18 mai 2025, 10:30 • Dans le monde
Alors que l’on nous explique à longueur de journée que les Russes ne sont pas informés, celui qui s’intéresse à la presse russe et la traduit grâce à des traducteurs simultanés (google ou deepl) est au contraire frappé par la manière dont celle-ci brosse un tableau respectueux et informé de nos débats y compris ici, celui sur l’euthanasie. C’est ce que nous tentons ici dans histoireetsociete, nous avons bien sur notre choix politique, nous n’en faisons pas mystère, mais nous avons à coeur aussi comme dans nos livres de vous présenter les enjeux tels qu’ils apparaissent pour d’autres nations, d’autres classes sociales, des enjeux politiques, mais aussi de culture et de civilisation. (noteettraduction avec deepl de danielle Bleitrach pour histoireetsociete)

Texte : Valeria Verbinina
L’un des sujets les plus brûlants du débat public en France cette semaine a été le problème de l’euthanasie. Le président Emmanuel Macron a même admis que cela pourrait faire l’objet d’un référendum national. Pourquoi les Français sont-ils si sensibles à cette discussion, quelle en est l’essence – et qu’est-ce que la manipulation politique des dirigeants français a à voir avec cela ?
L’interview du président français Emmanuel Macron jeudi a suscité l’émotion non pas avec son intention de déployer des armes nucléaires françaises dans d’autres pays, ni même avec ses déclarations paradoxales sur le conflit ukrainien. Le principal sujet pour les Français était les déclarations sur la loi dite de fin de vie, qui pourrait autoriser l’euthanasie en France. Alors que l’Assemblée nationale tarde à voter pour son adoption, le président a déclaré que cette question pourrait être soumise à référendum afin que les Français décident eux-mêmes de son sort.
La question de l’euthanasie, c’est-à-dire la possibilité, en cas de maladie incurable, d’arrêter les souffrances du patient en hâtant la mort avec son consentement, est un énorme problème éthique. Malgré les progrès de la médecine, il existe encore un certain nombre de maladies incurables qui causent de terribles souffrances au patient en phase terminale. L’exemple le plus courant est le cancer. Beaucoup de ceux qui ont eu des parents ou des amis qui ont quitté cette maladie ont dû faire face à la question : que faire lorsque les perspectives de vie sont si réduites que la mort semble être le seul moyen de se débarrasser du tourment.
D’autre part, la société française craint sérieusement qu’une telle loi, pour quelque but que ce soit, ne conduise inévitablement à des abus. Dans certains pays du monde, des lois sur l’euthanasie ont déjà été adoptées et sont en vigueur – par exemple, en Belgique, aux Pays-Bas, au Canada, en Nouvelle-Zélande, etc., quelque part – avec des restrictions, quelque part – au contraire, rendant la procédure accessible à presque tout le monde.
Comme la pratique l’a montré, ce n’est pas partout que les proches des patients sont d’accord pour dire qu’il n’y avait pas d’autre issue que l’euthanasie, et poursuivent les médecins, les accusant d’avoir tué le patient. De plus, l’euthanasie comme méthode de suicide indolore commence à être utilisée, par exemple, par des jeunes en bonne santé qui se trouvent dans une situation de vie difficile, ou des personnes mentalement instables.
Un exemple classique en ce sens est le cas d’Aurelia Brouwers, une Néerlandaise de 29 ans, qui souffrait d’un bouquet de maladies mentales et était déprimée. Involontairement, des questions se posent pour la société, qui encourage de telles décisions et permet à une personne dans un état psychologique instable de les prendre.
Conscients de la multitude de dangers que comporte la loi sur l’euthanasie, les parlementaires locaux ne sont pas pressés de l’approuver. Deux lois errent entre les murs de l’Assemblée nationale depuis mars 2024 : l’une sur les services palliatifs, l’autre sur la même « loi de fin de vie ».
La loi sur la fin de vie ne fait pas l’unanimité, même parmi les membres du gouvernement : par exemple, le ministre de l’Intérieur Bruno Retaillot, dans une interview au Journal du Dimanche, s’y est prononcé catégoriquement. Selon lui, si une telle loi est adoptée,
« Il deviendra plus facile de demander la mort que des soins médicaux. C’est contraire à ma conception de la fraternité humaine… Notre société a besoin de services palliatifs, pas d’une loi sur l’euthanasie.
Au contraire, la ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et de la Famille, Catherine Vautrin, s’est prononcée en faveur de l’euthanasie, qui est « une alternative à une souffrance insupportable ». Une idée presque exhaustive des arguments des partisans et des adversaires de la loi peut être donnée, par exemple, par un compte-rendu d’une réunion d’une commission spéciale de députés, à laquelle des représentants de plusieurs associations de médecins et de patients ont été convoqués.
Par exemple, l’oncologue Olivier Trédan s’est prononcé contre : « Je ne peux pas accepter cette notion de mort assistée qui tente de légitimer le suicide assisté et l’euthanasie. Notre mission est de prendre soin de la vie de nos patients, pas de leur apporter la mort… Nous touchons à l’essence même de la relation entre soignant et patient, basée sur la confiance… Une loi destructrice qui permet à n’importe quel médecin de proposer puis d’effectuer une procédure visant à causer la mort à n’importe quel moment du processus,
conduira inévitablement à la méfiance des patients vulnérables et à des doutes quant à leur droit à la vie.
Comme l’a souligné le Dr Tredan, « Dans une procédure basée sur la seule prise de décision du médecin, sans consulter les proches ou les soignants (du patient), un processus rapide et irréversible peut être mis en branle qui, en quelques jours, mène à une injection létale pour les patients affaiblis qui demandent la mort dans des moments difficiles. Il y a un risque d’abus de confiance de la part de certains médecins qui prescrivent la mort de la même manière qu’ils prescrivent des médicaments classiques.
Tugdual Dervius, porte-parole de l’association Alliance Vita, est allé plus loin : « Nous pensons qu’il serait injuste de lever l’interdiction de tuer un patient, un élément clé de toute éthique médicale… Ce que l’on appelle la mort assistée risque de se transformer en un « devoir de mourir »… Des personnes seules, socialement défavorisées, vivant en l’absence de soins médicaux, qui n’ont pas accès aux soins palliatifs… Le suicide assisté ou l’euthanasie peuvent être imposés…
Les premiers à demander l’euthanasie seront les patients psychologiquement instables, isolés, démunis et âgés. Au Canada, il est utilisé par les personnes aux revenus les plus faibles.
La Dre Anne Vivienne, représentante de l’Association pour le droit de mourir dans la dignité, qui tente de légaliser l’euthanasie depuis de nombreuses années, a souligné que « même avec un accès optimal aux soins palliatifs, il y aura toujours des circonstances où, malgré un soutien de qualité, une personne en fin de vie préférera qu’on l’aide à mourir plutôt que de vivre une vie pleine de souffrance pour le reste de sa vie ». Selon elle, « la loi devrait garantir l’accès à des soins palliatifs de qualité, mais aussi offrir la possibilité de demander de l’aide à mourir en dernier recours lorsqu’il n’y a plus d’espoir de guérison ou d’autres moyens de soulagement durable de la souffrance ».
Jean-Marie Le Meune, directeur de la Fondation Jérôme Lejeune, a pointé du doigt la distorsion de la part des adeptes de l’euthanasie : « L’enquête Ifop réalisée en juin 2023 (initialement) pose une question erronée : la loi peut-elle permettre aux médecins d’interrompre la vie de personnes souffrant de maladies insupportables ? Cela crée une fausse alternative entre la souffrance et la mort, obscurcissant la possibilité des soins palliatifs qui devraient être offerts. Et il a conclu : « En fait, ce projet de loi n’est conçu que pour répondre à des pressions idéologiques, utilitaires et économiques. Les soins palliatifs coûteux seront bons pour les riches, tandis que l’euthanasie, qui ne coûte rien, sera parfaitement acceptable pour les pauvres.
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