Je vais transmettre cette lettre à Fabien Roussel qui a, entre autres qualités celles d’entendre y compris quand on n’est pas très respectueux mais il sait quand il y a volonté d’aider de la part de gens qui n’ont plus rien à prouver mais qui restent communistes comme lui… Nous avons besoin de cette réflexion collective et ça il l’a compris, le tout c’est qu’il perçoive en quoi cette réflexion peut être réellement utile à tous les camarades du parti, au pays, il n’entend qu’à ce prix et il n’a pas tort… Cependant l’apport intellectuel est rarement “direct” pourtant là nous sommes en pleine actualité y compris les licenciements de Michelin … Xuan a raison, l’élection de Trump est un symptome de l’ampleur du bouleversement et comme il le dit” La direction du PCF avance tout doucement dans cette jungle mondiale. Elle se rappelle qu’il faut sortir de l’OTAN et s’intéresse à l’essor des BRICS. C’est un premier pas. Il n’est pas encore question du blocus de Cuba, encore moins de celui de l’Iran, ou des sanctions contre le Venezuela, ni des pays socialistes. Or l’essor de la Chine Populaire est un atout, et un exemple dans la nécessité de se fixer pour objectif une société socialiste à la française.
Il faudrait mettre l’accent sur ce dernier point, Jean-Claude a entièrement raison là-dessus. Et c’est là que des intellectuels, ceux qui 24 heures sur 24 s’occupent à tenter de comprendre peut être utile, des intellectuels il y en a peu alors qu’il y a beaucoup de courtisans, Histoireetsociete a cette contribution et n’en veut pas d’autre. (note de danielle Bleitrach)
Je voudrais d’abord dire pour dialoguer avec Michel, que Trump n’a malheureusement pas le monopole de l’idéologie fasciste et que la fraction des classes dirigeantes américaines qui soutient les Démocrates est non moins fasciste que celle qui soutient Trump, dont les petits, les nobodys, ne sont que l’un des soutiens. On le sait, l’histoire au moins nous l’a appris, les fascistes, ce sont les gros, bien avant les petits, qui n’en sont que la piétaille. Je pense que ton idée, Michel, selon laquelle le communiqué de Roussel est une façon de combattre la diffusion de l’idéologie fasciste n’est pas correcte et je te propose de généraliser : combattre pleinement la diffusion de l’idéologie fasciste, dont Trump n’est que l’un des porte-paroles, suppose de combattre l’IMPERIALISME GLOBAL dont les classes dirigeantes nord-américaines assurent la direction, et dont les dirigeants impérialistes français font partie. Et leur idéologie fasciste.
En tant que membre du PCF, je reçois régulièrement des notes d’information. Elles commencent à peu près toutes par «Jean-Claude». Moi, ça me fait rigoler parce que je me dis que ce genre de fraternité verbale, cette camaraderie sympathique, est uniquement un effet des technologies et que derrière, il n’y a rien. Mais revenons à nos moutons. Supposons que je sois une petite souris dans le bureau de Fabien Roussel et que celui me demand-cie : «Dis-moi, petite souris, quels sont, selon toi, les points importants que je devrais mettre dans mon communiqué?».
Extrêmement flatté d’être comparé à une petite souris, car en réalité je suis un gros et vieux rat noir à moustaches, plein de rhumatismes et parlant quelques mots de chinois, je lui dirais :
Cher Monsieur le Secrétaire national du PCF,
Cher camarade,
Cher Fabien,
D’abord je suis d’accord avec Danielle, ton communiqué d’aujourd’hui est mieux, bien mieux que d’autres que tu as commis ou signés antérieurement. Tu progresses. Mais fais attention quand même, le temps presse. Le troisème millénaire, c’est bientôt. Si tu me permets, et pour faire court, si j’étais toi je mentionnerais immédiatement 3 points, qui sont absents de ton propos, me semble-t-il. J’ajouterais un quatrième sur lequel, ma religion n’est pas encore bien faite.
1)Le premier, c’est l’impérialisme. Il faut que les Français comprennent, s’ils l’ont oublié, que le système capitaliste a évolué depuis la fin du XIXe siècle et que Lénine a commencé à rendre compte de ces changements. Il a parlé de pourrissement. Vois tu, les Etats-Unis nous offrent le spectacle de ce que peut devenir la démocratie bourgeoise dans le centre de l’Impérialisme global, dont la France est l’une des composantes : un spectacle de pourrissement.
La démocratie bourgeoise française, dont nous communistes, avons cru que nous pourrions la pervertir et en faire un chemin vers le socialisme, eh bien il va falloir que nous reconsidérions sérieusement notre position à son égard. L’impérialisme global est un impérialisme rentier. Ses entités, le capital financier dont François Morin a fait en son temps une bonne description, sont si grosses qu’elles pompent la plus-value au lieu de la produire. Cet impérialisme est rentier. C’est pour ça qu’il est monétaire.Il pompe la plus-value en achetant et en vendant et non en produisant. Il n’en a rien à foutre de produire, sauf des armements. Il presse et surexploite ceux qui produisent. Les entreprises sont avec lui des marchandises et la valeur actionnariale a depuis longtemps déjà remplacé la valeur ajoutée. Bernard Gerbier a écrit de bons textes là-dessus. Tu les trouveras dans la revue que dirige Rogalski vers les années 2010. Bref cet impérialisme rentier est à bout de course. Il est comme un cheval qui aurait trop courru. En même temps c’est un tigre, un animal dangereux mais maîtrisable.
Voilà ce que, à mon humble avis, tu devrais expliquer aux prolos qui croient que leurs malheurs viennent des «immigrés», c’est-à-dire de ces gens qui ont été chassés de chez eux par la misère et les horreurs de la guerre et qui auraient préfére touver dans leur pays la paix et la tranquillité.
Voilà sur ce premier point. Je ne suis qu’une modeste souris et ce que je dis là, c’est parce que j’ai eu l’honneur de manger quelques petits morceux de la Contribution à la Critique de l’Economie politique, un véritable festin. Comme je suis non seulement une petite souris mais un vieux et gros rat, j’ai eu la chance de manger quelques lignes écrites de la main même de Lénine. Quel délice! Tu en fais ce que tu juges approprié.
2)Mon deuxième point, vois-tu, Fabien, c’est la Révolution scientifique et technique de notre époque; Tu n’en dis pas un mot, pourquoi? Même si je suis qu’une petite souris, j’ai eu l’occasion de voir, en les mangeant, comment évoluaient les livres ainsi que leur contenu et je t’assure que tu n’es pas à la hauteur sur ce point. Moi, je fais partie de l’équipement régulier des ordinateurs. Mais toi, ma parole tu en es à l’époque où on faisait des «Vieux Lille» dans des marmites en terre cuite.
A ces prolos qui sont tes amis, qui devraient être tes amis, tes soutiens, tes camarades de combat et qui se laissent embringuer par ces suppôts de l’impérialisme (et donc de la très grande bourgeoisie française, ce qui n’est pas la même chose que «les banquiers») que sont le Rassemblement national et les autres groupes de l’extrême droite française, tu devrais expliquer ce qu’est cette révolution. Ce n’est certainement pas «un révolution informationnelle». Tout est information. Parler de révolution informationnelle, en quoi cela peut-il être intéressant? Une révolution des forces productives, c’est UNE REVOLUTION DU TRAVAIL. Voilà ce que, par parenthèse, tu devrais expliquer aux prolos. L’avenir de la France industrielle, intellectuelle et de service se trouve dans le développement de la REVOLUTION NUMERIQUE en cours, qui concerne, tous les tous les travaux et qui, pour se développer, suppose une instrumentation mathématique de très haut niveau, que des jeunes gens ont peu, malheureusement, la capacité et surtout l’envie d’acquérir.
Au lieu que cette révolution numérique, que Ivan Lavallée par exemple a proposé d’appeler UNE CYBER-REVOLUTION parce qu’elle combine la machine universelle de Turing (les ordinateurs) et la cybernétique, soit dévoyée par les gros, encore eux, les AMAZON et compagnie, qui en font des instruments d’extension simultanée du TEMPS de travail et de l’INTENSITE du travail, au lieu que cette révolution soit dévoyée par «les marchands de canons» et par «les faiseurs d’opinion», il nous faut ramener cette révolution dans la mouvance du peuple, la mettre à son service, repenser le travail et d’abord la formation du travail en fonction d’elle. Je me répète, pourquoi tu n’en parles pas?
Entre parenthèse, Fabien, je me rappelle avoir lu, dans l’une de tes première publications, que tu étais heureux de voir tes enfants être libres de choisir ce qu’ils veulent à l’école. Tu es sûr qu’un baccalauréat à peu près nul est en mesure de satisfaire les besoins immenses de formations nouvelles auxquelle notre pays doit aspirer? Tu es sûr qu’il ne faudrait pas un petit peu encadrer ces jeunes, les aider à faire des choses peut être un peu difficiles, des maths par exemple, mais qui sont autre chose que «faire ce qu’on veut», un DEA de théâtre option couture, par exemple. Parce que, former des nuls et ensuite mettre en place un système de sécurité emploi formation, pour pallier la défaillance des nuls, c’est extrêmement couteux et ce sont les prolos qui payent. Sois sympa, ne me parle pas de ces polytechniciens qui n’arrivent pas à trouver un emploi.
Mine de rien, tu devrais venir faire un tour en Chine et, au lieu de raconter des ânneries sur les Ouigours, tu devrais notamment voir comment les enfants de Chine bossent, et cela avec plaisir, parce que leur pays a 5000 ans de culture, d’école, de poèmes et de passion de la connaissance entre les deux oreilles, et que le fait de bosser est la combianaison de ce qu’ils ou elles sont comme petits et jeunes individus et des besoins de la nation dont ils et elles sont des membres à part entière.
3)Mon troisième point, c’est le socialisme. Je vais être bref. Il faut laisser la peur de Staline et celles du socialisme chinois aux bêtes à cornes. D’autant plus que la peur de Staline, c’est aussi le moyen, pour un certain nombre de petits bourgeois radicalisés de ne JAMAIS concevoir que nous devrions mener le combat pour une autre société, UNE SOCIETE QUE L’ON APPELLE SOCIALISTE, non pas parce qu’on a lu Lénine ou pour faire plaisir au spectre de Staline, mais parce que les forces productives sont désormais de portée mondiale, elles sont de portée de plus en plus sociale et il convient de mettre les rapports sociaux de production en accord avec ces monstres contemporains de socialisation. Parler de socialisation veut dire, par exemple, que la révolution numérique peut transformer TOUS LES TRAVAUX et pas seulement le travail industriel de production, parce nous sommes concernés par le COMPORTEMENT DE TOUS LES PAYS et pas seulement par notre nombril national, parce que le développement ou le non développement de tel ou tel coin de la terre a des répercussions partout, parce que les sociétés exigent désormais que le développement se fasse AU BENEFICE DU PEUPLE, DES PEUPLES et non au bénéfice de quelques uns.
Au lieu d’agir et de penser comme des personnages ratatinés et haineux, repliés sur eux mêmes, des romans de Marcel Aymé, personnages qui sentent la haine, la délation et la pisse, nous avons nous, communistes, et toi, Fabien Roussel, l’un des premieirs je veux le croire, l’ambition D’OUVRIR LE MONDE A TOUTES ET A TOUS, SUR TERRE. Nous ne sommes pas des missionnaires religieux. Nous observons simplement que le socialisme, c’est pour nous et pour ceux qui s’ emploient à le développer ou qui luttent pour son avénement, une certaine façon, que nous apprécions, d’être des êtres humains. Nous sommes des êtres humains parce que nous essayons d’agir comme des êtres sociaux et nous sommes d’autant plus poussés vers ces rivages socialistes que les forces productives et notre conscience désormais de pouvoir faire l’histoire au lieu de la subir comme une puissance naturelle, nous en indiquent le chemin.
4)Je passe au quatrième point, sur lesquel je pense que nous devrions avoir une reflexion collective plus prononcée. Voilà, c’est la question du développement. Comment faire? Commme l’a rappelé Xuan, avec vigueur, ce n’est pas la faute aux Chinois si notre industrie automobile et si les copains du Nord sont en difficulté. Dire ça, c’est faire du Marcel Aymé, précisément.
L’ennemi, c’est l’Impérialisme et les classes de vautours puants qui l’animent et en bénéficient. L’ennemi c’est donc, notamment, la libre circulation des capitaux. Retenons de ce grand bourgeois que fut Keynes ce que nous pouvons en retenir. Ce dont il faut se méfier absolument, C’EST DE LA LIBRE CIRCULATION DES CAPITAUX, ce n’est pas de la libre circulation des marchandises; Il nous faut également sortir de ces traités, comme celui de Maastricht, qui nous enferment dans les cages aménagées par les classes impérialistes d’Europe. Cela dit, il y a un problème à affronter et à résoudre. QUE FAIRE PRECISEMENT AVEC LA LIBRE CIRCULATION DES MARCHANDISES?
Nos camarades chinois éprouvent une sorte de confiance totale dans la libre circulation des marchandises. Cela tient à mon avis à ce qu’ils forment une économie de très grande taille. Mais nous, petite économie, avec des savoir-faire mais un petit marché, nous nous demandonc ce que nous devons faire. Faut-il protéger la réindustrialisation de la France? Mettre des barrières de protection et reconstruire? Comment faire?
Je passe sur tous les prérequis nécessaires à toute politique d’industrialisation, en France, à savoir foutre en l’air les Macron et toute cette merde de brigandes qui gouvernent ce pays et en absorbent la richesse, arrêter notre servitude à l’égard de l’Union européenne, reconquérir notre souveraineté monétaire, budgétaire, intellectuelle, scientifique, informatique. Cela sera possible si nous faisons la révolution. Et même dans ce cas, il faudra vraisemblablement, considérer que les choses ne se feront pas en cinq minutes. Notre tâche est aussi de préserver l’existant, comme disait un dirigeant communiste nordiste. Il convient énfin et c’est sans doute la priorité de consulter les intéressés, comment voient ils leur avenir et l’avenir intellectuel et industriel ainsi que de services de la France?
Mais au delà? Je me permets d’avancer 3 éléments pour la discussion.
1)C’est une exigence, il faut sortir de l’impérialisme, de son système guerrier, des dépenses auxquelles il nous conduit pour sauvegarder les fortunes d’une poignée de capitalistes. Certes, ce n’est pas simple. Mais rien n’est simple. Et ne pas en sortir sera encore moins simple, si, comme nous devons en faire raisonnablement l’hypothèse, les Etats-Unis reportent sur l’Europe le cout de la guerre en Ukraine et si en plus, leurs dirigeants débiles cherchent à nous entraîner dans un conflit armé avec la Chine, par Taiwan interposée.
2)Il conviendrait donc de se rapprocher avec fermeté et non du bout des lèvres, de la Chine. C’est bien de rencontrer les Vietnamiens, mais si on en reste là, cela apparâitra comme un alibi pour ne pas rencontrer les dirigeants de la Chine et voir avec eux ce que nous pouvons faire ensemble, en évitant de leur donner des leçons de démocratie et de comportement avec les Ouigours. Les Chinois sont des gens cultivés et ouverts. Ils sont prêts à discuter de tout, sauf des âneries. Si nous communistes, français, nous n’avons à mettre sur la table de discussion que des problèmes internes aux Chinois, alors, oui, ne faisons rien. Rendons visite aux Vietnamiens de temps en temps, pour la photo.
3)Le troisième élément concerne les BRICS. Cette organisation rassemble aujourd’hui, autour de plusieurs grands pays dont la Chine, la Russie et l’Inde, tout un sensemble de pays en développement. Ils veulent se développer. Ils ne savent pas comment faire mais ils commencent à en avoir marre «des Ricains». Cela veut-il dire que ce regroupement serait uniquement un regroupement «de sous-développés»? Personnellement, je ne le crois pas et il me semble que ce serait une proposition combattive de la part des communistes français que de proposer que notre pays lui soit associé et peut être en devienne membre.
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Niurka Règle
Lire, enfin quelque chose de sérieux qui donne à réfléchir, à discuter et à projeter. C’est le seul espoir et la seule manière de donner un désir de socialisme (de communisme ?). Merci.
Niurka Règle