Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Qu’est-ce que les sociétés mésoaméricaines nous apprennent sur le passé, le présent et l’avenir possible de l’humanité ?

Toujours dans le cadre de nos réflexions du weekend dans lesquelles nous tentons d’élargir et d’éclairer des questions “d’actualité”, nous devons tel l’ultime Marx et le travail totalement innovant d’Engels, essayer de comprendre comment les êtres humains ont essayé de vivre en société au nom de l’espèce. Ainsi grâce au travail des chercheurs il est possible non seulement d’interpréter à quel point les sociétés mésoaméricaines étaient coopératives ou autocratiques à partir de leurs systèmes de communication mais également de remettre de ce fait en question ce que nous définissons comme autocratique et démocratique. Ici autoritaire signifie plutôt des décisions émanant d’un pouvoir en rupture avec l’immense majorité de sa population. Le critère des coopérations doit être privilégié à ce titre bien sûr ; la solution des problèmes matériels reste centrale mais on mesure à quel point les faits culturels font partie de l’ensemble. Peut-être pourrait-on déjà s’entendre sur le fait que l’individu isolé est un mythe, qu’il a un besoin impérieux d’être pris dans des rapports sociaux ou alors c’est la jungle autodestructrice, mais là dessus, il y a deux possibilités, faire naître la morale, les valeurs d’une société d’un ordre imposé dans une vision toujours plus ou moins théologique, ou construire dans les coopérations nécessaires à la vie, dans leur transformation potentielle les conditions d’une réflexion à partir des buts recherchés et affirmés comme tels. C’est en ce sens que le monde multipolaire s’il est loin d’être socialiste, est déjà un possible différent de l’hégémonie occidentale autour d’une autorité impérialiste et impériale unipolaire avec la main mise sur les moyens du développement les ressources mais aussi l’interprétation de la réalité (note et traduction de Danielle Bleitrach pur histoire et societe)

Par Gary M. Feinman et David M. Carballo

Biographies des auteurs : 

Gary M. Feinman est archéologue et conservateur MacArthur de l’anthropologie au Field Museum of Natural History de Chicago.

David M. Carballo est professeur d’archéologie, d’anthropologie et d’études latino-américaines à l’Université de Boston.

Source: Ponts humains

Crédit : Cet article a été produit par Human Bridges.

[Corps de l’article :]

Les modes de communication utilisés par une société peuvent nous en dire long sur sa structure politique. Une étude de recherche que nous avons publiée en 2022 a révélé des modes distincts de communication et de tenue de dossiers administratifs dans la gouvernance sociale autocratique et collective au sein d’un échantillon de sociétés urbaines de la Mésoamérique préhispanique, où l’écriture a été initialement développée à des fins politiques. Chaque société avait son propre système de communication, mais les modèles étaient suffisamment clairs pour identifier la place d’une société particulière sur le continuum autoritaire-collectif.

Nous avons constaté que les méthodes d’écriture et les technologies de communication computationnelles étaient plus élaborées dans les sociétés ayant un modèle de gouvernance autocratique, qu’il s’agisse de la tenue de dossiers administratifs ou du calendrier. Dans ces sociétés autocratiques, l’accès à l’information écrite avait tendance à être plus restreint, axé sur les communications principalement privées aux personnes de haut statut. Au contraire, dans les sociétés plus collectives et coopératives, les textes écrits étaient situés dans des zones accessibles au public et transmettaient des informations générales par le biais de symboles qui faisaient plus largement partie des connaissances communes et des valeurs partagées fondamentales.

Teotihuacán, dans le centre du Mexique, et les États mayas, deux sociétés urbaines mieux connues de la Mésoamérique préhispanique, servent de comparaisons utiles. Teotihuacán avait une organisation plus collective, tandis que la civilisation maya classique à peu près contemporaine avait de nombreuses caractéristiques de la domination autocratique, telles que l’institution de la royauté divine. Les glyphes de Teotihuacán, dont le nombre était limité, comportaient des textes courts et rares, et ils étaient généralement placés dans des lieux publics et concernaient des thèmes communs, tels que la cosmologie et la fertilité. En revanche, les textes mayas étaient souvent situés dans des endroits restreints, largement accessibles aux personnes de haut statut, et concernaient souvent des sujets tels que la légitimation de l’autorité et des dirigeants.

Ces modèles sont illustrés par les deux systèmes calendaires. Les Mayas classiques utilisaient un compte long, qui était un système très précis et détaillé pour compter les cycles temporels à la fois en arrière et en avant, avec l’objectif principal de situer les rois, les reines et d’autres individus puissants dans de longs cycles de temps. Le compte long, qui suit le temps dans une série de cycles, était une technologie privilégiée de chronométrage et nécessitait une formation et des connaissances pour être compris, et était donc en grande partie le domaine des personnes de haut statut.

D’autre part, le cycle calendaire utilisé à Teotihuacán a été facilement transféré et enregistré collectivement par un large éventail de secteurs sociaux et a servi principalement à suivre les cycles annuels, très probablement pour situer les rituels saisonniers et les récits mythiques. Il s’agissait d’un système de « libre accès » qui était plus accessible à un segment plus large de la société. Lorsque les seigneurs mayas de la période classique ont perdu leur pouvoir et se sont dispersés, beaucoup de leurs écrits et pratiques calendaires plus ouvertement politiques ont été en grande partie perdus ou simplifiés et l’écriture de la période postclassique ultérieure s’est déplacée pour mettre l’accent sur les cycles rituels et les actions de groupe plutôt que sur les cycles individualisés. Les cycles à plus court terme de la Ronde calendaire ont été utilisés avant et pendant l’histoire de Teotihuacán et ont eu une application généralisée dans le monde mésoaméricain après la chute de cette métropole du centre du Mexique.

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2 Commentaires

  • Michel BEYER
    Michel BEYER

    Nous savons qu’avec la conquête du Mexique, les conquistadors n’ont pas importé seulement que le cheval. Ils ont aussi importé toutes les maladies européennes: grippe, choléra, peste, rougeole, etc. Les indiens non-immunisés contre ces maladies tombaient comme des mouches. Ce qui a facilité la conquête.
    Mais, en arrivant à Mexico, les espagnols ont découvert une ville très propre, et un réseau d’assainissement que n’auraient pas renier les verts . Alors que les rues des villes européennes de l’époque étaient envahies de tonnes de déchets, foyers de tous les microbes.

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    • admin5319
      admin5319

      Tu fais référence aux Atzèques voir aux incas c”est différent. Mais la civilisation maya si elle n’est pas totalement indépendante dans son “interprétation” de la colonisation espagnole pose d’autres problèmes que la rencontre avec les Européens. C’ est une ancienne civilisation de Mésoamérique principalement connue pour ses avancées dans les domaines de l’écriture, de l’art, de l’architecture, de l’agriculture, des mathématiques et de l’astronomie. C’est une des civilisations précolombiennes les plus étudiées avec celles des Aztèques et des Incas. Elle occupait à l’époque précolombienne un territoire centré sur la péninsule du Yucatán, correspondant actuellement à une partie du sud du Mexique, au Belize, au Guatemala, au Honduras et au Salvador.Ses origines remontent à la préhistoire et c’est aussi ce qui rend son étude passionnante et riche d’enseignement tels que ceux exposés ici.. La sédentarisation de populations est attestée, dans l’aire maya, à l’époque archaïque, entre le VIIe et le IIIe millénaire av. J.-C., les villages les plus anciens ayant été retrouvés sur les côtes de la mer des Caraïbes et de l’océan Pacifique. Les premiers indices de stratification sociale remontent à l’époque préclassique ancienne, au IIe millénaire av. J.-C., et se multiplient à l’époque préclassique moyenne, entre 1000 et 400 av. J.-C.2, avant l’émergence progressive d’États au préclassique récent. D’importantes cités-États mayas des Basses-Terres du sud, telles que Copán, Tikal ou Palenque, connurent leur niveau de développement le plus élevé à la période classique, entre le Ve et le IX e siècle de notre ère, avant d’être rapidement abandonnées entre la fin du VIII et du IX siècle bien avant l’arrivée des conquistadors. D’autres cités subsistèrent ou se développèrent alors dans les Basses-Terres du nord ainsi que dans les Hautes-Terres du sud, avant d’entrer en déclin, puis d’être quasiment toutes abandonnées, les Espagnols se sont contentés d’en refonder sur leurs bases mais certains idéologues cherchent à mettre en évidence les permanences puisque selon eux il favoriserait un fort syncrétisme religieux qu’ils veulent exemplaire. En fait la recherche scientifique a ignoré les Mayas jusqu’au début du XIX e siècle. La forêt avait repris ses droits sur la plupart de leurs cités, et, peu après la conquête espagnole, aux xvie et xviie siècles, certains prêtres espagnols ont commis un crime contre la culture maya et ont brûlé la quasi-totalité des livres (codex) en écorce de figuier, laissés par les Mayas.Seuls quatre codex ont été retrouvés.

      Les premiers explorateurs à approcher les vestiges de la civilisation maya au XIX e siècle ont contribué à lui forger une image romantique, mais hélas bien différente de la réalité : « qui n’a pas entendu parler, par exemple, d’un ancien Empire maya, véritable âge d’or durant lequel un peuple laborieux et éminemment pacifique se serait adonné, dans le calme de ses cités protégées par la forêt dense, à la seule contemplation des astres ? » le mythe est peu a eu dénoncé au profit de ce qui est décrit ici. Car, si les anciens Mayas étaient des bâtisseurs, de grands artistes et des savants, ils n’en étaient pas moins résolument guerriers. Du fait de leur organisation politique en cités rivales, la comparaison des Mayas classiques avec les cités grecques de l’époque classique ou avec les cités italiennes de la Renaissance peut être fondées. ce qui est la démarche de Morgan que vantent Marx et Engels… voir en quoi les différents types d’évolution des Rtats, des propriétés, et des familles y compris existantes peuvent nous aider à établir l’équivalent de ce que Darwin a établi à propos des espèces.

      Comme tu peux le voir ton interprétation est en fait trop rapide et participe d’une certaine idéologie qui n’est pas l’orientation de la recherche même si ce que tu dis sur Mexico est parfaitement exact.

      L’histoire de l’humanité n’est pas une simple évolution y compris avec une enfilade de modes de production mais un grand nombre de temporalités qui toutes jouent un rôle plus ou moins déterminant dans un processus révolutionnaire.
      danielle Bleitrach

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