Histoire et société

Dieu me pardonne c'est son métier

Anatoly Lokot : le monde a changé de manière irrévocable

https://kprf.ru/party-live/regnews/212073.html

Le maire de Novossibirsk, premier secrétaire du Comité régional de Novossibirsk du KPRF, a prononcé un discours lors du 5e plénum du Comité régional sur les tâches de l’organisation du parti pour mettre en œuvre les décisions du dernier plénum du Comité central. Marianne tente de nous faire comprendre ce que ressentent les Russes à l’idée d’avoir laissé détruire l’URSS, cette souffrance de plus en plus présente qu’un certain nombre de communistes de par le monde partagent avec cette chanson que l’on ne peut entendre sans avoir les larmes aux yeux à l’idée de tout ce que nous avons laisse détruire alors que le monde en a si désespérément besoin. Ce que nous dépeint la presse occidentale est une Russie où un autocrate paranoïaque s’est lancé dans une guerre de conquête, mais ce n’est pas du tout la réalité de la majorité du peuple russe. Il a été trahi, on lui a imposé la fin de l’URSS et depuis ceux qu’il avait vaincu durant la seconde guerre mondiale ont repris des forces et tentent d’en finir avec eux. Ceux qui se battent pour défendre leur pays et ce qu’on leur a arraché ce sont les Russes et ils mettent en cause non seulement l’assaut de l’OTAN mais également ceux qui pactisent avec lui dans les capitalistes qui pillent la Russie … Les Ukrainiens sont comme eux des victimes..(note de Danielle Bleitrach, traduction de Marianne Dunlop)

– L’ordre du jour de ce dernier Plénum du Comité Central du KPRF n’est pas un ordre du jour de routine, il revêt une importance considérable. Pour dire cela en clair, il s’agit de la place du parti dans les conditions extrêmement difficiles d’aujourd’hui. Une fracture est en train de se produire – il y a eu de tels tournants dans l’histoire de notre parti. C’était le cas en 1917, lorsque Vladimir Ilitch a préconisé un soulèvement armé immédiat lors d’une réunion à huis clos, et même tous les membres du Comité central ne l’ont pas soutenu. Il y a eu les événements de juillet 1918, lorsque le traité de paix de Brest a été négocié et que le système multipartite de gestion de l’État a été aboli. Il y a eu la transition vers la NEP. C’est à dessein que je me réfère à ces pages d’histoire pour que nous puissions tous ressentir l’importance des décisions qui sont prises.

Nous sommes le seul parti qui est uni sur des bases idéologiques, notre force réside dans notre base idéologique approfondie. Mais soyons francs : lorsque l’opération militaire spéciale a commencé, certains de nos camarades étaient désorientés, tous n’ont pas soutenu immédiatement les décisions qui étaient nécessaires à ce moment-là. Le Plénum avait donc la tâche importante d’affûter les outils politiques pour analyser la situation actuelle afin de doter les communistes de ces vues.

Une chronique de la destruction : de Kravtchouk à Zelensky

Les changements politiques en Ukraine, qui ont amené au pouvoir des groupes nationalistes et fascistes financés par le grand capital – ukrainien et occidental – ont été la suite de la destruction délibérée de l’État soviétique, notre mère patrie – l’URSS. En 1991, la voie a été dégagée pour que les idées et les forces nazies les plus sombres puissent entrer sur la scène politique. Tout a commencé par des idées diffusées par des articles de journaux et des stations de radio locales. Il serait juste, une fois de plus, de rappeler notre histoire récente et de citer un certain nombre de noms qui ont joué un rôle dans la destruction non seulement de l’État, mais de l’amitié séculaire entre nos nations. En Russie, ce fut Eltsine, au Belarus, Chouchkevitch, et en Ukraine, Leonid Kravtchouk.

Kravtchouk ne signifiait pas seulement la destruction de l’URSS, mais aussi la division de l’armée soviétique, la flotte de la mer Noire alors unifiée et un gigantesque arsenal militaire. Ce groupement s’est considérablement renforcé après le retrait de nos troupes d’Europe de l’Est. Maintenant, ces armes nous tirent dessus.

Leonid Koutchma mérite aussi sa place dans la liste. D’un côté, il est le concepteur du systèmes des fusées, il a travaillé à Baïkonour, il a été membre du parti de l’association Yuzhmash, directeur de cette gigantesque entreprise. Lorsqu’il s’est présenté aux premières élections présidentielles, en Russie nous placions tous nos espoirs en lui. Mais je me souviens d’une conversation que j’ai eue avec l’un des communistes ukrainiens les plus expérimentés, Georgi Kruchkov, lorsqu’il s’est rendu en Ukraine sur les instructions de Viktor Egorovich Kuznetsov et a rencontré la direction du parti communiste de l’époque. Il a dit : “Vous vous trompez sur Koutchma, vos espoirs sont faux, c’est un nationaliste, il a pris le chemin de l’intégration européenne”. Cela semblait étrange à l’époque, mais à la fin du second mandat de Koutchma, un livre intitulé L’Ukraine n’est pas la Russie est paru sous sa plume. Il s’agissait de la première tentative, au niveau de l’État, de justifier la séparation de l’Ukraine de la Russie.

Puis Viktor Iouchtchenko est arrivé au pouvoir. C’est à dessein que je ne dis pas “a été élu” ou “a remporté les élections”, car à l’époque, j’étais observateur de la Douma d’État en Ukraine et j’ai vu le début de la révolution orange. Lorsqu’un candidat qui ne satisfaisait pas les États-Unis au second tour a été élu, tout a été fait pour obtenir un “troisième tour”, non prévu dans la constitution du pays. Iouchtchenko, le candidat favori, a été poussé au sommet – un coup d’État inconstitutionnel a commencé. Depuis janvier 2005, l'”ukrainisation”, l’intégration européenne et la réhabilitation de l’UNA-UNSO, ce que nous appelons les “Banderistes de l’ombre”, tiennent le haut du pavé. Depuis le Maidan 2014, il est devenu futile de faire la distinction entre les politiciens ukrainiens – Porochenko et Zelensky se sont avérés être des marionnettes.

Malheureusement, les dirigeants de notre pays ont loupé cet épisode, nous avons manqué de vigilance. Année après année, l’Ukraine s’éloigne de plus en plus de nous. Le Maidan fut la conséquence logique des événements précédents. Les travailleurs ont été plongés dans la pauvreté et le niveau de vie s’est effondré. Même le salaire d’un employé d’état ne suffisait pas à faire vivre une famille de trois personnes pendant un mois. Le parti communiste a été interdit : il a d’abord été évincé, puis ses militants ont été arrêtés, et maintenant il est totalement interdit. Les monuments soviétiques, les monuments à Lénine et aux héros de la Grande Guerre patriotique ont été démolis, et les symboles soviétiques ont été légalement interdits. En Ukraine, un homme portant un drapeau rouge peut être arrêté ou lynché sans procès.

Bien sûr, la Crimée a été sauvée – grâce au référendum. Le Donbass prolétarien s’est obstinément défendu pendant 8 ans, saignant à mort. C’est un symbole de la ténacité du caractère russe. Et en février, la proposition du KPRF, défendue à la Douma d’État depuis 8 ans, de reconnaître la souveraineté des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk, a été adoptée. Notre parti a soutenu l’opération militaire spéciale pour libérer le peuple ukrainien asservi par les forces néo-nazies.

Le monde a changé

Aujourd’hui, à différents niveaux, y compris chez les dirigeants des pays capitalistes, on entend dire que le capitalisme est dans une impasse. Le président de la Fédération de Russie l’a également déclaré dans l’un de ses discours. En effet, le monde a changé, irrévocablement changé. Les représentations, les clichés avec lesquels nous avons vécu toutes ces années, ne sont plus adaptés. L’environnement change rapidement, les événements prennent un nouveau rythme, une nouvelle qualité, un nouveau son. Les États-Unis et l’OTAN ont tenté d’unir la communauté mondiale contre la Russie – des vagues successives de sanctions ont été annoncées. Ils ont obtenu quelques résultats, mais ils ne s’attendaient guère à voir se mobiliser notre société, à ce que des décisions soient prises conduisant à renforcer notre souveraineté, notre système monétaire.

Voyant la façon dont la Russie tenait le choc, 150 pays ont choisi de ne pas appliquer les sanctions, soit 60 % de la population mondiale. Ce n’est pas une coïncidence si le rapport de Guennadi Andreievitch [Ziouganov] note que les processus en cours peuvent être comparés à l’effondrement du système colonial.

Un défi historique nous est lancé : il s’agit de l’existence même de la Russie. C’est une guerre menée sur plusieurs fronts – idéologique, économique. Pour gagner cette guerre, nous avons besoin d’une mobilisation interne. L’ère des réformes libérales, des attitudes libérales, est terminée. Pour vaincre l’ennemi au combat, le soldat russe doit être équipé d’armes modernes, nourri, chaussé et habillé. Cette formule date de la guerre civile, c’est une formule léniniste. Le slogan de nos ancêtres était “Tout pour le front, tout pour la victoire”. Grâce à leur travail héroïque, Novossibirsk porte aujourd’hui, à juste titre, le titre de ville de la Vaillance au travail. Beaucoup de choses sont faites aujourd’hui, mais il reste beaucoup d’insuffisances et beaucoup de choses devront être rattrapées.

Appliquons les décisions du Plénum.

Le Plenum se fixe une tâche : maîtriser les technologies modernes de l’information, promouvoir notre propre agenda. Cette année est le 100e anniversaire de l’URSS, notre pays uni. La popularité des symboles soviétiques, le drapeau rouge, dans les territoires libérés est extrêmement élevée. Le drapeau de la victoire est devenu un symbole de la restauration de notre fraternité – aujourd’hui il est sur les blindages, il est hissé au-dessus des administrations des villes et villages libérés. C’est aussi, si vous voulez, un reproche à ceux qui ont abandonné les symboles soviétiques et leur histoire.

Cette année, nous avons célébré le 100e anniversaire de la Journée des pionniers. Au Palais de la Culture Gorky, nos membres du Komsomol ont ouvert une “capsule temporelle” lors d’un grand rassemblement de militants et ont noué des cravates rouges à 300 nouveaux pionniers. Le texte du message des pionniers du passé est un reproche à tous ceux d’entre nous qui n’ont pas réalisé les espoirs, les aspirations et les projets nourris il y a 50 ans par le merveilleux peuple soviétique (1).

Nous célébrons le jour de la Victoire à Novossibirsk – le défilé salue et rend hommage au monument de Lénine, et il n’est pas fermé, notre tribune est rouge, après le défilé défilent les lourds blindés de l’époque, et après l’étendard de la Victoire, les drapeaux des républiques soviétiques sont portés, le symbole de notre fraternité, de notre amitié – on ne voit ça nulle part ailleurs. Cette année, les gars de notre “Poste #1” au Monument de la Gloire ont fait le déplacement à Brest pour le 22 juin – et je crois qu’ils ne seront jamais infectés par la propagande nazie, les opinions anti-russes, et qu’ils grandiront pour devenir de vrais patriotes de notre pays.

Le parti parle de la consolidation des forces de gauche – dans le pays et à l’étranger. Dans ce contexte, je voudrais mentionner le nom d’Oleg Khorzhan, secrétaire du parti communiste de Transnistrie, qui croupit en prison depuis de nombreuses années. Cet homme a joué un rôle crucial dans l’établissement de liens de jumelage entre Novossibirsk et Tiraspol.

Le district de Belovodsky, dans la république populaire de Lougansk, nous a été assigné pour devenir son parrain. Je pense que l’organisation de notre parti devrait établir une communication avec les communistes de ce district – quel que soit leur nombre. En outre, je propose d’inviter les dirigeants du parti communiste des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk sur le territoire de Novossibirsk.

Aujourd’hui, des opportunités uniques s’ouvrent à nous : lorsque la popularité des idées de gauche, socialistes, augmente, il est très important pour nous que les jeunes perçoivent ces idées. L’histoire soviétique est à l’honneur. Nous avons une grande expérience de la construction de l’État soviétique, du peuple soviétique, l’expérience de Lénine et de Staline. Derrière nous – Batka Kovpak et le secrétaire du comité régional clandestin Fedorov. Nous avons derrière nous Makar Mazai, un sidérurgiste de Mariupol, Alexei Stakhanov, un mineur de Donetsk, Alexander Pokryshkin de Novossibirsk et Ivan Kozhedub, originaire de la région de Tchernigov, les régiments et divisions sibériens, les résistants clandestins de Krasnodon et la Jeune Garde. La vérité est la nôtre et la victoire est à nous !

(1) Les ex-soviétiques partagent un sentiment de honte collective pour ne pas avoir su préserver les conquêtes de l’ère soviétique. Les livres, films, séries télévisées des dernières années soviétiques font l’objet d’un véritable culte, d’autant plus qu’ils laissent entrevoir les fragilités du système et un pressentiment du danger. Le tort était sans doute de mettre l’accent sur un surcroît de ferveur socialiste et communiste, sur les qualités morales, et non sur la lutte des classes au plan national et international, sur une mise à niveau de la théorie.

La chanson Le lointain admirable (du téléfilm L’invitée du futur) en est une bonne illustration. A en croire les commentaires sur Youtube, les Russes ne peuvent s’empêcher de pleurer en l’écoutant, ils demandent pardon à Alice, l’héroïne du film. En voici les paroles, dans une traduction française approximative :

J’entends une voix du lointain admirable, La voix du matin dans la rosée d’argent. Je l’entends et le chemin incroyable Me donne le vertige comme un manège d’enfant Le lointain admirable, Sois pas impitoyable, Sois pas impitoyable, Féroce sois pas. D’une source inépuisable Au lointain admirable, Au lointain admirable J’ai commencé la voie. J’entends une voix du lointain admirable, Où la voix m’appelle, c’est pas un paradis. Elle me pose la question considérable : “Pour demain qu’est-ce que tu as fait aujourd’hui ? ” Le lointain admirable, Sois pas impitoyable, Sois pas impitoyable, Féroce sois pas. D’une source inépuisable Au lointain admirable, Au lointain admirable J’ai commencé la voie. Je promets que je serai bonne et candide, Et je ne quitterai mes amis, je sais. J’entends une voix, la voix sera mon guide Sur la route qui n’est pas encore tracée. Le lointain admirable, Sois pas impitoyable, Sois pas impitoyable, Féroce sois pas. D’une source inépuisable Au lointain admirable, Au lointain admirable J’ai commencé la voie.

La chanson en russe :

Et en français (il existe une version en japonais qui est plus belle) : http://www.youtube.com/watch?v=6zruZmLqAUk

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