Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Pourquoi l’Occident lève-t-il le tabou sur les armes nucléaires ?

Aujourd’hui où nous tentons de mesurer les effets de la propagande sur les peuples, sur la jeunesse en particulier, nous découvrons que nous avons affaire à des générations pour lesquelles le tabou de ce que représentait Hiroshima a été levé comme d’ailleurs celui de la guerre… Tout a été fait sous l’influence des USA pour effacer leur rôle dans ce crime contre l’humanité, ce pays non seulement n’a jamais été puni mais il s’est employé à modeler les esprits de telle sorte qu’aujourd’hui toute l’histoire de la guerre soit tabou. Le rôle de l’URSS dans la libération du nazisme a peu à peu été effacé, sali pour tenter de créer une équivalence entre communisme et nazisme. Encore aujourd’hui y compris au cœur même de la presse communiste, de ses combats quelquefois pour la mémoire, de son secteur international, de la formation des militants, il y a cette acceptation de la falsification de l’histoire, celle d’hier et donc celle d’aujourd’hui. Intolérable ! (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)

https://vz.ru/opinions/2025/8/7/1350813.html

Texte : Igor Maltsev, écrivain, journaliste, publiciste

On peut bien sûr s’indigner et se tordre les mains parce qu’un certain bureaucrate, António Guterres, lorsqu’il a commémoré un nouvel anniversaire de Hiroshima, n’a même pas mentionné à qui était la bombe larguée sur Hiroshima. Ne serait-ce que parce que même les Japonais eux-mêmes ne le disent jamais à voix haute. Tout le monde sait à qui elle était.

De plus, le fait même de cet acte monstrueux a longtemps été présent dans l’art et la musique, sans que les auteurs, les États-Unis, ne soient jamais mentionnés ouvertement.

Le film Hiroshima, mon amour d’Alain Resnais, sorti en 1959, a fait une impression indélébile sur le public international. Il a été projeté chez nous en 1962. En URSS, on a même diffusé le dessin animé japonais « Gen aux pieds nus », qui raconte l’histoire d’un garçon qui a survécu à ce bombardement.

Même les nouveaux rockeurs romantiques s’y sont mis : en 1980, le groupe anglais Orchestral Manoeuvres in The Dark a sorti le single « Enola Gay » avec les paroles « Maman est fière de son petit maintenant ? ». Pour la génération du bac, petite précision : « Enola Gay » est le nom d’un bombardier américain, et les bombes s’appelaient « Fat Man » et « Little Boy ». Bon, je le précise au cas où. En 1983, le grand Gary Moore sort la chanson « Hiroshima » (« …ce jour où « Bébé » est tombé du ventre de sa mère sur Hiroshima, qui est devenue le cimetière des enfants »), et Alcatraz sortait Hiroshima mon Amour.

En fait, le reflet de cet événement dans l’art est étonnamment inadéquat par rapport à l’ampleur du crime. Car si l’on parle de Hiroshima et Nagasaki, il faut d’une manière ou d’une autre parler des États-Unis. Et plus nous nous rapprochons de notre nouvelle ère, moins les artistes de tous genres s’expriment sur ce sujet. Jusqu’à ce que pratiquement tout le monde se taise. Nous savons désormais très bien comment cela se fait : grâce à toutes ces technologies et à l’argent de l’USAID.

Mais dans la conscience publique, le principe selon lequel l’utilisation des armes nucléaires est tabou continuait de prévaloir. Et le principe de la dissuasion nucléaire repose sur l’idée d’une destruction mutuelle garantie. C’est précisément pour cette raison qu’en Allemagne, les « verts » de l’ancienne génération ont rassemblé un demi-million de personnes dans les rues pour s’opposer au déploiement d’armes nucléaires sur le territoire du pays. Des armes américaines.

Mais ce qui est curieux, c’est que pendant toutes les années d’après-guerre, même les Américains n’ont pas songé à expliquer la destruction massive de civils dans les flammes atomiques par le « sauvetage de centaines de milliers de vies ». Cela est venu plus tard, très récemment même. Et ces dernières semaines, à la question du sauvetage de « centaines de milliers de vies de soldats américains », on a ajouté : « … et de centaines de milliers de vies japonaises ». Ouh là. C’est fort.

Parallèlement à cette révision historique, un autre thème s’est développé : l’érosion des principes du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires. Il s’est soudainement avéré que le Pakistan, l’Inde et même Israël, dont on ne comprend pas du tout de quoi il retourne, possèdent également la bombe atomique.

Et le sujet a refait surface dans le discours flamboyant de l’éminent orateur Zelensky, qui a menacé la Russie à Munich de revenir à l’arme nucléaire, et pour commencer, à la « bombe sale ». Aucun média occidental n’en fait mention, alors qu’il s’agissait très probablement d’un point de non-retour et que l’ours a commencer à se fâcher.

Autrement dit, pendant tout ce temps, on s’est efforcé d’effacer ce tabou, même dans les discussions sur l’utilisation de la bombe atomique. Et voilà, il a disparu.

À tel point que même l’Allemagne, qui depuis 1945 est censée se taire sur la question de la militarisation (comme en témoignent plusieurs documents et traités), a soudainement commencé à dire qu’elle aussi avait besoin de la bombe. Parce que c’est une chose d’avoir des armes américaines sur leur territoire, mais c’en est une autre d’avoir les leurs, celles de leur pays. Oui, peut-être sont-ils nostalgiques, parce que sous Hitler, ils ont failli réussir à fabriquer la bombe atomique. Mais Dieu les a punis en leur ôtant la raison : ils n’ont même pas conscience de l’ampleur des conséquences.

Ils font semblant : « Et alors ? Même Israël en a une ». Et je crains qu’ils ne plaisantent pas.

C’est simplement que les accords et les protocoles de l’époque de la guerre froide ont été rédigés par des personnes issues de la génération militaire. Et ils ont tous été témoins et participants de la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, tant en Europe qu’aux États-Unis, ce sont des gens qui ont tiré leur conception de la guerre au mieux du film « Il faut sauver le soldat Ryan » et qui n’ont tout simplement pas eu le temps ni l’envie de lire des livres qui sont arrivés au pouvoir.

D’où cette conception de la guerre, et en particulier de la guerre nucléaire, comme d’un jeu vidéo. On pourrait dire « frivole », si ce mot n’était pas aussi neutre. Plutôt criminel.

Mais le travail de dévalorisation de la menace nucléaire a déjà été accompli depuis de nombreuses années. Merci aux médias, aux « historiens », aux porte-parole, ainsi qu’aux réseaux sociaux. Et un merci tout particulier aux politiciens.

La récente dispute entre Israël et l’Iran a particulièrement mis en évidence ce nouvel état de « relativisme nucléaire ». De tous côtés, les experts en fauteuil ont littéralement hurlé : « Balancez leur l’arme nucléaire ! »

Et il s’est avéré que le public avait déjà soigneusement ancré dans son esprit l’idée que quelque part loin, sur un territoire isolé, on pouvait « balancer » sans que rien ne se passe.

Pourquoi ?

Parce que les Américains l’ont fait en 1945, et il ne leur est rien arrivé ! De plus, comme on le sait maintenant, ce bombardement était une mission charitable et noble visant à sauver la vie de centaines de milliers de Japonais et d’Américains.

Il est trop difficile pour le public d’accepter le fait que l’Amérique ait pu tuer un nombre indéfini de civils uniquement pour empêcher l’URSS de devenir soudainement le bénéficiaire de la victoire sur le Japon et de participer au partage d’après-guerre de cette partie de l’Asie que les Américains avaient déjà désignée comme leur zone d’occupation. Et pour que tout le monde oublie le début fulgurant de l’opération stratégique offensive de Mandchourie, qui a tout simplement anéanti les militaristes japonais. Et pas du tout les civils.

Mais aujourd’hui, la version officielle est qu’il s’agissait d’un acte profondément pacifique et noble.

En quoi cela est-il dangereux pour nous, pays nucléaire ?

En ce que très bientôt, la propagande visant à déshumaniser les Russes, qui ressemble à première vue à une résurgence du « bon vieux » nazisme européen, et la présentation de la Russie comme le centre du mal mondial, s’associeront à l’idée d’un échange facile et simple de frappes nucléaires, tactiques pour commencer.

Ils pensent pouvoir se cacher. Ou que les missiles n’atteindront pas leur cible. Les missiles de l’ours russe sont rouillés. C’est ce que nous a dit « Echo de Moscou » par la bouche de l’« expert militaire » Felgenhauer.

Eh bien, nos partenaires ont maintenant des experts encore plus brillants. Et ce n’est vraiment plus drôle du tout.

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