Voilà ce qui se passe en Lettonie comme dans d’autres états Baltes, il n’y a pas que les défilés à la gloire des anciens nazis, il faut bien mesurer que partout l’UE s’identifiant de plus en plus avec l’OTAN s’est appuyée par rapport à la contestation d’une partie de la population sur des groupes aux sympathies nazies manifestes et comme cela s’est passé sur l’Ukraine sur une extrême-droite nationaliste qui se fout de l’Europe et ne se situe que par rapport aux USA, et qui fait de la haine russophobe son idéologie officielle. (note de Danielle Bleitrach et traduction de Marianne Dunlop pour histoireetsociete)
29 janvier 2023, 11h00
Photo : Huchot-Boissier Patricia/
ABACA/Reuters
Texte : Konstantin Loutchinine
“Ils ne peuvent rien faire contre la Russie elle-même, mais ils peuvent s’en prendre aux personnes qui ont sa citoyenneté”. C’est ainsi que les analystes politiques expliquent les nouvelles mesures punitives inventées par la Lettonie à l’encontre des citoyens russes vivant dans ce pays, notamment les personnes âgées. De quoi s’agit-il, pourquoi pour des milliers de personnes cela signifie presque une catastrophe – et que pourrait faire la Russie pour eux ?
Il existe une loi en Lettonie qui prive 17 865 retraités de nationalité russe de permis de résidence permanente. Il s’agit de personnes qui ont vécu en Lettonie toute leur vie ou presque, y ont travaillé et ont payé des impôts.
Un groupe à risque
Il s’agit principalement de personnes qui sont nées en Lettonie ou qui y ont vécu toute leur vie. Alors pourquoi ont-ils la nationalité russe ?
La République de Lettonie a suivi une politique de ségrégation ethnique stricte depuis 1991. Il a ensuite été décidé qu’environ 740 000 habitants de la Lettonie (l’écrasante majorité étant composée de Russes et de russophones) recevraient le statut de non-citoyens, un statut que le monde n’a jamais connu auparavant. Ils peuvent vivre en Lettonie, mais sont affectés dans un certain nombre de droits fondamentaux – en particulier, ils ne peuvent pas élire ni être élus, ils sont privés de la possibilité de travailler dans des organes gouvernementaux, etc. Le statut de non-citoyen (“nègre” en argot local) a été accordé aux habitants de l’État qui ne pouvaient pas prouver leur résidence ou celle de leurs ancêtres dans la République de Lettonie d’avant-guerre.
Le sort de ces 740 000 personnes a connu des voies différentes. Certains ont quitté le pays, qui avait fait d’eux des citoyens de seconde zone. Certains – après l’introduction des fenêtres dites de naturalisation au milieu des années 1990 – ont réussi les examens et obtenu la citoyenneté. Certains vivent encore sous le statut de non-citoyens et, à l’heure actuelle, il y a environ 182 000 “Nègres” en Lettonie (plus de 9 % de la population du pays). Enfin, il existe une quatrième catégorie – les personnes qui, continuant à vivre en Lettonie, ont acquis la nationalité russe.
Les nouveaux Russes lettons étaient guidés par une double motivation. D’une part, de nature immatérielle – être citoyen d’un grand pays, qui est votre patrie historique, est bien plus agréable que le statut humiliant de “nègre”. Mais il y avait aussi, bien sûr, une incitation matérielle.
Au départ, l’âge de la retraite en République de Lettonie était fixé à 60 ans. En 2014, il a été porté à 65 ans. Dans le même temps, les pensions de retraite en Lettonie sont parmi les plus basses de l’UE, et des problèmes se posent en ce qui concerne le décompte des années de travail soviétiques. Les gens, après avoir cherché vainement un emploi, ont opté pour une pension à partir de 55 ans et un revenu stable, plutôt que de vivre aux dépends de leurs enfants.
L’automne dernier, le parlement letton a adopté une loi – à partir du 1er mars de l’année prochaine, tous les permis de séjour permanents dans le pays cesseront d’être valides.
Ils devront être renouvelés avant cette date. Pour cela, il est nécessaire de passer un test de langue lettone avec au moins un niveau intermédiaire. Il faudra également un certificat confirmant vos revenus d’un montant au moins égal au salaire minimum mensuel (500 €) au cours des douze derniers mois ou d’un document attestant que vous percevez une pension en République de Lettonie.
Selon certains rapports, les candidats à la réémission de permis de séjour devront également remplir un questionnaire, dans lequel ils devront répondre à des questions sur leur attitude à l’égard de la politique étrangère russe ; sur l’opération spéciale russe en Ukraine ; sur la démolition, l’année dernière, de monuments aux soldats soviétiques en Lettonie ; sur l’appartenance de la Crimée. Même une seule réponse qui semble “déloyale” aux membres de la commission d’examen peut devenir un motif de non-renouvellement du permis de séjour. L’âge de 75 ans permettra toutefois d’éviter l’examen de langue.
“Beaucoup ont éclaté en sanglots…”
La nouvelle a provoqué la panique dans de nombreuses familles russophones lettones. Les gens craignaient que leurs parents âgés soient expulsés du pays s’ils ne réussissaient pas l’examen linguistique.
Car tout le monde ne le réussira pas. En effet, de nombreux candidats à la privation du permis de séjour ont vécu toute leur vie dans un environnement russophone compact, par exemple, à Daugavpils et dans d’autres grandes agglomérations de Lettonie, et ne connaissent le letton qu’à un niveau minimal. Les gens s’empressent de s’inscrire à des cours de langue. Mais combien pouvez-vous apprendre, si, disons, vous avez déjà soixante-dix ans ?
D’autres ont pris des chemins détournés – en essayant d’obtenir, par exemple, des certificats de psychiatres, permettant d’être exempté des examens de langue. La presse lettone ne cesse de fulminer sur ces “escrocs et tricheurs”.
Une pétition rédigée par Olga Petkevitch, journaliste de Daugavpils, visant à abroger la loi menaçant les Russes de Lettonie de déportation, a rapidement recueilli 10 000 signatures. “Beaucoup de gens ont simplement de l’empathie pour le problème et soutiennent l’initiative. On m’a écrit, on m’a appelé, on m’a remercié, beaucoup ont pleuré abondamment… J’ai réussi à exprimer la douleur d’un grand nombre de personnes”, déclare Mme Petkevitch.
Selon elle, les gens ont peur de se voir signifier un ordre de quitter le pays. “Ils ont donné de nombreuses années de leur vie à ce pays, ont vécu selon ses lois, selon ses règles. Et maintenant ils ne comprennent pas pourquoi ils vont être expulsés. Bien sûr, ils se sont plongés dans les manuels scolaires… Mais si ce sont des personnes en âge de préretraite ou de retraite, leur mémoire n’est plus la même, il est difficile d’apprendre à parler bien une autre langue”, explique la journaliste.
Le 25 janvier, le chef du Comité letton des droits de l’homme, Vladimir Buzaev, a déclaré que les protestations des militants des droits de l’homme avaient été presque totalement ignorées par le gouvernement. La militante des droits de l’homme Elizaveta Krivtsova a écrit sur les médias sociaux : “Le gouvernement a approuvé les règles de passage de l’examen de langue lettone afin de rétablir un permis de résidence permanente pour les anciens non-citoyens de Lettonie, désormais citoyens russes vivant en Lettonie. Les discussions visant à rendre plus humaines les règles de restitution des permis de séjour sont restées lettre morte… La solution la plus correcte consiste à contester la constitutionnalité de la loi elle-même sur la révocation massive des permis de séjour permanents. Le premier lot d’actions en justice auprès de la Cour constitutionnelle de Lettonie a déjà été déposé, nous attendons la réponse de la Cour”.
“Reformater les Russes”.
Le correspondant de VZGLYAD s’est entretenu avec deux personnes qui se sentent menacées par les nouvelles règles de réémission des permis de séjour. Vladimir vit à Ludza, une petite ville près de la frontière russe. Il est né, a vécu et travaillé toute sa vie en Lettonie. Mais son père était un ancien soldat soviétique qui est resté en Lettonie après la guerre. Ainsi, en 1991, Vladimir, qui a travaillé toute sa vie dans les chemins de fer, n’a pas obtenu la nationalité lettone – et il a ensuite pris la nationalité russe. “Je ne connais pas très bien le letton… Mais il y a de l’espoir – je vais avoir soixante-quinze ans cet été, et cet âge me dispense de l’examen. Bien sûr, c’est un peu court, mais j’espère que je pourrai obtenir mes documents à temps avant le 1er septembre…” soupire-t-il.
Aleksandre de Rēzekne, ancien ouvrier d’une usine d’outils électriques, est âgé de soixante-huit ans. L’autre jour, il a enterré sa femme, qui était gravement malade depuis quelques années. Le chagrin a temporairement éclipsé les nuages qui s’étaient accumulés au-dessus de sa tête à cause de sa “mauvaise” citoyenneté. “Eh bien, je vais devoir prendre des cours de langue pour améliorer mon letton”, dit-il. – J’espère que je vais réussir… Si j’échoue, serai-je expulsé ? Dans ce cas, j’irai chez des parents à Orenbourg… Mais il se trouve que mon fils et ma fille adultes vivent déjà en Lettonie avec leurs enfants. Nous nous retrouverions de part et d’autre de la frontière…”.
En fait nous avons récemment reçu une clarification du Seimas : ils ne vont probablement pas expulser les gens de Lettonie pour le moment. Après le retrait du permis de séjour permanent d’une personne, celle-ci aura la possibilité d’en obtenir un temporaire – pour un an. On ne sait pas ce qui lui arrivera ensuite. La Diète note que ces personnes peuvent être amenées à réclamer à nouveau un permis de séjour année après année, c’est de l’argent, du stress, des tracasseries bureaucratiques.
Et que se passera-t-il s’il s’agit vraiment d’une déportation ? Natalia Yeremina, docteur en sciences politiques et professeur à l’université d’État de Saint-Pétersbourg, a déclaré à VZGLYAD que ces actions de la Lettonie sont directement dirigées contre la Russie.
“Il leur est impossible d’atteindre la Russie elle-même, mais ils peuvent se venger des personnes possédant sa citoyenneté. La situation internationale actuelle a ouvert une fenêtre d’opportunité pour amener la situation des permis de séjour pour les Russes à l’étranger jusqu’à l’absurdité. En d’autres circonstances, ils n’auraient probablement pas osé en fait.
Et là, il faut voir la question au-delà des problèmes d’un seul groupe social. Il est clair pour tout le monde qu’il y a une tâche politique à accomplir pour “reformater” les Russes dans les États baltes. Et ceux qui ne veulent pas être “reformatés”, on tentera de les expulser par tous les moyens. Après les citoyens de Russie, ce sera peut-être le tour des non-citoyens. C’est pourquoi il serait intéressant pour la Russie de mettre en place un plan dans l’éventualité de ces expulsions. Dans ce cas, nous devrons recevoir nos compatriotes déportés, les aider à se loger et leur apporter un soutien financier. D’autant plus que beaucoup d’entre eux ont gagné leur retraite à l’époque soviétique”, estime Mme Yeremina.
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Michel BEYER
Non-citoyen…être citoyen de nulle part. Est-ce que l’on peut imaginer une telle situation. Je savais que les aborigènes d’Australie connaissaient cela. L’antériorité de leur présence ne leur donnait ou ne leur donne pas le droit d’être australien. Une championne olympique du 400 mètres, australienne parce que “grande sportive” avait dénoncé cette situation le jour ou elle avait gagné la médaille d’or. L’Australie n’est pourtant pas en peine de nous donner des leçons de démocratie.
Avec le conflit ukrainien, la russophobie s’est aggravée dans certains pays, notamment dans les pays baltes, ainsi qu’en Pologne, Finlande, Norvège. Guy Mettan, journaliste et historien suisse, membre du Conseil de Genève, ayant aussi la nationalité russe, parle de l’époque de Charlemagne pour le début de la russophobie. En fait, il situe la naissance du phénomène à l’époque du grand schisme d’Orient entre catholicisme et orthodoxie. L’Ukraine donne une image de cette analyse. L’ouest de l’Ukraine est à majorité uniate, sous l’autorité du pape. L’orthodoxie est pourchassée. Annie Lacroix-Riz explique aussi très bien cela.
Le narratif veut que la Russie ait les yeux sur tous les territoires proches. En fait, c’est elle qui doit subir la visite des grands prédateurs. Il y a eu Napoleon, Hitler. Mais il y a eu aussi Charles x1 de Suède et d’autres. Tous ont vu leur grands projets s’écrouler. La russophobie trouve un terrain propice dans toutes ses régions limitrophes