Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Ce dont certains rêvent comme la seule survie du capitalisme : un nouveau Yalta, par Danielle Bleitrach

Oui, Trump est un syndic de faillite, et pas le maitre tout puissant derrière lequel nos élites « européennes, libérales » rêvent avec un cierge ou un bâton, dans ce mélange de fascination et rancune qu’avaient les Espagnols face à l’Église ayant choisi le franquisme. Ils envisagent le refus de la guerre du monde multipolaire comme une détente qui correspondrait à une entente équilibrant même la soumission supposée de la Russie à la Chine. Ce rêve est surtout le témoignage de l’incapacité suicidaire de nos « élites » politico-médiatique de refuser de prendre en compte la réalité et l’expérience que les peuples ont de ce moment où l’Occident « vainqueur » a proclamé la fin de l’histoire, l’impossible dépassement du capitalisme… Même dans sa chute, l’Occident et les élites françaises qui ne peuvent se détacher d’un tel modèle espèrent que le bon « suzerain » type Obama peut rétablir la situation et qu’il y a quelque chose à tirer des manœuvres de Trump. Mais il n’est jamais tenu compte de l’expérience réelle qu’ont les peuples ni de leur pression sur les gouvernants. Tout est à repenser, à tenter une autre Histoire, c’est un peu le thème du « cahier du pourquoi » que je viens de terminer et qui a entamé son périple dans les ateliers de fabrication de l’objet livre chez les éditions Delga qui ont tant contribué à tenter de maintenir une autre approche des FAITS.

Mais cette « nouvelle » détente est en fait le retour pur et simple à la situation d’avant 2014, voire 2008, lorsque la Russie était ouverte à l’occident et disposée à commercer et à s’intégrer avec l’Occident, mais qu’elle a été attaquée en Tchétchénie, puis a subi le coup d’État de Maïdan, etc. je reprends ici les propos de Russes devant une telle proposition.

Pourquoi la Russie ferait-elle confiance aux États-Unis maintenant, après avoir été trahie ? Un trou de mémoire ?

Et la logistique imposée à l’époque faisait que le principal bénéficiaire de l’intégration économique de la Russie avec l’Occident était en réalité l’Europe. Comment les États-Unis pourraient-ils nouer des liens économiques avec la Russie tout en maintenant l’Europe complètement exclue, en lui imposant un blocus commercial ? C’est le théâtre politique actuel (j’importe leur uranium, mais vous ne devriez pas importer leur gaz), mais combien de temps cela pourrait-il durer en cas de véritable détente ?

Cette véritable détente n’est-elle pas celle que revendique Poutine et qui a besoin des BRICS autant que de l’Asie centrale, de l’Afrique, c’est-à-dire de l’héritage de l’URSS ? C’est ce que j’avais avancé dans notre livre dans les chapitres consacrés à la relation Chine-URSS-Russie qui mériteraient un développement. Mais le format du livre ne permettait pas d’accorder à ces aspects-là tous les développements qu’ils auraient mérités et j’ai supprimé une centaine de pages.

Il faut bien mesurer que s’il y a en Russie un courant d’oligarques (la 5e colonne comme les appelle Ziouganov) prêt à un deal de ce genre, le peuple russe lui est de moins en moins prêt à faire confiance à ceux qui l’ont trompé et ont lâché la proie (des conquêtes sociales et de souveraineté nationale, de paix de l’URSS) pour ce qu’ils ont déjà expérimenté à la chute de l’URSS. De ce point vue, le texte traduit aujourd’hui par Marianne sur le vice président du KPRF en train de souhaiter un retour à la constitution de l’URSS, témoigne de l’importance du travail de mémoire opéré sur le peuple russe qui va vers le socialisme plutôt que vers un nationalisme chauvin à l’œuvre dans l’UE. Il fait que la pression du peuple russe qui s’exerce sur le gouvernement ne fait aucune confiance à Trump. Par parenthèse qui n’est pas un imbécile ne devrait se faire aucune illusion sur le sort qui lui est réservé et ce qu’il peut attendre de l’instabilité de l’occident. Voici donc encore un commentaire sur cette possible entente cordiale émanant cette fois d’un européen sceptique, un allemand:

Trump ne veut qu’une chose : la domination mondiale. On ne peut pas lui faire confiance !

S’il tenait à jouer franc jeu, il aurait quitté l’OTAN depuis longtemps.

Mais maintenant, il se fait passer pour le grand sauveur, disant aux Européens qu’il va nous expliquer comment nous entendre avec la Russie.

Il veut dicter la voie à suivre pour parvenir à un accord économique avec la Russie.

Les Européens n’ont pas besoin de Trump pour ça. On peut y arriver tout seuls ! Ce qu’il nous faut, c’est la fin de l’UE et de l’OTAN, et le départ de tous les étrangers de notre pays !

Y compris la puissance occupante, les États-Unis, car c’est précisément ce qu’il essaie déjà de faire à nouveau.

Voilà, c’est tout. Car NOUS, le peuple allemand, n’avons aucun conflit avec la Russie !

Et voici ce qu’il en est de Macron tentant une action parallèle en Chine, vrai ou fake news en tous les cas, Macron se prend pour Sarkozy, qui lui fonctionne réellement comme Trump, il tient son pouvoir de la division proche de la guerre civile dans un peuple sans alternative politique réelle, il sait que la survie du camp qu’il représente a besoin de cette guerre civile comme du partage en zones d’influence. Mais Sarkozy et Trump ont derrière eux environ 30 % de l’électorat devenue un clan, une caste prête à se faire tuer pour lui et pour qui ils représentent la seule « légalité ». Ce clan est soudé par de multiples liens, les intérêts, le spoil système, les jeux boursiers avec l’art des déclarations qui permettent aux initiés de jouer à la baisse ou à la hausse, les rancunes du prolétariat blanc à l’égard de l’élitisme des démocrates et de leur « wokisme », mais aussi le clan familial… Macron a été incapable de construire ces 30% et tout le monde peut le virer alors que Sarkozy fait alliance avec Le Pen en jouant la stratégie de Trump… Mais qui en Chine ou en Russie, sans parler du monde en développement peut faire confiance à Trump, Sarkozy, et ne pas mépriser Macron et Hollande… en nous disant qu’hélas ce genre d’individu qui ne voient qu’eux et leur audience dans les sondages en ignorant le rapport de forces au-delà d’une campagne électorale… nous en regorgeons…

Le communisme sans cette vue prospective à long terme qui sait dépasser les jeux de faction et construit l’unité de la nation dans un contexte géopolitique qui fort heureusement s’est inversé ne survivra pas plus que la social démocratie dont il est une variante la moins corrompue. Mais pour cela il faut un parti capable de faire face à l’Etat du capital en pleine décomposition. Nous en sommes loin et les maîtres censeurs s’emploient à en reculer l’avènement.

Danielle Bleitrach

Views: 204

Suite de l'article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

La modération des commentaires est activée. Votre commentaire peut prendre un certain temps avant d’apparaître.