Histoire et société

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Pourquoi le Monde global ne peut accepter la Parade militaire de la Victoire du 9 mai en Russie

mardi 15 avril 2025

Nous publions aujourd’hui un important article du président du KPRF, les communistes de Russie, G. Ziouganov qui annonce dans le cadre des cérémonies du 9 mai un important meeting internationaliste antifasciste auquel sont conviés toutes les forces progressistes, de gauche et partis communistes. Nous savons d’expérience pour en avoir discuté au meeting de Vénissieux que ni la direction du PCF, ni celle du PTB n’avaient connaissance de cette invitation. Comme ils ignorent totalement la position réelle du KPRF et de beaucoup de Russes face à la guerre, aux « négociations » actuelles. La censure qu’exerce l’UE, l’interdiction de voyager, de connaitre ce qui se publie en Russie pour mieux nous faire accepter le narratif de guerre et la faire payer aux peuples. Il s’avère que la traduction simultanée de deepl n’y suffit pas, il faut comme Marianne Dunlop, lire le russe, toute la presse et savoir faire comprendre les enjeux réels qui se rapprochent beaucoup de ceux du peuple français et de la direction du PCF, de ce que Fabien Roussel a défendu comme ligne au meeting de Vénissieux. Nous avons dans ce blog le souci des convergences réelles et de la victoire sur la censure. (note de Danielle Bleitrach histoireetsociete)

La victoire sur le nazisme est une date dangereuse pour le Monde global, car elle place la Russie dans le camp des vainqueurs, rappelle que la plus grande partie de l’Europe a activement collaboré avec les nazis et que les Etats-Unis n’ont pas « sauvé le monde » tous seuls, bien loin s’en faut. Cette mémoire doit être effacée, l’UE menace les dirigeants qui accepteraient de participer aux cérémonies de la Victoire le 9 mai à Moscou. La « Réconciliation » ne peut signifier que « Soumission ».

Cette année, nous célébrons les 80 ans de la fin de la Seconde Guerre mondiale, appelée Grande Guerre Patriotique en URSS, donc pour la Russie et tous les pays de l’espace post-soviétique, qui constituait un seul pays, et constituent historiquement un seul espace civilisationnel.

Les nations se constituent autour de symboles communs et celui du 9 mai est l’un d’entre eux. C’est bien la raison pour laquelle il fut attaqué dès la chute de l’URSS, notamment en poussant les pays d’Europe de l’Est et ceux apparus suite au démantèlement de l’URSS à passer du 9 au 8 mai, comme cela est célébré en Occident.

Cette différence vient tout d’abord de la précipitation de Churchill d’annoncer le premier à la BBC la capitulation de l’Allemagne nazie et ensuite du fait que cette capitulation a été signée dans la nuit du 8 au 9 mai, quand il était déjà le 9 à l’heure de Moscou.

En 2004, après la chute de l’URSS et l’avènement du Monde global, il ne peut plus y avoir de Victoire, car alors il y aurait des vainqueurs et des vaincus. Le Monde global ne peut être qu’un, il ne peut y avoir que le souvenir (des guerres passées) et la réconciliation (autour d’un seul maître). 

L’ONU, cet organe de gouvernance globale, rebaptise donc les 8 et 9 mai en Journées du souvenir et de la réconciliation. Dans la pure logique orwelienne de notre époque, le souvenir renvoie à l’oubli et la réconciliation à la soumission.

L’oubli de la collaboration généralisée, plus ou moins active, des pays européens avec le régime nazi et le soutien industriel, énergétique, financier apporté par les pays Alliés, comme les USA ou la France, à l’Allemagne nazie. On oubliera le refus le 16 avril 1939 de la France et de la Grande-Bretagne de conclure un accord d’entraide militaire avec l’URSS contre l’Allemagne nazie, il est vrai que ces grandes démocraties européennes avaient déjà conclu des accords avec l’Allemagne nazie. On oubliera que parmi les prisonniers de guerre faits par les Soviétiques, l’on retrouvera beaucoup de ressortissants des pays européens.

Il faut se réconcilier … autour d’une réécriture de l’histoire, dans laquelle les Etats-Unis jouent le rôle central de la libération de l’Europe, quand le rôle fondamental de l’Union soviétique est petit à petit gommé de la conscience collective, grâce au reformatage des programmes scolaires, aux surproductions hollywoodiennes et à la prise en main des élites dirigeantes en Europe.

Comment dans ce contexte, digérer le 9 mai ? Impossible, il est absolument indigeste. Il est un anachronisme, un fantôme du monde d’avant, d’avant la globalisation. Chaque année, les cérémonies du 9 mai provoquent des réactions hargneuses, dans ces pays, où la collaboration est un art de vivre, où l’on glorifie ses héros – collaborateurs ou véritables nazis, qui eux ont le droit de défiler, quand l’Europe de l’Ouest fête au mieux la Libération (mais non pas la Victoire) au pire l’Oubli et la Soumission.

Cette date est à ce point symbolique, que le grand démocrate Eltsine a annulé la traditionnelle Parade militaire du 9 mai en 1992 et a organisé une parade « de la Paix », avec un défilé des orchestres militaires non seulement des pays alliés, américains en tête, mais aussi allemands et italiens. Les défilés militaires furent réguliers à partir de 1995 … jusqu’à l’ère covidienne et l’annulation de la Parade de 2020. Mais même ici, la formulation a dépassé l’absurde : « déplacer » la Parade de 2020 … L’ère eltsinienne laissait encore des traces, il était difficile d’annoncer sa simple annulation. Le Régiment Immortel fut également annulé et les personnes qui osaient marcher dans la rue avec des portraits de leurs parents, étaient pris à partie par les forces de l’ordre. 

L’ordre global ne plaisante pas avec le symbolisme politique, lui en comprend l’importance.

Il est donc tout à fait logique, que pour les 80 ans de la Victoire, l’UE ne puisse accepter les grandes cérémonies prévues à Moscou, où doivent prendre part des chefs d’Etat et de Gouvernement étrangers. Ainsi, la responsable de la diplomatie européenne de menacer directement ceux qui auraient l’idée de mettre les pieds « chez l’ennemi » :

« De nombreux ministres ont déclaré que l’UE prenait au sérieux les déplacements à Moscou pour les célébrations du 9 mai et qu’ils auraient des conséquences », a déclaré la cheffe de la diplomatie européenne Kaja Kallas.

L’UE demande aux pays des Balkans occidentaux souhaitant adhérer à l’UE d’éviter le défilé du 9 mai à Moscou. Une telle participation « ne sera pas prise à la légère par l’UE », selon Mme Kallas.

Ces déclarations ont choqué en Russie, dont certains ne trouvent pourtant rien de mieux que d’en appeler … à la Cour de Justice de l’ONU. Bref, l’organe suprême de la globalisation devrait châtier ses enfants et remettre de l’ordre dans son troupeau … Nous sommes bien loin d’une révolution cognitive. Si les élites russes veulent réellement condamner ces personnes, il va falloir avoir le courage de condamner ce monde. Et ce n’est pas en négociant qu’il sera possible de réellement changer les choses.

Publié par Karine Bechet-Golovko à 10:37 

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Libellés : 9 maiparaderussieseconde guerre mondialeUnion européenne

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