Parmi les atteintes insupportables à la conscience du peuple français, des gens de gauche, des communistes français, il y a l’invraisemblable tolérance qui semble s’être installée autour de l’injustice subie par le peuple cubain. Alors que l’unanimité y compris de l’UE et de la France parait se faire dans la dénonciation du blocus, dans la réalité s’est installée une tolérance de fait devant le crime. Comme si on avait tous les droits face au communisme et que les communistes eux-mêmes s’inclinent… Là encore il faut noter que ce qui se réalise encore y compris en France dépend dans une large mesure de l’impulsion des communistes, comme on l’a vu avec la campagne d’André Chassaigne, les actions encore isolées pas assez relayées de tous ceux qui continuent à soutenir la cause la plus juste du monde qui ne peut pas se dissocier de la profonde transformation géopolitique qui s’opère au plan international. (note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)
Le journaliste Pietro Fiocchi, membre du Parti communiste italien, a interviewé le professeur Ivan Cardillo, président du Think Tank Institute of Chinese Law, qui s’est exprimé sur le siège économique, commercial et financier obsolète et criminel des États-Unis contre la plus grande île des Antilles.
Les initiatives populaires importantes, récurrentes et même récentes pour réclamer en chœur, de la rue aux organisations internationales, la fin du blocus contre Cuba, suggèrent que le moment est venu de tourner la page…
Pour mieux comprendre la complexité des dynamiques à l’œuvre et avoir un point de vue particulièrement compétent, nous nous sommes adressés à un expert, le professeur Ivan Cardillo, professeur universitaire de droit chinois et de systèmes juridiques comparés, président de l’Institut de droit chinois (www.dirittocinese.com) et président de l’Italy-China Business Development Forum. Il est un promoteur actif des canaux de dialogue internationaux, impliquant des experts de haut niveau dans divers domaines.
– Professeur Cardillo, que pensez-vous, d’un point de vue strictement juridique, de l’existence depuis plus de 60 ans d’un blocus économique, commercial et financier contre Cuba, une réalité imposée qui rend en fait presque impossible le développement du peuple cubain et la pleine réalisation des objectifs de développement durable des Nations unies ?
– Les Nations unies ont demandé à plusieurs reprises aux États-Unis de mettre fin à l’embargo (blocus) contre Cuba, et presque tous les pays se sont prononcés en faveur de l’île. L’embargo (blocus) n’affecte que directement le commerce entre les États-Unis et Cuba, mais indirectement l’ensemble de la communauté internationale qui, par crainte de sanctions secondaires, restreint ses échanges avec l’île cubaine.
Au total, 31 pétitions ont été déposées pour mettre fin au blocus économique. Le blocus affecte tous les aspects du pays, l’économie, les transports, l’alimentation, la santé, l’éducation, etc.
Le Parlement européen a qualifié sans équivoque le blocus de violation des droits de l’homme. Le point de vue juridique est toujours très complexe à analyser dans ces cas. Il y a d’une part le droit au développement d’un pays, Cuba, et d’autre part le droit à la sécurité des Etats-Unis qui se sentent menacés par Cuba.
Ce sentiment d’insécurité trouve évidemment son origine dans la diversité culturelle et politique qui caractérise l’île, trop proche géographiquement de l’Amérique pour être ignorée et laissée à elle-même et à son autodétermination, ce qui la placerait dans l’orbite de pays et de cultures que les États-Unis ont toujours combattus.
C’est la dynamique du conflit entre le Soi et l’Autre, de la peur de l’autre et de la diversité. La valeur à rechercher dans ce contexte est celle de la tolérance.
– Dans le domaine des relations internationales, face aux actes d’arrogance et de violence politique des grands contre les petits, le droit succombe-t-il toujours ou peut-il, avec les bonnes stratégies, offrir des instruments efficaces pour rendre la justice ?
Le droit international est un droit volontaire, c’est-à-dire que son respect est entièrement soumis à l’acceptation volontaire des États, qui doivent rester souverains.
C’est pourquoi il n’existe pas de tribunaux mondiaux véritablement exécutoires. De nombreuses institutions internationales connaissent des phases de blocage dans leur fonctionnement, parce que les rapports de force sous-jacents étaient à la recherche d’un nouvel ordre.
En ce sens, c’est le pays économiquement le plus fort qui dicte la ligne de conduite générale, souvent inspiré par la nécessité de maintenir cette supériorité et cette domination.
Aujourd’hui, l’ordre mondial est secoué par de nouvelles tensions. L’ordre unipolaire américain, fondé sur un certain système de valeurs et sur la doctrine Monroe qui théorise l’expansionnisme et l’ingérence, se sent menacé par la montée en puissance de la Chine, un pays inspiré par d’autres valeurs, suivi par de nombreux pays dits en développement ou du tiers monde.
Ces pays représentent une population plus importante que celle des pays du G7. Le mécanisme démocratique devrait reconnaître leur plus grande valeur, mais ce n’est pas le cas, car d’autres paramètres sont également pris en compte : la richesse, la puissance militaire et la puissance politique, y compris le soft power.
Un ordre international multipolaire serait sans doute plus démocratique, les pôles pourraient se limiter et contenir les dérives abusives de puissance.
C’est comme si le monopole de l’ordre mondial disparaissait et que tous les citoyens pouvaient bénéficier de la concurrence entre les systèmes. Dans cette pluralité, la justice serait plus facile à atteindre.
Les outils disponibles à cet égard sont les alliances régionales, les accords commerciaux et la perméabilité des économies. Ce n’est qu’en atteignant un certain poids spécifique en termes de PIB que les pays émergents peuvent acquérir un pouvoir de négociation dans la dynamique internationale.
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