merci encore à Isabelle Kersimon d’éclairer à la source et avec une justesse et du sérieux dans l’analyse.Isabelle KersimonS’abonner1tSlp8 odnnhsuongred
En lisant la préface de Michel Onfray (que je republie ci-dessous), beaucoup d’internautes estiment qu’il n’y a là aucun antisémitisme, juste “une description”.
Pour rappel, décrire un fils de rabbin – Karl Marx – en tant que Juif et non pas en tant que penseur, et l’opposer à un fils d’ouvriers “enraciné” signifie que le rabbin, par contraste, et son fils, ne sont pas “enracinés” : ils sont donc “cosmopolites”.
Décrire un Juif comme cosmopolite versus les hommes enracinés, c’est une figure classique de l’antisémitisme.
Ensuite, dire que Marx est issu d’une lignée d’une profession intellectuelle (fils d’un avocat), versus Proudhon, issu “d’une lignée de laboureurs francs” ne fait qu’illustrer ce que je viens de vous expliquer : le “Gaulois” de la “terre et des morts” (Google est votre ami), versus le Juif qui est potentiellement antinational, donc un ennemi de l’intérieur.
Si vous considérez que ces éléments sont des “descriptions”, je vous invite à vous interroger sur ces autres formules de l’antisémitisme historique : “les Juifs possèdent le pouvoir (l’avocat) et l’argent (les études de Marx financées par ses parents), ainsi que le pouvoir d’influencer, de contrôler, la marche du monde (les écrits de Marx ont influencé l’histoire – mais pourquoi diable Onfray n’évoque-t-il pas Engels ?).
Pourquoi Onfray n’évoque-t-il pas Friedrich Engels, coauteur avec Marx du Manifeste du Parti communiste ? C’est quand même une GROSSE QUESTION, d’autant que Engels est un fils de la bourgeoise industrielle et qu’il a été le principal financier de Marx, puisque Onfray parle de finances.
Si vous considérez, donc, qu’il est purement descriptif d’écrire qu’un fils de Juif – même converti, notez bien cela au passage – est, parce qu’il est “de lignée juive” – détenteur du pouvoir, de l’argent, de la faculté d’influencer le monde, alors vous pourrez peut-être aussi être d’accord avec la seule assertion qui manque dans cette préface : les Juifs ont le nez crochu.
Après tout, étant donné le nombre de caricatures publiées dans les années 1930 et censées “décrire” les Juifs, peut-être est-ce vrai que les Juifs ont le nez crochu ? C’est peut-être juste une description ? Comme tout le reste : le nez crochu, la fourberie, la trahison nationale et l’argent.
Isabelle Kersimon
Et moi ai-je le nez crochu ?
J’ai mis ma photo où je suis à un congrès, celui où je suis devenue membre du Comité central.. J’ai 41 ans et a priori j’ai plutôt un type aryen… oui mais… On ne naît pas juif, on le devient… Mais est-ce que karl Marx que sa femme appelait “le maure” et qui en fit avait un petit nez rond enfoui dans un système pileux qui ne cessa de prendre de l’ampleur, se prenait pour un juif? En tous les cas il e reniait pas ses ascendances juives, mais il traitait l’antisémitisme avec le mépris qu’il lui inspirait.
Il faudrait poursuivre cette réflexion sur Karl Marx, le mépris il n’y a pas d’autre mot qu’il éprouvait pour Proudhon, comme d’ailleurs cet autre antisémite forcené qu’était Dühring. Non seulement il se moque de lui avec férocité mais quand Proudhon meurt et qu’on lui demande quelques lignes, il répond en disant à quel point il continue à le prendre pour un type à l’intelligence limité et gonflé de sa propre importance. Quant à Dürhing qui annonce le national socialisme sur bien des points, Il charge Engels le mettre en pièce dans l’ ‘Anti-Dühring, un essai publié en 1878 par Friedrich Engels. Sous couvert de polémique avec le philosophe allemand Eugen Dühring, il s’agit d’ailleurs de l’un des exposés les plus complets de la vision marxiste du monde et de la politique. Parce que Marx n’attaque pas les “théoriciens” de ce type sur leur antisémitisme mais bien sur ce que ça révèle de manipulation de la classe ouvrière…
L’utilisation de superstitions et pour lui racisme et antisémitisme, voir sexisme (Proudhon est un misogyne maladif) sont des manières d’aliéner la classe ouvrière. Mais son analyse va plus loin, donc il existe bien sur différentes formes d’opium du peuple. L’antisémitisme, quoique certains veuillent en faire une sorte d’étalon suprême, se présente rarement seul, il fait en général partie d’une univers superstitieux à la recherche de la pierre philosophale que des forces occultes veulent vous ravir. On retrouve ces aspects réactionnaires, occultes, chez Dürhing et chez les nazis, mais aussi dans le nouvel antisémitisme à la mode d’Onfray. Est-ce un hasard si l’on a vu s’installer des batailles assez délirantes autour d’un médicament miracle que des forces hostiles (devinez lesquelles?) empêcheraient les peuples de s’approprier. Que celui qui s’y soit prêté soit par ailleurs un grand spécialiste n’enlève rien à l’utilisation sociologique d’un tel débat? Et ce qui m’est alors apparu suspect alors même que mon propre vécu en Afrique me faisait considérer que relevait du même obscurantisme ceux qui niaient l’utilisation très répandu d’un tel médicament. Simplement il y a dans la rumeur quelque chose qui en désigne les fondements irrationnels et c’est dans cette volonté de croyance que se niche une certain anti-capitalisme et anti-impérialisme dont Politzer a jadis démonté les tenants et les aboutissants à propos de l’idéologue du nazisme qu’était Rosenberg.
Il y a bien sur dans les sociétés catholiques l’héritage de Saint Paul et la manière dont il définit le peuple déicide pour séparer le judaïsme du catholicisme. Avec le choix de l’empereur Constantin de forcer sur la séparation en invitant Saint Jean Chrysotome à créer à peu près tous les thèmes de l’antisémitisme. L’influence de Saint Jean Chrisothome est particulièrement importante dans l’église orthodoxe. Luther aura son propre antisémitisme.
Mais la démonstration matérialiste de Marx sur ce qu’est le judaïsme touche justement à ce que nous définissons en ce moment comme le marchand et le non marchand. Dans les sociétés féodales, non marchandes, pré-capitaliste, le judaisme est un facteur marchand indispensable à leur fonctionnement. Marx dit dans le livre I du capital, que le juif est dans la Pologne féodale comme les pores de la peau, il en permet la respiration marchande, le minimum d’échange, de monnaie indispensable.
La société féodale rurale ne pouvait pas former d’éléments capitalistes et au moment où elle a pu le faire, elle a précisément cessé d’être féodale et on vu naître de grands banquiers comme les Médécis. Le capital dans son développement explique-t-il dans le Capital a besoin d’un homme abstrait et le protestantisme fait bien mieux l’affaire. je suis sure que Max weber quand il a écrit, l’éthique protestante et l’esprit du capitalisme avait médité cet écrit de Marx.
J’ai été nourrie et j’ai partagé toutes ces analyses, oui mais voilà il y a eu la réaction absolue celle qui a besoin d’un bouc émissaire et qui va le chercher dans l’imaginaire séculaire des peuples, le nazisme. Et nous n’en sommes pas sortis, comme je l’ai écrit dans un livre sur Brecht et Fritz Lang, le nazisme n’a jamais été éradiqué. On a limité le nazisme a sa conséquence l’horreur de la shoah mais jamais n’a été mis en avant l’essentiel sa dimension de classe, la manière dont il a été une création du capital aux abois. résultat l’antisémitisme non seulement n’a jamais été éradiqué mais il est redevenu un abcés de fixation.
Un peu à la manière où aujorud’hui va rechercher un vieux mythe historique pour désigner le juif Karl Marx pour empêcher la conscience de la nécessité du socialisme pour contribuer à l’anticommunisme. Il n’est malheureusement pas le seul.
Si j’ai dit Et moi est-ce que j’ai le nez crochu ?
C’est parce que partout la lèpre de l’antisémitisme est là dans ce monde où faute de franchir le pas nécessaire du socialisme, les forces réactionnaires se déchaînent pour nous vanter les régressions comme les voies de l’avenir.
Je n’ai jamais renié mes ascendances juives, elles ont conditionné tous mes choix politiques adolescents. J’ai raconté cela dans mes mémoires, les communistes, l’armée rouge m’avait sauvée. Il y avait des héros qui étaient allés en camp de concentration parce qu’ils s’étaient battus et pas parce qu’ils étaient désignés par une haine incompréhensible : les communistes.
Ce pacte est désormais violé par ceux qui n’assument pas l’héritage soviétique. Mais il y a autre chose, je ne me suis jamais sentie proche d’Israël. Enfant je disais à mon père : nous avons la terre pour nous, pourquoi s’enfermer là-bas. Il me répondait, nous avons besoin d’avoir un lieu où nous réfugier quand on nous chassera à nouveau. Mais ce lieu m’est apparu celui de l’injustice faite aux Palestiniens, donc je n’y ai jamais mis les pieds. Je ne suis jamais invitée aux fêtes rituelle familiales de peur que je plombe l’ambiance avec mon discours pro-palestinien.
Et pourtant, l’antisémitisme est revenu en force et s’étale complaisamment, les posts de l’extrême-droite sont relayés sans complexe par des gens qui parfois comme dans ce texte d’Onfray ni voient même plus malice. Et il ne s’agit pas seulement d’antisémitisme, le racisme et l’imbécillité qui en fait des arguments ne se divisent pas… Cela va avec l’affaiblissement dramatique des positionnements politiques et les arguments caricaturaux que l’on échange sur l’adversaire… C’est le nez de Macron et l’âge de son épouse qui deviennent des arguments, les superstitions religieuses acceptées comme des droits et leur défense de l’anti-racisme.
Marx a bien raison de ne pas dénoncer l’antisémitisme d’un Proudhon ou d’un Dürhing comme l’essentiel, ce qui est essentiel c’est le signe de l’insondable abrutissement de ceux qui en recourant à une telle argumentation suppléent à des analyses de classe ou rationnelle dont ils sont désormais totalement incapable, c’est une forme dramatique d’inculture et le signe d’une soumission au maître ….
Le racisme , l’antisémitisme comme on le voit aujourd’hui avec la sinophobie et la manière dont les thèmes sur le péril jaune prennent chez les imbéciles est simplement la peur de ceux qui risquent que de vous traiter comme vous avez accepté que certains soient traités, un espèce de retournement colonialiste basée sur l’inculture et les préjugés.
Que dire sinon que quand j’en suis victime, ce qui arrive de plus en plus souvent, je déserte définitivement les lieux où règne en maître le crétinisme du bouc émissaire, je sais que je vais rapidement y étouffer de mépris. Je ne suis pas Karl Marx, cela se saurait, donc je ne peux que réagir avec mon expérience d’abord celle de femme qui sait qu’on ne revient jamais dans un lieu où l’on peut vous battre.
En suite pourquoi à propos du mépris, est-ce que je pense à Aragon et à sa femme juive Elsa, et à sa marche sans fin dans les rues: comme lui, tout ce qu’il y en moi de vagabond , d’égaré m’oblige à m’enfuir, à marcher pour penser en espérant enfin découvrir la gomme à effacer l’ignominie humaine … et je murmure : “Je ne suis qu’un moment d’une chute éternelle. Le pied perdu ne se retrouve jamais.”
danielle Bleitrach
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luc nemeth
Ce qu’a pu écrire Marx à la mort de Proudhon ne doit pas faire oublier qu’il n’avait pas toujours tenu un langage de mépris : il avait même et à juste titre salué en lui l’auteur de ce qui reste son chef-d’oeuvre, Qu’est-ce que la propriété?, mais dont l’intéressé passa ensuite les vingt-cinq dernières années à le déconstruire et ce en voulant… démocratiser la propriété.
Danielle Bleitrach
il n’a de mépriser Proudhon et pas seulement à sa mort… l’ignorer c’est méconnaitre Marx et tenter une fois de plus de le réduire aux stupidités actuelles
luc nemeth
je n’ai pas plus de sympathie que vous pour les stupidités actuelles, et je vous laisse la responsabilité de supposer que je méconnais Marx, mais sur le point évoqué ici je suis formel pour affirmer qu’à la date de 1842 celui-ci avait défini Proudhon comme le “penseur le plus hardi du socialisme français” et s’exprimait encore favorablement sur son compte à l’époque de La Sainte Famille, paru en 1845 : c’est seulement ensuite, et à l’époque de Misère de la philosophie que la rupture est consommée.
Plus largement je comprends mal pourquoi vous vous privez du plus accablant peut-être, des arguments contre Proudhon : en dehors même de Marx les plus impitoyables envers lui ont souvent été des hommes, ou des femmes, qui l’avaient admiré mais qu’il aura réussi à éloigner de lui par sa régression.
Danielle Bleitrach
oui c’est vrai avant Misère de la philosophie il s’approche de Proudhon dont il admire les qualités polémistes… Mais cela dure peu…
luc nemeth
vous jouez ici sur les mots et continuez de nier l’évidence : ce n’étaient pas ses… “qualités polémistes” mais sa pensée, alors socialiste, qui avait initialement valu à Proudhon l’admiration de Marx
Danielle Bleitrach
monsieur votre agressivité me fatigue surtout quand il s’agit de défendre l’indéfendable à savoir le fait que Marx aurait été un admirateur de Proudhon. Je sais que c’est une interprétation à la mode et ceux qui défendent cette thèse s’appuient sur ce qui est écrit dans la Sainte Famille (1843), un livre que j’aime beaucoup en particulier dans sa critique des Mystères de Paris. Mais il n’a pas encore rencontré Proudhon et il en apprécie la force du verbe. C’est en 1844-45 qu’il le rencontrera et voici ce que lui même en dit en 1865 au Sozial Demokrat:”pendant mon séjour à Paris en 1844, j’entrai en relations personnelles avec Proudhon. Je rappelle cette circonstance parce que jusqu’à un certain point je suis responsable de sa ‘sophistication’ mot qu’emploient les Anglais pour désigner la falsification d’une marchandise”. Je ne vais pas recopier l’ensemble de la lettre mais en fait il explique comment ayant tenté de l’initier brièvement à Hegel, ce fut quelqu’un dont il se méfiait pour son éclectisme et son esprit confus qui acheva à tous les sens du terme l’initiation théorique de Proudhon et le gâcha définitivement, il s’agit de Karl Grün..
Bref monsieur cet amalgame que Marx a toujours dénoncé est fort à la mode mais l’éclectisme ne faisait pas partie de la formation de Marx, ni j’espère de la mienne. Il n’empêche que le personnage de Karl Grün peu connu des Français alors qu’il a toujours été un admirateur de la pensée “socialiste” française qu’il a popularisé en Allemagne est un homme engagé, participant à tous les combats et fidèle à ses idéaux, qui comme Marx l’a chèrement payé. Donc il ne s’agit pas des hommes mais de théorie et je recuse totalement une quelconque parenté entre Marx et Proudhon.
luc nemeth
si tout point de vue différent du votre vous insupporte à ce point je vous conseille d’aller vous procurer à la FNAC un ouvrage intitulé LES MEMES DROITS… face à la misogynie proudhonienne : vous pourrez au moins constater que loin de défendre l’indéfendable c’est même moi qui (en France en tout cas) suis allé le plus loin dans la sévérité envers le Proudhon post-1840 et ce en rappelant que la misogynie et l’antisémitisme, loin d’être chez lui de simples “dérapages” comme l’écrivent les proudhoniens attardés, font au contraire partie intégrante de son système de pensée.
Danielle Bleitrach
votre opinion différente ne m’insupporte pas au contraire puisque je vous réponds et argument malgré votre ton agressif, qui lui m’insupporte,je prendrai volontiers connaissance de votre travail, mais si en général Marx -bien qu’on l’ait accusé lui même d’antisémitisme dans la question juive – ne supporte pas l’antisémitisme (y compris celui de Dhuring) ce n’est pas sur ce terrain là qu’il attaque Proudhon (ni d’ailleurs Dhuring) mais sur l’incapacité à la dialectique .Cela mériterait d’autres développements.
luc nemeth
merci d’avance de votre intérêt. En fait vous n’aurez pas même besoin d’aller à la FNAC car au vu du refus persistant, chez les adorateurs de Proudhon, d’admettre la nature réelle de ces soi-disant ” simples dérapages” j’ai finalement abandonné de fait mes droits d’auteur et affiché le texte de ma plaquette sur le site http://www.academia.edu