Marianne m’envoie ce texte en le commentant ainsi : Cet article, c’est un peu n’importe quoi, il y a du paradoxe, du cynisme et même des déclarations de mauvais goût, des provocations. On a l’impression que le savant s’ennuie avec le journaliste de Rossijskaïa Gazeta (journal classé “officiel”) et se moque de lui, et de nous aussi par la même occasion, mais j’avais envie de le traduire.” et moi j’ai envie de le publier parce qu’il me semble que tout le monde peut partager cette ironie sur notre “bêtise” commune et sur dieu qui a fait les choses de bric et de broc. Même quand il aborde ce qui selon lui sans doute les deux plus grands hommes politiques Lénine et Staline (que ce soit négativement ou positivement le seul dirigeant demeure encore pour lui aujourd’hui un secrétaire du Parti communiste) et qu’il le compare au génie à partir de la taille du cerveau on a envie de lui répondre deux choses: la première est que si la grosseur du cerveau donne la mesure du cerveau c’est l’hydrocéphale qui l’emporte. Mais comme il parle d’autre chose au-delà de l’ironie, incontestablement, je lui dirai que Fidel orfèvre en la matière a aussi déclaré que le génie politique n’en était pas un ou du moins était plus courant que les autres. Pour exister il lui faut un peuple révolutionnaire expliquait-il, quand il y a une révolution de là surgissent un grand nombre de gens qui se révèlent et on découvre des capacités inconnues de gens jusqu’ici opprimés. Mais visiblement notre ironique savant dit à son intervieweur qu’il est complétement idiot lui et son journal qui ne sait que cirer les pompes et que si on discute avec des idiots c’est qu’on est soi-même un parfait crétin, un positiviste dans un monde où la créativité n’est plus qu’un filet, mais qu’il impossible de faire autrement puisque l’on doit vivre dans le monde qui nous est imparti et qui nous crée (note de Danielle Bleitrach et traduction de Marianne Dunlop)
Texte: Valery Vyjoutovitch
Rossiyskaya Gazeta – Numéro fédéral n ° 121 (6989)
Il est généralement admis, bien que cela n’ait été prouvé par personne, que le cerveau humain n’est pas utilisé à plus de 5%. Mais cette efficacité est encore suffisante pour la naissance d’idées brillantes qui entraînent de grandes découvertes et réalisations. Et si vous utilisiez votre cerveau à 100%? Est-ce possible? Et quel progrès l’humanité ferait-elle alors? Nous aborderons le sujet avec Sergei Saveliev, docteur en sciences biologiques, chef du laboratoire pour le développement du système nerveux à l’Institut de morphologie humaine.
Légende : Le cerveau ne veut pas travailler car son travail nécessite des coûts énergétiques. Photo: EPA
« Le malheur d’avoir trop d’esprit est une invention littéraire »*
Accepteriez-vous de vivre éternellement à condition que votre vie se poursuive dans un état végétatif?
Sergei Saveliev: Bien sûr que non. Ce n’est pas intéressant. Bien que certaines personnes naissent et meurent sans reprendre conscience, comme cela a été écrit dans l’anamnèse par l’un des secrétaires généraux du Parti communiste. Il a vécu et est mort sans reprendre conscience. Bien sûr, c’est une blague. Mais il y a des plantes qui vivent des milliers d’années. Demandez-leur, ça leur plaît probablement. En ce qui concerne l’évolution humaine, ce n’est rien de plus que l’évolution du cerveau, et rien d’autre. Parce qu’à tous autres égards, nous sommes faits n’importe comment. Comme l’a dit le célèbre ophtalmologiste Helmholtz, si le Seigneur Dieu m’ordonnait de faire des yeux, je les fabriquerais cent fois meilleurs. Cela s’applique également à tous les autres organes humains.
Qu’est-ce que le malheur d’avoir trop d’esprit dans la manifestation physiologique de cette, disons, maladie?
Sergei Saveliev: Le malheur d’avoir trop d’esprit tel que l’homme moyen l’interprète, ou dans le sens que le grand écrivain russe a mis dans ce concept – un tel malheur n’existe pas. Si une personne est assez intelligente, alors elle comprend les principes et les mécanismes du monde dans lequel elle vit et ne «jettera pas de perles devant des cochons», comme Tchatski*. Le malheur d’avoir trop d’esprit est une fiction littéraire. Une personne qui comprend ce qui se passe, d’une part, n’impose pas aux autres des exigences inutilement élevées et, d’autre part, utilise sans vergogne ses connaissances.
D’accord, je poserai la question comme ça: une charge excessive sur le cerveau peut-elle avoir des conséquences négatives pour une personne?
Sergei Saveliev: Il existe une opinion naïve selon laquelle le cerveau humain est illimité dans ses capacités physiologiques. En fait, il est très limité. Il existe des limites physiologiques claires. Le taux métabolique ne peut pas être augmenté indéfiniment. Lorsqu’une personne est mentalement inactive, c’est-à-dire quand, par exemple, elle lit «Rossiyskaya Gazeta» sur le canapé avant de se coucher, elle consomme environ 9% de toute son énergie corporelle. Et si sa lecture l’excite et l’échauffe d’une manière ou d’une autre, agit comme du poivre dans la nourriture, alors elle commence à penser, et sa dépense énergétique dans ce cas atteint 25% de l’énergie totale du corps. Ce sont des coûts très élevés et très lourds. Le corps humain y appose résistance. Par conséquent, nous sommes paresseux et non curieux. Et pourtant, la créativité exige exactement ces 25%.
« Dans le cerveau, tout est arrangé de telle manière que l’entrée est à un rouble, et la sortie à trois »
Alors, pour le bien de la santé, l’énergie mentale doit être économisée?
Sergei Saveliev: Cela se produit contre notre volonté. Le cerveau humain n’est pas adapté aux coûts énergétiques élevés. Un mode d’activité à 25% peut durer quelques semaines. Et puis la fameuse dette énergétique commence à apparaître et ce qu’on appelait dans l’ancienne médecine l’épuisement nerveux. Dans le cerveau, tout est arrangé pour que l’entrée soit à un rouble, et la sortie à trois. Si vous vous fatiguez intellectuellement pendant deux semaines consécutives, vous devez vous détendre et vous reposer pendant six semaines afin de compenser les dépenses du cerveau.
Êtes-vous en train de dire que le stress intellectuel nuit au cerveau?
Sergei Saveliev: Bien sûr qu’il fait du mal, le cerveau n’est pas adapté à l’intellect.
Je pensais que vous diriez que l’exercice intellectuel renforce le cerveau, tout comme l’exercice physique renforce les muscles.
Sergei Saveliev: Rien de tel n’arrive non plus aux muscles. Ils ne se renforcent pas par l’effort physique, mais sont détruits. Combien de temps voulez-vous vivre? Si vous voulez vivre jusqu’à cinquante ans en ayant un beau corps d’athlète, alors, bien sûr, renforcez vos muscles. Mais n’importe quel muscle peut se contracter un milliard de fois, puis il mourra. Toute surcharge équivaut à la mort. Cela s’applique à la fois aux muscles et au cerveau. Le taux de mortalité des athlètes professionnels est dix fois plus élevé que celui des gens ordinaires. Avec des maladies graves. Le sport n’est pas bon pour la santé.
Une faible charge sur le cerveau est-elle utile?
Sergei Saveliev: Oh, c’est le rêve de tout souverain.
La passivité cérébrale ne conduit-elle pas à une dégradation mentale?
Sergei Saveliev: Le monde est rempli d’histoires mystiques sur le cerveau, mais l’essence est simple: le cerveau ne veut pas travailler, car son travail nécessite des coûts énergétiques. C’est la raison de notre oisiveté, de notre paresse et de notre désir de voler, d’acquérir des biens sans effort.
« On n’expliquera jamais pourquoi l’un voit ce que l’autre ne voit pas. »
Il y a des gens qui ont des capacités phénoménales. Par exemple, la possibilité de multiplier deux nombres à quatre chiffres mentalement en quelques secondes. Y a-t-il une explication scientifique à cela?
Sergei Saveliev: Il faut étudier dans une école de physique et de mathématiques pour maîtriser cette compétence. Ce n’est pas difficile, il existe des techniques bien connues. Et en plus, il faut être limité dans de nombreux autres domaines pour montrer de telles prouesses. Il n’y a là rien de créatif ni même de génial. Il y a des gens dans l’histoire qui sont doués pour multiplier les nombres, surtout quand il s’agit de leur propre argent. Mais, malheureusement, ces personnes n’ont rien produit, que des calculs.
Y a-t-il des zones du cerveau humain qui sont responsables d’un don particulier, par exemple pour la musique ou les échecs?
Sergueï Saveliev: Bien sûr. Toute la surface du cerveau est occupée par des zones structurellement très bien identifiables. Vous pouvez regarder les coupes histologiques. Sur ces coupes histologiques de quelques microns d’épaisseur, des champs existent et leurs limites sont visibles. Chaque champ est fonctionnellement adapté à une fonction particulière. Par exemple, à la vision, à l’ouïe, au mouvement. Et le cerveau est composé de tels champs. Qui sont différents selon les individus, chaque champ est différent pour différentes personnes. Une personne, par exemple, un bon photographe, peut avoir un champ trois fois plus grand dans le domaine «visuel» que toute autre. Et ce sont des milliards de neurones, des milliards de connexions. Vous ne pouvez jamais expliquer pourquoi l’un voit ce que l’autre ne voit pas. C’est la même chose avec un musicien ou un scientifique. Nos capacités individuelles sont déterminées par la combinaison de ces champs qui ont différentes tailles. Selon la taille, l’un ou l’autre talent est clairement exprimé. Et quiconque a une zone limitée, par exemple, en mathématiques, excusez-moi, il n’y a rien à faire. Bref, notre comportement est déterminé par la taille des champs du cortex cérébral, ainsi que par les structures sous-corticales responsables de chaque fonction. Par exemple, pour la fonction musicale. Pour simplement entendre, vous devez avoir deux douzaines de structures. La probabilité qu’une personne ait toutes ces structures suffisamment grandes, franchement, est faible. Par conséquent, il y a peu de musiciens exceptionnels, et il y a beaucoup d’imitateurs.
« La raison est un concept abstrait »
Comment le cerveau et la raison sont-ils liés l’un à l’autre?
Sergey Saveliev: La raison est un concept abstrait. Si un ver de terre rampe consciemment d’une solution saline à une solution alimentaire, est-ce l’effet de la raison? Du point de vue des psychologues, oui. Mais la physiologie ne fonctionne pas avec des concepts abstraits. Le génie – oui, il existe un tel concept en physiologie. La combinaison unique de la taille des structures cérébrales permet à quelqu’un d’écrire de la musique de génie. Et l’autre n’écrira jamais de musique de génie, car il n’a pas la combinaison appropriée de structures. Le cerveau est un appareil structurellement déterminé qui détermine l’individualité et l’unicité de chaque personne. Pour cette raison, tout le monde est différent. Et ces capacités ne sont pas héritées. Malgré un parent talentueux, l’enfant peut être d’une médiocrité totale. Ce qui est généralement le cas.
Peut-on dire que la raison est le médiateur entre le cerveau et le corps?
Sergei Saveliev: Non. La raison n’est généralement pas un concept scientifique. Qu’est-ce que la raison? Pointer du doigt sur un clavier d’ordinateur? Appuyer sur les boutons du téléphone? Compter jusqu’à dix?
Néanmoins, il y a le concept d’« êtres doués de raison ».
Sergei Saveliev: Je ne m’occupe pas de philosophie.
Dans tous les cas, la raison est un concept physiologique.
Sergueï Saveliev: Pour moi, un tel concept n’existe pas pour la simple raison que ses frontières sont floues. Tous les animaux dotés d’un système nerveux ont une intelligence. Et en ce sens, il est insensé de dire que l’homme est intelligent et que les autres êtres vivants sont dénués de raison. L’homme est un produit de l’évolution cérébrale. Il peut créer quelque chose qui n’était ni dans la nature ni dans la société. Les fourmis par exemple ne peuvent pas créer ce qui n’était pas dans la société. Et les vers plats, et même les singes ne peuvent pas créer quelque chose qui ne faisait pas partie de leur communauté. Un homme peut. Qu’est-ce qui définit l’homme? Le fait qu’il produise de manière créative quelque chose qui n’a pas été créé avant lui dans la nature et la société. Et si nous convenons que la raison est la capacité de créer quelque chose qui n’était ni dans la nature ni dans la société, alors j’accepte ce concept. Mais si nous ne l’introduisons pas, alors nous obtenons une vague définition vide, du verbiage pour philosophes, dont la tâche principale est d’expliquer pourquoi nous gaspillons nos vies de manière si médiocre.
« Les Européens ont subi une évolution négative »
Y a-t-il des limites au développement du cerveau?
Sergei Saveliev: Ceux qui posent de telles questions supposent que le cerveau humain a été figé dans son évolution il y a deux cent mille ans, et que depuis lors, il n’y a pas eu de changements évolutifs.
Parce qu’il y en a eu ?
Sergei Saveliev: Depuis deux cent mille ans, voire un peu moins, environ cent trente-cinq mille, le cerveau humain a diminué de deux cent cinquante grammes. Je veux dire dans l’Europe civilisée. Parce qu’ils ont sélectionné les conformistes et détruit les personnes créatives et indépendantes.
L’évolution du cerveau a-t-elle été négative?
Sergei Saveliev: Pour l’Europe, oui. Les Européens ont subi une évolution négative et une forte spécialisation cérébrale – une sélection artificielle séculaire, très stricte, qui a réduit la taille et la masse de leur cerveau au profit du conformisme et de l’adaptation sociale.
Le conformisme et la capacité de s’adapter socialement sont-ils propres uniquement aux Européens?
Sergei Saveliev: Oui. Parce qu’ils ont toujours vécu très près les uns des autres et que tout ordre d’un prince atteignait rapidement tout le monde. Voyez, ils coupent déjà la tête d’un paysan dans un village voisin… Mais en Afrique ça a mal fonctionné, et en Russie ça a mal fonctionné aussi, ça n’a pas marché. Par conséquent, nous avons plus de polymorphisme, tandis que les Européens en ont moins. Plus il y a de polymorphisme, plus il y a de chances de progrès évolutif.
« Le cerveau humain ne veut pas travailler, n’aime pas et, si possible, ne le fera jamais »
Les possibilités illimitées du cerveau, si elles existent, comportent-elles des risques pour l’humanité?
Sergei Saveliev: Il n’y a pas de possibilités infinies. Premièrement, il y a des contraintes énergétiques. Deuxièmement, le cerveau humain est adapté à la résolution de problèmes biologiques spécifiques et résiste fortement à toute utilisation abusive. Par conséquent, il ne veut pas travailler, n’aime pas ça et, dans la mesure du possible, ne le fera jamais.
La paresse a donc une base physiologique?
Sergei Saveliev: Bien sûr. Lorsque vous êtes paresseux et que vous ne faites rien, votre cerveau utilise neuf pour cent de votre énergie. Et quand vous commencez à penser il en utilise jusqu’à vingt-cinq. Et c’est un désastre. Parce que lorsque vous êtes paresseux, vous avez des endorphines, ces médicaments internes, qui sont injectés dans votre cerveau et, par conséquent, vous n’êtes pas seulement inactif, vous nagez dans le bonheur. Mais si, Dieu vous en préserve, vous commencez à travailler, votre cerveau trouve un million de façons de vous en décourager. Du coup, le corps résiste et, anticipant la consommation d’énergie, hurle simplement: « Que vais-je faire demain?! Où est la garantie que mon réfrigérateur sera à nouveau plein ?! » Autrement dit, vous résistez à tout travail comme un singe normal. Et c’est tout à fait naturel.
Peut-on contraindre un cerveau paresseux à fonctionner?
Sergei Saveliev: Oui.
Comment?
Sergey Saveliev: Lorsque vous êtes mis dans une situation stressante qui nécessite un effort mental. Mais à la première occasion, le cerveau va vous fausser compagnie. Même le cerveau d’un génie, adapté à la créativité, essaiera d’éviter le travail. Il est plus facile pour un génie de simuler son génie que de créer quelque chose. C’est pourquoi les génies n’ont qu’une seul œuvre géniale sur vingt, les autres sont des faux. Le singe en l’homme est incorrigible, il lui faut tout le temps cacher sa queue.
« Il ne faut par rechercher le génie chez les politiciens »
Le cerveau d’un génie est-il physiquement différent du cerveau d’une personne ordinaire?
Sergueï Saveliev: Oui, le cerveau d’un génie pèse plus lourd. À un moment donné, l’Institut du cerveau a été créé en Russie, où ils ont étudié, entre autres, le cerveau de Lénine, l’ont comparé au cerveau de Maïakovski et d’autres personnes exceptionnelles. Il s’est avéré que le cerveau de Lénine était petit et pesait 1330 grammes. Pour Staline c’est à peu près la même chose. Ce qui était, comme nous pouvons le dire maintenant, tout à fait prévisible. En général, le génie ne doit pas être recherché chez les politiciens. Nous avons un comportement instinctif biologique appelé dominance. L’hyper-dominance caractéristique des politiciens, c’est-à-dire le désir de gouverner, de contrôler les gens et le cours de l’histoire, est déterminée biologiquement. Mais le génie est différent. C’est la capacité de l’insolite. Tout babouin peut devenir un hyperdominant. Par conséquent, ils n’ont rien trouvé de spécial dans le cerveau de Lénine, il y a des paramètres très médiocres. C’est juste que cette forme de comportement biologique instinctif – la domination – était chez lui hypertrophiée.
« Le cerveau fonctionne même quand on dort »
Est-il vrai que pas plus de 5% du cerveau humain sont utilisés?
Sergei Saveliev: Quelqu’un qui pense ça l’utilise probablement à 2%. Cette histoire de cinq pour cent est un non-sens. Tout le cerveau fonctionne. C’est comme la RAM d’un ordinateur: on l’éteint – et tout a été effacé. Par conséquent, six minutes après qu’une personne est déconnectée de l’oxygène et de la nourriture, le cerveau commence à perdre la mémoire de manière irréversible et à mourir. Il consomme dix pour cent de l’énergie totale du corps, même lorsque nous dormons. Précisément parce qu’il travaille toujours et en entier.
« La dépense intellectuelle est la prévention du vieillissement »
Qu’est-ce que le vieillissement cérébral? Qu’est-ce qui cause la démence sénile?
Sergei Saveliev: Le vieillissement du cerveau est principalement la mort des neurones. Il est très difficile de tuer les neurones eux-mêmes. Mais leur nombre n’est pas inépuisable. De plus, les neurones humains commencent à mourir dans l’utérus. Après cinquante ans, ils meurent déjà en quantité, et tous les dix ans, notre cerveau perd trente grammes de neurones. Ce processus se poursuit jusqu’à un âge très avancé. Et si vous ne pensez pas avec votre tête, si ne forcez pas les vaisseaux à fournir du sang et de l’approvisionnement en sang aux neurones, alors à l’âge de quatre-vingts ans, le cerveau peut s’alléger de 100 grammes, voire plus. Chez les personnes qui n’utilisent pas du tout leur cerveau, ce type d’affaiblissement va encore plus vite. Les personnes intelligentes conservent leur puissance mentale plus longtemps.
Cela signifie-t-il que le cerveau a besoin d’une dépense intellectuelle?
Sergey Saveliev: Absolument. C’est la prévention du vieillissement. Mais avec des mots croisés et en regardant le programme télévisé “Quoi? Où? Quand?” [cf. Questions pour un champion chez nous, NdT] le vieillissement cérébral ne peut être ralenti. Pour le ralentir, vous devez résoudre un problème à chaque fois que vous n’avez pas rencontré auparavant. Jouer aux échecs ne peut qu’accélérer le marasme, pas l’arrêter. Parce que les échecs ne sont pas une vraie activité intellectuelle. C’est juste de la combinatoire. Malheureusement, de nombreuses personnes confondent créativité et combinatoire. La combinatoire, c’est quand un quatrième est fait de trois morceaux de papier, et en même temps le cerveau se tourne les pouces.
L’évolution nous promet-elle un progrès mental?
Sergueï Saveliev: Non, pas du tout. Les perspectives ne sont pas réjouissantes: une diminution de la taille du cerveau due au conformisme total et à une adaptation constante à l’environnement, l’exportation de son individualité et de ses capacités à l’Etat en échange d’une économie d’énergie. Lorsque nous traitons avec l’État ou la religion, nous leur donnons notre liberté créative et intellectuelle. Et eux, à leur tour, nous garantissent nourriture et reproduction. Donc, tout ira de pire en pire. Et si cette tendance se poursuit, le cerveau humain peut diminuer de deux cent cinquante grammes supplémentaires.
L’évolution va donc dans la direction opposée? L’humanité ne devient pas plus intelligente, mais plus stupide?
Sergueï Saveliev: Hélas, oui.
*Le malheur d’avoir trop d’esprit (горе от ума) est une célèbre pièce de théâtre écrite par Griboïedov en 1825, le personnage principal est Tchatski.
Carte de visite
Photo: Alexander Korolkov / RG
Sergey Saveliev est un paléoneurologue, docteur en sciences biologiques, chef du laboratoire pour le développement du système nerveux à l’Institut de morphologie humaine de l’Académie des sciences de Russie. Né à Moscou, diplômé de la Faculté de biologie et de chimie de l’Institut pédagogique d’État de Moscou du nom de Lénine, a travaillé à l’Institut du cerveau de l’Académie des sciences médicales de l’URSS, depuis 1984 à l’Institut de recherche en morphologie humaine de l’Académie russe des sciences médicales. Depuis plus de 30 ans, il mène des recherches dans le domaine de la morphologie et de l’évolution du cerveau. Auteur de plus de 10 monographies, de 100 articles scientifiques et du premier Atlas stéréoscopique du cerveau humain au monde. Depuis de nombreuses années, il étudie les pathologies embryonnaires du système nerveux et développe des méthodes pour leur diagnostic. Il est l’auteur de l’idée du tri cérébral – une méthode d’analyse des capacités humaines individuelles dans les structures du cerveau grâce au développement et à l’utilisation d’un tomographe à haute résolution.
Photographe, membre de l’Union créative des artistes de Russie, récompensé par des médailles de bronze, d’argent et d’or de l’Union des Artistes de Russie.
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la copie conforme de nombre de scientifiques aujourd’hui. Grande connaissance de leur sujet, grande stupidité pour le reste. La raison n’existe pas. La déraison?
Lorsque j’étais jeune combien de scientifiques attachés à la raison et aux lumières faisaient le lien entre la nécessité des sciences et les nécessités de la raison entre les siences et la philosophie que l’on peut avoir de la vie commune sur cette planète. Aujourd’hui c’est décevant de constater l’abime d’égoisme et de savoir. Le cerveau diminue en Europe. Les génies ont de gros cerveaux alors que rien de celui d’einstein ne le distingue de bien d’autres.
Ce monsieur ne me convainc pas, il me désespère
Baran
Superbe trouvaille cet article! Merci