mongols, avons vraiment besoin d’hommes intelligents. Même s’ils sont lâches comme des lapins.

Nous avons assez de guerriers et d’hommes courageux pour nous-mêmes. A ne plus savoir qu’en faire. Quel que soit votre interlocuteur – c’est un descendant direct de Gengis Khan, ou de Jamukha, ou de Subede-batyr, ou de Sukhbaatar.

Un habitant et un yak dans le parc national du lac Khubsugul à Khanh Somon, Khuvsgel aimag, Mongolie (Photo : Marina Lystseva/TASS).

Les Mongols ont également combattu aux côtés des soldats soviétiques pendant la Seconde Guerre mondiale. Les étudiants mongols qui faisaient leurs études en Union soviétique avant la guerre sont tous partis au front. Beaucoup d’entre eux sont morts. Nous savons comment nous battre. Et nous avons aussi toute une armée d’athlètes. Surtout des lutteurs. En ce qui concerne le nombre de champions olympiques pour 1 000 habitants, nous sommes les premiers au monde.

Nous avons même eu un champion du monde de sambo comme président.

Mais le pays manque cruellement d’ingénieurs. Et dans toutes sortes de domaines. Et nous avons également besoin de spécialistes en informatique. Cette zone est également sous-développée ici. Et il est impossible de s’en passer de nos jours. Or il y a beaucoup de spécialistes en informatique parmi ceux qui quittent votre pays. Il y en a beaucoup parmi lesquels choisir.

L’agence d’immigration de Mongolie teste minutieusement tous ceux qui viennent ici. Ils voient ce qu’ils peuvent faire et comment ils peuvent être utilisés. Et il est certain que beaucoup d’entre eux peuvent être utilisés en tant que professeur de langue russe – comme locuteur natif.

Nos professeurs travailleront avec lui pendant quelques mois, et vous aurez réellement un professeur de RLE – russe comme langue étrangère – dans votre poche. Les Kalmouks et les Bouriates sont bilingues : ils connaissent le russe et comprennent très bien le mongol. Les Bouriates se désignent eux-mêmes comme tels – les Mongols-Bouriates.

Nous en avons environ cent mille dans le nord de la Mongolie. Mais ils ne connaissent pas la langue russe. Alors que c’est la langue maternelle de vos “fugitifs”. Seulement, ils devront enseigner loin d’Oulan-Bator – dans nos lointains oulous.

Mongolie. Oulan-Bator. Vue de la ville. (Photo : Sergey Bobylev/TASS)

“Nitchevo”, ils vivront bien dans nos yourtes aussi. C’est bon pour leur santé. Nous, les Mongols, avons beaucoup besoin du russe. Nous ne pouvons rien faire sans. À un moment donné, après la guerre, plus de 60 000 Mongols ont reçu une éducation supérieure dans les universités soviétiques. Sans connaissance du russe, vous êtes coincé. Vous ne pouvez tout simplement pas entrer à l’université. À une certaine époque, les Mongols se sont tournés vers l’enseignement supérieur chinois et coréen. Et le flux de ceux qui souhaitaient postuler s’est fortement tari. Tous ces caractères sont trop difficiles à apprendre. Alors que nous avons, comme les Russes, l’alphabet cyrillique.

Mongolie. Oulan-Bator. Une yourte sur le toit d’un bâtiment. (Photo : Viktor Drachev/TASS)

Toute l’élite militaire de la Mongolie a étudié dans les écoles militaires soviétiques. Et maintenant, ils étudient dans les écoles russes. Il n’y a probablement pas un seul institut militaire en Russie qui n’ait pas deux ou trois de nos compatriotes qui y étudient. Un de nos présidents est diplômé de l’académie militaro-politique de Lvov. Un officier politique adjoint professionnel.

L’ensemble de l’état-major général, tous les officiers supérieurs du ministère de la défense – tous ont étudié en Russie. Et récemment, la Mongolie a obtenu sa propre flotte. Nous louons des bateaux en Chine pour transporter notre houille vers le Japon, la Corée du Sud et l’Indonésie (la Mongolie possède l’un des plus grands gisements de houille du monde, Tavan Tolgoi).

Et maintenant, de jeunes Mongols étudient dans les écoles maritimes russes. L’anglais, d’ailleurs, y est très bien enseigné. Ainsi, un jeune mongol ne peut se passer du russe. Pas de carrière, pas d’affaires. Et il y a tellement de professeurs potentiels ici…

En bref, laissez-les partir. Laissez-les rester. Laissez-les se marier avec des filles mongoles. Elles sont très belles les filles ici. On dit que ce sont les plus belles filles d’Asie. Nous, les Mongols, en bénéficierons tant sur le plan génétique que démographique.

lors d’un mariage mongol au Mémorial des soldats soviétiques à Zaisan Tolgoi, en Mongolie. (Photo : Viktor Drachev/TASS)

Et nous élèverons nous-mêmes des guerriers à partir des enfants de lâches et de “fuyards”. Nous avons mille ans d’expérience pour cela…

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