Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

POURQUOI LES RUSSES PRÉFÈRENT DÉSORMAIS L’EURO AU DOLLAR

Toujours dans le cadre de ce que nous avons choisi d’explorer aujourd’hui et demain, à savoir cette phase “bizarre” de la chute de l’empire américain, avec sa principale difficulté échapper à l’emprise de l’empire, jouer sur les contradictions au sein du capital et de l’impérialisme y compris comme dans le cas de la Russie on n’est plus l’URSS sans pour autant être intégré totalement, en demeurant terres ouvertes au pillage, la reddition n’ayant servi à rien. Quand se pose alors la question de la mobilisation des masses pour défendre la souveraineté. (note de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Benaouda AbdeddaïmLe 28/04/2021 à 8:37

Moscou s’affranchit monétairement des Etats-Unis. Pour la première fois, le dollar est mis en minorité dans les exportations de la Russie. Au bénéfice de l’euro.

“Dédollarisation”, comme désintoxication. En Russie, le terme ne relève plus du vœu pieux. En une année, la part des exportations de la Russie libellées en dollar a chuté de 13 points. Elle était de 61% fin 2019, elle n’est plus que de 48% fin 2020, selon les dernières données de la Banque centrale. On est là bien au-delà d’un symbolisme politique.

En huit ans, la place de la devise américaine dans les recettes extérieures russes s’est contractée de 40%. Les grands exportateurs contrôlés par les capitaux d’Etat ont renégocié au maximum leurs contrats, pour facturer autant que possible dans d’autres monnaies.

L’Etat russe compte maintenir cette tendance comme une ligne de conduite géopolitique. En février, le numéro 2 de sa diplomatie Sergueï Ryabkov avançait une nécessité de recourir au dollar au minimum, afin d’éliminer la dépendance à “une source toxique d’actions hostiles permanentes”. Le 12 avril, dans un entretien à l’agence de presse iranienne IRNA, c’est le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov qui, de nouveau, a évoqué des “mesures progressives” pour “dédollariser”, dans une “transition vers des paiements en devises nationales ou alternatives”.

Roi euro

Les tableaux de la Banque de Russie attestent que l’œuvre de persuasion fonctionne de mieux en mieux auprès d’anciennes républiques d’URSS. Le mouvement le plus substantiel concerne les échanges avec la Chine, avec qui un mécanisme de compensation en roubles ou en yuans est en train de s’installer. Mais, comme le relève l’agence Bloomberg, entre eux, c’est le “roi euro” à présent. La monnaie unique européenne est utilisée dans quatre ventes sur cinq aux clients chinois. Le bouleversement, initié par le pétrolier Rosneft, a eu lieu en à peine deux ans, l’expédition du brut s’opère à présent normalement en euros. La chaîne d’information étatique chinoise CGTN explique que “cela reflète l’accélération des efforts de dédollarisation de la Russie”. Et Pékin ne trouve rien à y redire.

Délaisser ainsi la devise d’un bloc commercial occidental pour celle d’un autre bloc commercial occidental apparaît à Moscou presque comme une formalité, avec cette idée qu’il n’y a, somme toute, pas grand-chose à redouter d’une amplification des sanctions européennes. Les Russes se concentrent donc sur un seul facteur de vulnérabilité, celui de la sujétion à la devise de la puissance qu’elle caractérise comme la plus “hostile”.

Réseau SWIFT

Il s’agit donc de se prémunir d’une éventuelle offensive américaine qui serait destinée à paralyser le système financier russe. Tout en prônant la désescalade, le président des Etats-Unis Joe Biden a parlé il y a deux semaines d’une “réponse proportionnée”. Les experts à Moscou mettent en exergue l’interdiction faite aux établissements américains d’intervenir sur une partie du marché des obligations libellées en rouble, tout en notant que la mesure se révèle moins restrictive que prévu. Cependant, elle contribue à maintenir les opérateurs russes dans une expectative constante.

A chaque nouvelle série de sanctions, la marge de manœuvre de Washington se rétrécit, ce qui pose de plus en plus la question de savoir jusqu’où les deux parties sont prêtes à aller”, considère Vladimir Tikhomirov, économiste en chef de BCS Global Markets à Moscou.

Est-ce que le marché secondaire russe sera ciblé? Comment les banques publiques russes seraient empêchées d’opérer en dollars? Et une fois encore ces dernières semaines, l’option d’évincer la Russie du réseau SWIFT est brandie. Le 21 avril, l’Ukraine l’a plaidée auprès de l’Union européenne. Option prématurée, d’après un ancien spécialiste du dossier des sanctions au Trésor américain.

Une déconnexion de ce système de traitement des opérations bancaires internationales, où le dollar demeure prédominant, pourrait paralyser les transactions des établissements bancaires russes. La société de gestion d’actifs QBF à Moscou prévient que les grands exportateurs russes n’auraient alors d’autre choix que de chercher à travailler avec des banques étrangères – non-américaines – pour assurer leurs activités opérationnelles. Une autre forme de “dédollarisation”, cette fois subie.Benaouda Abdeddaïm Editorialiste international

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1 Commentaire

  • Jean François DRON
    Jean François DRON

    Et si en Europe on commençait à penser que dédollarisation et déconditionnement idéologique US devrait êttre à l’ordre du jour !

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