Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Pourquoi les communistes français ont-ils peur du socialisme ?

J’ai quitté définitivement le PCF le 22 avril 2020 quand l’Humanité et la direction du PCF ont censuré l’anniversaire des 150 ans de Lénine. Là, le ridicule le disputait à l’odieux: que l’on me censure depuis plus de vingt ans sans me dire pourquoi passe encore… mais Lénine! Depuis je suis “sympathisante” et cela me permet de contempler avec philosophie ce qui en d’autres temps me faisait exploser de colère. Il est un âge où il faut prendre de la distance et s’impliquer seulement dans ce sur quoi vous pouvez avoir de l’influence. Pourtant l’interrogation de J.Cl. Delaunay résonne comme une énigme : “Pourquoi ne veulent-ils pas parler du socialisme?”

On pourrait croire que c’est à cause des campagnes, de plus en plus délirantes, de nos médias aux ordres que nous n’osons pas affronter le problème: toutes en effet visent à faire passer Hitler et le nazisme pour une aimable bluette à côté de Staline-Lénine-Mao-Fidel-Marx et le communisme… Mais alors pourquoi avoir tenu à conserver le titre de communistes?

A cela je répondrai que le refus est venu de la base, malgré toutes les tentatives des directions successives pour débaptiser le PCF. Dans le même temps, la rupture avec tout ce qui fondait l’originalité du PCF a été largement consommée par ces mêmes directions. L’argument de la “liquidation” a été une auto-culpabilisation, une invite à abandonner nos fondamentaux, notre histoire, pour être “moderne”, acceptés… De faire oublier nos supposés “crimes”… Cette conviction insufflée pendant plus de vingt ans n’est pas étrangère à tout ce que l’ensemble de la société française a subi en matière d’abandon de ses valeurs progressistes, Robespierre n’a plus été comparé à Danton mais à Marie-Antoinette. La mise à l’écart de toutes les couches populaires, leur déqualification est allée de pair avec la mise en pièce de l’école et plus généralement une absence de projet culturel. Pas un jour sans que de tous côtés nous subissions cette pression médiatique et… ses délires.

Hier sur Arte, 28 minutes, courte réflexion sur la relation entre la Chine et les USA. Jean Quatremer déclare que la Chine commet des horreurs, les Ouïghours sont castrés par exemple, pas le moindre doute sur ce fake produit par le gang des milliardaires avec à leur tête Guo Weiming pourtant exposé dans un autre sujet sur Arte. L’assistance s’effraie quand le dit Jean Quatremer explique que ces horreurs sont faites sur le territoire chinois alors que celles des États-Unis se font sur toute la planète. Comment ose-t-il? Mais le dit Jean Quatremer expose peu à peu l’amplitude de son projet démocratique: Bolsanoro a raison, il vaut mieux laisser crever les vieux que détruire l’économie. Comme il provoque quelques protestations là-dessus et sur la défense du machisme, de la brutalité de Dupont Moretti de la part d’une féministe, qui l’accuse d’eugénisme à propos de son choix de Bolsonaro, l’autre maintient et oppose un chiffre : savez-vous combien il y a eu de morts de moins de 84 ans en France, 220 seulement et il chute sur la nécessité d’une réforme des retraites puisque les vieux que l’on a sauvé doivent payer. Les droits de l’homme portés par les défenseurs de l’occident contre le communisme en sont là…

Tout cela pour faire oublier le fait que ce sont les pays communistes qui ont les meilleurs résultats dans la lutte contre l’épidémie et cela sans sacrifier “les vieux” et organiser un conflit de génération pour imposer la politique de destruction du service public de santé. Nier les faits et justifier l’injustifiable voilà où ils en sont. Et nous ?

Leurs “intellectuels” sont contraints dans cette logique à un élitisme de conformisme, d’académisme et de vulgarité dont la nomination de Roselyne Bachelot est une illustration. La culture a perdu son élan réel pour devenir l’instrument d’une “distinction”. La “gourmandise”, l’ego du ministre se substituant à tout projet.

Nous nous sommes coupés de ce qui fait la création: observer la rue, dans la rue, le peuple, ce qui se transforme et le travailler pour le porter jusqu’à la civilisation, c’est ça une avant-garde… Dans l’académisme, le conformisme on pétrifie, et au meilleur des cas on va au peuple pour le catéchiser. Il y a là un provincialisme, un mépris plein de gaudriole qui peut très vite se transformer en légitimation de l’Oppression. Le contraire de ce que le PCF avec Aragon avait porté, là aussi il y a eu un dévoiement: les droits reconnus à la science, à la culture se sont transformés en une acceptation de tout ce que les notables nous décrivaient comme le meilleur jusqu’à la pitrerie du marché. La seule audace étant dans les mœurs au lieu d’en faire la voie à l’émancipation humaine. Dans ce domaine comme dans d’autres, la disparition d’une avant-garde n’a rien apporté au peuple et tout au capital.

En ce moment, nous parlons beaucoup avec Marianne, du fait que nous avons parfois beaucoup de mal à avoir un langage commun non seulement avec les Français mais avec les communistes français. Cela est dû au hasard de notre histoire, la manière dont nous avons pu nous confronter à d’autres peuples, à vivre à leurs côtés et pas seulement par le biais des médias ou du tourisme.

Il y a incontestablement chez les Français une incapacité à prendre conscience de la situation et du mouvement du monde, un côté donneur de leçon alors que l’on est gorgé d’une propagande de bas niveau. Cela se double d’un art de faire la politique de l’autruche comme s’il pouvait y avoir une alternative politique sans remise en cause du mode de production capitaliste. Ce qui se traduit chez les communistes par un “entre-soi” politique sur la question des alliances politiciennes, les uns s’effaçant dans un Front de gauche, les autres prônant la nécessité d’un parti communiste retrouvant ses couleurs au sein de la gauche plurielle. Mais les deux ont beaucoup de mal à poser la question de l’UE et de fait celle du socialisme. Beaucoup de mal également à dépasser l’expression politicienne pour comprendre le monde concret des antagonismes de classe qui justement ne trouvent plus l’expression politique adéquate. Le cas caricatural étant bien sûr la préoccupation environnementale, de santé, et la prétention des écolos politiciens de récupérer la mise.

Peut-être faut-il admettre que c’est l’ensemble de la société qui ne cadre plus avec sa représentation. Mais peut-être faudrait-il admettre que si on reste dans l’entre-soi des alliances une nécessité aussi incontournable qu’un candidat communiste à la présidentielle pour mobiliser les couches populaires est incompréhensible sans la perspective du socialisme.

Pourquoi les communistes, qui bénéficient d’une analyse marxiste et qui se sont créés pour la transformation de cette société capitaliste vers le socialisme, la paix, la justice sociale, ont-ils tant de difficultés? Pourquoi semblent-ils être passés de l’avant-garde à la remorque, alors qu’ils demeurent pour l’essentiel ce qui se fait de plus dévoué, de plus désintéressé dans cette société au point même parfois d’être passés d’une exigence politique à une exigence morale, moralisatrice même ?

C’est peut-être lié au fait que nous, Français, avons représenté la forme la plus révolutionnaire de la domination bourgeoise, et notre nec plus ultra a tendance à devenir le parlementarisme parfois comme chacun sait non dénué de “crétinisme”… Mais cette incapacité française à trouver une issue est dû incontestablement au mode parasitaire de notre propre capital, colonialiste et désormais financiarisé et militarisé… Là encore contradiction de la manière dont ce capital se heurte à un modèle de service public de longue tradition et créé dans sa forme la plus achevée par l’influence communiste à la Libération. Même dévoiement de la “commune”, puis du communisme municipal en privilège “notabilaire”de l’élu qui veut choisir son successeur et imposer sa politique de compromis qui lui attire la sympathie de ses pairs… Savoir se conduire dans les institutions telles qu’elles sont ce qui provoque le gauchisme… Résultat, défendre ce qui a été pied à pied parait suffisant alors qu’il faut combattre pour une nouvelle étape. Cela aussi commence à se faire jour mais c’est difficile. En gros, c’est de nos victoires liées à l’intervention populaire que nous tirons pour une part nos stagnations.

On retrouve alors en matière d’issue politique le même obstacle auquel sont confrontés les progressistes américains: l’absence d’alternative et le dévoiement ou l’abstention des couches populaires, des îlots de résistance devenus occasion de division. Il en sera ainsi si nous ne dépassons pas par une projet socialiste, ces antagonismes de surface qui se figent entre communautarisme et modèle républicain.

Si l’on considère que l’issue politique relève d’un problème interne, ce qui n’est pas faux, la meilleure des attitudes, consiste à recréer le lien avec les couches populaires. Elle peut et doit favoriser une prise de conscience plus générale. Mais si on cherche “la modernité” dans ce qui constitue le problème, la politique du chien crevé au fil de l’eau, là on n’a aucune chance d’aboutir à la moindre transformation.

De surcroît, même l’attitude la plus consciente, la première celle de s’ancrer sur les couches populaires, ne nous mène pas très loin si nous l’isolons du mouvement du monde qui est celui de la chute du capitalisme et de la défense folle d’un système qui fait eau de toute part.

En contemplant donc ce problème qui est celui du parti théoriquement fondé pour défendre le communisme et sa perspective politique le socialisme, qui n’ose rien aborder ni l’UE, ni les relations internationales, ni le socialisme, on peut s’interroger sur les raisons d’une telle attitude.

Ce qui est frappant également c’est un réveil de la jeunesse qui veut que l’on pose de telles questions. De plus en plus souvent de jeunes communistes viennent me voir à cause du blog. Ils ont des parcours divers, cela va du jeune énarque au menuisier en passant par l’étudiant mais tous ont des origines prolétariennes, issus de héros de la résistance et ayant fait le tour de la planète, non en touristes mais en ayant vécu dans des mondes différents, ceux du sous-développement ou la Chine, la Russie.

Ils veulent s’engager et ne sont pas des gauchistes, des têtes brûlées, ils ont beaucoup plus que moi la patience du dialogue mais ils souhaitent aussi autre chose, un lieu où ils se retrouveraient pour être “utiles”, réellement utiles loin des gauchismes et des conformismes, où il serait possible de reconstruire le PCF sans dérive groupusculaire.

Je me dis que si je n’avais pas connu Cuba, vécu l’expérience de la période spéciale aux côtés des Cubains, je ne serais pas aussi apte à comprendre ce que ces jeunes cherchent. Je les remercie simplement parce que leur existence, leurs manières d’être, leurs exigences politiques me prouvent à quel point ils font partie des conditions objectives du socialisme dans notre pays. Ils sont la preuve que quelque chose est à discuter, à mettre en œuvre, une confrontation des expériences. Cela avance mais c’est simplement une lueur si souvent ignorée au profit de débats stériles sur des questions secondaires, des concurrences internes. C’est épuisant et j’ai bien fait de refuser à mon âge de continuer à me débattre dans ce que j’estime des sottises par rapport à l’urgence, mais au moins dans cet espace-là je fais ce que je peux.

Danielle Bleitrach

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7 Commentaires

  • RIANI
    RIANI

    Comme très souvent, je me trouve en plein accord avec cette analyse. Heureusement que tu as ajouté le paragraphe relatif à la mobilisation de la jeunesse parce que j’avais l’impression sinistre d’avoir connu un monde perdu. Pourrais-tu, s’il te plaît, à l’occasion, développer ta position à l’égard de l’UE. C’est une question fondamentale pour moi. Merci pour tous ces éclairages si utiles.

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  • gBertolina
    gBertolina

    Bonjour Danielle,

    Je partage en grande partie votre analyse sur le parti, sur son renoncement au fait d’évoquer le socialisme et sur la nécessité de reconstruire un parti de classe qui parle aux milieux défavorisés et plus globalement à la classe populaire. Le parti est devenu un parti d’intellectuels, et seulement d’intellectuels malheureusement. Nous nous sommes peu à peu rapprochés de la social-democratie aux yeux des gens et pmnotzmment suite à nos diverses alliances (malgré un programme que je juge en partie révolutionnaire (évidemment nous pouvons aller bien plus loin)).

    Pour élargir le propos, notre mutation ne permet plus aux rassemblements de gauche de parler aux classes populaires et cela se coordonne avec l’épuisement des forces communistes (en témoigne les résultats municipaux dans ma ville de Manosque où les classes populaires ce sont soit abstenues, soit ont voté à droite, ce qui nous a empêché de l’emporter…). À côté de partis à tendance bourgeoise ou social-démocrate comme le PS ou EELV par exemple nous nous perdons si nous nous contentons de les singer. Nous devons retrouver notre rôle singulier et moteur de la gauche pour mobiliser les classes populaires, sans cela le Capital a le champ libre et la gauche française continuera de se perdre.

    En cela j’aimerai que le parti soit plus concret lorsque il parle de l’UE, qu’il ose avancer des positions claires et tranchées, qu’il ne se contente pas de répéter la doxa “conventionnel”. À ce propos de je serais curieux de connaître un peu plus en détail votre point de vue sur le positionnement que devrait adopter le parti. Je pense que là-dessus se joue une partie du vote des classes populaires, même si au-delà nous manquons également de présence dans les quartiers, dans les entreprises et que les “écoles” du parti disfonctionnent également. Nous voyons par exemple de moins en moins d’ouvrier ou d’employé avoir des responsabilités ou faire partie des cadres du PCF.

    Merci en tout cas pour vos analyses, je lis votre blog et votre livre avec intérêt.

    Guillaume

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  • Reitnomud
    Reitnomud

    Lâcheuse..!
    Bien fraternellement
    Un sublime…

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  • Jean Claude DELAUNAY
    Jean Claude DELAUNAY

    Ce débat est très utile. Il faut le poursuivre. Je souhaite dans mon commentaire du moment : 1) Donner une explication de la raison pour laquelle le parlementarisme est devenu, comme le dit Danièle Bleitrach, le nec plus ultra de nos propositions politiques; 2) insister sur un élément qui, à mon avis, est encore trop absent de notre discussion, à savoir :l’élément “nation”.
     
    1) Pourquoi les communistes français sont-ils prisonniers des formes et de l’esprit de la démocratie bourgeoise?

     

    La réponse à cette question doit être cherchée, à mon avis, dans un pays capitaliste développé comme le nôtre, dans l’évolution des structures de la population active. Je vais décrire cette évolution à très grands traits.

     

    Son point de départ est l’apparition claire, à la fin du 19ème siècle, du Capital financier, c’est-à-dire, au sein de la bourgeoisie, d’une fraction que l’on a appelé par la suite “la grande bourgeoisie”. Cette fraction dirigeante s’est efforcée de trouver des solutions, acceptables pour elle, aux contradictions du capitalisme industriel de l’époque.

     

    Celle solution fut d’abord le Capitalisme monopoliste d’Etat. Je simplifie considérablement et me contente de dire que cette invention structurelle a eu pour conséquence de créer, aux côtés de la classe ouvrière classique, de nouvelles catégories sociales de fonctionnaires et d’employés. Les grandes entreprises elles-mêmes ont évolué et ont créé de semblables catégories. Je crois que ces évolutions ont eu une conséquence très importantes au plan politique. Elles ont changé en profondeur la stratégie du PCF. Tout cela serait à vérifier, évidemment.

     

    La raison d’être de ce dernier était de révolutionner directement la société. Avec l’apparition de ces nouvelles catégories sociales, qui n’étaient pas des catégories ouvrières quoique sociologiquement proches du prolétariat, la stratégie du PCF est passée d’une stratégie de révolution directe à une stratégie d’alliance électorale pour cette révolution.

     

    Après 1945, le CME lui-même a évolué. Cette structure était totalement centrée sur la guerre. Elle a accordé une place aux besoins populaires collectifs, non pas pour la raison que la grande bourgeoisie avait bon coeur mais parce que le peuple français avait pris une part active à la libération de son pays. La stratégie d’alliance est devenue le moyen principal sinon unique grâce auquel le PCF a continué de penser la révolution de la société.

     

    Autour des années 1970, le Capitalisme monopoliste d’Etat est entré en crise et a été remplacé, sous la direction des grandes bourgeoisies du monde, par le Capitalisme monopoliste financier mondialisé. Ce nouveau système a engendré de nouvelles populations actives. Mais deux évolutions se sont produites. La CMFM a touché de plein fouet les populations engendrées par le Capitalisme monopoliste d’Etat (population étatique) ou qui existaient en son sein (population ouvrière déclassée par la migration des capitaux productifs). Les migrations des populations de pays sous-développés vers les anciennes métropoles se sont amplifiées.

     

    Il faudrait analyser de plus près comment ces chocs démographiques se sont entrecroisés. Ce qui paraît clair est que la stratégie d’alliance électorale poursuivie par le PCF non seulement n’a pas marché mais a placé le PCF sous la dépendance directe du PS, qui est devenu, à la fin du 20ème siècle, le maître-d’oeuvre principal de l’électoralisme dans lequel s’était depuis bien longtemps engagé le PCF.

     

    Ce qu’il y avait d’intention révolutionnaire dans la stratégie d’alliance du PCF inaugurée pendant les années 1930 a été complètement châtré par le PS au cours des années 1980 et suivantes. La stratégie d’alliance du PCF est devenue une coquille vide. Comment se fait-il que cette stratégie n’ait pas été abandonnée par les communistes?

     

    2) Le rôle de l’idéologie européenne incarnée dans l’UE et l’abandon corrélatif de toute référence à la nation

     

    Il me paraît clair, rétrospectivement, qu’à un moment donné il s’est produit, au niveau de la direction du PCF, un glissement en faveur de l’Union européenne. Il est sans doute apparu impossible de satisfaire simultanément l’alliance électorale (qui était désormais inscrite dans les gènes communistes) avec la population ouvrière, minoritaire, de plus en plus pénétrée par la nouvelle immigration et numériquement en déclin, et l’alliance électorale avec la population étatique, en voie de radicalisation, toujours en place et numériquement plus importante que celle des ouvriers.

     

    Il y avait sans doute la conscience que l’UE était aux mains du grand capital. Mais d’une part la sous-estimation de l’incidence directe de la monnaie unique sur l’économie française et le sort du prolétariat, et d’autre part la sur-estimation des possibiités révolutionnaires, ou plus simplement transformatrices, de l’Etat européen en Etat keynésien bis. Il faudrait analyser l’influence des idées social-démocrates sur la formation de cette idéologie européenne de substitution.

     

    La pregnance de cette idéologie, si mon analyse est exacte, a eu trois conséquences : 1) la classe ouvrière française a été sacrifiée. En effet, son sort ne dépendait pas uniquement de l’euro. Il dépendait du Capital financier dont l’horizon était beaucoup plus large que l’Europe. 2) Ce tropisme européen avait pour complément implicite, au plan national français, l’idée d’une stratégie d’alliance avec la population étatique, en voie de radicalisation, mais d’une part pénétrée par l’idéologie social-démocrate et ses pulsions sociétales, d’autre part mise en concurrence avec de nouvelles couches salariées directement impliquées dans la mondialisation capitaliste. 3) l’abandon de toute référence nationale au combat communiste.

     

    Je crois que nous sommes toujours et encore en train de patauger dans cette merde. Je crois devoir souligner au passage la responsabilité directe de certains instances du PCF dans cette situation. Je pense en particulier à la Section économique du PCF, ouvertement favorable à la construction européenne, même s’il s’agit d’une autre Europe, et par conséquent véhicule fervent des illusions à ce propos. Le socialisme n’est certainement pas évoqué par cette équipe. Ce à quoi fait référence Frédéric Boccara dans l’éditorial du dernier numéro d’Economie et Politique, est la refondation de la gauche.

     

    Le combat pour les stratégies électorales a progressivement transformé la pensée révolutionnaire communiste en une pensée arithmétique. On aditionne des morceaux et on se dit que si tout ce monde était uni, ça serait la victoire. Oui, et même cela peut se produire. Mais c’est une victoire arithmétique, fragile, et non une victoire de classe, infiniment plus solide.

    3) Conclusions personnelles

     

    Pour terminer, je vais chercher à résumer ma compréhension des choses, aussi modeste soit-elle. Je formule 7 conclusions.

     

    1) Le PCF doit faire retour à sa stratégie de transformation révolutionnaire initiale de sa fondation, car celle-ci s’est noyée et perdu dans la stratégie électorale.

     

    2) Cela n’empêche pas de tirer positivement leçon de cette stratégie d’alliance électorale. Elle a produit des effets importants. Mais comment éviter de subordonner la première à la seconde?

     

    3) Le socialisme, conçu comme la rupture avec le capitalisme et la construction progressive d’une société au service du peuple, doit être le véhicule politique de cette reconversion. Ce n’est pas l’arithmétique qui doit déterminer le rythme et l’intensité de l’action révolutionnaire. C’est cette action qui doit progresser à son rythme. L’arithmétique doit suivre même si elle est moins généreuse que dans le cas contraire. Cela dit, la générosité du cas contraire est une illusion surtout si le capital financier mondialisé est toujours en place.

     

    4) Le Capital financier se combat sur le plan national. L’Union européenne, est une machine au service du grand capital et des grandes bourgeoisie européennes. Elle n’a aucune compétence pour combattre ses créateurs.

     

    5) Un combat résolu, national, socialiste, au sens léniniste du terme, contre le Capital financier est le seul moyen de mobiliser et d’unifier la classe ouvrière française pour la construction d’une société nouvelle.

     

    6) Les classes étatiques, engendrées par le Capitalisme monopiste d’Etat et la socialisation qui en a accompagné le développement, classes qui sont aujourd’hui déclassées, vaporisées, humilées, ont évidemment leur place dans cette société nouvelle, au lieu qu’elles espérent encore en l’Europe.

     

    7) Le salariat engendré par la mondialiation capitaliste a aussi sa place dans cette évolution à la condition de bien voir que l’insertion de l’économie socialiste de la France dans l’éconoie mondiale ne poursuivra pas du tout les mêmes objectifs que le Capital financier mondialisé, ce qui n’est quand même pas très difficile à comprendre.

     

     

    Jean-Claude Delaunay

     

         

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  • MICHEL Michel
    MICHEL Michel

    Voici le dernier communiqué sur le site du PCF :Remaniement: pour le PCF, l’heure est à la résistance et à la conquête de nouveaux droits en faveur de la majorité de notre peuple. Elle est à l’augmentation des salaires, à commencer par ceux des femmes, « premières de corvée » ces derniers mois, à la sécurisation de l’emploi et de la formation tout au long de la vie, à la réduction de la durée du travail, au développement des services publics, notamment de la santé publique. Elle est à une autre utilisation de l’argent au service du bien commun. Elle est à la construction d’une alternative, qui mette à l’ordre du jour un nouveau modèle de développement plaçant l’humain et la planète au cœur de tous les choix, qui inaugure un nouvel âge de la démocratie dans notre pays. Cela illustre parfaitement ce qui est dit ici sur la peur des communistes de parler de la marche vers le socialisme. Notre direction continue dans le consensus mou de la sociale démocratie.
    Face à la grande colère des travailleurs c’est tout ce que la direction du parti trouve à proposer : la recopie des revendications syndicales plus une alternative “pour un nouveau modèle de développement” ….. “un nouvel âge de la démocratie dans notre pays”. L’abstention atteint des niveaux records parce que la classe ouvrière ne trouve nul part dans l’offre politique des propositions pour la neutralisation des nuisibles que sont les pilleurs, les prédateurs capitalistes. Impossible d’avancer dans ces conditions

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    • Danielle Bleitrach

      je crois que nous sommes dans les limites du 38 e congrès avec un secrétaire et un exécutif nouveau, mais un conseil nationale dont le président Pierre Laurent définit l’ordre du jour et bénéficie d’une troupe qui freine des quatre fers allié avec les refondateurs. Le prochain congrès devra éclairer les enjeux et se donner une véritable majorité. Pour le moment diviser entre les impatients et ceux qui sont prudents ne serait pas une bonne affaire… Je reconnais que c’est dur et qu’ils ne jouent pas le jeu de la démocratie, du travail ensemble… Si j’ai été obligée de quitter le parti c’est parce que j’étais confrontée jusqu’à l’insupportable à leur censure, défiance et autres manœuvres… Mais je crois que ceux qui sont plus jeunes, qui n’ont pas mon histoire doivent se battre. SI j’avais dix ans de moins j’aurais mené ce combat en rassemblant et en posant les enjeux (ce que je fais ici), mais là c’était le lion devenu vieux, prenant des coups de pied de l’âne… La dignité m’imposait le retrait mais ceux qui peuvent se battre doivent le faire parce que l’enjeu nous dépasse, c’est y compris le pays… et notre peuple… c’est ce que nous avons devant nous…

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      • MICHEL Michel
        MICHEL Michel

        Tout à fait d’accord avec toi Danielle. Je tiens compte dans les débats internes du niveau d’engagement des camarades autour de moi. Des progrès ont été accomplis depuis le congrès les débats de fond deviennent possibles et la fraternité se renforce. Toutefois, dans des débats comme celui ouvert ici il me paraît utile de se repositionner. J’apprécie beaucoup les débats de se blog. Ils m’aident à conserver l’envie pour contribuer à la préparation d’une relève car je ne suis pas loin de ton âge.

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