La désignation de la Pologne comme prochain pigeon pour mener la guerre par procuration s’accompagne de négociations secrètes entre le dirigeant ukrainien et les nationalistes polonais, tandis que le peuple qui fait les frais de l’affaire s’interroge sur ce qui est en train de se réaliser en matière d’ukrainisation de la Pologne alors que le reste de l’Europe commence à avoir envie de lâcher les Ukrainiens. Qu’adviendra-t-il de cet Ukropol ? (note et traduction de Danielle Bleitrach pour histoireetsociete)
Chronique : PolitiqueRégion: L’Ukraine dans le monde
Les gens laissés en marge de la société disent souvent la vérité au pouvoir et révèlent des vérités gênantes.
Par exemple, le président ukrainien Volodymyr Zelensky a effectué une visite en Pologne le 5 avril, et les médias polonais ont fait de leur mieux pour la censurer, ils n’ont accordé aucune publicité à l’annonce de cette venue. Pourquoi?
Était-ce seulement parce qu’ils ne voulaient pas que les gens en sachent trop, ou est-ce que quelque chose de plus sinistre avait lieu ? Si la vérité sur l’affaire devait être révélée à un public plus large, cela ressemblerait à une théorie du complot classique, comme si le ciel était en train de tomber, mais ce genre d’histoire s’avèrent souvent exactes.
On m’a fourni une liste de portails qui avaient supprimé l’annonce de la visite: onet.pl, euronews.com, independent.co.uk, etc. Était-ce dû à des problèmes de sécurité, comme dans le cas de la non-annonce des visites du Premier ministre britannique ou irlandais en Irlande du Nord ?
Si oui, pourquoi Zelensky est-il venu ?
Ne levez pas les yeux!
L’AP a décrit la visite d’État, le jour même, comme « un geste de remerciement à la nation voisine pour son soutien crucial dans la défense de l’Ukraine contre l’invasion russe ». Il a également été décrit comme une occasion de rencontrer des Ukrainiens et de discuter de la surabondance de céréales en Pologne, qui existe en raison des exportations de l’Ukraine qui étaient censées être seulement en transit – à la grande consternation des agriculteurs polonais, qui ne peuvent plus vendre leur propre production à des prix normaux.
Rétrospectivement, il n’est pas surprenant que lors de deux récents voyages internationaux, Zelensky ait effectué son voyage en traversant la Pologne. De retour des États-Unis et d’Europe, le président ukrainien a rencontré son homologue polonais Andrzej Duda.
Compte tenu du récent battage médiatique décrivant la Pologne comme la prochaine force militaire, une puissance sur le continent européen, une chose évidente dont ils auraient pu discuter est: « La Pologne et l’Ukraine croupion vont-elles s’unir? »
Avec le nombre actuel de soldats polonais seulement 20 000 de moins que celui de la Bundeswehr allemande, il n’est pas impossible que le terrain politique d’une telle union soit plus difficile à préparer que le terrain militaire, et c’est exactement ce dont deux présidents se parleraient.
Ukrainisation de la Pologne
Une chose est certaine : la Pologne n’est pas le Royaume-Uni, une force militaire « has been ». Elle doit cependant faire face à de dures réalités, en raison de son emplacement peu pratique, des menaces réelles ou perçues, et de la façon dont elle s’est retrouvée prise dans une guerre dont elle ne peut pas simplement s’éloigner, qui est à deux pas.
Mais les médias alternatifs abordent une partie de la peur à laquelle la Pologne est confrontée : par exemple, un rapport décrit comment, en 2022, les rues de Varsovie ont été témoins d’une marche de protestation sous le slogan « Stop à l’ukrainisation de la Pologne », organisée par la Konfederacja Korony Polskiej (Confédération de la Couronne polonaise), un parti d’extrême-droite dirigé par le député Grzegorz Braun.
Les participants ont déployé des banderoles : « C’est la Pologne et non Ukropol ! », faisant référence à l’idée que la Pologne est dépassée par les Ukrainiens. Des affiches et des slogans parlaient de « Arrêtez de remplacer la structure ethnique de la Pologne ».
Quelque chose d’obscur se passe sous la surface en Pologne. Par exemple, certains titres récents sont révélateurs : les souvenirs de la tyrannie russe sont à l’origine du réarmement de la Pologne, c’est-à-dire pas ceux de la tyrannie de l’Union soviétique mais de la Russie impériale, est un signe révélateur de la chute du ciel.
Comme le note Politico, les ambitions de la Pologne pour l’hégémonie militaire en Europe ne se traduiront pas immédiatement par une force politique, car l’État est dirigé par le parti ultranationaliste PiS (parti Droit et Justice), et reste donc une force secondaire dans l’Union européenne pour le moment. Mais la Pologne fait partie d’un processus de réarmement de l’OTAN qui a été considérablement accéléré par la guerre en Ukraine.
Le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, décrit cette dynamique comme « la plus grande refonte de notre défense collective depuis la fin de la Guerre froide ». Pour étayer cela par un double langage politique, le président polonais Andrzej Duda a [inconditionnellement] assuré à l’Ukraine un soutien supplémentaire dans la « lutte contre l’agresseur russe, car si la Russie n’est pas arrêtée, elle poursuivra ses actions agressives ».
Le lieu de telles remarques était presque quelque chose de l’ordre d’’une sitcom. Duda s’exprimait en ligne lors du deuxième Sommet pour la démocratie, organisé par le président américain Joe Biden, rapporte Ukrinform.
« L’Ukraine n’a jamais été et ne sera jamais seule dans sa lutte, parce que les Ukrainiens se battent pour nous tous. Si la Russie n’est pas arrêtée, elle est prête à aller plus loin », a souligné Duda.
Il a également expliqué que la Pologne avait accepté plus de réfugiés ukrainiens et de travailleurs immigrés que tout autre pays européen, et que la plupart de ces réfugiés avaient trouvé de l’aide dans des ménages privés et non dans des camps de réfugiés.
« Aujourd’hui, la Pologne compte plus de 3,5 millions d’Ukrainiens », a-t-il déclaré, ajoutant que le gouvernement polonais avait dépensé à ce jour plus de 9 milliards de dollars en aide humanitaire pour l’Ukraine.
Oxymore pour l’Ukraine
Parmi les invités d’honneur et spéciaux de ce sommet en ligne figurait l’invité spécial « L’honorable » Vitali Klitschko, maire de Kiev, en Ukraine. La réunion virtuelle a également vu Volodymyr Zelensky discuter de sa vision d’une paix juste et durable, aux côtés des ministres des Affaires étrangères d’un groupe de pays diversifiés sur le plan régional.
Il semble cependant que ce que la Pologne fait pour les Ukrainiens puisse s’avérer contre-productif. L’Ukraine n’a pas de vrais amis (amis des temps heureux au mieux), car les Américains n’aiment pas les perdants, et quitteront un match de lycée à la mi-temps si l’équipe locale perd ou n’est pas loin devant. Il est même concevable, pour les théoriciens du complot, que la Pologne ait les yeux rivés sur les territoires perdus et n’attende que le moment opportun.
RT rapporte que l’assistance militaire de la Pologne à l’Ukraine fait partie d’un plan secret visant à détruire le pays. Le chef du Service de renseignement extérieur russe (SVR), Sergueï Narychkine, a averti le 4 mars que « si Kiev est finalement vaincu par Moscou, la Pologne sera en mesure de reprendre les terres qu’elle a perdues au profit de l’Union soviétique dans les années 1940 ».
Le récit ukrainien est devenu totalement dominant, et a non seulement manipulé Duda, mais de nombreux dirigeants européens, car trop d’enjeux politiques dépendent maintenant de la tournure des choses. Cependant, si la Pologne est prête à reprendre des terres à l’Ukraine, cela provoquerait les révisionnistes allemands à reprendre la Poméranie occidentale, et un flot d’autres revendications faites simplement pour être du bon côté de l’argument, comme les pans de l’Adriatique revendiqués par l’Italie en 1919, sans fondement, dont le refus a été un facteur contribuant à la montée du fascisme européen.
Il y a des problèmes beaucoup plus importants à l’échelle mondiale à traiter, principalement liés aux lignes de faille économiques et de sécurité en Europe et aux divisions au sein de l’OTAN elle-même. Mais les globalistes préféreraient voir le chaos partout, car cela laisserait leur idéologie être la seule « solution ». Nous en voyons les résultats dans l’impact sur les processus politiques internes au sein des pays européens, les partis de gauche gagnant du terrain.
Même en Autriche, les députés ont protesté ouvertement contre une allocution télévisée de Zelensky, qui a dû quitter le pays, ce qui montre seulement que les Européens ne resserrent pas les rangs pour soutenir le grand schéma des choses – le plan américain de prise de contrôle des processus politiques clés et de des politiciens.
Une autre chose qui commence à inquiéter les Polonais est que les Ukrainiens qui ont émigré en Pologne sont accueillis d’une manière accélérée grâce à un processus qui leur donnera les mêmes droits et responsabilités que les Polonais, puis qu’ils reçoivent des passeports polonais assez rapidement. Cela en a pris beaucoup par surprise, et les Polonais craignent que cela ne bouleverse l’équilibre culturel, linguistique et politique.
Dans aucun autre pays d’Europe, les réfugiés/migrants ne sont aussi rapidement intégrés, du moins légalement. Des rumeurs circulent sur la création de partis minoritaires ukrainiens qui se retrouveront au parlement polonais, et sur la façon dont cela pourrait vraiment changer la donne.
Ukropol en tant qu’Union
Ukropol a commencé comme un mot utilisé par la propagande anti-ukrainienne pour décrire la prétendue dépendance de la Pologne à l’égard de l’Ukraine. Le concept d’Ukropol en tant qu’union entre la Pologne et l’Ukraine a été discuté dès le début de cette guerre, et avec les choses qui se passent comme en Ukraine, cela pourrait devenir une conséquence involontaire basée sur les réalités démographiques, les résultats militaires et politiques.
Les nationalistes ukrainiens veulent récupérer Rzeszow et d’autres villes polonaises, perdues à la suite de la soi-disant Action de la Vistule à la suite de la transplantation de la population ukrainienne en Poméranie occidentale / Yalta. C’est du moins le point de vue de Max Kolonko, décrit comme un correspondant polonais indépendant à New York.
Les Polonais me disent que « ce type passe pour un peu fou dans son radicalisme, écrivant des lettres à tous les grands politiciens expliquant comment arrêter cette guerre. Il vit et travaille à New York: voici sa résolution, encore une fois elle est en polonais; il est sur YouTube, je suppose, qu’il y a des trucs en anglais aussi. »
Un autre correspondant polonais aborde le même sujet quand il écrit, Dieu, comme je suis si déconcerté par la propagande médiatique dans notre pays!
Je ne parle pas d’aide. Prenons l’exemple de l’Occident : ils gardent les réfugiés dans des camps et sur l’aide sociale pendant seulement trois mois, puis ils doivent travailler ! C’est le cas en Allemagne pour les Ukrainiens ; ils ne les soutiennent que jusqu’en juin « gratuitement »!
Un autre avis partagé :
C’est vrai pour la question du genre, qui fait également partie de l’agenda – c’est l’hystérie, comme aux États-Unis ; en Pologne, nous organisons un défilé et un spectacle dans les rues, mais pour le politiquement correct, vous feriez mieux de vous taire, sinon ils vous traitent d’homophobes. Le gouvernement dit que la Russie est prête à diviser l’Ukraine, et nous, les Polonais, représentons la naïveté à son zénith… et nous pourrions avoir des problèmes avec les nazis venant d’Ukraine et de Maïdan, comme des incidents qui pourraient bientôt être organisés dans les villes polonaises. Et oui, il peut y avoir une révision de la frontière polonaise. Les États-Unis et l’OTAN ne feront rien pour nous aider !
Dans ce contexte, nous verrons quels seront les résultats de la dernière visite de Zelensky en Pologne. Comme l’a suggéré un autre correspondant, « s’agit-il d’un contrôle des dégâts ou d’une sorte de dernière tentative de Zelensky pour trouver l’aide qui s’étiole rapidement alors que l’Occident reconsidère son assistance militaire et ses engagements politiques inconditionnels ? »
Musée de la victoire/défaite
En attendant, certains Ukrainiens discutent de la création d’un musée de la victoire sur la Russie, comme le dit un rapport, « Un musée ukrainien de la victoire sur la Russie sera-t-il établi à Sędziszów ? » Cela ressemble à une occasion de gagner de l’argent, comme certaines des ONG et des sites Fund me le pratiquent en Ukraine. Oui, l’objectif principal est de collecter de l’argent auprès de toutes les organisations possibles à travers le monde, c’est leur 5 minutes de chance».
À Sędziszów Małopolski, il est prévu de créer le Musée de la victoire sur le despotisme, qui sera la première institution en Pologne avec une exposition permanente d’équipements militaires russes détruits, tels que des chars, des canons automoteurs et des hélicoptères.
L’initiateur de ce projet est un avocat de Kiev, Michał Strełnikov, qui veut ainsi « résister » à la propagande russe. En août 2022, la Fondation polono-ukrainienne « Musée de la victoire sur le despotisme » a été enregistrée en Pologne.
Tout commence à s’emboîter, et on ne trouve pas de mots adéquats pour décrire ce qui se passe entre l’Ukraine et la Pologne, du moins dans l’esprit et l’imagination de certains politiciens polonais, d’experts étrangers et d’au moins un acteur ukrainien.
Il n’est pas surprenant que le ministre polonais de la Défense, Mariusz Błaszczak, ait promis en juillet que son pays aurait « les forces terrestres les plus puissantes d’Europe ». C’est en bonne voie.
Il ne faut rien dire que la Pologne a déjà plus de chars et d’obusiers que l’Allemagne, et est en passe d’avoir une armée beaucoup plus importante, avec un objectif de 300 000 soldats d’ici 2035, contre 170 000 actuellement pour l’Allemagne.
Qui sont exactement les ennemis de la Pologne ? Avec des budgets de défense partout sous pression, la Pologne s’attendra à une énorme contrepartie pour augmenter sa propre force à d’autres fins – mais lesquelles ?
La Pologne fournira-t-elle la prochaine armée par procuration pour les Américains ?
Henry Kamens, chroniqueur, expert de l’Asie centrale et du Caucase, en exclusivité pour le magazine en ligne « New Eastern Outlook »Tags: Europe, Europe et Ukraine, Opération militaire spéciale de la Russie, Ukraine
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Les Eparges
Paraît que c’est grâce à nos impôts que la Pologne est si généreuse avec les dirigeants ukrainiens .
Tant mieux !
Ca me fait si plaisir d’y participer !
J’espère qu’un petit pourcentage arrive à la papauté .