Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

La guerre contre Cuba et les méthodes de la « Divine Providence »

Si l’on veut percevoir jusqu’où peuvent aller les mafias qui gouvernent les Etats-Unis et leurs complices, le mode de fonctionnement criminel de ce système qui grâce au dollar exerce un racket généralisé sur la planète et est en train d’attaquer frontalement ses alliés européens, l’expérience de Cuba est incontournable. Cuba est le laboratoire d’un monde qui cherche à naître grâce à l’héroïsme des Cubains. Il faut agir tous ensemble au nom de l’humanité. (note et traduction de Danielle Bleitrach dans histoire et société)

Il ne s’agit pas d’inventions ou de récits issus de théories du complot. En 1979, le Washington Post a rapporté que la CIA avait mis en place un programme contre l’agriculture cubaine et que des agents avaient été fabriqués à cette fin depuis 1962.

Auteur: Raul Antonio Capote | informacion@granmai.cu

21 juillet 2023 09:07:50

En 1972, le virus de la peste porcine a entraîné l’abattage de plus d’un demi-million de porcs, une attaque qui s’est répétée en 1980. Photo: Liborio Noval

La guerre économique que les États-Unis mènent contre Cuba depuis plus de 60 ans, la plus longue et la plus féroce de l’histoire, n’a pas épargné un seul secteur de la vie quotidienne des Cubains.
Dans son effort pour briser une nation entière, l’empire semble prêt à utiliser « les méthodes de la Divine Providence » et à ne pas laisser pierre sur pierre.
Le blocus ne permet pas, pour ne citer que quelques exemples, l’utilisation du dollar dans les transactions commerciales, interdit aux entités cubaines d’ouvrir des comptes de correspondants dans les banques américaines et ne cesse de traquer vicieusement les opérations financières de l’Île.
Ces mesures suffiraient à elles seules à mettre en faillite l’économie de n’importe quel autre pays ne disposant pas du système socio-économique en place à Cuba. Cependant, elles ne sont qu’un échantillon de l’écheveau de lois, de sanctions et d’interdictions dont souffre le peuple cubain.
Mais il existe un autre front dans cette guerre, tristement célèbre pour sa cruauté : la guerre biologique, qui constitue une menace à la fois pour la santé et pour l’économie.
En 1961 et 1962, la CIA a introduisit à Cuba la maladie de Newcastle, qui provoqua une forte mortalité dans le cheptel aviaire.
En 1972, le virus de la peste porcine africaine entraîna l’abattage de plus d’un demi-million de porcs, une attaque qui s’est répétée en 1980, provoquant une deuxième épidémie après l’introduction d’un virus génétiquement manipulé en laboratoire.
C’est au cours de l’été 1981 que les bovins ont été infectés par la myélite ulcéreuse ; en 1993, ce fut au tour des lapins de souffrir d’hémorragies virales et, trois ans plus tard, les abeilles ont contracté l’acarien varroa, un parasite qui occasionne une forte mortalité dans les ruches.
On peut ajouter à cette liste le scolyte du caféier, qui a anéanti les plantations de café, la rouille de la canne à sucre, la moisissure bleue du tabac, le thrips palmi, l’acarien du riz, etc.
Il ne s’agit pas d’inventions ou de récits issus de théories du complot. En 1979, le Washington Post a rapporté que la CIA avait mis en place un programme contre l’agriculture cubaine et que des agents avaient été fabriqués à cette fin depuis 1962.
Devant un jury américain, Eduardo Arocena, chef du groupe terroriste Omega 7, a reconnu en 1984 avoir participé à une opération d’introduction de germes dans l’Île dans le cadre de la guerre biologique contre Cuba.
Les scientifiques cubains ont pu démontrer que tous ces virus avaient été manipulés en laboratoire pour les rendre plus virulents, plus adaptables au climat, plus résistants aux médicaments ou aux agents chimiques et biologiques, et plus difficilement détectables.
Les dégâts causés à l’économie du pays sont innombrables ; la destruction des cultures, des volailles, du bétail et des porcs a entravé la production de denrées alimentaires de base et a ralenti le développement agricole.
La guerre biologique est étroitement liée au blocus, dans le cadre de la stratégie visant rendre la population de l’île rebelle par la famine, la misère et les maladies.

LA LUTTE DE CUBA SOCIALISTE VA JUSQU’AUX LIMITES DU POSSIBLE AVEC TOUJOURS LA VIE ET LE DÉVELOPPEMENT DE L’ÊTRE HUMAIN DANS LA NATURE…


Cuba, le pays où l’agroécologie est vraiment appliquée

Cuba, le pays où l'agroécologie est vraiment appliquée

Comment passer de l’agriculture intensive à l’agroécologie ? Geoffrey Couanon, réalisateur, s’est rendu à Cuba. L’île a entamé depuis vingt ans une conversion agroécologique, avec des hauts et des bas. Il a rapporté un projet de documentaire, Si se puede !

Reporterre – Qu’est-ce que l’agriculture a de particulier à Cuba ?

Geoffrey Couanon – Il y a eu une crise alimentaire et énergétique sans précédent, et ça a été un électrochoc. À la fin des années 1980, Cuba pratique une agriculture très industrialisée, et « technologiquement avancée » largement orientée vers l’exportation en direction de l’URSS. Canne à sucre, café, cacao, tabac.

Au début des années 1990, après l’effondrement du bloc soviétique, Cuba perd son principal partenaire commercial. Il faut imaginer un PIB qui en deux ans s’effondre de 38 %, c’est plus que ce qu’ont connu les Grecs au cours des dernières années. La production alimentaire dégringole. Pour les Cubains, c’est une période alimentaire très compliquée, extrêmement dure. La fameuse « période spéciale ».

Un choc, mais qui a permis l’émergence d’un mouvement tout à fait différent : il a fallu réintroduire de la diversité dans l’agriculture pour avoir plus d’autonomie, moins dépendante des importations de produits chimiques synthétiques. C’est le développement de l’agroécologie. Contrairement à une lente sensibilisation en Europe, il y a eu à Cuba l’urgente nécessité de se nourrir.

Cuba est donc un laboratoire pour le monde puisqu’on n’a jamais tenté une reconversion du système agricole à cette échelle.

Concrètement, l’agroécologie cubaine, ça ressemble à quoi ?

Beaucoup d’agriculture urbaine : Cuba compte plus de 380 000 exploitations agricoles urbaines, qui produisent plus de 1,5 million de tonnes de légumes. Ces exploitations fournissent 70 %, et parfois plus, des légumes frais à La Havane.

Et puis surtout, il y a le mouvement « Campesino a campesino » (De paysan à paysan). Le paysan est acteur de l’innovation technique et sociale. C’est lui qui teste l’agorécologie sur ses terres. Il y a aussi des ateliers de formation, des échanges de semences et des forums régionaux et nationaux de partages des savoir-faire.

L’agroécologie produit 65 % de l’alimentation du pays, alors qu’elle ne couvre que 25 % des terres agricoles. Ce mouvement agroécologique est justement au cœur de notre documentaire. Nous voulons filmer ces échanges, ces pratiques, ce mouvement social qui pourrait en inspirer d’autres.

La question sous-jacente est de savoir si l’agroécologie est un choix conjoncturel sur le court terme qui a été appliqué dans un temps particulier de crise, ou si c’est un choix structurel qui pourrait installer une vraie souveraineté alimentaire pour le pays ?

Quelle différence entre l’agroécologie cubaine et française ?

C’est une question complexe. À Cuba, le gouvernement peut définir un choix politique et organiser les règles du jeu de l’économie. Nous, on est dans des pays d’économie de marché, et où on a des gouvernants qui disent : « J’aimerais bien pouvoir faire çà, mais si je décide d’aller dans tel sens, on aura la fuite des capitaux, si je décide de favoriser les entreprises locales, je suis en désaccord avec l’Organisation mondiale du commerce ».

Cuba se crée des marges de manœuvres et c’est quelque chose d’important dont nous pourrions nous inspirer.

En France, on a une concentration rapide et forte des terres, une diminution du nombre de paysans. À Cuba, il y a eu une redistribution des terres extraordinaire : en dix ans, plus de un million et demi d’hectares ! À l’échelle française, ça voudrait dire les Midi-Pyrénées et l’Aquitaine.

En France, le discours ambiant prétend que les deux agricultures peuvent très bien cohabiter, qu’on peut très bien avoir une agriculture paysanne et puis une agriculture plus intensive, plus exportatrice. Mais c’est très compliqué de parler d’agroécologie et en même temps d’avoir des discours sur la compétitivité avec tout ce qu’il y a derrière, à savoir la main-d’œuvre pas cher dans les fermes, l’agriculture industrielle.

Est-ce que nous voulons une agroécologie paysanne à taille humaine avec une multitude de paysans ou une agroécologie intensive de supermarché avec une main mise de quelques agromanagers qui pourront choisir comment ils veulent nous nourrir ? Ce sont deux projets de société très différents.

Comment vous est venue l’idée du film ?

Je suis réalisateur et Céline qui participe à la préparation et la réflexion autour du film, est ingénieure, spécialisée en agroalimentaire. Céline est aussi passionnée par Cuba, elle y a réalisé plus d’une dizaine de voyages. Nous sommes tous les deux animés d’une même volonté : donner la parole, relayer, témoigner, montrer les alternatives constructives à un système dominant écrasant pour l’humain et la nature.

Notre projet a pour fil conducteur « la Ruta de ciencias y técnicas », une initiative du ministère de l’Agriculture cubaine, qui organise chaque mois une tournée à travers une ou plusieurs provinces pour visiter des paysans et des fermes qui expérimentent des pratiques agroécologiques. Ce périple est l’occasion de confronter les points de vue sur ce mouvement. Car l’agroécologie ne fait pas consensus sur l’île.

Vous défendez aussi les films sur l’agriculture. Pourquoi ? C’est compliqué de parler d’agriculture au cinéma ?

L’agriculture, c’est là que tout se passe. J’ai l’impression que celui qui sait cultiver, qui a cette connaissance, peut tout faire. Et pourtant, les paysans disparaissent tous les jours en emportant leurs histoires.

Surtout, je choisis de réaliser des films sur l’agriculture car je suis profondément choqué, énervé, par ce qu’est devenu le métier de paysan dans nos sociétés contemporaines. Tour à tour moqué, dévalorisé, accusé ou complice de cette machine infernale de la productivité, de l’exploitation et du profit.

Souvent, les films qui abordent l’agriculture, sont très simplistes, très manichéens. Il y a la thèse et l’antithèse. Parfois il n’y a même pas d’antithèse. Ils nous disent ce qui est bien et ce qui est mal, comme si c’était une vérité absolue. Un film sur l’agriculture peut rapidement être cliché. Nous avons une image des paysans et de leur univers et nous souhaitons qu’ils y correspondent. La plupart du temps on se trompe. Il faut se laisser surprendre.

–  Propos recueillis par Lorène Lavocat

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