Nous avons choisi Marianne Dunlop et moi, dans la partie de l’ouvrage collectif que nous avons consacré à la rencontre possible entre la France et la Chine accorder une large place à la relation Chine-Russie, ce n’est pas moins de trois chapitres qui sont consacrés à l’approfondissement de cette relation. Notre démonstration est assez proche de celle faite ici par Piotr Akopov qui n’est pourtant pas communiste mais soutien du président Poutine. La relation entre la Chine et la Russie est profonde tant dans sa dimension historique que dans le fait qu’elle ne s’est pas construite simplement en réaction à l’hostilité de l’occident. Relations de voisinage qui se sont renforcées paradoxalement à la chute de l’URSS pour ensemble empêcher l’explosion de l’Asie centrale et relations vers le sud dans un monde multipolaire qui tente de trouver ses propres lignes forces. Actuellement les pourparlers avec les USA à cause de ce contexte ne mettent pas en cause au contraire le partenariat stratégique. (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)
https://ria.ru/20250225/tramp-2001351539.html
Il est impossible de séparer la Russie et la Chine, et la relation entre les deux pays a une valeur stratégique unique. Il s’agit essentiellement d’une réponse aux spéculations entourant les implications du revirement de Trump sur l’Ukraine et le dialogue américano-russe qui s’est engagé, et cette réponse prend la forme de citations tirées de la conversation entre les dirigeants de la Russie et de la Chine.
Que l’entretien téléphonique de Vladimir Poutine et Xi Jinping ait coïncidé avec le troisième anniversaire du début de la SVO est, bien sûr, une coïncidence, mais plus que symbolique. Tout comme le fait qu’il y a tout juste dix jours était célébré le 75e anniversaire de la signature du traité d’amitié, d’alliance et d’assistance mutuelle au Kremlin – en présence de Staline et de Mao. Certes, un autre traité d’amitié est aujourd’hui en vigueur entre nos deux pays, qui ne contient aucune disposition relative à une alliance militaire, mais les deux dirigeants ont souligné à maintes reprises que le niveau actuel des relations dépasse tout ce qui s’est passé au cours des siècles d’histoire des liens entre la Russie et la Chine.
Et ce n’est pas une exagération : trois ans de conflit ukrainien ont montré que Moscou et Pékin se tiennent effectivement « dos à dos ». Car nous avons deux composantes essentielles des relations étroites : la confiance et une vision similaire de l’avenir (à la fois de notre interaction et de l’ordre mondial). Certes, la Chine n’était pas notre allié militaire officiel dans le conflit avec l’Occident, mais elle était et reste un allié géopolitique, ce qui, dans la situation mondiale actuelle, est extrêmement important. Tout comme il est très important pour la Chine que la Russie ne soit pas seulement un arrière fiable, mais un partenaire aux vues similaires visant à construire un nouvel ordre mondial post-occidental.
Ce n’est donc pas une coïncidence si Xi Jinping a déclaré à Poutine : « L’histoire et la réalité montrent que la Chine et la Russie sont de bons voisins qui ne peuvent être séparés et de vrais amis, qui partagent les joies et les difficultés, se soutiennent mutuellement et poursuivent un développement commun ».
La nouvelle formulation mentionnée dans le rapport russe sur la conversation n’est pas une coïncidence : « Le lien entre la Russie et la Chine en matière de politique étrangère est le facteur de stabilisation le plus important dans les affaires mondiales ».
Un lien n’est pas seulement une alternative aux termes « alliance » ou « union », c’est une caractéristique réelle de l’interaction stratégique étroite entre les deux pays sur la scène mondiale. Il était particulièrement important de souligner ce point à un moment où les spéculations sur les causes et les conséquences de la volte-face de Trump se multiplient : le changement brutal de la position américaine sur la crise ukrainienne a non seulement stupéfié les atlantistes européens, mais a également suscité de nombreuses spéculations sur « ce que Trump exigera de la Russie pour l’Ukraine ». La réponse la plus populaire est, bien sûr, l’affaiblissement des liens avec la Chine, car la nouvelle administration a parlé à plusieurs reprises d’affaiblir le lien entre Moscou et Pékin et a fait valoir que la Russie ne voulait pas être le petit frère de la Chine. Mais tous les arguments sur les chances de Trump de parvenir à un tel accord sont totalement inutiles, pour la simple raison que Poutine n’accepterait jamais une telle combinaison. Les relations avec la Chine sont véritablement stratégiques pour la Russie, et ce choix ne peut être modifié par des promesses ou des pressions. Il en va de même du côté chinois – et Xi l’a également dit : « La relation Russie-Chine a une puissante force motrice interne et une valeur stratégique unique, elle n’est pas dirigée contre une tierce partie et n’est pas influencée par une tierce partie. »
Par conséquent, aucune rencontre entre Poutine et Trump (et notre président a parlé à son homologue chinois du début du dialogue russo-américain) ne changera fondamentalement rien à l’engagement de Moscou et de Pékin sur la voie du renforcement du lien, et après la fin des hostilités, personne ne pourra creuser un fossé entre nos pays. Poutine et Xi se rencontreront au moins deux fois cette année : à Moscou en mai et à Pékin en août-septembre (et il est possible qu’ils se rencontrent en marge du sommet des BRICS au Brésil, si les deux présidents y sont présents). Ils auront l’occasion de discuter et de coordonner, entre autres, notre politique à l’égard de l’Occident, qui n’est plus aussi uni. Et les tactiques distinctes dans les relations avec les États-Unis et l’Europe ne feront qu’accroître les opportunités pour la Russie et la Chine.
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