Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

L’échec de la politique étrangère US ? Non! La nature de l’impérialisme

22 DÉCEMBRE 2023

la gauche radicale américaine oppose “sa” démocratie à la réalité de la politique des Etats-Unis gouvernée comme ici par le complexe militaro industriel, mais cette opposition est d’une grande naiveté. .C’est dès le départ la forme que prend partout la societe bourgeoise puisque la liberté citoyenne repose sur l’individu abstrait libéré tandis que les individus concrets eux sont considérés comme libres d’aller se vendre au propriétaire de moyens de production. La conception de la démocratie qui se proclame un universel est en fait historique, c’est àdire qu’elle traduit l’état réel des rapports de production et pas l’idéal proclamé. Cette démocratie là aux Etats Unis n’a jamais été que la reconnaissance de l’esclavage d’une majorité comme étant la base de la “communauté”nationale et son droit à soumettre toutes les autres nations sur ce même modèle L’impérialisme porte cette caractéristique au delà du colonialisme comme un modèle de “démocratie” dont le visage réel est le pillage, les sanctions, les blocus, comme la réalisation du “progrès” de l’émancipation de l’individu abstrait, le citoyen élisant sa “représentation” tandis que les individus concrets subissent de fait un mode d’esclavage. L’expérience vécue par la Russie à la suite de la “trahison” de Gorbatchev a été celle d’une confrontation brutale avec la réalité de ce qu’offrait ce “libéralisme”. Ce qui se passe en Ukraine ou à Gaza est aussi une autre manière de révélation de ce qu’une telle “démocratie” représente en réalité d’oppression meurtrière. (note et traduction par danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

PAR BRUCE COLLINS

Dave Valdez/Photo de la Maison-Blanche

Gorbatchev et l’échec de la politique étrangère américaine

La mort de Michel Gorbatchev en 2022 me rappelle l’échec de la politique étrangère américaine à saisir l’occasion de faire du monde un endroit plus sûr pour la démocratie et tous les êtres vivants. La période au cours de laquelle il a dirigé l’Union soviétique a été une occasion sans précédent et historique pour les États-Unis de diriger plutôt que de contraindre les autres. Les choix faits par les administrations Reagan et Bush ont levé le voile des faux-semblants et révélé la vérité selon laquelle les décisions de ce pays en matière d’allocation des ressources et d’élaboration des politiques sont régies par le complexe militaro-industriel.

Pourquoi la politique étrangère des États-Unis a-t-elle été conçue pour déstabiliser d’abord l’Union soviétique, puis la Russie ? Au lieu de soutenir Gorbatchev, le gouvernement américain a décidé de profiter de ses propositions tout en planifiant clandestinement d’abroger les accords conclus. L’équipe de Scowcroft et Gates a créé un mur de tromperie et a poussé le monde plus près de la catastrophe en refusant d’accepter la proposition de Gorbatchev de poursuivre le démantèlement des arsenaux nucléaires. Les mentalités impérialistes de Scowcroft et de Gates étaient prêtes à utiliser des subterfuges, des ruses et des mensonges flagrants pour faire avancer les intérêts de l’armée. La vérité est que le comportement de la politique étrangère américaine et le choix de dépenser plus pour l’armée que le reste du monde combiné ont éclipsé tout discours sur le fait que nous vivons dans une démocratie.

Quel est le prix du salut ? Nous ne devons pas confondre les intérêts du complexe militaro-industriel avec les intérêts du peuple américain. Si la démocratie et la liberté vantées par les soi-disant « patriotes » étaient en fait une force puissante, pourquoi aurions-nous besoin d’une allocation aussi importante à l’armée ? Imaginez que dans le contexte du débat actuel sur notre démocratie, les États-Unis ont dépensé entre 10 et 20 000 milliards de dollars pour les guerres en Irak et en Afghanistan. Quel a été le rendement de ces dépenses ? Si ces dollars étaient plutôt investis dans le peuple américain, ils suffiraient à couvrir les besoins d’investissement dans les infrastructures, d’éducation et de prêts étudiants. Le rapport de l’American Society of Civil Engineers (ASCE) dans son récent rapport (publié tous les quatre ans) estime que les États-Unis devront investir plus de 4,59 billions de dollars d’ici 2025 pour améliorer les infrastructures du pays. Dans un autre secteur de la dette en expansion, les prêts étudiants approchent maintenant les 2 000 milliards de dollars. Une autre politique étrangère, celle de la diplomatie et de la conciliation, aurait pu permettre de redistribuer les ressources pour faire des investissements dans ce pays.

Michael Hudson, dans son livre : The Destiny of Civilization : Finance Capitalism, Industrial Capitalism or Socialism, rapporte qu’en Chine, contrairement aux États-Unis, le gouvernement crée le crédit avec l’intention explicite de créer de l’argent et du crédit pour investir dans l’économie réelle ; construire des trains à grande vitesse, construire des logements, investir dans l’éducation. En d’autres termes, les banques chinoises ne font pas de bénéfices pour des prises de contrôle d’entreprises ou à des fins spéculatives, mais pour des investissements dans l’économie réelle. Le néolibéralisme, tel qu’il est pratiqué par les États-Unis, a créé un rôle élargi pour le secteur financier, poussant un programme conçu pour empêcher toute entité gouvernementale de contrôler l’offre de crédit. Le néolibéralisme tente de gagner de l’argent financièrement, ce qui est le moyen le plus rapide de gagner de l’argent. Les néolibéraux se concentrent sur la création de crédit non pas pour investir dans l’économie réelle, augmentant ainsi les moyens de production, mais pour acheter et vendre les moyens de production existants.

Quel est le lien entre la politique étrangère et l’économie ? Pour reprendre les mots de Lyndon Johnson, nous pouvons avoir « du beurre et des armes à feu ». Les États-Unis ont choisi les armes à feu. Cependant, dans un monde fini, nos ressources ne peuvent pas aller plus loin. Le moyen le moins efficace de dépenser de l’argent pour acheter des armes à feu pour soutenir le complexe militaro-industriel, ou pour les contribuables locaux de subventionner des stades sportifs. Nous les trouvons éparpillés dans toute l’Amérique. Nous devons plutôt investir dans les infrastructures, l’éducation et les personnes, et non dans les armes de destruction massive, et nous devons éviter les mésaventures créées par la nécessité de la guerre et des armes. Compte tenu de ces considérations, il n’est pas dans notre intérêt, conformément à notre engagement envers le complexe militaro-industriel, de rechercher une solution pacifique au conflit. Il n’est donc pas surprenant que Reagan et Bush aient discrètement rejeté le geste de Gorbatchev de démanteler nos arsenaux nucléaires respectifs. Bill Clinton, que beaucoup considèrent comme la deuxième administration Reagan, sauf qu’il a soutenu le droit des femmes à la liberté reproductive, a défié les accords conclus avec Gorbatchev qui empêcheraient une nouvelle expansion de l’OTAN. En outre, Clinton a assuré à Eltsine en 1994 que toute expansion de l’OTAN serait lente et sans surprise et se ferait en partenariat avec la Russie. Il a dit à Eltsine qu’il aimerait que la Russie et les États-Unis se concentrent sur le programme du Partenariat pour la paix et non sur l’OTAN. Pendant ce temps, à Washington, les « entrepreneurs » de la politique étrangère élaboraient des plans pour l’élargissement immédiat de l’OTAN au-delà de ce à quoi on pouvait raisonnablement s’attendre.

Les États-Unis avaient un choix à faire, un peu comme à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Les États-Unis ont décidé du plan Marshall pour reconstruire nos anciens ennemis en soutenant les alliés au sein de ces nations, à la fois en Allemagne et au Japon. Avec la dissolution de l’Union soviétique, les États-Unis ont eu le choix de soutenir et d’aider la Russie à construire une démocratie et à moderniser l’économie russe. Au lieu de cela, nous avons choisi de trahir les accords originaux avec Gorbatchev. En fait, on pourrait dire que le chemin sinueux vers la guerre en Ukraine a commencé en 1991.

Si vous voulez vous déclarer le bastion de la liberté et de la démocratie et de l’exceptionnalisme américain, il est absolument essentiel de fournir un leadership aux autres plutôt que de les contraindre avec la menace de la guerre ; financières ou autres. L’idée que le mode de vie américain est dérivé de l’âme de notre nation, de nos croyances fondamentales selon lesquelles « tous les hommes sont créés égaux », une personne, une voix, doit nécessairement se manifester dans notre politique étrangère. La politique étrangère ne peut être dissociée de ces convictions fondamentales. Le monde se serait mieux porté si les États-Unis avaient honoré leur parole avec Gorbatchev.

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5 Commentaires

  • Michel BEYER
    Michel BEYER

    Lu sur le site de “dedefenda.org”: le 18/03/2022, Joe Biden critiquant l’ntervention russe du 24 février s’est attiré la réplique suivante de Xi Jiping: ” c’est celui qui a mis la crécelle autour du cou du tigre d’aller là retirer”. Vraisemblablement un vieux proverbe chinois. Il ne s’agit pas bien sûr pas du “tigre de papier” qui servait de cible à Mao Tse Toung dans sa critique contre l’URSS.
    J’ai beaucoup de mal à croire à la naïeveté de Gorbatchev et Elstine. Forts de l’attitude passive de ces 2 personnages, USA et OTAN ont joué sur du velours. Actuellement, pour retirer la crécelle/OTAN, attention aux griffes. Montrer patte blanche ne suffira pas, encore faudra-t-il garantir que la crécelle ne revienne sous une autre forme.

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  • Franck Marsal
    Franck Marsal

    On peut se demander dans quelle mesure en 1919 au moment du Congrès de Versailles, les USA ne sont pas encore suffisamment en position de force pour dominer le monde et y remplacer le duopole anglo-français. Dans quelle mesure donc, la paix du traité de Versailles n’entérine pas un rapport de force provisoire, le temps que la guerre européenne ne se rejoue, portant cette fois les vieux empires européens à leur point de rupture et la domination américaine à son niveau de super-puissance mondiale.
    Dans cette perspective, on peut penser qu’il en est de même de la vision américaine de Gorbatchev / Eltsine. L’URSS est dissoute et défaite, mais les USA n’ont pas encore les moyens de contrôler l’immense espace ainsi ouvert. Ils anticipent donc d’emblée une deuxième guerre, et la préparent.
    Ce sont les guerres d’Irak et d’Afghanistan, la destabilisation du Caucase russe, l’agression contre la Serbie, les multiples révolutions de couleurs, la destruction de la Libye, la tentative semi-avortée de destruction de la Syrie, jusqu’aux guerres actuelles dont l’Ukraine reste encore le point névralgique.
    L’URSS fut pendant la guerre froide le seul rempart contre une domination mondiale des USA. L’URSS détruite, l’objectif fut de réaliser cette domination mondiale en détruisant en profondeur toute structure nationale alternative, en détruisant la Russie. La résistance opérée depuis 20 ans par la Russie de Poutine leur donne en un certain sens raison. Les conditions d’une domination Etats-unienne dans ce vaste territoire n’étaient pas complètement réalisée avec la destruction de l’URSS.
    Ce faisant, les USA ont de surcroît découvert qu’après avoir digéré l’espace post-soviétique, ils feraient face à un géant d’une autre dimension, la Chine.

    Mais la domination mondiale est un processus qui engendre lui-même ses propres contradictions et ne peut que les aiguiser. Les USA recherchent la domination mondiale pour trouver à l’extérieur la solution de leur contradictions intérieures, de leurs propres déséquilibres, financiers, économiques, industriels, sociaux et politiques. Elles ne peuvent donc accroitre leur domination qu’au détriment des zones dominées, y compris à un certain stade de leur propres alliés, tenus dans un réseau serré de coercition et de promesses de privilèges. Le point semble atteint où ce vaste nouvel ordre mondial, fragilisé par ses propres contradictions autant que par les oppositions qu’il rencontre, est susceptible d’être largement mis en cause. Il se raidit alors et ce raidissement est la cause réelle de toutes les guerres actuelles.

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  • Martine Garcin
    Martine Garcin

    Bonne introduction à la bataille qui va se mener en 2024 sur la « Démocratie », « valeur universelle » portée prétendument par les USA et plus largement par le Bloc occidental. On apprend dans la presse de ce jour (DL 26/12/2023) que « La démocratie sera également au cœur du 80e anniversaire de la Libération en 2024-2025 », selon le président de la « Mission Libération » chargée d’organiser le 80e anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale. On voit déjà quel pays sera célébré comme porteur des bonnes valeurs « démocratiques » et quel pays sera balayé sous le tapis. Il va falloir ressortir les tableaux de morts par pays, les sondages sur les pays ayant le plus participé à la victoire, etc.
    Un espoir, cependant, toujours dans la presse d’aujourd’hui, dans l’Humanité, ce qui est rare, l’éditorial de Maurice ULRICH intitulé « La guerre américaine » [à la Palestine]. Extrait :
    « Voici ce que déclarait il y a quelques jours le département d’État : « Les États-Unis se sont engagés pour la sécurité d’Israël et il est crucial pour les intérêts nationaux américains d’aider Israël à développer et à maintenir une solide capacité d’autodéfense » C’est dit. La guerre à Gaza est aussi une guerre américaine. Stop the war ». Le 22 novembre, Pierre BARBANCEY notait déjà dans l’Humanité qu’Israël est vu comme un pivot du commerce mondial dans le cadre du projet américain de corridor Inde-Moyen-Orient-Europe (IMEC), concurrent de la BRI chinoise.

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  • Rémignard jean
    Rémignard jean

    En 1991 tout à leur victoire contre l’URSS, l’impérialisme occidental n’a pas imaginé que le très discret pays du milieu allait s’´inscrire d’une manière originale et de long terme dans la division internationale du travail et de la production
    L’impérialisme US et ses supplétifs occidentaux ont cru que l’installation d’un système hybride en Chine allait sceller la conversion du pays du milieu à la démocratie système politique qui assure depuis 250 ans la continuation reproduction extension du capitalisme
    Mais si l’on peut affirmer que c’est la nomenclature qui a détruit d’abord le PC de l’URSS puis les institutions soviétiques en Chine on ne peut que constater que le choix du développement des forces productives (hommes, machines, infrastructures) et le maintien de la direction politique par le PC leur a permis de contribuer d’une manière extraordinaire à l’interdépendance renforcée de tous les pays du monde
    De plus le pays du milieu a choisi d’exporter non pas leur modèle politicoeconomique mais dès qu’il en a eu les moyens de faciliter le développement des forces productives de tous les pays qui veulent sans intervenir dans leur organisation intérieure
    La faiblesse des usa et du bloc occidental c’est qu’ils ne sont plus les dominants comme la bousculade des milliardaires US à los angeles pour participer à la rencontre avec XI montrant du même coup les fractures entre les intérêts divergents des différentes parties du capital
    La chine et l’orientation BRICS permet une politique de Paix meilleure ennemi de l’impérialisme
    On en revient à Lénine LA PAIX LA PAIX LA PAIX

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  • Daniel Arias
    Daniel Arias

    63e anniversaire de l’indépendance du Burkina: discours à la Nation du Capitaine Ibrahim Traoré

    Voilà les résolutions prises par le nouveau gouvernement du Burkina pour lequel la bataille de la production est aussi importante que celle contre le banditisme longtemps favorisé par les impérialistes pour entraver le développement de ces pays si riches.

    https://youtu.be/hGW_5wJDhwA?si=6DIP4KijnN8TCFKB

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