Un important débat a lieu dans ce blog et il reflète pour ce que j’en sais bien des interrogations, des prises de conscience dans et hors parti communiste. Il touche à l’essentiel, la conscience de plus en plus aiguë que le capitalisme a fait son temps et que parce qu’il entretient des divisions, des concurrences, des guerres, le capitalisme va a contrario de la nécessaire coopération pour répondre aux défis auquel chaque pays est confronté. La nécessité du socialisme -en tant qu’il est un mode de production capable d’orienter le progrès et non la régression vers ces coopérations collectives- s’impose.
Oui mais voilà il ne faut pas se faire d’illusions, jamais la droite, l’extrême-droite n’ont été aussi fortes, l’abstention massive n’est pas nécessairement le signe d’une exigence de changement profond mais un repli préoccupant.
Comment peut-on aller vers ces coopérations et surmonter la situation actuelle qui est l’affaiblissement des partis et forces organisées qui pourraient œuvrer en vue du socialisme? Comment provoquer l’effort collectif, en vue d’un dépassement de contradictions secondaires mais profondément ancrées dans les mentalités?
Comme le notait Lénine, le compromis bourgeois sera longtemps à l’ordre du jour. “Nous devons comprendre, écrivait Lénine, qu’à défaut d’une base philosophique solide, il n’est point de science ni de matérialisme qui puisse soutenir la lutte contre l’envahissement des idées bourgeoises et une renaissance de la conception bourgeoise du monde” oeuvres, t33, p.207) Ce compromis bourgeois nait non seulement de l’ancien ordre des choses, un cadavre pourrissant dans le nouveau, mais de la difficulté de la lutte, de la crainte d’y perdre plus qu’on n’y gagne et donc de la recherche d’une position de “conciliation” que l’on croit plus aisée à atteindre.
Ce que souligne donc Lénine c’est la nécessité d’une avant-garde mais une avant-garde qui soit toujours plus et mieux dans le concret et le partage des difficultés populaires, qui mesure cet envahissement de la crainte du changement, la comprend et y répond en renforcement pas en stigmatisation, en faux procès.
Parce que dans le même temps, le même Lénine mettait les communistes en garde contre une vision sectaire et l’étroitesse. Je dirais que les deux vont ensemble le sectarisme va avec l’absence de formation, l’isolement et l’affaiblissement. Il insistait sur la nécessité de rassembler dans la construction du socialisme toutes les forces de la vieille société loyales à la construction des soviets pour l’amélioration et la souveraineté du peuple. On ne construira pas le communisme avec les seuls communistes et rien ne sera édifié sans alliance avec les sans parti en priorité dans tous les domaines du travail expliquait-il.
Mais chez Lénine, cette nécessité exige des communistes toujours mieux avertis des buts et capables de promouvoir l’action collective sans sectarisme mais avec lucidité. Il faut expliquait-il démasquer partout systématiquement la “démocratie moderne bourgeoise, surtout celle des Etats-Unis, matrice impérialiste. Toutes sortes de “socialistes“, notait-il , admirent cette “démocratie” et se “prosternent devant elle“, alors qu’en fait, elle “n’est rien d’autre que la liberté de prêcher ce que la bourgeoisie a intérêt à prêcher, c’est-à-dire les idées les plus réactionnaires, la religion, l’obscurantisme, la défense des exploiteurs, etc.” (id.p.206)
En général, montrait-il, l’édification du socialisme a besoin de la paix, pas n’importe quelle paix, celle qui laissera toute latitude à œuvrer au rétablissement économique et aux progrès sociaux. Pas une paix dont l’armement et l’accumulation des facteurs de guerre est le ressort avec de formidables inégalités, toutes les injustices s’accumulant mais une véritable paix qui crée les conditions d’un partage et où chacun a à gagner à la coopération.
Bref, je résumerai ce qui me semble plus que jamais pertinent dans cet exposé léniniste: quand la tempête et les périls menacent, il faut faire tous les efforts du monde pour créer les conditions de l’alliance et pas seulement au sommet entre partis politiques, tous plus ou moins coupés des masses, mais d’abord à partir du monde du travail en travaillant tous ensemble à des solutions concrètes. Le sectarisme, l’étroitesse sont à proscrire et ces défauts accompagnent en général la faiblesse des communistes, faiblesse organisationnelle, faiblesse théorique. Roussel a raison d’insister sur le PCF comme parti de gouvernement mais il faut aller jusqu’au bout de cette vision: parti de gouvernement quand il s’agit de remettre en cause le capitalisme et son autodestruction tout sauf démocratique, il a raison de souligner l’ambition d’une telle participation, il s’agit comme à la libération de reconstruire la France, ses services publics, mais on ne pourra le faire qu’en mettant au pas ceux qui ne cessent de la détruire. Pas seulement les “évadés fiscaux”, mais bien la financiarisation, la destruction des capacités productives du pays. Ce qui est déjà avancée vers le socialisme et qui ne saurait se contenter de mesures ponctuelles alors que l’énorme ponction du capital financier s’amplifie.
Ce refus du politicien et de ses jeux de notables, Roussel a raison de l’affirmer mais il faut qu’il en tire les conséquences “pour bien gérer l’économie, gouverner l’Etat et faire du commerce, utiliser le capital privé tout en l’évinçant de la direction politique, ce qui est construire le socialisme, il faut choisir et répartir judicieusement les cadres. La clé de la situation disait Lénine est dans les hommes, dans le choix des cadres, dans la vérification de l’exécution. Il faudra voir le rôle du parti et pas seulement celui de ses élus dans une assemblée nationale devenue une véritable pétaudière avec le partage des influences et des petits avantages, mais bien dans cette capacité à fournir des cadres issus en particulier des couches prolétariennes. Des cadres, disons-le ayant une conception de classe sans laquelle la souveraineté est un vain mot.
Donc le congrès, sa préparation, est fondamental pas seulement pour le parti mais pour sortir la France de cette impuissance, cette aliénation, ce grotesque d’une élite hors sol capricieuse et destructrice.
En fait l’expérience qui a été faite au sein du PCF, comme dans celui des divers “mouvements”, c’est la carence dans ce domaine des cadres. Il va y avoir un congrès du PCF, un certain nombre d’entre nous ont été systématiquement écartés et beaucoup de militants découvrent l’état réel du parti. Ce n’est pas pire que dans d’autres partis, mais aucun ne se donne le but d’un parti communiste et n’a besoin de l’intervention consciente de ses militants comme tous ceux qui désirent loyalement œuvrer à l’amélioration de la vie collective. J’ai eu les échos de ce qui se passait dans certaines sections, la direction actuelle de ces sections, fédérations, acquises aux anciens dirigeants ne réunit plus personne et pratique l’inertie, face à cela un certain nombre de camarades ont repris les listings des adhérents y compris ceux qui ne viennent plus, ont pris leur distances et vont les contacter. Il y a un héritage à transmettre et il est important, les jeunes en feront ce que leur action exigera, action de communistes. “Il ne s’agit pas seulement de comprendre le monde mais de le transformer” et c’est à eux de faire et à nous de transmettre.
Roussel dit que le parti communiste est un parti de gouvernement, une force de proposition. Oui mais il faut d’abord reconstruire ce parti par rapport à la rupture qui existe aujourd’hui et qui montre l’épuisement de la “démocratie” bourgeoise, la nécessité de faire autrement pour créer les conditions collectives de toutes les coopérations.
On ne rétablira une situation qui s’est dégradée depuis trente au moins en quelques semaines mais sans prétendre la reproduire à l’identique, on peut déjà mesurer le bougé et il existe, les insuffisances également. Il y a quelques constantes que j’ai brièvement notées qui doivent servir de point d’appui à un renouveau non seulement du PCF mais de la vie démocratique de notre pays, celle qui favorise l’intervention populaire.
Danielle Bleitrach
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C. L.
C’est le renouveau du socialisme qu’il faut envisager, au moins autant que celui de la démocratie. Dans celle-ci, en tant que régime réel, c’est-à-dire la démocratie bourgeoise, il n’y a pas eu de rupture, et elle est toujours en vigueur. Avec des fortunes diverses mais elle affronte la crise du capitalisme sans qu’on puisse augurer de son écroulement prochain.
En revanche dans le socialisme il y a eu rupture, marqué par la chute des régimes hérités de la révolution bolchevique de 1917. Cela invite pour le moins à réinterroger les concepts fondamentaux du marxisme-léninisme, à en débattre. Ce débat intéresse le plus grand nombre de gens possible, sur la base de la liberté d’opinion. Y a-t-il des raisons de l’autoriser aux uns et l’interdire aux autres ? Non, il n’y en a pas et ce blog devrait donner l’exemple. La démocratie bourgeoise, pour revenir à elle, accepte le principe du débat et encadre ses modalités. Malgré tous ses défauts, elle a au moins ce mérite. Tirons-en le meilleur à tout prendre, plutôt que de l’agonir à l’envi.
Le socialisme ne consiste pas à « utiliser le capital privé tout en l’évinçant de la direction politique ». Il consiste à le faire disparaitre dans toutes les secteurs et branches de l’économie, y compris l’agriculture. Et il consiste aussi, par voie de conséquence, à établir le régime qui construira la société où ce but sera atteint, sous l’autorité du parti communiste.
Que le mot ’socialisme’ désigne aussi la ligne social-démocrate entraîne une ambiguïté sémantique qui a pu abuser des responsables communistes et par attraction les entraîner à des positions étrangères au marxisme-léninisme. C’est là transposer cette ambigüité de la sémantique à la politique. A l’exemple de certains politiciens machiavéliens, on pourra trouver subtile et profitable cette transposition. Moi non.
Xuan
Tous les régimes hérités de la révolution bolchévique de 1917 ne sont pas tombés. Nous avons déjà parlé ici des pays socialistes nés dans des pays pauvres non encore industrialisés, où la restauration du capitalisme n’a pas eu lieu.
En Chine un incident s’est produit en 1989, une manifestation de masse multiforme, et qui aurait pu aboutir à la première révolution de couleur, parce que les leaders qui en ont pris la direction voulaient le libéralisme. Il y a eu environ 200 morts, dont des policiers brûlés vifs, non pas place Tien An Men mais dans les faubourgs en fait.
Le résultat est que, contrairement à ce qui s’est produit la même année en URSS, la Chine est restée socialiste et a maintenu la dictature du prolétariat.
Faut-il autoriser la liberté d’opinion aux uns et l’interdire aux autres ?
Au sein du peuple les contradictions devraient se résoudre par la discussion puisqu’il n’y a pas d’intérêts fondamentalement conflictuels.
Lorsque le socialisme sera instauré dans notre pays, le peuple laissera-t-il s’exprimer librement des gens comme Macron, Hollande, Sarkozy, ceux qui se sont opposés des années durant aux intérêts du plus grand nombre ? Je ne crois pas.
Mais d’abord faut-il cerner ce qu’on entend par « liberté d’opinion », par « les uns » et par « les autres ».
Par exemple le racisme et l’antisémitisme ne sont pas considérés comme des opinions, parce qu’ils ont entraîné des génocides et des massacres d’innocents.
Le fascisme et l’impérialisme ont aussi entraîné des génocides et des massacres d’innocents, du reste ils se sont souvent combinés avec le racisme et l’antisémitisme, ou bien avec le terrorisme ou encore les néo nazis comme en Ukraine.
Il ne s’agit pas d’opinons anodines et sans conséquences. Il s’agit d’idéologies qui ont sciemment massacré.
Lorsque le socialisme sera instauré dans notre pays, je ne crois pas que la classe au pouvoir l’aura laissé s’installer paisiblement, mais elle s’y sera opposée de toutes ses forces, et par la violence armée autant que possible.
Par conséquent il y a fort à parier que le peuple ne voudra plus entendre ces gens-là. Déjà maintenant il n’aime pas les entendre.
D’ailleurs il n’avait pas donné la parole aux royalistes, lorsque la révolution bourgeoise les a chassés.
La bourgeoisie accepte le principe du débat et encadre ses modalités dans les limites de la république bourgeoise, au-delà desquelles elle définit le « totalitarisme».
Et la dictature du prolétariat elle aussi accepte le principe du débat et encadre ses modalités, dans les limites de la république socialiste.
Rouge Trégor
Entièrement d’accord. Comme disait St Just (avec justesse) “Pas de liberté pour les ennemis de la liberté”. Dans une république socialiste, il devra en être de même.
marsal
La question du mot “socialisme” est moins celle d’une ambigutïté sémantique que celle d’un manque collectif d’éducation politique. Lorsque l’éducation politique est faite, l’ambiguité disparaît. Nous avons en effet déjà discuté, mais il faut prolonger cette discussion. Aujourd’hui, le capitalisme entre dans une crise existentielle qui dépasse en étendue et en profondeur celle qu’avait ouverte la guerre impérialiste de 14-18.
Grâce aux révolutions socialistes du 20ème siècle, nous allons pouvoir aborder cette période dans une situation beaucoup plus favorable qu’il y a un siècle :
1) nous avons l’expérience de plusieurs révolutions socialistes, dans des pays certes isolés mais situés sur plusieurs coninents et qui sont autant de ferments qui aujourd’hui accélèrent les prises de consciences et les évolutions politiques dans leur environnement proche : En Amérique latine, par exemple, le prestige et les acquis de de la révolution cubaine jouent un rôle essentiel et c’est ce qui fait à mon avis que le mouvement soclaliste avance sur l’ensemble du sous-continent, alors qu’il piétine et même régresse en Europe
2) Grâce à ces révolutions, qui ont été confrontées à un grand nombre de situations concrètes différentes, nous avons tout un panel d’expériences politiques, sur des problématiques concrètes, qui nous aident à avancer. Il ne s’agit pas de réécrire le marxisme léninisme mais de le compléter, sur la base de la méthode du matérialiste historique (brillamment confirmée par l’expérience) pour y intégrer toutes les leçons du 20ème siècle. Il faut en revanche corriger les interprétations erronnées, comme l’idée que, à partir de la révolution bolchévique, une victoire révolutionnaire mondiale ou même européenne rapide était la solution. L’histoire a avancé de manière dialectique et plusieurs étapes historiques étaient nécessaires.
3), Un de ces pays, la Chine a réussi à briser le carcans imposé par les pays dominant pour bloquer le développement des pays dominés. Grâce à ce pays, d’une part, les pays qui avancent sur la route du socialisme (ou même simplement qui refusent les diktats impérialistes) ne peuvent plus être totalement isolés et soumis, d’autre part, les pays dominés, même capitalistes, peuvent à nouveau avancer, construire les infrastructures essentielles et affermir leur souveraineté.
Nous allons désormais pouvoir franchir une nouvelle étape dans l’édification de structures socialistes et c’est la seule issue à la crise qui se développe.
Daniel Arias
Sans PCF nous avons Ruffin.
Si vous avez comme moi quelques minutes de lecture à perdre son analyse sur le mariage RN LREM.
https://francoisruffin.fr/rn-flirt-lrem/
Un très long texte, quelques choses justes, une longue attente et pshiiiiiiittt, aucune proposition.
À lire en comparant avec les textes produits par les représentants du KRPF.
Textes soignés, argumentés où les démonstrations scientifiques appuient des propositions concrètes applicables de suite.
pedrito
“Ce n’est pas pire qu’un autre parti”, écrit Danielle. Bien sûr! Mais cela ne peut pas ni me ni nous consoler, parce que nous avons appris que depuis toujours le Parti Communiste, ni même un autre PC quelconque, mais surtout le nôtre, n’était et ne pouvait être un parti comme un autre. Nous étions uniques, parce que le PC était unique, Être communiste, c’était lutter avec abnégation pour créer une société socialiste, pas pour conserver un strapontin d’élu rémunéré.
Aujourd’hui, tout parait à reconstruire
TOUT!!!!!