Profitons de ces temps de fête où l’audience est confidentielle pour avoir des colloques relevant de l’intimité, la famille élargie à quelques acquets…
Quelqu’un pourrait-il m’expliquer ce qui se passe exactement avec Le temps des cerises ? La maison d’édition dont je m’honore d’avoir été auteur.
Je fuis avec une telle constance toutes les crises internes et périphériques au sein de ce malheureux parti que quand j’ai vu se dessiner une union sacrée qui partait du PRCF, des contestataires de la CGT jusqu’aux refondateurs, je n’ai eu aucun envie de venir renforcer ce front hétéroclite. Je suis toujours dans le même état d’esprit. Le paradoxe étant que sur le plan individuel, j’éprouve de la sympathie et parfois de la camaraderie pour la plupart des individus signataires mais quand je les vois se regrouper alors qu’ils sont incapables de le faire pour trouver les conditions d’une lutte commune pour le socialisme et donc pour créer un PCF digne de ce nom, je me demande quel est le consensus et contre qui il est dirigé?
En ce qui concerne le temps des cerises et Francis Combes, c’est comme Delga, une maison d’édition qui représente le courage et sans laquelle beaucoup de choses auxquelles je tiens, en vrac le marxisme, Cuba, la mémoire du communisme, des textes rares et précieux auraient été complètement effacés, donc a priori je n’ai pas envie de les voir saborder. Mais je le répète comme j’ignorais et j’ignore toujours de quoi il est question (et je ne dois pas être la seule de mon espèce), je ne signe aucune pétition.
Mon intérêt pour l’existence d’une maison d’édition de ce type est pourtant fondamental. Comment vous le faire mesurer ? j’ai récemment publié un texte d’un marxiste chinois qui explorait les raisons de la contrerévolution qui avait (temporairement) gagné en URSS. J’ai publié beaucoup de textes de diverses provenances sur cette question. Je crois même que l’on peut expliquer toutes mes publications, tous mes choix, par cette volonté de me battre contre l’apparente défaite de 1991, pour en comprendre les ressorts d’un point de vue révolutionnaire. C’est sur cette base là que nous avons commencé notre collaboration avec Marianne. L’apport de Marianne a été cette “révélation”: non seulement les Russes et les peuples de l’URSS n’étaient pas restés passifs devant la remise en cause de la révolution socialiste, mais s’ils avaient paru pétrifiés c’était un KO debout dont ils sortaient à peine. Ils multipliaient les réflexions sur cet évènement non digéré.
Donc, non seulement Cuba refusait de plier, mais les peuples qui avaient vécu le socialisme en pensait autre chose que ce que l’on racontait ici, y compris au parti. C’est vrai qu’à travers cette rencontre d’abord de Cuba puis celle de Marianne, de ce retour en sa compagnie à l’est, je suis passée du temps des Cerises à Delga qui approfondissait le même sillon…
Par ailleurs, toujours grâce à Marianne, je découvrais que les communistes chinois avaient beaucoup travaillé cette question de l’effondrement. Lors de notre voyage en Crimée, nous avons appris que dans un immeuble de 27 étages à Pékin, un grand nombre de Chinois se consacraient à l’étude de “l’échec”… peu à peu ont filtré certaines des publications. Ce Chinois marxiste, récemment publié, était un des chercheurs et dans cette contrerévolution, le fait était patent, il voyait, entre autres, la victoire intellectuelle du nihilisme occidental, passé de la contestation du capitalisme à la contrerévolution contre le socialisme. Et il dénonçait l’attitude de l’appareil du pouvoir qui avait surgi depuis le stalinisme et avait trouvé son épanouissement sous Khrouchtchev et les successeurs. A l’inverse de Lénine, qui malgré de terribles circonstances, menait toujours le combat théorique et politique avec ses adversaires, il y avait eu “l’efficacité stalinienne”, un incroyable démiurge, menant génialement la modernité, écrasant le nazisme, mais aussi le revers, pas le temps de bavarder. C’était à la fois vrai et faux, Staline ne cesse d’expliquer, d’analyser mais comme le disait Lukacs, avec une tendance au dogme, mais tout est expliqué , commenté. Il m’est arrivé sous la censure actuelle du PCF d’affirmer qu’un procès stalinien serait un degré supplémentaire de liberté par rapport à ce qui était à l’oeuvre dans le parti, en 2020, dans l’humanité, depuis Robert Hue…
Donc disons pour revenir à l’uRSS, qu’il y a un parti détruit par la grande guerre… 40% des cadres communistes ont succombé parce qu’ils étaient en première ligne… Il y a la difficulté de réformer. Les défauts initiaux se sont aggravés ultérieurement avec la déstalinisation. Tant qu’il y a eu des conquêtes prolétariennes, tant que l’élan révolutionnaire a été là, cela a tenu, mais quand avec Khrouchtchev et jusqu’au désastre de Gorbatchev ce sont des couches moyennes, des bureaucrates qui se sont emparés du parti confondu avec l’état, la censure, l’art de faire taire en ignorant, en faisant comme si cela n’existait pas a remplacé pour une part le goulag, mais a livré l’URSS à ses ennemis.
Ce que je pense c’est que les partis nés de l’eurocommunisme ont suivi la même trajectoire que je décris dans mes mémoires. Ils combinent la liquidation, l’abandon, voire les illusions khroutchévienne, le ya qua, avec la censure suppléant à l’affrontement des idées.
Tout cela pour dire à quel point je suis ennemie de toute censure, des pratiques consistant à étouffer les voix qui dérangent, non seulement parce que j’en ai été la constante victime mais parce que c’est le cercueil du communisme tel que je l’entends. Depuis plus de vingt ans je tente de comprendre, et pas seulement ce qui va dans mon sens. Je me bats contre ce que l’on me raconte, et donc j’ai vu à Cuba jusqu’où pouvait aller le mensonge, et avoir rencontré des maisons d’édition d’abord comme le temps des cerises, puis Delga fut une aide inestimable dans le désert communiste.
C’est d’ailleurs cause de cette exigence de parole, que j’ai quitté ce parti tant le compromis y restait fort autour de la censure dans l’Humanité, dans la presse communiste et le consensus délétère de l’eurocommunisme s’y poursuivait, c’était de l’impatience, mais je n’avais plus le temps, ni la force, je reprenais ma liberté de parole et de pensée.
Je dois dire que parmi les vertueux protestataires contre ce qui était infligé au temps des cerises j’ai vu avec plaisir s’élever Claude Mazauric, j’ai beaucoup d’estime pour lui, pour sa roborative intelligence, sa culture, son art de la polémique mais je suis contente de savoir qu’à toutes ces vertus il ajoute un haine de la censure qui nous rapproche un peu plus parce que jusqu’ici il s’est fort bien accommodé de celle dont ses amis me frappaient depuis plus de vingt ans, à l’inverse de Roland leroy et de jean Pierre Kahane, il n’est pas intervenu pour faire cesse le caprice despotique de son ami le Hyarec me concernant . Comme quoi on peut penser que chacun est susceptible d’évoluer si le fond est bon… Je vous ferai grâce de tous ceux dont j’ai eu la joie de découvrir qu’enfin ils étaient ennemis de toute censure, rien ne me laissait présager tant de bonheur vingt après…
Pourtant, je demeure très consciente du fait que rien n’est plus difficile que de trouver les conditions réelles d’un débat qui ne soit pas verbiage inutile, appropriation “nihiliste” de la fausse démocratie, celle qui ne mène que sur la dissolution des forces. Donc je respecte ce qui va dans le bon sens. Je suis convaincue que nous sommes dans une situation de transition et que ce qui aidera le plus la transformation nécessaire est la volonté de faire face à l’autre transition, celle de la réalité, de la fin du capitalisme ou celle de l’humanité. Il faut aider d’abord même en mettant à jour.
C’est pourquoi je me méfie des protestations de ceux qui se regroupent dans des coalitions hasardeuses contre tel ou tel, tirant sur tout ce qui bouge encore et se faisant les alliés momentanés de ceux qui ne veulent que liquider. Alors oui il faut que Le temps des cerises se développe, que ce qu’il a porté et peut porter encore existe mais il faut qu’on arrête d’envoyer des insultes, des procès a priori, et que l’on puisse en paix contribuer à un véritable dialogue qui ne braderait pas le peu qu’il nous reste.
Cela suppose que toutes ces participations, ces propriétés dont on ne sait à qui elles appartiennent en matière de locaux, de titres de presse, d’édition ou autres relèvent d’un véritable état des lieux dont les militants doivent avoir connaissance et pas seulement dans les appels à renflouement… Que l’on sache qui finance quoi et qui… Les ventes du patrimoine considérable, les transactions type pif le chien, doivent ne plus être des pratiques de couloir entre quelques individus devenus les copropriétaires, ce qui évitera les procès d’intention et permettra au militant communiste d’être responsable. Les rumeurs seront évitées, les indignations orientées également.
Je suis peut-être en effet très naïve mais je considère que quelles que soient la multiplication des pratiques de sommet, voire de couloir, le PCF a de beaux restes et c’est encore un lieu dans lequel demeurent des potentialités pour un combat pour le pluralisme intellectuel, pour la culture… Il faut partir de là… C’est ce que j’ai tenté de faire dans mes mémoires qui ont été censurées, ceux qui les ont lues savent qu’il n’y a aucun règlement de compte mais des choix politiques. Encore un thème pour le Congrès, pas de règlement de compte mais la nécessité de changer en profondeur, s’ouvrir au nouveau en s’appuyant sur ce que la tradition communiste avait de meilleur, l’éducation, la formation mais aussi la transparence dans laquelle chaque militant pouvait opérer des choix.
Donc il faut comprendre pour agir et je sens bien que je n’ai pas les éléments de ce choix. Comme j’ai beaucoup à faire, j’ai tendance à négliger ce sur quoi je ne sens pas mon action d’un apport quelconque, résultat j’ignore la quasi totalité des Faits concernant ce sujet qui pourtant me tient à coeur.
Mais comme je vois se succéder des proclamations déplorant les effets désastreux de je ne sais toujours pas quoi, j’aimerais bien savoir de quoi il est question. Si l’explication pouvait se limiter aux FAITS cela m’arrangerait. Merci.
Danielle Bleitrach
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Danielle Bleitrach
voici le texte que je reçois en réponse … et qui me satisfait puisqu’ils ont l’air contents, l’essentiel est la survie du temps des cerises, mais inutile de dire que sur le fond ce message crypté avec des sous entendus, non élucidés et dans lequel on ne comprend toujours pas comment et pourquoi depuis plusieurs jours le PCF est mêlé à cette histoire le pourquoi de cette fièvre de pétition n’est pas dans les moeurs du PCF tel que j’ai l’ai connu…je vous recommande en particulier quand on en arrive aux questions financières, le paragraphe suivant: “Conforter la défense de la pluralité de l’édition et notre conception du rôle de la lecture et de son contenu exige d’affronter pleinement ces défis. C’est le sens que nous donnons à notre volonté de consolider notre indépendance. A contrario de certains qui appellent à des interventions, voire des immixtions de l’un ou de l’autre parti, jusqu’à même aller brandir les statuts d’un parti politique touchant à la procédure d’exclusion !” je réitère donc ma proposition , celle de savoir enfin qui possède quoi et en quoi c’est utile pour nos combats?
LETTRE OUVERTE
SÉRÉNITÉ ET DÉTERMINATION
Dans un contexte médiatique et émotionnel marqué d’une certaine fébrilité et d’allégations, certaines erronées et d’autres fortement tendancieuses, l’assemblée générale des associés, dont certains fondateurs, de notre maison d’édition Le Temps des Cerises Éditeurs s’est tenue mardi 15 décembre dernier dans les conditions légales et sanitaires satisfaisantes. Après avoir débattu sereinement et franchement, la nécessité de dépasser une polémique stérile et une médiatisation inopportune s’est imposée pour poursuivre notre travail sur le devenir du Temps des Cerises. Les associés ont formulé d’importantes suggestions éditoriales et organisationnelles pour l’avenir, s’appuyant sur le rapport d’activité présenté et confirmé par le cabinet d’expertise qui suit la situation financière du Temps des Cerises.
L’une a concerné le besoin de répondre aux interrogations qui ont pu légitimement occuper les esprits depuis quelques jours du fait d’un emballement médiatique organisé dont chacun a pu avoir connaissance, dépassant trop souvent la situation réelle du Temps des Cerises elle-même, voire s’inscrivant dans des dimensions politiciennes étrangères à la vie de la maison d’édition.
L’assemblée a clairement et unanimement réaffirmé la philosophie et la ligne éditoriale de notre maison d’édition. Et pour mettre définitivement fin aux doutes et apaiser les débats, elle a confirmé la nécessité de poursuivre le travail éditorial engagé jusqu’à aujourd’hui par Francis Combes, directeur littéraire, et de continuer à le faire avec lui. Ce qui a toujours été notre objectif et notre volonté collective.
La maison est reconnue par sa production poétique, romanesque, d’essais et de textes théoriques marxistes. C’est son identité, elle ne doit y renoncer sous aucun prétexte au risque même de sombrer. Elle tient sa force de ses auteur-e-s, de leurs diversités. Ce serait folie que d’y renoncer. Tous ses fidèles auteur-e-s et futurs auteur-e-s pourront sans exclusive continuer d’y publier s’ils le souhaitent. Parce qu’il n’a jamais été question d’autre chose.
Le second type de suggestions fait suite à la situation financière de la maison dont le rapport financier présenté en séance a pu mettre au jour une réalité difficile, commune à bien des maisons d’édition de notre dimension. Cette réalité est, hélas, indiscutable et incontournable.
Les difficultés financières du Temps des Cerises Éditeurs sont une récurrence de son histoire. C’est un fait connu de tous, même si dans la dernière période un début de redressement a été réalisé grâce à une gestion rigoureuse. Or ce qui, hier, se résolvait par une solidarité et un soutien réguliers de nos ami-e-s et lecteurs-trices, toujours au rendez-vous et que nous remercions une nouvelle fois, doit désormais s’inscrire dans une structuration financière plus solide permettant à notre maison d’édition d’atteindre son autonomie de gestion et de se développer à partir de ses ressources propres.
… / …
Car les faits sont là. Non seulement le plafonnement des ventes pèse sur les comptes de la maison et sa capacité à se développer, mais la crise sanitaire et les mesures du gouvernement, comme la crise économique et sociale, ajoutent durablement à ces difficultés. Et nul doute que les manœuvres en cours de domination des grands groupes dans le milieu de l’édition, de la diffusion et de la librairie vont transformer en profondeur le secteur et la place des petits établissements tels que le Temps des Cerises.
Si ces évolutions confirment l’importance cruciale d’une maison d’édition comme la nôtre pour résister, c’est peu dire qu’elles la confrontent aussi à des défis importants, qui deviendront des contraintes insurmontables jusqu’à mettre potentiellement en danger son avenir, si son modèle économique n’est pas significativement transformé. Conforter la défense de la pluralité de l’édition et notre conception du rôle de la lecture et de son contenu exige d’affronter pleinement ces défis. C’est le sens que nous donnons à notre volonté de consolider notre indépendance. A contrario de certains qui appellent à des interventions, voire des immixtions de l’un ou de l’autre parti, jusqu’à même aller brandir les statuts d’un parti politique touchant à la procédure d’exclusion !
C’est donc avec le souci de pouvoir assurer une réelle autonomie de gestion de la maison d’édition, que l’assemblée des associés a décidé à l’unanimité moins une voix, la constitution d’un comité de direction ayant pour mission d’étudier toutes les propositions permettant d’assurer une consolidation financière de la maison et son développement, dans le strict respect de sa philosophie originelle. Constitué de Francis Combes, directeur littéraire, de Frédéric Rauch, directeur général et dont l’intégration dans l’équipe de direction a été actée par l’assemblée, et de moi-même, gérante, ce comité de direction a été chargé de rassembler et de réfléchir aux suggestions émises et de présenter fin janvier début février 2021, lors de la prochaine assemblée générale, l’ensemble des pistes de travail envisageables à cette fin.
Enfin, comme chacun a pu le mesurer, cette assemblée a eu lieu dans un contexte médiatique et relationnel difficile. Sur la base d’hypothèses fantasmées et de jugements infondés, des propos très violents ont été tenus publiquement dans plusieurs médias nationaux et sur les réseaux sociaux à l’encontre de membres de la direction de la maison et d’associés. Des propos blessants pour nombre de militants de la cause du Temps des Cerises qui s’engagent quotidiennement dans le travail concret de valorisation de la maison. Et qui auraient pu être évités si une volonté de dialogue avait prédominé. Ces propos laisseront sans doute quelques cicatrices. Mais en aucun cas, ces cicatrices ne devront altérer l’engagement de chacune et de chacun en faveur de notre maison et l’ambition portée à son développement. C’est le choix qu’a voulu faire l’assemblée des associés. Il y a une réelle volonté de sortir de cette situation et de retrouver le chemin de la fraternité. De poursuivre le travail dans l’intérêt de la maison d’édition, dans l’intérêt de ses auteur-e-s et dans l’intérêt de ses lecteurs-trices. Nous savons compter sur la responsabilité de chacune et chacun pour cela. L’enjeu a trop d’importance.
Montreuil, le 19 décembre 2020
Anita Binacchi
Gérante
Bernard Trannoy
A noter la lettre de Marc Lacroix-Riz entre autres.
Danielle Trannoy et Marie-Christine connaissent bien le dossier, voir avec elles
La lettre d’Anita résume bien, rien à redire à son esprit de responsabilité
ANC Lannion
Il y aune lettre de réponse de Francis Combes. Je vais la rechercher et la mettre en ligne.
ANC Lannion
La voici.
Une lettre de Francis Combes aux lecteurs du Temps des Cerises
Chères amies, chers amis,
Avant toute chose, je souhaite vous adresser mes vœux pour l’année qui commence. Quelle soit meilleure, pour nous tous, que l’année qui vient de s’achever.
Vous avez été nombreux, à recevoir, à la veille du Nouvel An, une lettre signée Anita Binacchi et envoyée d’une adresse du syndicat CGT-FNAF (Agro-alimentaire) ; ce qui a dû en surprendre plus d’un. Disons-le simplement, cette lettre est une tentative d’enfumage sur le mode « tout va très bien madame la marquise »… mais elle a bien peu à voir avec la réalité.
En fait, ce syndicat, FNAF-CGT, représenté par son ancien secrétaire général, Freddy Huck, était entré dans le capital de notre maison d’édition, il y a quelques années, pour nous apporter son soutien. Et pendant une dizaine d’années, il l’a fait en respectant l’indépendance de la maison d’édition que j’ai créée, il y a vingt-sept ans, avec un collectif de 32 écrivains (dont Jorge Amado, Eugène Guillevic, Gilles Perrault, Patrick Besson, Pierre Gamarra, Roger Bordier, Jacques Gaucheron, Catherine Claude, Patricia Latour…)
L’originalité du Temps des Cerises tient à sa politique éditoriale, à son attachement aux idéaux de la Commune, à sa passion pour la poésie et la littérature, à son engagement aux côtés des luttes sociales et de solidarité internationale. Nous avons toujours « affiché la couleur » mais nous nous sommes toujours montrés ouverts, comme le disait notre Manifeste initial, « accueillants à tous ceux qui, dans leur diversité, considèrent que le capitalisme n’est pas le fin mot de l’histoire de l’humanité. Ou alors ce serait le mot de sa fin ». L’autre singularité du Temps des Cerises dans le paysage éditorial français est que les auteurs en ont été les fondateurs et les animateurs. Ils constituaient à la fois l’Assemblée des associés et le Conseil éditorial, chacun comptant pour un quel que soit le nombre de ses parts.
Les choses ont commencé à changer il y a deux ans… quand j’ai annoncé mon intention de passer la main. Après le départ de sa directrice, Juliette, j’avais accepté de reprendre le collier avec l’objectif non seulement d’assurer la continuité du travail éditorial mais aussi de remettre sur pied une équipe capable d’assurer la relève. Ce que j’ai fait. Il y a aujourd’hui autour du Temps des Cerises un collectif de jeunes, garçons et filles, à la fois littéraires et militants, qui ont déjà pour certains une expérience de plusieurs années dans le métier des livres. J’avais annoncé d’emblée mon intention de leur passer la main (tout en restant un temps pour les aider) car je ne me crois pas indispensable et suis dans une logique de transmission. Prétendre qu’ils seraient trop jeunes est triste et idiot (j’avais pour ma part 28 ans quand j’ai débuté dans ce métier). Mais la FNAF-CGT, devenue l’associé principal, s’y est opposée. Arguant du soutien qu’ils nous ont apporté, ils prétendent aujourd’hui contrôler et diriger la maison d’édition. Ils confondent solidarité et prise du pouvoir. Ils ont donc, à mon insu, pendant plusieurs mois, recherché un candidat pour prendre ma place. Comme ils sont totalement incompétents en matière d’édition, le choix qu’ils ont fait est désastreux. Ils ont été solliciter un permanent du PCF, rédacteur en chef de la revue Économie et politique, Frédéric Rauch, qui, à 55 ans, n’a aucune expérience de l’édition, a fortiori de l’édition littéraire et poétique. De plus, il est élu à Agen, secrétaire départemental du PCF dans le Lot-et-Garonne et il vient d’accepter un autre emploi à la communauté urbaine de Bordeaux.
Ainsi, il prétend diriger le Temps des Cerises à mi-temps !… pour un salaire deux fois supérieur à celui que percevait l’ancienne directrice, pour un plus que plein temps. Ce qui est une curieuse façon de vouloir « redresser », comme cela a été prétendu, la maison d’édition.
Ses premières déclarations d’intention augurent d’un vague projet éditorial qui n’a rien à voir avec le Temps des Cerises. On peut craindre qu’il s’agisse d’éditer des publications inspirées par les idées d’un petit groupe qui tourne autour de la commission économique du PCF et de quelques syndicalistes au service d’un douteux projet politique. Or le Temps des Cerises n’a jamais été une maison d’édition du PCF. A fortiori pas d’un groupe sectaire. Si ce projet se met en œuvre, il signera la fin du Temps des Cerises tel que nous l’avons conçu, animé, défendu et aimé avec vous, voire sa disparition pure et simple.
La lettre de la gérante (placée là par le syndicat CGT-FNAF) présente les choses de façon plus qu’inexacte. D’abord, contrairement à ce quelle affirme, l’AG du 15 décembre n’a jamais eu à connaître de cette lettre qu’elle envoie aujourd’hui et qui a dû être rédigée après coup, en petit comité. D’autre part, cette AG s’est tenue dans des conditions qui l’invalident. La gérante a en effet « oublié » de convoquer 10 associés sur 33 ! Dont plusieurs des fondateurs de la maison d’édition. Ne connaît-elle pas la liste des associés (drôle de gérante !) ou est-ce volontaire ? Dans ces circonstances, une minorité d’associés (5 sur 33) mais majoritaire en termes de parts du capital, a pu prendre les décisions qu’elle voulait. Cela a été fait au mépris de l’avis du Conseil éditorial et des auteurs qui se sont exprimés par l’Appel ci-joint, lequel a été soutenu par 600 personnes (auteurs, lecteurs, amis de la maison d’édition). Au passage, on peut s’étonner que des gens qui se veulent militants syndicaux ou politiques s’appuient ainsi sur le « droit des actionnaires » contre le droit des auteurs, des producteurs, des animateurs de la maison d‘édition et se comportent dans la maison d’édition comme les patrons qu’ils sont censés combattre par ailleurs.
Votre attachement à la maison d’édition, que vous soyez auteurs, lecteurs, libraires ou bibliothécaires, n’est pas dû à un attachement à tel ou tel, mais à un intérêt pour le travail éditorial que nous menons depuis des années et que vous jugez sans doute nécessaire et de qualité. Ce coup de force se fait contre vous.
Tous les acteurs de cette affaire étant membres du PCF, la direction de ce parti a été amenée à prendre une position publique sans ambiguïté (et dont je vous adresse copie). Mais les acteurs du coup de force semblent résolus à passer outre.
Aujourd’hui, ils me demandent de rester avec le titre « honorifique » de « directeur littéraire ». D’après eux, je pourrais continuer de siéger au Comité éditorial (dont ils ont modifié la composition en excluant les directeurs de collection et les écrivains). J’aurais le droit d’y rester, assis sagement sur un petit tabouret… Surtout, ils me demandent de continuer à travailler bénévolement. Car il faut bien que quelqu’un soit là pour « faire les livres »… Ce que j’ai fait ces deux dernières années ; mais parce que je voulais préparer l’avenir. Dans les conditions nouvelles où on m’impose ce directeur que je récuse et où on dénature la maison d’édition, je n’ai aucune raison de continuer. Je n’ai pas vocation à jouer les larbins ni les faire-valoir. Je n’ai donc d’autre choix que de quitter cette maison d’édition que j’ai créée et animée.
Mais j’entends bien aider, dans la mesure de mes possibilités, à ce que le Temps des Cerises et son esprit d’indépendance et de liberté renaissent et continuent, autrement, sous une autre forme.
Et je formule des vœux pour que cela se fasse au plus tôt, avec un soutien actif de beaucoup d’entre vous. Amicalement,
Francis Combes
Fondateur du Temps des Cerises