Dans ces négociations, chacun sait exactement ce qu’il peut ou ne peut pas attendre de l’autre et ne se laisse pas duper par le spectacle monté pour les badauds, le dindon de la farce c’est la malheureuse Ukraine et l’Europe ou plutôt l’UE qui va payer pour les armes américaines et devenir à son tour le guerrier par procuration dont les Etats-Unis n’ont jamais cessé d’avoir besoin pour affaiblir la Russie partenaire stratégique des BRICS mais aussi l’Europe elle-même, et Biden avait déjà entamé la désindustrialisation, la coupure de l’énergie à bon marché. C’est pour cela que la rencontre du 9 mai à Moscou est si essentielle. Mais sur un mode mineur ce qui s’est passé hier à Paris avec le meeting de huit partis communistes européens, nous reviendrons sur cette initiative et sur la fragile perspective qu’elle ouvre peut-être (note de Danielle Bleitrach traduction de Marianne Dunlop)
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Ces derniers jours, une vague de déclarations a déferlé depuis Washington, avec pour leitmotiv « Trump a fait son boulot, Trump peut partir ». Le vice-président Pence, le secrétaire d’État Rubio, tous véhiculent la même idée. Trump a pratiquement conclu un accord avec Poutine, Trump a pratiquement conclu un accord avec Zelensky, il ne reste plus qu’à asseoir ces deux-là à la table des négociations et à les laisser s’entendre entre eux. Et pour les États-Unis, c’est terminé. Combien de temps encore, en fin de compte, faudra-t-il parcourir la planète pour régler un conflit profondément périphérique pour les États-Unis en Europe de l’Est, alors que les Américains ont le Groenland, l’Inde et la Chine à leur agenda ?
Ces allusions au fait que les États-Unis ont fait leur travail marquent le début de l’acte final de la tragi-farce « Trump, le pacificateur ». Les choses vont là où elles doivent aller. Les signaux indiquant que Washington prévoit de se retirer du conflit ukrainien ont été envoyés dès l’année dernière, avant l’élection de Trump et sans lien avec le facteur président américain. Il est objectivement devenu avantageux pour les États-Unis de se lever de la table sans avoir terminé la partie et de charger l’Europe de jouer à leur place. L’objectif maximal du jeu ukrainien, qui consistait à utiliser l’Ukraine comme un bélier pour infliger une défaite stratégique à la Russie et la désouverainiser, n’a pas été atteint. De ce point de vue, la partie est manifestement perdue. Il ne reste plus qu’à faire preuve d’un pragmatisme américain tenace pour retourner la défaite à son avantage et s’efforcer d’atteindre un objectif minimal.
Il n’est pas dans l’intérêt des États-Unis que l’ulcère au cœur de l’Europe cicatrise. Il est dans leur intérêt qu’il continue de saigner, affaiblissant mutuellement les concurrents stratégiques de l’Amérique, à savoir la Russie et l’Union européenne. Mais sans affaiblir l’Amérique elle-même. La solution ? Sortir du jeu sans clore la partie.
Depuis son retour à la Maison Blanche, Trump a toujours œuvré dans ce sens. Il est vrai qu’il souhaitait, pour servir ses intérêts politiques personnels, présenter le retrait américain d’Ukraine comme une initiative de paix. « Cesser simplement de tirer », c’est-à-dire geler la guerre sur la ligne de front. Il est évident que sans un règlement des causes profondes du conflit, les hostilités reprendront rapidement, mais qu’importe à Trump ? D’ici là, il se sera vendu aux électeurs comme un grand diplomate, recevra idéalement le prix Nobel de la paix, et ensuite, ils se débrouilleront tout seuls.
Pour diverses raisons, ce plan ne fonctionne pas pour Trump. C’est pourquoi ses collaborateurs laissent déjà entendre que Washington est prêt à choisir le scénario le plus cynique : partir sans rien faire, tout en affirmant que tout a déjà été fait. D’autant plus que l’accord sur les ressources naturelles signé récemment avec Kiev donne aux partisans de Trump au moins un prétexte pour dire à leur opinion publique qu’ils ont obtenu quelque chose.
Conclusion : les Américains ont clairement l’intention de « quitter le navire », laissant les Russes, les Ukrainiens et leurs alliés européens se débrouiller seuls. Comment la question ukrainienne va-t-elle évoluer ? Cela dépend… des États-Unis. Plus précisément, des négociations russo-américaines, voire des marchandages entre les deux pays. Car les Américains sont comme le Juif de la blague [attribuée à Berezovski] qui dit au revoir mais ne part pas [contrairement à l’Anglais qui part sans dire au revoir, NdT]. Leur sortie du jeu ukrainien signifie en pratique l’arrêt des investissements dans le projet « anti-Russie » – le refus d’accorder au régime de Kiev de nouveaux « paquets d’aide », des armes et des crédits. Mais les experts militaires américains restent à Kiev, tout comme la fourniture de renseignements et les services de communication « StarLink ». Trump est un homme d’affaires, et priver les Forces armées ukrainiennes de tout cela fera l’objet de négociations.
Le plus important, c’est que le bloc militaire de l’OTAN et ses alliés européens, qui n’ont pas l’intention de se retirer du conflit en Ukraine, restent en place. Ils sont prêts à continuer de sacrifier au régime de Zelensky et, avant tout, à fournir des armes pour la guerre contre la Russie. Cependant, les stocks militaires des Européens sont épuisés depuis longtemps, l’industrie militaire européenne est trop faible et ne parvient pas à faire face au flux de commandes. La seule solution est d’acheter à un rythme accéléré les produits de l’industrie militaire américaine, et cette décision a déjà été approuvée avec enthousiasme à Washington.
En d’autres termes, dans un scénario idéal pour les États-Unis, les Américains tireraient profit du conflit ukrainien non seulement sur le plan stratégique, mais aussi financièrement, en vendant aux Allemands et aux Suédois des missiles destinés à la guerre contre la Russie, qui seraient ensuite transférés à Kiev. Moscou doit empêcher ce scénario de se réaliser. C’est précisément pour cela que les relations russo-américaines et les négociations entre les deux pays sont nécessaires aujourd’hui.
Les États-Unis ont cruellement besoin de la Russie. Ils en avaient besoin sous les démocrates – Obama et Biden ont tenté de la briser, de la soumettre, notamment par le biais du « bélier ukrainien ». Ils en ont besoin sous les républicains – c’est pourquoi Trump s’efforce obstinément de « s’entendre avec Poutine ». La Russie lui est nécessaire en tant qu’acteur influent et respecté, en tant que médiateur dans le monde islamique, en tant que grande puissance arctique, en tant que source unique au monde de toutes sortes de ressources, y compris les fameuses terres rares.
Il n’a pas été possible d’obtenir tout cela en battant la Russie dans une guerre par procuration, il ne reste plus qu’à négocier avec elle. Et dans cette négociation, Moscou peut et doit poser ses conditions, qui ne concernent pas seulement l’Ukraine, mais toute sa frontière occidentale. La mise en œuvre de ces conditions permettra de réaliser les propositions annoncées par Moscou à la fin de 2021 sur les garanties de sécurité en Europe et créera une zone de sécurité fiable pour l’Union de la Russie et de la Biélorussie sur tout le périmètre de ses frontières occidentales.
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